Publication du Service économique régional d’Abuja, réalisée avec les contributions de l'antenne de Lagos et du SE d’Accra.

Nous rappelons à notre cher lectorat que le Service économique régional d’Abuja publie régulièrement sur l’actualité économique franco-nigériane et sur ses activités dans le pays à travers sa page LinkedIn et son compte Twitter. Il en est de même pour le Service économique d’Accra, sur LinkedIn.

 

LE CHIFFRE A RETENIR

15,5 % : C’est l’inflation prévue en 2025 au Nigéria d’après le Fonds monétaire international.

FAITS SAILLANTS

Nigéria :

Les annonces de retrait malienne, burkinabé et nigérienne auront des conséquences commerciales limitées pour le Nigéria ; Face à une nouvelle dépréciation du naira, la CBN resserre sa politique macroprudentielle et poursuit le remboursement de ses arriérés en devises ; L’Etat de Lagos consacre un quart de son budget au développement des infrastructures ; Le géant néerlandais FrieslandCampina obtient une subvention de 5 M USD de la part de la Fondation Bill & Melinda Gates pour son nouveau projet dans l’industrie laitière.

Ghana :

La pénurie de cacao affecte le secteur et les transformateurs ; La BoG abaisse son taux directeur de 100 pb pour le ramener à 29 %.

 

Nigeria

Les annonces de retrait malienne, burkinabé et nigérienne auront des conséquences commerciales limitées pour le Nigéria

Le Mali, le Burkina Faso et le Niger, membres fondateurs du bloc régional en 1975, ont exprimé dimanche dernier leur souhait de sortir de la Communauté économique des États de l'Afrique de l'Ouest (CEDEAO). Certains déplorent les effets que telles annonces pourraient avoir sur ces trois économies. Ainsi Bulama Bukarti, analyste principal à l'Institut Tony Blair, de déclarer : « Le retrait du Niger, du Mali et du Burkina Faso de la CEDEAO constitue un acte de sabotage économique. S'isoler de ses voisins les plus proches au milieu d'une crise économique est profondément imprudent. »

Le Nigéria représente par exemple 30,7 % des importations africaines du Niger. Le pays dépend notamment à 70 % de l’électricité importée du Nigéria. L’entreprise publique Nigelec, seul fournisseur du pays, achète en effet cette électricité à Mainstream Energy Solutions, société privée exploitant, sous concession, les barrages hydroélectriques de Kainji (Niger State) et Jebba (Kwara State), dans l’Ouest du Nigéria. A la suite du coup d’Etat, Bola Tinubu avait pris la décision de couper l’approvisionnement du Niger, en accord avec les sanctions imposées le 30 juillet par la CEDEAO à la junte militaire.

Les effets commerciaux des trois éventuels retraits devraient à l’inverse rester limités pour le Nigéria. D’après les données de l’OEC, le poids du Mali, du Burkina Faso et du Niger dans le commerce extérieur nigérian est extrêmement faible : en 2021 ils représentent, pris ensemble, 0,4 % des exportations nigérianes et 0,1 % de ses importations.

Face à une nouvelle dépréciation du naira, la CBN resserre sa politique macroprudentielle et poursuit le remboursement de ses arriérés en devises

Le taux de change autonome nigérian (NAFEX, taux de change interbancaire) s'est établi lundi dernier à 1 414 USD/NGN, soit une chute de 45 % par rapport au taux de clôture de 975 USD/NGN du vendredi 26 janvier. Dans ces circonstances, la Banque centrale du Nigéria (CBN) a publié mercredi une circulaire intitulée « Harmonisation des exigences de déclaration sur les expositions en devises étrangères des banques », émettant de nouvelles exigences prudentielles à destination des banques. La circulaire dispose ainsi que la position ouverte nette des banques (soit, approximativement, l’actif net en devises) ne peut plus être positive, et qu'elle ne peut excéder, en valeur absolue, 20 % de la valeur des capitaux propres. Officiellement, il s’agit là de limiter l’exposition des banques au risque de change afin d'atténuer les risques pour le système financier, notamment dans le cas d’une appréciation future du naira. Les banques ont été tenues de se conformer à ces limites au 1er février, le cas échéant en se délestant de leurs actifs en devises. La CBN appliquait d’ores et déjà des seuils macroprudentiels en matière de valeur de la NOP en fonction des capitaux propres, mais la position ouverte nette pouvait être jusqu’à présent être négative comme positive.

Par ailleurs, les médias ont cette semaine cité un porte-parole de la CBN qui a déclaré que la banque avait injecté 500 M USD supplémentaires sur le marché des changes pour faire face à l'arriéré persistant des transactions vérifiées. Bien que cette information n'ait pas été confirmée par les acteurs du marché, elle fait suite à l'annonce récente de l'injection par la CBN d'environ 2 Md USD pour régler les engagements en suspens dans les secteurs de l'industrie manufacturière, de l'aviation et du pétrole.

L’Etat de Lagos consacre un quart de son budget au développement des infrastructures

Le commissaire à la Planification économique et au Budget de l’Etat de Lagos a indiqué que l’Etat fédéré consacrerait 24,3 % de son budget 2024 aux infrastructures, soit environ 550 Md NGN (578 M USD), sur un budget total de 2250 Md NGN (2,4 Md USD). Le budget 2023 dédié aux infrastructures étaient lui de 483 Md NGN. Ce montant doit notamment permettre de mener à leur terme les projets d’infrastructure de transport en cours, tels que l’achèvement des projets de métros aériens de la ligne bleue et de la ligne rouge, l’extension du réseau ferroviaire, ou encore les projets d’autoroutes de Lekki-Epe et de Lagos-Badagry. L’enveloppe doit également permettre le lancement de la construction du quatrième pont continental reliant Ikorodu à Lagos Island.

Pour rappel, le budget de l’Etat fédéral pour 2024 prévoit de consacrer 1 320 Md NGN (1,4 Md USD) aux infrastructures sur un budget fédéral de 27 500 Md NGN (28,9 Md USD), soit 5 % du budget total.

Ces sommes restent néanmoins loin du niveau requis pour répondre aux besoins en infrastructure du Nigéria et de l’Etat de Lagos. En effet, la Banque mondiale estime qu’un investissement annuel de 100 Md USD pendant 30 ans (3 000 Md USD) serait nécessaire pour combler le déficit en infrastructures. En 2020, le Plan national pour les infrastructures du gouvernement fédéral estimait de même que le pays avait besoin de 150 Md USD d’investissements par an pour répondre à ses besoins en infrastructures.

Le géant néerlandais FrieslandCampina obtient une subvention de 5 M USD de la part de la Fondation Bill & Melinda Gates pour son nouveau projet dans l’industrie laitière

Le consortium Value4Dairy, dirigé par FrieslandCampina WAMCO, une filiale locale du géant néerlandais des produits laitiers FrieslandCampina, a récemment obtenu une subvention de 5 M USD de la Fondation Bill & Melinda Gates (soit 50 % du financement total du projet). L'objectif de ce projet est de soutenir la production laitière à petite échelle à travers l’établissement de trois zones laitières autonomes dans les États d'Oyo, d'Osun et d'Abuja. Gérées par des coopératives agricoles locales, ces zones serviront de centres de formation pour 10 000 éleveurs et petits exploitants, et ultérieurement pour 40 000 producteurs laitiers. Chaque zone sera équipée d'entrepôt, de points de vente d'intrants laitiers et de points de collecte de lait, en vue d’être transformé en produits laitiers nutritifs.

Lancé en avril 2021, le Consortium Value4Dairy est une collaboration entre quatre partenaires : FrieslandCampina WAMCO (filiale de FrieslandCampina), URUS (entreprise d'insémination artificielle, de génétique et des systèmes de gestion des troupeaux), Barenbrug (entreprise de semences d'herbe et de fourrage) et Agrifirm (entreprise opérant dans le domaine de la nutrition animale et de l'agriculture).

Il est important de noter que le Nigeria importe actuellement plus de 75 % de ses besoins en lait, estimés à 2,2 millions de tonnes par an.

 

Ghana

La pénurie de cacao affecte le secteur et les transformateurs

Une pénurie de fèves de cacao oblige des usines de transformation de cacao à interrompre leurs opérations. Le Ghana, classé deuxième producteur mondial de fèves de cacao après la Côte d'Ivoire, fait face à une diminution continue de sa production agricole au cours des deux dernières années. Cette baisse est attribuée aux conditions météorologiques défavorables, aux maladies spécifiques aux cacaoyers et aux activités d'extraction illégale d'or qui empiètent sur les plantations. Un rapport d’Oxfam en 2023 indique que près de 90 % des producteurs de cacao gagnent seulement 2 USD par jour, les poussant à louer leurs terres à des mineurs illégaux ou à s'adonner à l'exploitation minière artisanale.

Le Conseil du cacao du Ghana (COCOBOD) prévoit une production d'environ 800 000 tonnes pour la saison 2023/2024. Cependant, les experts de l'industrie anticipent une récolte plus faible, estimée à environ 570 000 tonnes – la plus faible depuis 2002. L'année précédente, un déficit de production a conduit le Ghana à ne pas respecter ses contrats d'approvisionnement, entraînant un manquement de 44 000 tonnes métriques, une situation inédite pour le pays.

La BoG abaisse son taux directeur de 100 pb pour le ramener à 29 %

La Banque du Ghana (BoG) a abaissé son taux directeur de 100 points de base, le ramenant à 29 %, marquant la première baisse en deux ans. Cette décision est motivée par l’amélioration des indicateurs macroéconomiques, particulièrement la diminution du taux d’inflation. Toutefois, il a été souligné que le maintien d’une politique monétaire restrictive demeure crucial pour consolider la désinflation.

En effet, le taux d’inflation a enregistré une baisse de plus de 30 points en 2023, atteignant 23,2 % en décembre 2023 en glissement annuel. Les prévisions d’inflation indiquent une poursuite de la désinflation en 2024, pour atteindre 15 % à la fin de l’année 2024, en revenant progressivement à l’objectif de moyen terme de 6 à 10 % en 2025.

Le taux directeur de la BoG avait atteint son pic en juillet 2023 à 30 %, maintenu jusqu’en janvier 2024, ce qui le positionnait comme le plus élevé en Afrique. Des taux élevés restreignent considérablement l’accès au crédit, entraînant des taux d’intérêts sur les prêts commerciaux qui oscillent autour de 32 % en moyenne, fermant quasiment l’accès aux crédits pour les particuliers comme pour les entreprises.