Cette veille hebdomadaire présente l'actualité économique et financière en Suisse du 27 décembre au 8 janvier 2024.

Faits saillants                                                                 

  • Participation du Président de la République au Forum économique de Davos (15-19 janvier)
  • Inquiétudes croissantes à l’égard du franc fort
  • Initiative pour une 13ème rente AVS : votation le 3 mars

 

Macroéconomie

  • Forum de Davos : L’édition 2024 du Forum économique mondial se tiendra du 15 au 19 janvier. Le record du nombre d’inscrits de l’an dernier devrait être battu, avec plus de 2800 participants attendus, en majorité issus du secteur privé (entreprises et organisations non-étatiques). Des personnalités politiques de haut rang, dont les présidents ukrainien et israélien ainsi que les premiers ministres qatari et chinois, sont également attendues. Les conflits en Ukraine et au Moyen-Orient seront au cœur des échanges. Le Président de la République, Emmanuel Macron, participera également au Forum, une 1ère depuis 2018 (visio-conférence en 2021). Cette 54ème édition dont le thème est « Restoring trust », devrait voir abordées des discussions autour des défis du changement climatique, de l’intelligence artificielle, de l’emploi ou encore de la place des pays BRICS, alors que ceux-ci viennent de s’élargir à 10 pays. Six des sept Conseillers fédéraux devraient être présents et les relations entre la Suisse et l'UE devraient constituer un thème central pour le pays hôte.

  • Franc fort : Après s’être appréciée de +6,5% par rapport à l’euro en nominal entre le début et la fin de l’année 2023, la devise suisse continue de suivre une tendance ascendante. Fin décembre, le franc a atteint son plus haut niveau face à l’euro depuis 8 ans (à 1 EUR=0,9281 CHF). Dans ce contexte, Swissmem, la faîtière de l’industrie des machines, des équipements et de la métallurgie a fait part de sa vive inquiétude en qualifiant l’appréciation du franc de «dramatique», estimant que la compétitivité de ses membres était «gravement menacée», alors que la conjoncture économique internationale reste atone. Pour mémoire, le secteur représenté par Swissmem exporte 80% de ses biens (près de 30% des exportations suisses totales), orientées pour moitié vers le marché unique.

  • Chômage : Selon le Secrétariat d'État à l’Economie (SECO), le taux de chômage s’est établi en 2023 à son niveau le plus faible depuis 22 ans, à 2,0 % en moyenne contre 2,2 % en 2022. Il a atteint un seuil historiquement bas à la fin du printemps avant de remonter du fait de la dynamique conjoncturelle plus faible, à 2,3 % en décembre. Les offices régionaux de placement comptabilisaient 107 000 chômeurs inscrits fin 2023. Dans ce contexte, l’assurance-chômage a enregistré un excédent de recettes de 2,79 Mds CHF (2,31 Mds CHF en 2022).  Au sens de la définition du Bureau international du travail (BIT), le chômage touchait 4,2 % de la population active suisse au 3ème trimestre de 2023.

  • Indice PMI : Les enquêtes de conjoncture de décembre indiquent que les perspectives de croissance de la Suisse s’améliorent légèrement, dans un contexte toutefois de croissance faible (1,1% prévu par le SECO pour 2024). L’indice PMI manufacturier augmente légèrement mais reste faible, inférieur au seuil de croissance de 50 points. L’indice PMI des services, plus axé sur le marché intérieur, a en revanche bondi pour atteindre son plus haut niveau depuis juin 2022. Les derniers signaux conjoncturels de la Banque nationale suisse (BNS) confirment que les entreprises du secteur des services prévoient d’augmenter leurs effectifs.

  • Droits de douane : Depuis le 1er janvier 2024, la Suisse ne perçoit plus de droits d'importation sur les biens industriels de toute origine. La suppression des droits de douane industriels avait été approuvée par le Parlement en octobre 2021 avec pour finalité de réduire la cherté des prix et de gagner en compétitive en limitant le coût des entrants pour les entreprises industrielles suisses. Selon le SECO, cette mesure génèrerait un gain de bien-être total estimé à plus de 860 M CHF par an. En effet, si l’Etat ne percevra plus de recettes directes sur ces importations, les consommateurs devraient eux bénéficier de baisses de coûts d’achats et les entreprises pourront dégager des gains de productivité. Les produits industriels comprennent les matériaux utilisés dans les processus de production, tels que les biens d'équipement, les matières premières, les produits semi-finis et les machines, ainsi que les biens de consommation classiques. Les produits agricoles ne sont pas concernés. La suppression des droits de douane vient souligner le caractère particulièrement daté de l’accord de libre-échange de 1972 avec l’UE, couvrant pour l’essentiel les seuls biens industriels.

  • Fiscalité : Les nouveaux taux de la taxe sur la valeur ajoutée sont entrés en vigueur le 1er janvier. Le taux normal augmente à 8,1 % (+0,4 pt), le taux réduit à 2,6 % (+0,1 pt) et le taux spécial pour les prestations du secteur de l’hébergement à 3,8 % (+0,1 pt). Ces changements sont la conséquence du résultat favorable de la votation du 25 septembre 2022 relative au projet « AVS 21 » qui vise à pallier le déficit prévu de l’AVS.

    Par ailleurs, l'initiative « pour l'avenir », soutenue par les Jeunes socialistes et les Jeunes verts visant à mettre en place un impôt de 50 % sur les successions de plus de 50 M CHF en faveur d'une « transformation écologique de l'économie », aurait déjà recueilli plus de 130 000 signatures, ouvrant la voie à un dépôt auprès de la chancellerie. Pour mémoire, une initiative similaire d’introduction d’un impôt sur les successions au plan national avait été balayée par 71 % des Suisses, il y a sept ans.

  • Inflation : Selon l’office fédéral de la statistique (OFS), le taux d’inflation s’est établi à 2,1 % en moyenne en 2023, conformément aux prévisions du SECO et de la Banque nationale suisse (BNS), après 2,8 % en 2022. En décembre, il s’est élevé à 1,7% en glissement annuel. L’inflation pourrait reprendre une trajectoire ascendante en ce début d’année du fait de plusieurs hausses de prix pour les loyers, le taux de TVA, les tarifs d’électricité et les transports publics (cf. veilles précédentes).

 

Secteur financier

  • UBS / Crédit Suisse : La reprise de Crédit Suisse par UBS s’accompagne d’une suppression progressive de postes. A la fin de l’année 2023, on comptait déjà le départ de 13 000 personnes pour un effectif mondial de 116 000 employés. Les réductions d'effectifs devraient se poursuivre en 2024, alors qu'UBS a prévu de réduire largement la voilure dans la banque d'investissement de son ex-concurrente, source récurrente de problèmes dans le passé.

 

Secteur non financiers

  • Initiative pour une 13ème rente AVS : Le 3 mars prochain, le peuple suisse se prononcera sur la « 13ème rente AVS (assurance-vieillesse et survivants) ». Les syndicats ont lancé leur campagne et l'initiative paraît avoir de réelles chances de succès lors de la votation. De plus en plus d’éléments de partis du bloc bourgeois soutiennent désormais l’initiative aux côtés de la gauche et des Verts : la branche genevoise de l'UDC a ainsi décidé d’appeler à voter oui, une intention aussi annoncée par des personnalités du Centre. Ils suivent ainsi l’avis de la majorité de leurs militants (69 % des sondés au Centre et 65 % à l'UDC en faveur). Ces partisans d’une 13ème rente mensuelle, qui se traduirait par une hausse de la pension annuelle d’environ 8 %, soutiennent que les personnes âgées qui doivent se contenter d'une rente AVS subissent de plus en plus un recul de leur pouvoir d’achat. De leur côté, les opposants affirment que cette réforme mettra les retraites des futures générations en péril : si l’initiative pourrait être mise sur pied sans autre financement à court terme, les finances de l'AVS étant équilibrées, ces dernières pourraient être en déficit après 2030. Une prévision jugée trop pessimiste voire instrumentalisée selon Pierre-Yves Maillard, président de l'Union syndicale suisse.

  • Relations UE-Suisse : Suite à la présentation par le Conseil Fédéral du projet de mandat de négociation avec l’Union Européenne, différents acteurs ont fait connaître leur position. Jacques Gerber, président de la Commission Europe des cantons est favorable à des négociations, affirmant que le statu quo actuel se traduirait par la poursuite de l’érosion des bilatérales. Les gouvernements des cantons tenteront d’adopter une position commune sur le projet de mandat le 2 février prochain. En revanche, l'Union syndicale suisse ne soutient pas, à ce stade, le mandat de négociation dans sa version actuelle, refusant en particulier la libéralisation du trafic ferroviaire et l'ouverture du marché de l'électricité et jugeant insatisfaisante la question de la protection des salaires.

  • Transports : Afin de renforcer le transport ferroviaire de marchandises, le Conseil fédéral a proposé au Parlement de libérer trois enveloppes financières pour un montant global d’aides de 500 M CHF. 180 M CHF doivent aider à introduire une nouvelle technologie, l’attelage automatique numérique (DAC, de l’anglais « digital automatic coupling ») censé simplifier le fret, le rendre plus rapide et plus économique. Ce couplage numérique des wagons aura une certification de l’UE ; le Conseiller fédéral Albert Rösti, en charge des transports notamment, envisage une collaboration avec l'Allemagne et l'Autriche à ce sujet. Le Conseil fédéral propose également 260 M CHF pour soutenir sur quatre ans le transport par wagons complets isolés (WCI). Ces trains de marchandises assemblés à partir de différentes voitures commandées par plusieurs entreprises servent avant tout pour les trajets intérieurs. Exploités actuellement par CFF Cargo, ils remplissent des fonctions importantes dans le domaine logistique et garantissent l’approvisionnement du pays mais ne sont pas viables économiquement sous leur forme actuelle. Pour continuer d’encourager le fret, qui représente 40 % du transport de marchandises, le Conseil fédéral prévoit donc ce « coup de pouce » financier temporaire au transport par WCI avec l’objectif qu’il parvienne à s’autofinancer à moyen terme. Enfin, des aides pour couvrir d’autres coûts, notamment de transbordement, sont prévus à hauteur de 60 M CHF par an.