Comme les nuages dans le ciel genevois, les hypothèses les plus sombres d’aggravation des tensions commerciales internationales se sont accumulées au mois de mai.

Extrait de l'Editorial :

Entre Chine et Etats-Unis : complication des négociations bilatérales suivie d’une décision américaine de porter les droits de douanes de 10 à 25% sur la première tranche d’exportations chinoises (décidée en 2018 à hauteur de 200 Mds USD) et lancement de la procédure pour en frapper 300 Mds USD supplémentaires, soit la quasi-totalité du flux. Entre Etats-Unis et Union Européenne : la menace de rétorsions douanières croisées au titre du contentieux Airbus-Boeing vient d’augmenter fortement suite aux condamnations miroirs prononcées par l’organe d’appel de l’OMC ; les Etats-Unis se donnent par ailleurs six mois pour obtenir de l’UE une limitation de ses exportations automobiles, sous menace de sanctions unilatérales au titre de la sécurité nationale. Au Royaume-Uni, l’échec des négociations entre partis conservateur et travailliste et la démission annoncée de la Première Ministre, Mme May, font progresser l’hypothèse d’un Brexit sans accord. Ces tensions sont identifiées comme le premier risque pour la croissance mondiale en 2019.

Elles représentent aussi une menace considérable pour l’OMC, que l’unilatéralisme américain, la perspective de paralysie de son organe d’appel, les pratiques distortives de la Chine, l’anachronisme du statut des pays en développement, l’enkystement des négociations multilatérales, pourraient potentiellement vider de tout rôle dans la régulation des échanges mondiaux. Plus que jamais la réforme de l’organisation s’impose, comme urgence face aux tensions économique et seule perspective pour son salut existentiel. Pour l’Union Européenne, on en connait les directions principales. Avant tout, une mise à jour des disciplines encadrant la concurrence entre modèles économiques différents : sur les subventions industrielles, les transferts forcés de technologie. Une refondation de la légitimité du mécanisme de règlement des différends, visant à surmonter le blocage de son organe d’appel par les Etats-Unis. Une restauration de l’efficacité des procédures ordinaires de traitement amiable des obstacles commerciaux: transparence des interventions publiques (notifications de subventions et de normes réglementaires), recherche de solutions négociées. Enfin, une prise de responsabilité des pays en développement qui soit désormais commensurable à leurs capacités économiques : la négociation pour réformer les subventions contribuant à la surpêche en représentera à court-terme le premier test...