La crise des dettes souveraines, débutée en 2010, a rappelé les fragilités architecturales de la zone euro, qui comporte au niveau central un pilier monétaire (la BCE) mais pas de « pilier budgétaire » unifié comme dans les États fédéraux. Malgré des fondamentaux agrégés relativement sains par rapport à d'autres zones dans le monde, la zone euro a en effet connu une forte instabilité macroéconomique et financière, qui lui a été spécifique.

En dépit d'une stabilisation de la situation en zone euro depuis la mi-2012 grâce à l'action des États membres et de la BCE (réforme de la gouvernance et engagements des États en matière de finances publiques, renforcement du rôle de la BCE, mécanismes de solidarité financière, approfondissement de l'Union bancaire, réorientation du policy mix en faveur de la croissance), cette crise a montré la nécessité pour une zone monétaire de disposer d'un instrument pérenne de stabilisation économique, en cas notamment de choc asymétrique. Cet instrument pourrait prendre la forme d'un budget - commun et de taille significative - pour la zone euro.

Composé de dépenses contracycliques - comme des dépenses liées au chômage - et de recettes cycliques - comme l'impôt sur les sociétés -, ce budget commun participerait à la stabilisation macroéconomique de la zone euro via des stabilisateurs automatiques au niveau central et une capacité d'intervention discrétionnaire. En outre, une telle évolution conforterait la position de la BCE, qui pourrait être plus encline à agir sur une dette centrale adossée à ce budget et ainsi contribuer à la stabilité financière de la zone.

La mise en place d'un budget commun pour la zone euro constitue un processus de moyen terme, qui nécessite en parallèle un pas en avant dans l'intégration politique, afin d'assurer la légitimité démocratique des nouvelles prérogatives confiées au niveau européen. La solidarité accrue qui en découle pourrait également justifier un renforcement supplémentaire de la gouvernance économique en zone euro. De plus, une telle évolution aurait dans de nombreux domaines (social et fiscal notamment) des effets structurants. Au total, la mise en place d'un budget central améliorerait significativement le fonctionnement économique et institutionnel de la zone euro, ce qui contribuerait à renforcer son potentiel de croissance.

Trésor-Éco n° 120