La série des Documents de Travail présente des travaux menés au sein de la DG Trésor, diffusés dans le but d’éclairer et stimuler le débat public. Ces travaux n’engagent que leurs auteurs.
 

En 2015, la chaleur (chauffage, eau-chaude sanitaire et cuisson notamment) représente environ 47 % de la consommation finale d’énergie en France, et reste largement carbonée (65 % provenant du gaz, du pétrole et du charbon). L’augmentation de la part des énergies renouvelables dans la consommation de chaleur représente un levier majeur de la transition vers une économie bas-carbone.

La France s’est dotée d’objectifs ambitieux concernant la chaleur renouvelable (33 % en 2020 et 38 % en 2030 de chaleur renouvelable dans l’ensemble de la chaleur), mais est aujourd’hui nettement en retard sur la trajectoire prévue (20,7 % de chaleur renouvelable en 2016, contre 25,5 % prévu). Cela s’explique notamment par la forte baisse des coûts des combustibles fossiles au cours des deux dernières années, qui modifie l’arbitrage entre chaleur renouvelable et chaleur carbonée.

Les technologies de chaleur renouvelable sont en général peu coûteuses (par exemple, un chauffage collectif au bois peut présenter un coût d’abattement du carbone compris entre 8 et 11 €/tCO2). En particulier, elles apparaissent nettement plus efficaces que nombre d’EnR électriques qui sont par ailleurs fortement subventionnées.

Le soutien à la chaleur prend les formes suivantes :

  • Un fonds chaleur (doté d’environ 0,2 Md€ en 2017) soutient les projets collectifs de taille importante, en leur offrant des subventions pour leur permettre d’être compétitifs avec des solutions au gaz. Le fonds chaleur a fait preuve de son efficacité depuis 2009, en sélectionnant des projets présentant un coût d’abattement du carbone faible. Le fonds chaleur a été soutenu à hauteur de 1,2 Md€ sur la période 2009 et 2014, contre 11,7 Md€ pour les EnR électriques via la contribution au service public de l’électricité.
  • Le crédit d’impôt pour la transition énergétique (CITE), qui peut concerner des appareils de chaleur renouvelable (à hauteur de 0,3 Md€ en 2016).
  • Des aides locales sous forme de prime à la casse, pour inciter les ménages à remplacer leur chaudière ancienne et polluante.
  • Des taux réduits de TVA pour certaines installations.

Pour favoriser le déploiement de la chaleur renouvelable, la mise en place d’un prix du carbone suffisant est l’outil principal, en particulier du fait du caractère décentralisé de la chaleur (la production se fait à l’échelle d’un ou quelques logements, sauf pour les réseaux de chaleur), afin d’orienter les investissements privés vers les EnRT. Les professionnels du secteur estiment qu’un prix du carbone de 50 €/t serait suffisant pour améliorer significativement la compétitivité de ces technologies. Le rehaussement de la trajectoire de la composante carbone par rapport à celle prévue dans la loi de transition énergétique pour la croissance verte (LTECV), adopté en loi de finance initiale 2018, est un élément essentiel de soutien à la chaleur renouvelable.

Cependant, même avec la tarification du carbone adoptée, le développement de la chaleur renouvelable est soumis à plusieurs obstacles semblables à ceux rencontrés pour la rénovation thermique : contrainte de crédit, problème d’information, biais cognitifs, préférence pour le court terme. Ces obstacles peuvent empêcher la diffusion de certaines technologies même rentables. Des politiques complémentaires sont alors nécessaires :

  • Le fonds chaleur, qui repose sur un processus efficace de subventions basées sur une analyse socio-économique, devrait être maintenu.
  • Pour les installations individuelles, le CITE peut aider à l’adoption des technologies les plus efficientes (comme le chauffage au bois ou les réseaux de chaleur) et ayant les émissions les plus faibles (dans le cas du chauffage au bois). Il est cependant nécessaire d’assurer une information claire sur le bon usage du chauffage au bois, afin de limiter la pollution locale causée par une mauvaise utilisation d’appareils théoriquement performants.

Documents de Travail n° 2018/2