POLOGNE
Situation économique
La Pologne et la convergence européenne depuis l’adhésion à l’UE
Avec une population de près de 38 millions de personnes, la Pologne constitue la principale économie parmi les Pays d’Europe Centrale et Orientale. Depuis son adhésion à l’UE en 2004, le pays a connu deux décennies de rattrapage économique. Les taux de croissance polonais ont systématiquement été supérieurs à la moyenne européenne et la croissance polonaise ne s’est interrompue qu’en 2020 en raison de la pandémie de covid19 (récession de -2% du PIB).
Croissances des PIB des Etats-membres de l'UE depuis 2005 (en %)
Source : Eurostat
Lors de son adhésion à l’UE, la Pologne était le 9ème PIB de l’Union européenne (Royaume-Uni exclu), juste derrière l’Autriche. La Pologne est aujourd’hui le 6ème PIB de l’UE derrière les Pays-Bas et devant la Belgique. Ainsi, le rapport du PIB par habitant polonais au PIB moyen par habitant français, en parité de pouvoir d’achat, est passé de 46% en 2004 à 79% en 2023.
PIB par habitant PPA polonais en % du PIB PPA français
Source : Eurostat
La Pologne compte 17,2 millions d’actifs en 2023. Le salaire mensuel brut moyen s’élevait début 2025 à 8 620 PLN soit environ 2050 EUR. Le coût horaire moyen de la main d’œuvre du secteur privé était en 2024 de 16,6 EUR (moyenne UE : 33,2 EUR). Le Pologne connait l’un des taux de chômage les plus faibles en Europe, à 2,9% en 2024 (moyenne UE : 5,9%).
Impact de la pandémie de covid19 (2020)
La Pologne est parmi les économies de l’UE ayant le mieux résisté à la pandémie de covid19. Le pays n’a alors connu qu’une récession de -2% du PIB (moyenne UE : -5,6%). Sur l’ensemble de l’année 2020, la demande intérieure polonaise s’était moins contractée (-1,5%) que dans le reste de l’UE (-3,5%). Surtout, l’ampleur de la récession en 2020 avait été avantageusement limitée par l’amélioration de la balance commerciale (+6,7 Mds EUR en 2020 contre -4,4 Mds EUR en 2019). Les importations polonaises, notamment énergétiques avaient alors connu une baisse (-4,83%) tandis que les exportations polonaises s’étaient maintenues (+0,12%).
En réaction aux conséquences économiques de la pandémie de covid19, le gouvernement polonais avait mis en place un « plan anticrise » (plus de 36 Mds EUR d’aide publique déboursés), sous la forme de chômage partiel, de prêts non-remboursables et d’aides à la trésorerie des entreprises afin de soutenir les entreprises et de préserver l’emploi. Ces aides ont temporairement dégradé les finances publiques polonaises : le déficit public est passé de -0,7% du PIB en 2019 à -6,9% en 2020 tandis que la dette publique a atteint 57,2% du PIB fin 2020 (+11,5 points de pourcentage - pp).
Reprise et relance (2021)
Comme le reste de l’UE, la Pologne a connu en 2021 un phénomène de reprise. La croissance du PIB s’est élevée à +6,9%, au-dessus de la moyenne européenne à 5,4%. La Pologne a ainsi dépassé dès 2021 le PIB enregistré en 2019 (576 Mds EUR contre 533 Mds EUR) tandis que le chômage se maintenait à 3,4% (+0,2pp).
Le retour de la croissance en 2021 a permis une amélioration de la situation des finances publiques. Le déficit et la dette publique ont respectivement atteint -1,8% (+5,1 pp) et 53,6% (-3,6pp) du PIB en fin d’année.
En revanche, la relance de l’activité s’est accompagnée d’un retour à une balance commerciale négative (-7,7 Mds EUR en 2021) en raison de la reprise et du renchérissement des importations (271 Mds EUR, soit +27% en un an) que n’ont pas compensé pas les bonnes performances des exportations polonaises (264 Mds EUR soit +20%). Partant, la balance des paiements temporairement positive en 2020 (12,8 Mds EUR), s’est également dégradée pour redevenir négative en 2021 (-8,3 Mds EUR).
Dans le cadre du plan de relance européen NextGenerationEU, plusieurs Etats membres de l’UE ont pu faire approuver leurs plans de relance et de résilience (PRR) et en toucher un premier décaissement dès l’été 2021. La Pologne n’a vu son plan (Recovery and resilience plan for Poland) validé qu’en juin 2022 et n’a sollicité un premier décaissement qu’en décembre 2023 (cf. années 2023 et 2024 ci-après).
Une reprise entravée par les conséquences de la guerre en Ukraine (2022)
Taux d’inflation (IPCH) mensuel (en glissement annuel) en Pologne et dans l’UE (en %)
Source : Eurostat
En 2022, la Pologne a enregistré une croissance de 5,1%, supérieure à la moyenne européenne (3,5%). A la veille de l’invasion russe de l’Ukraine, l’économie polonaise connaissait une dynamique très positive : 10,7% de croissance annuelle au T1 2022 contre 5,7% en moyenne dans l’UE. Mais le déclenchement du conflit en Ukraine a alimenté une forte inflation, évaluée à 13,2%[1] en 2022 (9,2% en moyenne dans l’UE) et altéré la croissance qui a progressivement chuté pour atteindre 0,6% au T4 2022, passant sous la moyenne européenne (1,7%).
Evolution du taux de croissance trimestriel (en glissement annuel) en Pologne et dans l’UE.
Source : Eurostat
En 2022, la Pologne a connu une forte dégradation de sa balance commerciale (-24,3 Mds EUR) et de sa balance des paiements (-19,5 Mds EUR) sur fond de renchérissement des importations et notamment des produits énergétiques.
Face au phénomène d’inflation initié en 2021 et largement amplifié en 2022, le gouvernement polonais a adopté un « bouclier anti-inflation » sous la forme de réduction de TVA sur les produits énergétiques et alimentaires, ainsi que de distribution de « chèques anti-inflation » aux ménages les plus modestes.
Conséquence de l’invasion russe, la Pologne accueille depuis 2022 environ 1 million de réfugiés ukrainiens, dont un grand nombre a rapidement travaillé de façon légale (la sécurité sociale polonaise dénombrait fin 2022 plus de 742 000 travailleurs ukrainiens, réfugiés ou non). Selon les estimations, la Pologne aurait dépensé dans la première année du conflit l’équivalent de 2% de son PIB (10 Mds EUR) pour l’aide à l’Ukraine, principalement sous forme de prestations au bénéfice des réfugiés sur son sol (prestations sociales et de santé, logement, scolarité des enfants réfugiés) et de dons d’équipements militaires.
Les mesures de soutien face à l’inflation, les réformes fiscales, ainsi que les conséquences de la guerre (accueil des réfugiés notamment) ont légèrement dégradé les finances publiques du pays en 2022. Ainsi, le déficit public s’est creusé à -3,7% (-1,9 pp) du PIB, mais la dette publique a poursuivi sa baisse (-4,5 pp), à 49,1% du PIB.
2023, une année de transition
Suite à un sérieux ralentissement de l'activité en début d’année, la Pologne a affiché en 2023 une croissance faible mais positive de 0,2%.
La variation des stocks a lourdement pesé sur la croissance (-6,9 pp). Les entreprises, notamment dans l'industrie, ont constitué d'importants stocks au sortir de la pandémie, qu'elles ont largement écoulés alors que les chaînes d'approvisionnement s'amélioraient.
La consommation a également reculé (-1,0 % en 2023) et contribué négativement à la croissance (-0,8 pp), dans un contexte de forte inflation (+10,9 % en moyenne annuelle) et d'érosion des revenus réels.
Echo à ce recul de la consommation, la balance commerciale s'est améliorée et la Pologne affichait un excédent de 10,5 Mds EUR en 2023, contre un déficit de 20 Mds EUR en 2022). Les exportations nettes ont ainsi été le 1er contributeur à la croissance (+5,4 pp).
L'investissement a également progressé de +8,0 % en g.a, atteignant 17,4 % du PIB.
L’année 2023, marquée par des élections législatives en octobre qui ont vu la défaite du pouvoir en place depuis 2015 et la victoire d’une coalition d’opposition, a été marquée par de nombreuses dépenses préélectorales qui n’avaient pas été programmées dans la loi de finances 2023. Ainsi, le déficit budgétaire s'est établi à 5,3% du PIB, contre -3,4 % en 2022.
Enfin, la révision du plan de relance polonais, validée par l’UE fin 2023 et incluant un chapitre REPowerEU, portait les dons du PRR polonais de 22,5 à 25,3 Mds EUR et les prêts de 11,5 à 34,5 Mds EUR. En outre, un préfinancement inconditionnel de 5 Mds EUR a été obtenu en toute fin d’année, au titre de REPowerEU. La Commission européenne a débloqué le versement des fonds à la Pologne, qui étaient gelés depuis 2022.
Reprise marquée de la croissance en 2024
En 2024, la reprise de la consommation a permis une accélération de la croissance, qui a atteint +2,9 %. La consommation des ménages a progressé de 4,0 % en 2024 (+0,7 % en 2023), grâce à une progression notable des salaires réels (+9,5 % contre +1,1 % en 2023). La consommation des administrations publiques a progressé de 6,7 %. Ainsi, la consommation apporte la principale contribution à la croissance 2024 (+3,1 pp).
Les entreprises polonaises ont également reconstitué leurs stocks, soutenant la croissance (+0,5 pp), après une année d’importants déstockages, encouragés par l’accumulation de stocks post pandémie.
Cependant, résultante directe de la mauvaise conjoncture sur ses points forts à l’export, la balance commerciale de la Pologne contribue négativement à la croissance 2024 (-1,0 pp). Ainsi, l’export (-0,8 %, 350 Mds EUR) a été négativement impacté (i) géographiquement par le contexte économique défavorable en Allemagne, 1er client de la Pologne (-4 %, -3,8 Mds EUR) et (ii) sectoriellement par la baisse des ventes de batteries pour voitures électriques (-40 %, -4,6 Mds EUR).
Enfin, la contribution de l’investissement à la croissance s’est détériorée en 2024 (+0,3 pp vs. +2,1 pp en 2023), dans l’attente des décaissements du plan de relance et de résilience (PNRR). Le contexte de transition entre les cadres financiers pluriannuels (CFP) 2014-2020 et 2021-2027 a joué en défaveur de l’investissement public. S’agissant du PNRR, après un blocage jusque début 2024 dû au non respect des super-jalons sur l’indépendance de la justice, 35 % du montant octroyé à la Pologne avait été versé à la fin de l’année 2024.
Composantes de la croissance du PIB de la Pologne, en pp
Source : Eurostat
Sur l’année 2024, l’inflation (IPCH) moyenne s’est établie à 3,7 % (après 10,9 % en 2023), en raison de quatre facteurs : (i) l'augmentation rapide des revenus disponibles, due à la politique de revalorisation du salaire minimal (passé de 560 EUR en 2019 à 1 090 EUR en janvier 2025), des salaires des agents de l’Etat (+30 % pour l'éducation nationale et +20 % pour les autres fonctionnaires au 1er janvier 2024), des pensions et des prestations sociales ; (ii) la levée progressive des boucliers anti-inflation sur l'énergie (cf. supra) ; (iii) le retour de la TVA sur l'alimentation (idem) ; et (iv) la reprise de la consommation.
Enfin, les finances publiques se sont fortement dégradées en 2024, le déficit ayant atteint 6,6% du PIB, contre 5,7% prévus dans le plan de stabilité à moyen terme tranmis à la Commission européenne (PSMT). le ministre des Finances a justifié ce dérapage par (i) une dépense accélérée pour rebâtir les capacités de défense (selon la méthodologie comptable UE), (ii) une consommation plus faible que prévu (épargne plus importante) se traduisant par des recettes de TVA plus faibles et (iii) des dépenses liées aux inondations de l’automne. La dette publique atteignait 55,3 % du PIB en 2024, contre 49,5 % en 2023.
Perspectives de croissance en 2025
En 2025, la consommation resterait le principal contributeur à la croissance. Les ventes de détail ont progressé de 4,4 % en mai en glissement annuel (g.a), avec une tendance haussière sur la vente de biens durables. Notamment, les ventes d'électroménager ont progressé de 18,9 % en g.a, et les ventes d'automobiles de 15,7 %. Le dynamisme de la consommation au T2 2023 s'explique par l'amélioration du pouvoir d'achat porté par la hausse des salaires réels, et par l'augmentation temporaire des achats avant l'application éventuelle de droits de douane américains.
L'investissement reprend timidement. La production du secteur de la construction est à son plus bas depuis 2021 (-2,9 % en g.a en mai), après 5 mois de baisses consécutives. Les retards de décaissement des fonds du plan de relance européenne (PNRR) ont un impact négatif sur le secteur et sur l'investissement public, alors que la dernière révision du plan repousse certains paiements du 2nd semestre 2025 au 1er semestre 2026. Cependant, l'investissement privé, après une baisse de 2,2% en 2024 devrait retrouver le chemin de la croissance en 2025. Signe d'amélioration, la production de biens d'équipements à destination des entreprises augmente rapidement (+10,4 % en mai en g.a).
La balance commerciale devrait contribuer négativement à la croissance, en raison des tensions commerciales et des difficultés économiques du voisin allemand, 1er partenaire commercial.
Le déficit budgétaire devrait se maintenir à des niveaux élevés en 2025 (-6,4 %), alimenté par l'augmentation des dépenses de défense, des dépenses sociales et de la charge de la dette. Facteurs limitants, la hausse des droits d'accise et la non-indexation du barème de l'impôt sur le revenu à l'inflation devrait permettre d'abonder les recettes budgétaires.
Pour en savoir plus sur l’économie polonaise :
- Commerce extérieur de la Pologne : Le commerce extérieur polonais en 2022 - POLOGNE | Direction générale du Trésor (economie.gouv.fr)
- Relations économiques entre la France et la Pologne
- Economic forecast for Poland (Spring 2025) - European Commission
- Présentation de l’économie polonaise par l’OCDE : Économie de la Pologne en un coup d’œil - OCDE (oecd.org)
- Présentation de la Pologne par le Fond Monétaire international : Republic of Poland and the IMF
- Données économiques générales de la Pologne présentées par l’institut polonais de statistiques, GUS : Statistics Poland / Basic data ainsi que Main | DBW (stat.gov.pl)
Principaux indicateurs macroéconomiques de la Pologne
|
2021 |
2022 |
2023 |
2024 |
Population |
||||
Population (en millions) |
37,1 |
36,9 |
36,8 |
36,6 |
Macroéconomie |
||||
PIB (Md EUR courants) |
583 |
661 |
749 |
846 |
Taux de croissance du PIB réel (%) |
6,9 |
5,1 |
0,2 |
2,9 |
PIB/habitant (EUR) |
15 100 |
17 520 |
19 980 |
22 560 |
Prix |
||||
Inflation - IPCH (%y/y) |
5,2 |
13,2 |
10,9 |
3,7 |
Emploi |
||||
Taux de chômage (% pop active) |
3,4 |
2,9 |
2,8 |
2,9 |
Taux de chômage des jeunes (15-24ans) |
11,9 |
10,8 |
11,4 |
10,8 |
Taux d’activité (% pop 20-64 ans) |
75,4 |
76,7 |
77,7 |
78,4 |
Salaires |
||||
Salaire minimum au premier semestre (en EUR) |
614,08 |
654,79 |
745 |
978 |
Salaire brut moyen (en décembre) (en EUR) |
1444 |
1559 |
1790 |
2034 |
Recherche et développement |
||||
Dépenses de R&D (% PIB) |
1,42 |
1,44 |
1,56 |
nd |
Extérieur |
||||
Balance commerciale (Md EUR) |
-7,8 |
-22,0 |
4,8 |
-6,3 |
Exportations (%y/y) |
12,3 |
7,4 |
3,7 |
2,0 |
Importations (%y/y) |
16,3 |
6,8 |
-1,5 |
4,2 |
Solde courant (% PIB) |
-1,3 |
-2,2 |
1,8 |
0,2 |
Taux de change |
||||
4,6 |
4,7 |
4,4 |
4,3 |
|
Finances publiques |
||||
Déficit public (% du PIB) |
-1,8 |
-3,7 |
-5,3 |
-6,6 |
Dette publique (% PIB) |
53,0 |
48,8 |
49,5 |
55,3 |
Sources : Eurostat; GUS |
||||
%y/y : en glissement annuel |
[1] Indice des prix à la consommation harmonisé (HICP).