« TRIPS ADVISOR »

Du G20 à l’OMC la lutte contre la COVID-19 est érigée en priorité : les règles du commerce peuvent-elles aider à résoudre la crise sanitaire ? Toutes choses égales par ailleurs, on assiste à un étrange « revival » des discussions des années 1990, dominées par la pandémie du SIDA.

D’un côté, des propositions libérales réactivent les précédents des accords plurilatéraux sur les produits pharmaceutiques et les technologies de l’information, issus de la fin de l’Uruguay Round : pour réduire le coût des biens sanitaires (tarifs, facilitation réglementaire), encadrer les restrictions aux exportations, échanger les bonnes pratiques. Cette voie est prônée par l’UE et ses affinitaires du « groupe d’Ottawa ».  De l’autre, une exigence de suspension temporaire des droits de propriété intellectuelle (accord ADPIC ou « TRIPS » en anglais), pour autoriser l’accès, la copie et la manufacture en masse des potentiels vaccins et traitements pouvant juguler la pandémie. C’est la proposition promue par l’Inde, l’Afrique du Sud et de nombreux PED. Cette demande est rejetée par les pays industrialisés et de grands émergents (comme le Brésil), pour qui la propriété intellectuelle demeure la condition sine qua non des investissements de recherche pharmaceutique.

On pensait pourtant ce problème résolu depuis la conférence ministérielle de Doha en 2001 ! Sa décision avait débouché sur le seul amendement d’un accord de l’OMC depuis le cycle d’Uruguay : il permet aux PMA et aux pays ayant des capacités de production insuffisantes de recourir aux « licences obligatoires spéciales » pour importer des copies génériques de tout médicament. Le contexte d’aujourd’hui semble aussi plus favorable. Les multinationales pharmaceutiques s’affirment plus conscientes qu’il y a vingt ans de leur responsabilité à favoriser l’accès du plus grand nombre aux médicaments qu’elles développent. L’initiative de l’« accélérateur d’accès aux outils de lutte contre la COVID-19 » (ACT-A) et sa facilité d’achat de vaccins (COVAX) offrent des réponses concrètes (plateforme d’échanges de bonne pratiques et données de recherche, financements) qui n’existaient pas en 2001, époque à laquelle furent aussi lancés le « Fonds mondial » de lutte contre les grandes pandémies (SIDA, tuberculose, paludisme) et l’alliance pour les vaccins (GAVI)...