Vue satellite de la ville de Toyama - Source Geoportail IGN

L’aménagement du territoire japonais est à la croisée de plusieurs défis : maintien d’une vitalité et d’une attractivité économique ; adaptation à une population vieillissante et, dans certaines villes, en diminution ; réduction de l’empreinte environnementale urbaine. Afin d’accompagner et organiser les efforts des collectivités locales et de leurs partenaires publics et privés, le Ministère japonais du Territoire, des Infrastructures et des Transports (MLIT) porte depuis plus de 15 ans une politique « Compact City + Network », qui vise notamment à réorganiser spatialement la densité des villes japonaises, à recréer des centres-villes attractifs, et à adapter les services – notamment de transports - aux formes urbaines ainsi remaniées. Le service économique de Tokyo publie une étude sur cette politique.

1. Une politique fortement mise en avant par le MLIT

Le sujet de la ville compacte est régulièrement mis en avant par le MLIT comme un des principaux axes de la politique d’urbanisme du Japon. Ce fut notamment un des thèmes développés par le MLIT lors de la cinquième rencontre franco-japonaise sur la ville durable (MTES-MCT / MLIT), en janvier 2018 à Tokyo et Kanazawa. Afin d’en savoir plus, le service économique régional de l’Ambassade de France à Tokyo a réalisé une étude sur l’historique de cette politique au Japon : émergence des problématiques auxquelles elle cherche à répondre, mise en forme par les lois, mesures de soutien mises en place par le gouvernement, prise en main par les collectivités. L’étude contient également une présentation du fonctionnement des documents d’urbanisme et de l’application du droit des sols au Japon.

Extrait du Master Plan Compact City + Network de la ville de ToyamaLa politique Compact City + Network vise avant tout à répondre à la problématique de la diminution de la densité de population dans certains quartiers, en raison du vieillissement et déclin de la population japonaise. Cette baisse de densité met en péril le fonctionnement social des quartiers, la viabilité des services publics, la rentabilité des commerces. L’idée de la politique Compact City + Network est de rassembler la population et les services dans des parties du territoire urbain plus restreintes, prédéfinies par la collectivité locale (zones d’attraction résidentielles, zones d’attraction des fonctions urbaines), afin de maintenir une densité suffisante dans ces zones prioritaires (et donc, sur le long terme, « vider » les autres zones). La mise en œuvre opérationnelle du zonage Compact City repose essentiellement sur des mécanismes incitatifs (subventions, communication…), avec très peu de mécanismes d’obligation/interdiction. La partie « + Network » correspond à la mise en place et sécurisation de services locaux de transports adaptés à la nouvelle organisation de l’espace urbain : qualité de la desserte courte distance (à l’intérieur des zones d’attraction), qualité des liens entre les différentes zones, consolidation des modèles économiques des opérateurs.

2. Des résultats concrets incertains, mais un recul encore insuffisant

Le tramway de la ville de Toyama est un composant essentiel de sa politique Compact City + NetworkLa ville de Toyama, précurseur érigé en modèle, affiche des résultats positifs sur les densités de population ou la fréquentation des transports en commun, mais ailleurs sont signalés des projets d’aménagement ou de constructions réalisés en complète contradiction avec les orientations de zonage Compact City fixées par les municipalités.

Mais à l’échelle de temps de l’urbanisme, et à plus forte raison dans un pays où les changements s’opèrent lentement, les prémices de la politique Compact City + Network sont encore très récents. Aussi, même si un certain nombre de faiblesses « mécaniques » semblent apparaître dans la mise en œuvre – lorsqu’on l’observe à travers un regard français habitué à un droit de l’urbanisme assez fort – il est sans doute encore trop tôt pour tirer un bilan de cette politique.

Pour l’avenir, le gouvernement japonais, soucieux d’afficher son engagement dans la réalisation des Objectifs de Développement Durable de l’Agenda 2030 de l’ONU, devrait de plus en plus relier ses politiques d’urbanisme, dont la politique Compact City + Network, à l’ODD 11 – « villes et communautés durables ».

3. Des opportunités pour les entreprises françaises

Quels que soient ses résultats concrets, la politique Compact City + Network constitue un axe prioritaire du MLIT, régulièrement mis en avant au plan domestique comme à l’international, et des dizaines de villes japonaises sont engagées dans des plans Compact City. Ce mouvement constitue donc une opportunité pour les entreprises françaises des secteurs de la ville durable (mobilités urbaines, concessions de bâtiments publics, district energy, réseaux d’infrastructures urbaines…), qui peuvent apporter leur savoir-faire aux territoires urbains japonais en recomposition. A minima, ces entreprises peuvent « packager » leurs solutions comme de possibles contributions à la réalisation de villes compactes et dotées de transports publics efficaces : même si les objectifs prioritaires diffèrent, on retrouve en effet dans la réalisation de la Compact City japonaise des similitudes avec la fabrication de la ville durable française, notamment à travers les éco-quartiers, éco-cités, plan Cœur de Ville, opérations de renouvellement urbain, etc.

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Etude réalisée par :

  • Roxane Rousseau, Stagiaire ENTPE, Chargée d’études Développement durable, SER de Tokyo
  • Avec l’appui de Machi Yoda, Attachée sectorielle Développement durable, SER de Tokyo
  • Sous la supervision de Stéfan Le Dû, Conseiller Développement durable, SER de Tokyo