Depuis l'intensification de la crise de la dette souveraine en zone euro à l'été 2011, les trajectoires de croissance des États-Unis et de la zone euro divergent alors qu'elles étaient fortement liées auparavant, y compris pendant la crise. En 2012, la croissance américaine a résisté (+2,2 %) alors que la zone euro est entrée de nouveau en récession(– 0,6 %). Ce découplage est principalement dû au dynamisme relatif des moteurs privés aux États-Unis, contrairement à la zone euro où seuls les échanges extérieurs permettent de limiter la chute de l'activité.

L'économie américaine dispose de stabilisateurs automatiques plus faibles et d'un marché du travail plus flexible qu'en zone euro, ce qui explique des fluctuations cycliques généralement plus marquées et justifie le recours à des politiques macroéconomiques plus réactives. Pendant la crise de 2008-2009, la contraction de l'activité a été moindre aux États-Unis qu'en zone euro grâce à un plan de relance plus massif. L'ajustement de l'emploi et des salaires a cependant été plus important aux États-Unis, ce qui a préservé la situation financière des entreprises.

Le policy-mix a également joué un rôle important dans le découplage actuel. Sur la période 2011-2012, l'effort de consolidation budgétaire a été moins important aux États-Unis qu'en zone euro, où il s'est intensifié avec la crise des dettes souveraines sous la contrainte des règles budgétaires et des marchés financiers. En outre, l'ajustement aux États-Unis est progressif et s'opère dans un contexte de reprise de l'activité. À l’inverse, dans la zone euro, les plans de consolidation portent dans une large mesure sur les pays les plus fragiles, où la demande privée s’ajuste dans un contexte d’assainissement des bilans et entraînent des effets croisés du fait de la forte intégration commerciale des économies. La fragmentation financière en zone euro se traduit par des conditions de financement du secteur privé moins favorables qu'aux États-Unis, notamment pour les pays les plus fragiles.

Toutefois, ce découplage pourrait être amené à se réduire dans les années qui viennent. Dans la zone euro, la situation financière s'améliore assez nettement depuis l'été 2012, grâce aux mesures prises par la BCE, (dont l'annonce des Opérations monétaires sur titres -OMT-) et à l’annonce de la mise en place d'un mécanisme unique de supervision, première étape vers la constitution d'une union bancaire. Aux États-Unis, les efforts qui restent à mener en termes de réduction des déficits publics et courants sont plus conséquents qu'en zone euro. À moyen terme, la situation structurelle des finances publiques est moins favorable que dans la zone euro.

Trésor-Éco n° 114