La Semaine européenne de l’énergie durable (EUSEW) se tient du 22 au 26 Juin 2020, sur le thème de la construction d’un futur énergétique propre contribuant à la relance et à la croissance vertes post COVID-19. À cette occasion, revenons sur les derniers efforts et contributions des acteurs publics et privés français pour la transition énergétique au Japon, avec un focus sur les startups et PME innovantes.

L'innovation, au coeur de la relation économique franco-japonaise

L'innovation est un thème central de la relation franco-japonaise. 2016, déclarée année de l’innovation France-Japon, avait vu se succéder de nombreux évènements, dont le lancement de la French Tech Tokyo, ainsi qu'un grand forum organisé à Osaka et mettant en avant de nombreux thèmes, dont ceux de la transition écologique - hydrogène, construction bois, coopération entre les agences nationales ADEME et NEDO... La French Tech a inspiré l'initiative J-Startup du gouvernement japonais, visant à soutenir le développement de startups japonaises autour du concept de Société 5.0. Ces relations soutenues autour de l'innovation trouvent des applications de plus en plus nombreuses dans le domaine de la transition bas-carbone, et notamment dans l'énergie : énergies renouvelables, réseaux intelligents, hydrogène, efficacité énergétique... 

Qu'est ce que la French Tech ?

Logo French Tech

La French Tech est une initiative publique au service de l'écosystème d'innovation français, portée par le Ministère de l'Economie. Originellement label officiel lancé en novembre 2014 et attribué par les autorités françaises à des pôles métropolitains reconnus pour leur écosystème de startups, la French Tech se dote dans les années qui suivent de plus grands moyens avec la création de la mission French Tech au sein de l'incubateur Station F à Paris, du nouvel indice Next40 listant les 40 startups françaises les plus prometteuses, ou encore de la labellisation d'entreprises françaises à l'étranger. 

La French Tech Tokyo fait ainsi partie des hubs French Tech internationaux officiellement labellisés, aux côtés de Londres, Hong Kong, Kuala Lumpur ou encore New York. Chaque hub met son réseau à disposition et soutient les startups et PME françaises dans leur implantation à l'étranger en facilitant les mises en contact et l'organisation de rencontres entre membres. A ce jour, environ 50 startups, dans les jeux vidéos, l'e-commerce, les nouvelles mobilités ou encore les énergies renouvelables ont intégré la French Tech Tokyo. 

Des échanges institutionnels en appui des coopérations entre entreprises

Les gouvernements français et japonais échangent depuis longtemps sur les politiques publiques de ville durable, de mobilité, d'environnement et d'énergie. En 2019, ces échanges ont été encore renforcés à travers la signature de la feuille de route 2019-2023 du partenariat d’exception franco-japonais, accompagnée d'un nouveau mémorandum de coopération dans le domaine de l’innovation pour la transition énergétique entre les ministère français et japonais en charge de l'énergie.

Cette dynamique de coopération se matérialise aussi par les accords entre entreprises françaises et japonaises pour la transition énergétique ; en 2019 toujours, une dizaine de partenariats économiques et industriels dans ce secteur, notamment dans l'éolien et le solaire, furent valorisés lors de la visite à Tokyo du Président de la République, mobilisant tant des grands groupes français (ENGIE, Total, Bouygues, Naval Energies, CEA...) que des PME (Ciel&Terre, Ideol).

Valorisation des accords entre entreprises françaises et japonaises, notamment dans l'innovation et la transition énergétique - Tokyo, juin 2019

Cette coopération riche entre entreprises prend également forme en dehors du Japon et de la France, avec de nombreuses réalisations dans les énergies renouvelables (géothermie, solaire, éolien...), partout dans le monde, impliquant là encore de grandes entreprises françaises du secteur de l'énergie, et des partenaires japonais tels que les grands énergéticiens ou les maisons de commerce.

Tendance de plus en plus marquée de ces échanges : l'attrait des grandes entreprises japonaises pour la capacité d'innovation des PME et startups françaises au bénéfice de la transition vers des systèmes énergétiques plus propres et plus sobres, comme illustré lors de la dernière réunion de coopération industrielle des nouveaux systèmes énergétiques à Grenoble en février 2020 : face à une délégation japonaise dominée par les grands groupes, la présence remarquée de nombreuses startups françaises avait fait apparaître les différences de culture entre nos deux pays quant à l'innovation par les entreprises (innovation ouverte vs. innovation fermée) notamment dans ce secteur stratégique de l'énergie, longtemps dominé par un petit nombre d'acteurs proches des pouvoirs publics.

L'innovation française pour la transition énergétique au Japon : quelques exemples

Revenons sur quelques exemples de success stories illustrant ce phénomène, avec des startups et PME françaises qui depuis quelques années se positionnent sur le marché japonais, contribuant à la transition de l'archipel vers un modèle énergétique plus durable.

  • energy poolSur la gestion intelligente de l’énergie, Energy Pool, leader mondial de gestion des capacités des réseaux électriques et de gaz, a développé depuis 2016 des liens étroits avec Tokyo Electric Power Company (TEPCO), premier opérateur électrique nippon couvrant notamment l’ensemble de la zone métropolitaine de Tokyo. En décembre 2019, une cérémonie en l’honneur de la prise de participation de TEPCO, ouvrant de nouvelles perspectives au Japon et en Asie, avait eu lieu à l'Ambassade de France à Tokyo. Energy Pool développe également des projets avec de nombreux autres opérateurs électriques régionaux.

  • SelectraSelectra, entreprise déjà implantée dans une dizaine de pays, permet la comparaison des offres et services de fournisseurs d’énergie (gaz, électricité) et de télécommunications (internet). Au Japon, le bureau de Tokyo ouvert en octobre 2019 a établi des liens avec les détaillants d’électricité Looop Denki, Remix Denki, concurrents des fournisseurs énergétiques historiques, ainsi qu’Enepi, fournisseur de gaz. Désireux de faciliter l'accès à une énergie plus verte, des réflexions sont en cours pour proposer des achats groupés d’énergie renouvelable et une offre de compensation carbone aux particuliers.

  • METRONDans l’efficacité énergétique, METRON, startup offrant une solution d’optimisation énergétique par intelligence artificielle pour les immeubles de bureaux, usines et autres complexes industriels (METRON-EVA Factory) vient récemment de signer un partenariat stratégique avec NTT Facilities, filiale du groupe japonais NTT, leader des télécommunications. Dans l’optique d’un déploiement commercial, l’entreprise a ouvert en mars 2020 sa filiale au Japon.          

Les énergies renouvelables ne sont pas en reste avec des entreprises françaises se démarquant par des technologies innovantes, notamment pour les installations solaires ou éoliennes flottantes, mais également dans les bioénergies, filière moins visible mais tout aussi stratégique pour le Japon.

 

  • Ideol, un leader mondial de l’éolien flottant, dont la solution est la seule technologie étrangère employée surIdeol les démonstrateurs d'éolien flottant au Japon, a renforcé en 2019 ses liens avec le Japon, avec des partenariats avec l'opérateur électrique alternatif Shizen Energy ou encore avec le géant du BTP Taisei, en vue d’un déploiement commercial. En juin 2020,  Ideol, ADEME Investissement et JERA, le plus grand fournisseur d’électricité au Japon, annoncent un accord pour investir conjointement dans le développement de fermes éoliennes flottantes à travers le monde, dont l’Asie

 

 

  • Ciel&TerreCiel&Terre, spécialiste du solaire flottant, a équipé depuis 2013 plus d'une centaine de fermes solaires flottantes partout dans l'archipel (70% du marché japonais des systèmes solaires flottants), dont la plus grande du pays à Yamakura-Dam, inaugurée en 2018. En 2019, la maison de commerce Itochu a pris des parts dans Ciel&Terre, afin notamment d'explorer d'autres marchés en Asie.

 

 

  • Naskeo, spécialisée dans la conception et la construction d'unités de biométhanisation, travaille sur plusieursNaskeo projets. Sa première unité au Japon, dans la région de Hokkaido, a été réalisée en partenariat avec des agriculteurs locaux, contribuant à la fois à la transition énergétique et à la revitalisation économique locale en région rurale.

 

Plusieurs autres startups et PME françaises s'intéressent de près au marché japonais de la transition énergétique : avec un mix énergétique encore très majoritairement dominé par les énergies fossiles, et des gisements d'efficacité énergétique encore peu exploités dans certains secteurs, beaucoup reste à faire pour doter le Japon d'un système énergétique durable, résilient, compatible avec l'urgence climatique.

Au delà des petites entreprises, les énergéticiens et grands groupes français comme ENGIE, Bouygues, EDF, Total, Veolia, Naval Group et Air Liquide continuent également d’alimenter des accords et partenariats déjà riches des expériences passés. Ainsi, en 2019, Air Liquide a inauguré son nouveau Campus Innovation Tokyo qui vise à réunir 200 collaborateurs travaillant sur le développement de matériaux avancés, des solutions d’efficacité énergétique, de réduction de l’empreinte carbone ainsi que l’hydrogène et le biométhane. ENGIE, à travers sa filiale ENGIE New Ventures destinée aux investissements dans des startups œuvrant pour la transition énergétique, a soutenu le succès de deux startups sur le sol japonais, KiWi Power ayant remporté le Japan Energy Challenge 2019 et UnaBiz qui a remporté un contrat de réseau de gaz avec Nippon Gas et SORACOM. Naval Energies, spécialiste des énergies marines renouvelables, poursuit sa lancée dans l’éolien flottant avec un mémorandum d'entente signé avec Hitachi Zosen en juin 2020.