BANGLADESH
Indicateurs et conjectures
Dernière mise à jour : juillet 2025
Historiquement agraire, profitant de la fertilité du delta du Gange, l’économie du Bangladesh (PIB de 460 Mds USD pour 175 M d’habitants) a connu un tournant industriel à partir des années 90 avec le développement du secteur du prêt-à-porter. Grâce à ses quelques cinq millions d’employés faiblement rémunérés, il assure aujourd’hui près de 90% des exportations, soit environ 40 Mds USD. Ce modèle s’appuie sur une économie peu diversifiée mais a néanmoins permis au pays de connaître un taux de croissance annuel moyen supérieur à 6% sur les cinq dernières années, de diviser le taux de pauvreté par deux et de quadrupler son PIB par habitant en moins de vingt ans pour atteindre environ 2700 USD en 2025, désormais à hauteur du voisin indien (2900 USD). Celui-ci reste toutefois particulièrement vulnérable aux chocs externes, du fait de sa dépendance aux importations énergétiques et alimentaires et de la concentration géographique de ses marchés à l’export (Europe, Etats-Unis) et de ses sources d’importations (Chine, Inde).
Le Bangladesh sortira de la catégorie des pays les moins avancés (PMA) en 2026
Le Bangladesh a obtenu en 2021, année de célébration du cinquantenaire de l’indépendance, la confirmation par le PNUD de sa sortie de la catégorie des PMA. Ce reclassement sera formalisé en novembre 2026, après une transition étendue pour cause de COVID-19. Son IDH (0,670 en 2022) est celui qui a le plus progressé dans la région Asie du Sud et le positionne au 129ème rang, devant l'Inde (134ème) ou le Pakistan (164ème).
Néanmoins, le Bangladesh risque d’être particulièrement exposé aux conséquences de sa sortie des PMA. Le principal obstacle pour le pays concerne la perte de son accès préférentiel à de nombreux marchés, particulièrement le marché européen (régime « Tout sauf les armes ») qui absorbe près de 50% de ses exportations textiles, mais pour lequel le Bangladesh pourra profiter pendant une transition de 3 ans. La réimposition progressive de droits de douanes pourrait entraîner une baisse potentielle de 14% de ses exportations selon l’OMC. Dans ce cadre, la signature d’accords commerciaux avec ses principaux partenaires (négociation en cours avec la Chine, l’Inde et le Japon), la diversification de son tissu économique vers d’autres secteurs (cuir, pharmacie) et la montée en gamme de l’industrie locale sont une priorité pour les années à venir.
Source : FMI (avril 2025)
Une balance commerciale structurellement négative, qui a entamé les réserves de change
Après avoir bien résisté à la crise du COVID-19, l’économie bangladaise a été, depuis le début du conflit en Ukraine, fortement affectée par la hausse des tensions sur ses équilibres extérieurs, alimentant l’inflation et réduisant ses réserves de change. L’importance du déficit commercial (15 Mds USD en 2024), un faible niveau d’IDE (3,2 Mds USD nets) et des transferts des expatriés décevants (22 Mds USD) ont contribué à la hausse des tensions sur la monnaie et les réserves de changes, passées de 46 à 19 Mds USD, soit de 5,8 à 2,3 mois d’importations, entre 2021 et 2024. Cette pression sur le taka a mené à une forte dévaluation face au dollar, de 83 Tk/USD en 2021 à 120 Tk/USD aujourd'hui. Face à ces pressions, le Bangladesh a signé en janvier 2023 avec le FMI pour un programme de plus de 5 Mds USD.
La situation s'est dégradé sous l’effet du contexte international, mais le déficit commercial est quoiqu’il en soit structurellement déficitaire, oscillant entre 4 et 6% du PIB. Les entreprises bangladaises sont performantes à l’export, mais les exportations restent peu diversifiées, avec 85% de prêt-à-porter dont les 5 plus gros pays-client de la filière représentent 60% des achats. Les filières auparavant identifiées comme porteuses telles que le cuir ou les crevettes peinent à voir leurs résultats décoller et les têtes se tournent dorénavant vers d’autres secteurs comme les produits pharmaceutiques, les TIC et l’agro-alimentaire.
Grâce à une amélioration des exportations et des transferts des expatriés en 2024-25, couplée à un soutien important des bailleurs internationaux, les réserves de change se sont stabilisées voire légèrement redressées à 26,7 Mds USD fin juin 2025.
Commerce extérieur. Source : Bangladesh Bank.
Une inflation qui peine à refluer et pèse sur les ménages les plus pauvres
Historiquement maintenue sous la barre des 6%, l’inflation s’établit désormais durablement autour de 9% depuis septembre 2022, portée par la hausse des prix des matières énergétiques. Ce niveau élevé a incité les autorités à prendre des mesures budgétaires et monétaires restrictives qui affectent la croissance, estimée pour l’année fiscale 2024-25 (FY25) à 3,9% selon les autorités soit à un rythme bien inférieur aux années précédentes, également en raison des manifestations de l’été et des fortes inondations en août.
De plus, la faible croissance couplée à la baisse de l’emploi total (4% des travailleurs ont perdu leur emploi entre juillet et décembre 2024), et à une inflation à près de 10% depuis plus de deux ans et demi, a fait replonger une partie de la population dans la pauvreté. Selon la Banque mondiale, l’extrême pauvreté (en dessous de 2,15 USD/jour en parité de pouvoir d’achat) continue d’augmenter pour atteindre en 2024-25 près de 9,3%, contre 7,7% l’année précédente et 5,0% en 2021-22, annulant plus d’une décennie de progrès.
Un secteur bancaire en difficulté, avec un ratio de créances douteuses à plus de 30%
Concernant le secteur bancaire, il est aujourd’hui en grande difficulté après avoir souffert pendant plusieurs années des conséquences d'une mauvaise gouvernance sous le gouvernement Hasina, exploitée par l'élite politique et économique pour s’enrichir. La restructuration du secteur bancaire (PNP) est ainsi un enjeu majeur sur les prochaines années, notamment considérant le taux de prêts non-performants estimé aujourd’hui à environ 35% par la Bangladesh Bank. Les marges de manœuvre sont faibles alors que les injections de liquidités alimenteraient l’inflation et la recapitalisation approfondirait le déficit.
Bien que la Banque centrale ait entrepris plusieurs réformes pour endiguer la dégradation de la stabilité financière, la situation de certaines banques demeure particulièrement alarmante. Dans le cadre de la nouvelle Bank Resolution Ordinance 2025, qui renforce ses pouvoirs en matière de restructuration des institutions financières en difficulté, la Bangladesh Bank envisage notamment de fusionner cinq banques islamiques en crise — Social Islami Bank, Global Islami Bank, First Security Islami Bank, Union Bank et EXIM Bank — dans le cadre d’un ambitieux plan de stabilisation du secteur bancaire. Le taux de PNP de ces banques atteint 77% d'après un audit indépendant.
Source : Bangladesh Bank
Une comparaison régionale
Bangladesh | Inde | Pakistan | |
Population (M hab), 2022 | 169 | 1407 | 227 |
Croissance démographique, 2022 | 1,1% | 1,0% | 2,0% |
Macroéconomie | |||
PIB (Mds$), 2022 | 461 | 3469 | 376 |
PIB/hab ($), 2022 | 2734 | 2466 | 1658 |
Croissance PIB, 2022 | 7,2% | 6,8% | 6,0% |
IDE (%PIB), 2021 (1) | 6,0 | 16,2 | 9,5 |
Inflation (%), 2022 | 6,1% | 6,9% | 12,1% |
Finances publiques | |||
Déficit public (%PIB), 2022 | -5,1 | -9,9 | -7,8 |
Dette publique (%PIB), 2022 | 37,5 | 83,4 | 77,8 |
Dépenses publiques (%PIB), 2022 (2) | 15,0 | 28,2 | 22,3 |
Pression fiscale (%PIB), 2022 (2) | 7,7 | 6,8 | 11,4 |
Risque pays, 2022 (3) | C | C | D |
Echanges | |||
Balance commerciale (%PIB), 2021 (4) | -6,4 | -2,0 | -10,0 |
Exportations françaises vers (M€), 2021 (5) | 192 | 5999 | 414 |
Importations françaises depuis (M€), 2021 (5) | 3076 | 6715 | 1115 |
Aspects qualitatifs | |||
IDH, 2022 (6) | 0,661 (129e) |
0,633 (132e) |
0,544 (161e) |
Doing business (sur 190 pays), 2020 (7) | 168e | 63e | 108e |
Source : IMF, https://www.imf.org/external/datamapper/datasets
(1) UNCTAD : https://unctad.org/en/Pages/DIAE/World%20Investment%20Report/Country-Fact-Sheets.aspx
(2) Heritage Foundation : https://www.heritage.org/index/explore?view=by-variables&u=637193829921497074
(3) Coface : https://www.coface.fr/Actualites-Publications/Publications/Barometre-Risque-Pays-et-Secteurs-T4-2019
(4) Balance biens et services, Banque Mondiale : https://data.worldbank.org/indicator/NE.RSB.GNFS.ZS
(5) Douanes françaises : http://lekiosque.finances.gouv.fr/Default.asp
(6) PNUD : http://hdr.undp.org/sites/default/files/hdr_2019_overview_-_french.pdf
(7) Banque Mondiale : https://www.doingbusiness.org/