Washington Wall Street Watch n°2024-43
Réflexions hebdomadaires sur les principaux évènements financiers, institutionnels ou règlementaires, aux Etats-Unis.
Sommaire
Conjoncture
- Les prix de l’immobilier augmentent avec la baisse de l’offre
- L’inflation PCE marque le pas
Politiques Macroéconomiques
- Les responsables de la Fed s’accordent sur la poursuite de la baisse des taux directeurs
Services financiers
- Donald Trump nomme Scott Bessent Secrétaire du Trésor
- La Fed a rendu son rapport semestriel sur la stabilité financière
Situation des marchés
Brèves
Conjoncture
Les prix de l’immobilier augmentent avec la baisse de l’offre
Selon le rapport publié le 26 novembre par l’Agence fédérale de financement du logement (Federal Housing Finance Agency - FHFA), les prix de l’immobilier ont augmenté de +0,7 % en septembre et de +0,7 % au 2ème trimestre. Sur un an, les prix ont progressé de +4,3 %. Selon Anju Vajja, directeur adjoint de la division de la recherche et des statistiques de la FHFA, les prix ont poursuivi leur hausse en raison d’une pénurie de logements disponibles, mais les taux élevés ont pesé sur cette dynamique.
L’indice Case-Shiller publié par S&P Global, qui porte sur les prix immobiliers des 20 plus grandes villes américaines, a augmenté en juillet de +0,2 %. En glissement annuel, l’indice progresse de +4,6 % (après +5,2 %).
L’inflation PCE marque le pas
Selon les estimations du Bureau of Economic Analysis (BEA), en octobre, l’indice des prix des dépenses de consommation personnelle (Personal Consumption Expenditure – PCE) et sa composante sous-jacente (hors énergie et alimentation) ont augmenté de +0,2 % et de +0,3 % respectivement, au même rythme que le mois précédent pour les deux. Sur douze mois glissants, l’inflation et sa composante sous-jacente se sont établies à +2,3 % et +2,8 % respectivement (après +2,1 % et +2,7 %). Les progressions sont en ligne avec les attentes du marché
Sur un mois, les prix de l’énergie ont baissé de -0,1 % (après ‑2,1 %) tandis que les prix de l’alimentation se sont stabilisés (0,0 % après +0,4 %). Sur douze mois glissants les prix de l’énergie ont baissé de ‑5,9 % (après ‑8,1 %) et les prix de l’alimentation ont augmenté de +1,0 % (après +1,2 %).
Les prix des services ont augmenté de +0,4 % (après +0,3 %) tandis que les prix des biens ont baissé de -0,1 % (après -0,1 %). En glissement annuel, l’inflation des services s’établit à +3,9 % (après +3,7 %) et celle des biens poursuit son recul (-1,0 % après -1,2 %).
Politiques Macroéconomiques
Les responsables de la Fed s’accordent sur la poursuite de la baisse des taux directeurs
Selon le procès-verbal (minutes) de la réunion du comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) des 6 et 7 novembre, publié le 26 novembre, les responsables de la Fed se sont montrés particulièrement confiants sur l’état de l’économie américaine.
Les responsables ont notamment souligné que la trajectoire de désinflation était bien amorcée, tout en admettant une possible volatilité des données au mois le mois. En particulier, le ralentissement des prix des composantes sous-jacentes serait observé dans un large spectre de biens et de service, ce qui aurait renforcé la confiance des responsables.
Bien qu’il reste encore robuste, le marché du travail continuerait de ralentir eu égard à la baisse du nombre des postes vacants, des taux de démission et rotations de la main d’œuvre. Les responsables de la Fed considèrent que le marché du travail est proche de l’objectif de « maximum d’emploi » assigné au mandat de la Fed.
L’activité et la consommation ont été bien plus dynamiques qu’anticipé par les responsables de la Fed, soutenues notamment par un marché du travail solide et le dynamisme des salaires réels. Toutefois, de nombreux responsables ont souligné les difficultés financières rencontrées par les ménages à revenus faibles et modérés, comme en témoignent les défaillances des prêts de cartes de crédit et automobiles.
Dans l’ensemble, les responsables de la Fed considèrent que le double mandat de la Fed est assuré de manière équilibrée et en conséquence, ils s’accordent sur la poursuite de la baisse des taux directeurs. En effet, une normalisation trop lente de la politique monétaire pourrait nuire inutilement à l’économie. En revanche, une majorité d’entre eux ont indiqué qu’il serait devenu plus difficile d’estimer le taux neutre, soulignant l’importance d’une approche graduelle et progressive dans l’assouplissement de la politique monétaire.
Services Financiers
Donald Trump nomme Scott Bessent Secrétaire du Trésor
Le 23 novembre, Donald Trump a publié un communiqué de presse dans lequel il annonce la nomination de Scott Bessent comme 79ème Secrétaire au Trésor, et expose les priorités sa politique économique, à savoir : i) le leadership de l’économie américaine en termes d’entreprenariat et d’innovation ; ii) l’attractivité des capitaux et le bon fonctionnement des marchés financiers ; iii) le maintien du dollar comme une monnaie de réserve ; iv) la réduction de la dette ; v) la lutte contre les déficits commerciaux ; et v) la domination énergétique. Il affirme également sa préoccupation que chaque citoyen puisse profiter du développement de l’économie américaine.
Né en 1962 en Caroline du Sud et diplômé de Yale, Scott Bessent est un investisseur qui a consacré sa carrière à la gestion de fonds alternatifs (hedge fund). Entre les années 1990 et 2015 il alterne des fonctions au sein du hedge fund de Georges Soros et la création de son propre hedge fund. Il participe notamment à la prise de position spéculative contre la Livre qui poussera le Royaume-Uni à sortir du système monétaire européen (Black Wednesday) et plus tard contre le yen. Il quitte ses fonctions au sein du fonds de Georges Soros en 2015 pour créer le hedge fund Key Square Group.
Financeur et conseiller économique de la campagne de Donald Trump, il fixe trois objectifs pour le mandat du candidat Républicain : une croissance du PIB de 3%, une baisse du déficit public à 3% en 2028 et une hausse de la production de pétrole de 3 M de barils par jour. En matière de politique monétaire, il a notamment pris position pour l’identification rapide du successeur de J. Powell, a qui il reproche le manque de réactivité dans la lutte contre l’inflation et la baisse trop importante des taux en septembre 2024. Expert des stratégies macroéconomiques, il a réaffirmé le rôle du dollar comme monnaie de réserve et a écarté une intervention de l’Etat pour dévaluer la devise américaine. Il semble favorable à une approche plus graduelle que D. Trump en matière de droits de douanes. Sa nomination a été perçue positivement par les marchés des Treasuries en raison de son discours d’austérité budgétaire et ses prises de position raisonnable en matière commerciale.
La nomination de Scott Bessent devra être confirmée par le Sénat.
La Fed a rendu son rapport semestriel sur la stabilité financière
La Fed a publié le 22 novembre son rapport semestriel sur la stabilité financière, dans lequel elle met principalement en avant des vulnérabilités liées à la valorisation élevée des actifs et un niveau d’effet de levier historiquement haut au sein des hedge funds.
Pour évaluer la stabilité financière, cette étude examine quatre sources de vulnérabilités du système financier à des chocs externes négatifs : (i) la valorisation des actifs, (ii) le niveau d’endettement des entreprises et des ménages, (iii) l’effet de levier dans le secteur financier, et (iv) les risques de financement liés au manque de liquidité.
La pression sur les valorisations atteint des sommets historiques, le ratio entre le prix des actions et les résultats des entreprises (22x) se rapprochant du pic atteint avant la pandémie, de même que le ratio entre les prix de l’immobilier et les loyers générés. La liquidité de nombreux marchés demeure insuffisante et conduit à une forte volatilité des prix.
Les risques liés à l’endettement des entreprises et des ménages demeurent modérés, la part de leur endettement total rapportée au produit intérieur brut (PIB) tendant à diminuer à son niveau le plus bas depuis 20 ans (1,4x). La majorité de cette dette est par ailleurs portée par des emprunteurs bien notés et en situation d’honorer leurs engagements, notamment grâce à la bonne tenue des résultats des entreprises. Toutefois, les taux sur les cartes de crédit et les crédits automobiles parmi les emprunteurs les moins bien notés sont supérieurs à leur moyenne prépandémique.
Les vulnérabilités provenant de l’effet de levier dans le secteur financier demeurent notables, mais sont variables selon les acteurs. Le secteur bancaire est jugé sain et résilient, les niveaux de capitaux étant pour la plupart des établissements bien supérieurs aux obligations réglementaires, malgré des moins-values latentes encore importantes sur les produits de taux. En revanche, l’effet de levier des hedge funds atteint son point le plus haut depuis que les données de suivi sont disponibles (9x).
Enfin, les risques de financement persistent mais n’augmentent pas. La liquidité des banques est positive, mais malgré les réformes engagées par la Securities and Exchange Commission (SEC), certains fonds monétaires, dont l’encours a fortement cru, demeurent exposés à ces risques.
Situation des marchés
Au cours de la semaine écoulée (de vendredi à mercredi), l’indice S&P 500 a progressé de +0,9 %, à 5 999 et le Nasdaq Composite de 0,5 %, à 19 060.
Les rendements des obligations souveraines américaines (Treasuries) à 2 ans et à 10 ans ont tous les deux baissé de ‑0,1 point pour atteindre 4,2 % et 4,3 % respectivement.
Au cours de la semaine, la nomination de S. Bessent au Treasury, considéré comme une personnalité qui connaît bien le secteur financier, a détendu le marché obligataire souverain. L’inflation PCE en glissement annuel a augmenté par rapport au mois précédent mais étant en ligne avec les attentes du marché, elle n’a pas créé de mouvement d’ampleur sur les marchés financiers.
Brèves
- Le 22 novembre, Michelle Bowmann, Gouverneure à Fed, s’est exprimée sur le recours à l’intelligence artificielle (IA) dans les services financiers. Après une analyse des opportunités (e.g. gains de productivité des travailleurs) et des risques de l’IA (e.g. augmentation des fraudes, menaces cyber), elle en a discuté les enjeux règlementaires, qui impliquent la gestion des risques et la promotion de l’innovation (conception d’une définition juridique de l’IA, évaluation du cadre règlementaire existant, promotion d’un environnement concurrentiel pour les développeurs d’IA).
- Le 27 novembre, l’Office of the Comptroller of the Currency (OCC), le régulateur des national banks, a annoncé une augmentation de +16 % des frais facturés aux grandes banques (actifs supérieurs à 40 Md USD) en raison de la hausse prévue des coûts de supervision de l’agence pour l’année 2025. Les frais facturés aux autres banques sont soumis à une augmentation de +2,65 % pour prendre en compte l’inflation. Par ailleurs, l’OCC continuera d’appliquer une surcharge aux banques nécessitant des ressources supplémentaires de supervision.
- Selon la 2ème estimation du Bureau of Economic Analysis (BEA), la croissance du PIB est restée inchangée à +2,8 % en rythme annualisé au 3ème trimestre 2024 (+0,7 % sur un trimestre).
- D. Trump nomme Kevin Hassett au poste de directeur du National Economic Counil (NEC), organe d’analyse économique au sein de la Maison-Blanche. En tant que directeur du NEC, il sera chargé de porter les politiques fiscales, commerciales, et énergétiques de D. Trump avec le Treasury. K. Hassett a été le président du Council of Economic Advisors (CEA), organe de conseil économique de la Maison-Blanche (2017-2019) et conseiller principal (2020) en charge de la réponse à la crise sanitaire durant le 1er mandat de D. Trump. La nomination du directeur du NEC n’est pas soumis à un vote de confirmation du Sénat.