Le taux de chômage des titulaires de doctorat (les docteurs) est élevé en France, que ce soit par rapport aux autres catégories de diplômés ou comparativement à celui des docteurs dans d'autres pays. Il faut toutefois noter qu'il varie fortement d'une discipline à l'autre. Le taux de chômage des docteurs en mécanique, électronique, informatique et sciences de l'ingénieur est faible et proche de celui des diplômés d'écoles d'ingénieurs (autour de 4 %). Par contre, celui des jeunes docteurs en chimie, lettres et sciences humaines est trois fois plus élevé.

Comparativement aux détenteurs d'un Bac+5, les docteurs sont peu présents dans la R&D privée, le secteur public étant leur principal débouché. Bien que cela ne constitue pas une exception française et que la même observation puisse être faite dans tous les pays développés, on peut s'interroger sur l'existence d'un biais de sélection, de la part des entreprises, à l'encontre des docteurs et en faveur des ingénieurs.

Pour tester cette hypothèse, on compare, à l'aide d'un modèle économétrique, la productivité des docteurs à celles des autres diplômés, au sein d'une cellule de R&D privée. Il en ressort que les docteurs ont une productivité comparable à celle des ingénieurs et, qu'à ancienneté égale, ils ne sont pas moins rémunérés. Il n'y a donc pas de biais de sélection à l'encontre des docteurs. Au vu des compétences disponibles et des spécificités des entreprises, le recrutement des docteurs dans les équipes de R&D privées n’est pas inférieur à ce qui serait économiquement optimal. Toutefois, l’inadéquation de l’offre de formations doctorales peut, elle, conduire à une mauvaise utilisation du capital humain.

Le rôle important joué par les chercheurs détenteurs d'un diplôme autre que Bac+5 ou doctorat dans la production d'innovations apparaît clairement dans l'analyse économétrique. La désaffection des jeunes pour les formations scientifiques et les besoins croissants de l'économie française en chercheurs n'en sont que plus préoccupants. Autant que le doctorat, il serait nécessaire de soutenir toutes les filières d'enseignement scientifique, même les plus courtes.

Trésor-Éco n° 94