Le Ministère des finances britannique a publié en 2006 une étude sur les implications économiques du changement climatique (Stern Review on Economics of Climate Change). La principale novation du «Rapport Stern» est d'introduire l’analyse économique au cœur du débat climatique et de la mettre au service d'un vigoureux plaidoyer : les dommages causés par le réchauffement de la planète seraient 5 à 20 fois supérieurs aux sacrifices que les systèmes économiques devraient supporter pour lutter efficacement contre l'effet de serre. Ce message abondamment médiatisé a contribué à forger un consensus international sur la nécessité et l'urgence d'agir.

Le «Rapport Stern» se démarque des règles traditionnelles de l'analyse coûts-bénéfices pour comparer les dommages du réchauffement climatique et les coûts de réduction des émissions de gaz à effet de serre. Certains des choix méthodologiques qui sous-tendent l'analyse, notamment la séparation du calcul des dommages climatiques et des coûts de l'action ainsi que la faiblesse inhabituelle du taux d'actualisation (1,4%), ont été vivement critiqués par des économistes comme W. Nordhaus et R. Tol. Avec une approche plus homogène des coûts et bénéfices des mesures de prévention du changement climatique, une méthode d'actualisation plus orthodoxe et une prise en compte plus fine de la valeur du carbone et de l'incertitude dans la modélisation, Stern aurait sans doute pu prévenir les objections dont il est victime sans renverser le sens de ses conclusions.

La validité de ces conclusions est largement tributaire de notre capacité à maîtriser les coûts de l'atténuation de l’effet de serre. D'après le rapport, une baisse de 25% des émissions de gaz à effet de serre en 2050 par rapport à aujourd'hui ne devrait entraîner que de faibles perturbations pour l'économie mondiale, de l'ordre de 1% du PIB mondial en 2050. Ce résultat optimiste repose sur un modèle qui suppose que les options les moins coûteuses pour réduire les émissions de carbone seront exploitées en priorité grâce à des politiques de prix correctement calibrées. Les pouvoirs publics ont donc la responsabilité de créer un cadre incitatif privilégiant le recours aux instruments économiques pour minimiser le coût global de l'effort de prévention du risque climatique.

Trésor-Éco n° 30