Dans le contexte de renforcement de la coopération franco-japonaise pour la transition énergétique et en lien avec une mission de découverte du marché japonais organisé pour des entreprises françaises du secteur de la mobilité, l'Ambassade de France au Japon a organisé un séminaire franco-japonais consacré à l'hydrogène. Cet évènement a permis d'échanger sur les politiques nationales des deux pays, sur le développement industriel, et sur les travaux de recherche en cours au Japon.

L'hydrogène pour l'indépendance énergétique au Japon, pour la décarbonation en France

En ouverture du séminaire qui a rassemblé une centaine de participants, le ministère japonais de l'économie, du commerce et de l'industrie (METI) et le ministère français de la transition écologique et solidaire (MTES), tous deux en charge des politiques énergétiques nationales, ont présenté leurs feuilles de route respectives pour l'hydrogène-énergie.

Séminaire hydrogène à l'Ambassade de France à TokyoCôté japonais, le METI a rappelé le fort engagement du Japon pour établir à terme une "société basée sur l'hydrogène", afin notamment de réduire la dépendance du pays aux énergies fossiles importées. A cette fin, le gouvernement a fixé des cibles quantitatives (véhicules, stations, logements équipés) mais aussi tarifaires, avec l'objectif que l'hydrogène devienne moins cher que le gaz naturel (en incluant les bénéfices environnementaux). Côté français, le MTES a exposé la récente feuille de route hydrogène nationale, adoptée à l'été 2018. Elle établit un lien fort entre hydrogène et énergies renouvelables, et fixe trois grandes orientations : décarbonation de l'hydrogène dans l'industrie, utilisation de l'hydrogène pour développer la mobilité propre, utilisation de l'hydrogène pour décarboner la production d'électricité et de gaz. Le MTES a également rappelé la solidité du tissu industriel français pour l'hydrogène, avec une dizaine d'entreprises membres du Conseil de l'Hydrogène créé en 2017, et des réalisations concrètes comme le train à hydrogène d'Alstom ou encore la flotte de taxis hydrogène qui sera mise en service à Paris d'ici 2020 par Air Liquide, Idex et Toyota.

Echanges entre grands groupes industriels japonais et pôles de compétitivité français

Suite à ces présentations institutionnelles, plusieurs représentants de l'industrie ont présenté leurs développements en matière d'hydrogène.

Le pôle de compétitivité français Véhicule du Futur a ainsi mis en avant les 87 entreprises et laboratoires qui, parmi ses membres, portent ensemble déjà 76 projets technologiques pour l'hydrogène, un nombre en croissance rapide. Ces projets, localisés dans l'est de la France, portent aussi bien sur les véhicules (voitures, trains, deux roues...) et les stations que sur la production d'hydrogène à partir d'énergies renouvelables (vent, biogaz, énergie fatale de l'industrie...). L'Agence de développement de la région Bourgogne-Franche-Comté a mis en avant sa vision de l'hydrogène - nécessairement produit à partir de sources renouvelables. Elle a souligné son expérience de plus de 20 ans sur cette technologie avec un solide tissu de PME, startups et universités couvrant l'ensemble de la chaîne de valeur. Elle a également invité les entreprises japonaises à investir dans l'hydrogène en Bourgogne-Franche-Comté. Le pôle de compétivité européen CARA, fort de ses 200 membres, a exposé les défis environnementaux, économiques et sociaux que pose la mobilité aujourd'hui, et son espoir que l'hydrogène contribue à y répondre. Il a présenté le projet Zero Emission Valley, soutenu par l'Union Européenne, qui vise à installer 20 stations, 15 électrolyseurs et 1000 véhicules en région Rhône-Alpes-Auvergne. Le pôle CARA travaille aussi sur des projets de camions à hydrogène (avec Renault Trucks notamment) et de train à hydrogène.

Zero Emission Valley

L'industrie japonaise était quant à elle représentée par Fujitsu Advanced Technologies et Toshiba. Fujitsu, géant de l'électronique et des équipements TIC, a présenté son projet "Solar to H2" consistant à optimiser la production d'hydrogène à partir de panneaux solaires, grâce à un système intelligent qui s'adapte automatiquement au niveau d'ensoleillement. Fujitsu cherche ainsi à atteindre le plus haut rendement au monde de production hydrogène à partir d'énergie solaire. Toshiba a présenté ses solutions H2One et H2Rex. H2One est un système tout en un qui rassemble, dans une installation de la taille d'un container de transport, un système de production solaire, un stockage d'hydrogène, et un système de conversion hydrogène/électricité. H2One permet ainsi d'apporter de l'énergie à des bâtiments non reliés au réseau électrique. Les unités H2One peuvent également être déployées sur des sites touchés par des catastrophes naturelles. H2Rex est un système de pile à combustibles utilisant l'hydrogène pur pour fournir de l'électricité à haut rendement. Toshiba a également présenté le centre de recherche pour l'hydrogène créé à Fukushima et financé par l'agence nationale NEDO.

Fukushima Hydrogen Energy Research Field

Le point sur la recherche pour l'hydrogène au Japon

La seconde partie du séminaire était dédiée aux projets japonais de R&D et d’innovation dans le domaine de l’hydrogène, qui suivent la feuille de route du METI présentée en première partie. Les divers projets et acteurs sont d’ailleurs coordonnés par la NEDO (New Energy and Industrial Technology Development Organization), l’agence de financement du METI, qui dédie à l’hydrogène et aux piles à combustibles un budget de 220 M$. A l’interface entre la R&D et le contexte économique, entre les acteurs industriels et académiques, la NEDO finance une multitude des projets couvrant toute la chaîne de valeur de l’hydrogène : la production, le transport, le stockage, l’utilisation mais aussi la sécurité et la réglementation.

Présentation par l'Université de KyushuLe gouvernement japonais veut construire une société hydrogène et prévoit donc de nombreuses utilisations, qu’elles soient stationnaires (lancement de la pile à combustible résidentielle Ene-farm en 2009) ou de mobilité (lancement du véhicule à Pile à Combustible en 2014). L’importance de l’origine de l’hydrogène (marron, bleu ou vert) a été soulignée et des projets associant les technologies de l’hydrogène avec celles des énergies renouvelables, notamment les cellules photovoltaïques, sont en cours de développement.

Une partie importante de la recherche se concentre aussi sur l’étude des matériaux, que ce soit pour les catalyseurs des piles à combustibles ou les alliages métalliques permettant le stockage solide de l’hydrogène. Autre option de stockage, la recherche sur l’ammoniac comme vecteur d’énergie a fait l’objet d’un programme interministériel d’innovation (SIP) bénéficiant d’un financement de 30M$ par an pendant 5 ans.

Un centre dédié à l’hydrogène se situe à Fukuoka et rassemble des démonstrateurs (150 unités de piles à combustibles), des laboratoires de recherche et des entreprises sur le campus Ito de l’Université de Kyushu. Ce centre met aussi en avant le rôle crucial de la formation des futures générations aux technologies de l’hydrogène et de la communication vers le public.

Evènement co-organisé par le service économique régional, le service pour la science et la technologie et le bureau Business France de l'Ambassade de France à Tokyo, avec l'appui du MTES et du METI.

Intervenants et diaporamas :

I) Politiques nationales pour l'hydrogène et le développement industriel

II) Aperçu des projets universitaires et de R&D japonais sur l'hydrogène

  • Eiji Ohira, Director General, Fuel Cell and Hydrogen Group, Advanced Battery and Hydrogen Technology Department, NEDO
  • CO2 Free Ammonia as CO2 Free Fuel and Hydrogen Carrier - Bunro Shiozawa, former Deputy Program Director of SIP “Energy Carriers” and Innovation Strategy Coordinator of SIP "Energy systems toward a decarbonized society” of the Cabinet Office / Senior Associate, Sumitomo Chemical Co., Ltd.
  • Dr. Kazunari Sasaki, Senior Vice President, Kyushu University
  • Hydrogen from regional energy management to global network of renewable production - Dr. Tatsuoki Kono, Professor, Institute for Material Research, Tohoku University / Project Professor, Research Center for Advanced Science and Technology, University of Tokyo