Le 5 juillet 2018 s’est tenu à la Résidence de France à Tokyo un séminaire portant sur la coopération franco-japonaise en matière d’énergie. L'évènement, organisé par la CCI France-Japon dans le cadre de son centenaire, avec la collaboration du service économique de l'Ambassade de France, a rassemblé près de 150 personnes, autour de trois tables rondes consacrées aux ressources énergétiques importées (fossiles et nucléaire), aux énergies produites localement au Japon (renouvelables), et enfin aux innovations pour une énergie intelligente. Les échanges ont permis d'esquisser de nouvelles pistes de coopération entre entreprises françaises et japonaises, pour la transition énergétique du Japon et en lien avec les échanges institutionnels animés par les ministères et agences des deux pays.

Séminaire "Paving the way for French-Japanese cooperation in the energy sector"Le Ministère japonais de l'économie, du commerce et de l'industrie (METI), également en charge de l'énergie, a présenté dans ses grandes lignes la politique énergétique japonaise. Après avoir rappelé les révolutions énergétiques successives auquel le monde a été confronté depuis les années 1960, il a mis l’accent sur les défis spécifiques auxquels la politique japonaise doit répondre : un taux d’autosuffisance énergétique très faible (8% en 2016), l’absence de ressource primaire produite nationalement, un taux de dépendance au Moyen Orient extrêmement élevé (86,4 % pour le pétrole en 2016), des prix/coûts de production de l’électricité dans la fourchette haute par rapport à des pays comparables. Il a par la suite rappelé les engagements du Japon en matière de réduction de ses émissions de GES (-26 % en 2030 par rapport à 2013). Listant les bouleversements mondiaux en cours affectant directement ou non le paysage énergétique nippon, il a ensuite présenté les grandes lignes du 5ème plan fondamental de l’énergie adopté quelques jours plus tôt. Ce nouveau plan maintient les objectifs « 3E+S » (Energy security, Economic efficiency, Environnement + Safety) du précédent ainsi que les mêmes objectifs chiffrés pour les mixes énergétique et électrique 2030. Il a conclu en pointant les renouvelables, l’hydrogène et le nucléaire comme les principaux domaines possibles de coopération renforcée en matière énergétique pour la France et le Japon, et en rappelant l’échéance commune des présidences croisées G7/G20 de l’année prochaine.

Présentation de la politique de transition énergétique de la FranceLe service économique de l'Ambassade, représentant le Ministère français de la transition écologique et solidaire, a tracé dans ses grandes lignes également la politique énergétique française et insisté sur les potentiels encore inexploités de coopération dans de nouveaux domaines – des renouvelables aux systèmes énergétiques intelligents en passant par l’hydrogène et la décentralisation des politiques de transition énergétique.

Le premier panel traitait des potentiels de coopération en matière de ressources énergétiques importées (plus particulièrement, fossiles et nucléaire). Ce panel comptait des représentants de Total Japan, Idemitsu Kosan, Orano Japan, TEPCO Fuel & Power et du service nucléaire de l’Ambassade de France. Chacune des entreprises a souligné l’existence de partenariats fructueux avec des acteurs de l’autre pays. En matière d’énergies fossiles, l’accent a été mis particulièrement sur le GNL. Total a souligné les défis posés par le manque d’interconnexion avec le continent et par les incertitudes liées à la possible relance du nucléaire, ne permettant pas aux énergéticiens de s’engager pleinement sur une nouvelle voie. Les problématiques de réseaux ont également été évoquées par TEPCO, qui a souligné la nécessité mais les difficultés d’assurer une fourniture d’électricité au niveau de la demande. Enfin, les deux représentants du nucléaire ont rappelé l’étroitesse historique des relations dans ce domaine entre France et Japon et la proximité des défis actuels (adoption d’une technologie en circuit fermé ; sûreté ; augmentation du coût ; non-prolifération ; et acceptation du public).

Intervention de l'Ambassadeur de France au JaponL’Ambassadeur Laurent Pic a noté que le Japon et la France partagent des profils énergétiques assez similaires du fait d’une demande en énergie importante face à un certain manque de ressources naturelles sur leur territoire. Il a ensuite rappelé l’historique de la coopération France-Japon en matière énergétique, en particulier dans le domaine nucléaire, duquel il a signalé les approches et défis communs à nos deux pays. Signalant les challenges posés tant par les changements climatiques et la signature de l’Accord de Paris que par la catastrophe de Fukushima, il a rappelé l’engagement de la France en matière de transition énergétique et appelé à l’action toutes les parties prenantes. Il a en particulier souligné que l’élan impulsé par les gouvernements français et japonais permettait de déployer une vision claire pour le futur, aidant le secteur privé à s’inscrire dans une dynamique présentant des opportunités technologiques et économiques importantes. Il a enfin noté que le déploiement des renouvelables représentait un défi commun, auquel la coopération entre nos deux nations concrétisée par la relance d’un dialogue énergétique incluant les acteurs privés permettrait de faire face ensemble.

Réalisations françaises dans les énergies renouvelables au JaponLe deuxième panel traitait des potentiels de coopération en matière d’énergies produites localement au Japon. Ce panel comptait des représentants d’Engie Asia Pacific, Air Liquide Japan, Japan H2 Mobility, Veolia Japan, Renova et de Total Japan. Au cours des discussions, l’accent a été mis sur la nécessité pour les entreprises d’effectuer un virage dans leur activité historique et de s’inscrire dans la dynamique de décentralisation et de production locale des énergies. Les entreprises ont une fois de plus rappelé les partenariats fructueux établis avec des acteurs locaux. La question du manque de compétitivité des nouvelles technologies énergétiques au Japon a été soulevée à plusieurs reprises, plusieurs intervenants estimant que le Japon accuse un très important retard par rapport à l'Europe en la matière.

Le troisième panel traitait enfin des potentiels de coopération en matière d’énergies « intelligentes ». Ce panel comptait des représentants d’Engie Japan, Energy Pool Japan, Bouygues Asia et SAFT Japan. La discussion a ainsi mis l’accent sur les questions de grid, de stockage ou encore de digitalisation. En particulier, les représentants d’Engie et d’Energy Pool ont tous deux cité la nécessité de suivre la dynamique des 3D (Décarbonisation, Décentralisation, Digitalisation) et de développer des business models innovants afin de répondre aux problématiques énergétiques du futur. Les participants ont ainsi présenté, à l’image du discours de l’Ambassadeur, les défis énergétiques à venir comme opportunités de croissance et d’évolution pour leur entité.

En savoir plus...

Photos : Life.14 pour CCI France Japon