La consommation d'antibiotiques par les humains et les animaux conduit à des mutations bactériologiques qui menacent de rendre les médicaments existants inefficaces dans le traitement de certaines pathologies.

La consommation d'antibiotiques par les humains et les animaux conduit à des mutations bactériologiques qui menacent de rendre les médicaments existants inefficaces dans le traitement de certaines pathologies. Une hausse de la résistance aux antibiotiques pourrait dès les prochaines décennies provoquer chaque année plusieurs millions de décès dans le monde et une réduction de l’activité pouvant aller jusqu'à 0,8 point par an d'ici 2050 dans les pays développés.

Ce risque sanitaire appelle une réponse coordonnée au niveau mondial, comme souhaité par le G20. Il faut, quand c'est possible, réduire et diversifier la consommation des antibiotiques existants, mais aussi renforcer les incitations à la recherche de nouveaux antibiotiques efficaces contre les bactéries potentiellement résistantes. Le niveau actuel de la R&D en la matière paraît en effet insuffisant face au risque. Dans le domaine pharmaceutique, le droit de la propriété intellectuelle permet à l'innovateur d'exploiter une rente limitée dans le temps, dépendant du service médical rendu, et à partir de la date de l'enregistrement d'un brevet ou de l'autorisation de mise sur le marché. Ces règles sont mal adaptées aux nouveaux antibiotiques, dont l'utilité immédiate peut être faible du fait de traitements déjà existants, et dont la date à laquelle ils deviendront utiles est incertaine.

Pour pallier l'insuffisance de R&D pour contrer la résistance aux antibiotiques, il conviendrait d'abord, pour ces médicaments, d’harmoniser le régime de la propriété intellectuelle entre les pays et de faire courir la protection à partir de la commercialisation effective de la nouvelle molécule.

La faisabilité au niveau mondial d'un fonds de récompense pour l'innovation dans le domaine de la résistance antimicrobienne devrait aussi être examinée. Un tel fonds permettrait à l'innovateur de céder ses droits de propriété intellectuelle en échange d'une récompense prédéterminée. Cela aurait l'avantage d'offrir à l'investisseur la certitude d'une rémunération minimale pour une découverte, mais aussi de rendre possible sa diffusion immédiate selon le mode le plus efficace, sans la perte sociale associée à la période d'exploitation de la rente de monopole.

Un tel fonds pourrait servir de test à la mise en place de systèmes de récompense pour d'autres types d'innovation, pour lesquels le régime actuel d'incitation par le brevet ne semble pas assurer à lui seul le niveau socialement optimal d'investissement dans la R&D, comme cela semble être le cas par exemple dans le domaine de la lutte contre les conséquences du réchauffement climatique.

Trésor-Éco n° 215