Actionnariat commun et concurrence
La détention, par un même investisseur, de participations minoritaires au capital social de plusieurs entreprises actives, et pouvant être concurrentes, sur un même marché s'est fortement développée ces dernières années. Ce phénomène, appelé actionnariat commun, est lié au développement de l’actionnariat institutionnel qui permet de réduire les coûts de financement des entreprises, mais pourrait également, en particulier sur des marchés concentrés, générer des effets anticoncurrentiels.
L'actionnariat commun (« common ownership ») s'est rapidement développé ces dernières années. Il se définit par la détention, par un même investisseur, de participations minoritaires au capital social de plusieurs entreprises actives, et pouvant être concurrentes, sur un marché.
L'actionnariat commun est principalement le fait d'investisseurs institutionnels (banques, compagnies d'assurance, mais également les organismes de placement collectifs comme les fonds d'investissement et fonds de pension), qui détiennent des actifs pour le compte de leurs clients et collectent leurs droits de vote.
Ces deux dernières décennies, l'actionnariat institutionnel s'est renforcé à l'échelle internationale, permettant de réduire les coûts de collecte et d'analyse des informations pour les investisseurs et in fine les coûts de financement pour les entreprises.
Le développement de l'actionnariat institutionnel a entraîné une hausse du degré d'actionnariat commun dans les entreprises cotées. Aux États-Unis, la part des trois plus gros investisseurs institutionnels dans les entreprises du S&P 500, est passée de 5 % en 1998 à environ 20 % en 2017 (cf. Graphique ci-dessous). Le développement des fonds indiciels a fait passer la part des entreprises américaines cotées détenues par des investisseurs institutionnels possédant au moins 5 % du capital d'autres entreprises du même secteur de moins de 10 % en 1980 à environ 60 % en 2014. Au niveau européen, en 2016, l'actionnariat commun avec une participation d'au moins 5 % concernait 67 % des entreprises cotées.
L'actionnariat commun pourrait réduire la concurrence dans certains secteurs concentrés (e.g. secteur du transport aérien, secteur pharmaceutique). Cependant, aucun consensus ne se dégage sur l'effet global de l'actionnariat commun sur l'économie.
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+ Autres publications à consulter sur le sujet :
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Rosati, N., Bomprezzi, P., Ferraresi, M., Frigo, A. and Nardo, M., Common Shareholding in Europe, EUR 30312 EN, Publications Office of the European Union, Luxembourg, 2020, ISBN 978-92-76-20876-1.
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Frazzani S., Noti K., Schinkel M. P., Seldeslachts J., Banal Estañol A., Boot N. et C. Angelici (2020), “Barriers to Competition through Common Ownership by Institutional Investors”, Study for the Committee on Economic and Monetary Affairs, Policy Department for Economic, Scientific and Quality of Life Policies, European Parliament, Luxembourg.
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Azar J., Schmalz M. C. et I. Tecu (2018), "Anticompetitive effects of common ownership", Journal of Finance, vol. 73, issue 4, 1513-1565.
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Bebchuk L. A. et S. Hirst (2019), "The specter of the giant three", NBER Working Paper No. w25914, National Bureau of Economic Research