Toute l'actualité économique et financière hebdomadaire de l'Arabie Saoudite, du Bahrein, des Emirats arabes unis, du Koweit, d'Oman, du Qatar et du Yémen.

 SERAD

 

Edito - Quatre "bonnes résolutions" pour 2023

Les économies développées pourraient connaître cette année la récession la plus anticipée de l’histoire. Pour le Golfe, l’euphorie liée à l’envolée des prix du baril ne se répétera probablement pas mais la région devrait quand même continuer à surperformer le reste du monde. Le FMI prédit une croissance de 3,6 % en 2023 (après 6,5% en 2022), contre 2,3% à l’échelle mondiale (3% l’année dernière).

Dans ce contexte, à quoi pourraient ressembler les "bonnes résolutions" des pays du Golfe ?

1- Hydrocarbures : maintenir un prix du baril "dans la monnaie" compatible avec le maintien d'une croissance satisfaisante. Comme nous l’écrivions avant les fêtes, les incertitudes persistent sur l’évolution des prix de l’énergie. La réouverture en Chine pourrait jouer à la hausse mais la récession en Europe et aux Etats-Unis joue à la baisse. Côté offre, incertitudes également sur la stratégie que va adopter l’OPEP+. Pour les pays du Golfe, ce qui comptera in fine sera le maintien des prix au-dessus de leur point mort budgétaire : 63 USD le baril en moyenne, tout en ménageant la croissance mondiale dont ils ont tant besoin. 

2- Résister à la tentation de la dépense et réformer. En 2022, le train des réformes structurelles lancé pendant la pandémie a rencontré celui des recettes exceptionnelles liées à l’envolée des prix du pétrole. Le risque est que le second arrête le premier. Pour l’instant, les revenus exceptionnels ont surtout permis aux pays de la zone de se désendetter. Ces derniers ont également annoncé des plans d’investissement qui permettront d’accélérer leur diversification. S’agissant des réformes, le cap semble être maintenu ; hormis peut-être au Koweït où la propension redistributrice est forte compte tenu des équilibres politiques internes.

Dans ce contexte de réforme et de rentrées exceptionnelles, le rôle des fonds souverains va encore s’accentuer. Les études parues ces dernières semaines confirment l’envolée de leurs actifs sous gestion alors que la liquidité diminue dans le reste du monde. La concurrence pour lever auprès des fonds souverains, qui a déjà augmenté ces derniers mois, va donc devenir encore plus féroce. Et les fonds se renforcent sur toutes les classes d'actifs, y compris la dette privée pour combler les manques du secteur bancaire.

3 - Se faire de nouveaux amis, y compris parmi les ennemis de ses amis, sans perdre ses bons amis. Les pays du Golfe vont continuer cette année à recalibrer leurs relations internationales. Les visites successives de Joe Biden et de Xi Jinping à Riyad en 2022 donnent une idée des rééquilibrages et des changements d’alliances économiques à l’œuvre. Le contexte de la présidence indienne du G20, après celle de l’Indonésie, devrait alimenter le pivot asiatique de la région. Le risque est que progressivement ces changements d’alliance accélèrent la fracturation entre les “économies du Nord”, qui ont voté les sanctions contre la Russie, et les “économies du Sud” qui ont voté contre ou se sont abstenues, ces dernières étant perçues par le Golfe comme les principaux réservoirs de croissance des décennies à venir.

4- Convaincre qu'une puissance pétrolière peut être en même temps un champion de la transition énergétique. Après la COP égyptienne, ce sera au tour des Emirats d’accueillir l’événement en novembre. La réussite de cette conférence va dépendre des discussions des prochains mois. L’enjeu pour les EAU ? Convaincre le monde qu’il a encore — un peu — besoin de pétrole. 

 

Graphique de la semaine - Des économies toujours dépendantes aux hydrocarbures (2021)

Des

 O&G

Sources : FMI (articles IV récents et WEO d'octobre 2022), SER 
Pour les exportations des EAU, sont comptabilisées les réexportations (par le FMI)

Pétrole et gaz

Brent (cours au 06/01/2023 à 13h GST) :  79 USD 
Tendance baissière depuis début 2023

Les marchés pétroliers commencent l’année 2023 en berne. Après avoir clôturé 2022 à un peu moins de 86 USD le baril, les prix à terme du Brent avoisinent désormais 79 USD, en ce vendredi 6 janvier 13h GST. 

L’assouplissement de la politique sanitaire restrictive chinoise a souvent été analysé en 2022 comme l’un des principaux facteurs pouvant pousser les prix de l’or noir à la hausse. La réalité est plus complexe puisque les prix pétroliers n’ont pas durablement augmenté alors même que la Chine a désormais enlevé les principales mesures de sa stratégie zéro-covid. Pékin fait actuellement face à une recrudescence des cas d’infection, ce qui restreint les prévisions de demande pétrolière chinoise à court terme. Les yeux se tournent également vers Washington et ici aussi, les perspectives économiques sont assez fades. En outre, la FED a maintenu en ce début d’année une posture assez hawkish, ce qui laisse envisager de futures hausses de taux ou, au minima, un certain statu quo en 2023.

Peu d’informations côté offre, si ce n’est que face à ce faible dynamisme, le géant pétrolier Saudi Aramco aurait abaissé de 1,45 USD par baril le prix de son brut exporté vers l’Asie en février (selon Bloomberg). Du côté de Moscou, les sanctions européennes semblent progressivement agir puisque l’agence de notation S&P souligne que les exportations russes de brut en mer ont atteint leur plus bas niveau depuis deux ans en décembre (à noter que certains ports n'ont pas fonctionné à pleine capacité pour d'autres raisons, comme le port de Kozmino qui a été à l’arrêt une dizaine de jours). A voir si cette tendance se poursuit et affecte véritablement les prix de l’or noir en 2023. 

 

Brèves économiques

Région

Les fonds souverains de la Péninsule arabique ont pleinement profité des cours pétroliers élevés en 2022, selon le rapport annuel 2023 du Global SWF. Les investisseurs souverains du Golfe auraient ainsi investi près de 83 Md USD en 2022, contre 44 Md USD en 2021, 49 Md USD en 2020 et 39 Md USD en 2019. Selon cette dernière édition, publiée début janvier, cinq des dix investisseurs souverains les plus actifs l’an passé étaient originaires du Golfe (ADIA, PIF, Mubadala, ADQ, QIA). Toujours selon le rapport, ces cinq fonds souverains du Golfe ont surtout investi dans des marchés matures en 2022 (en Amérique du Nord pour ADIA et PIF, en Europe pour Mubadala et QIA) alors qu’ADQ a un tropisme assumé autour des économies émergentes. Autre élément qui ressort de cette publication : la forte hausse de la valeur des actifs sous gestion de nombreux fonds souverains du Golfe (en comparaison avec l’édition de janvier 2022 du Global SWF). ADIA gèrerait ainsi un peu moins de 1000 Md USD d’actifs sous gestion fin 2022 (contre 829 Md USD fin 2021), KIA 769 Md USD (contre 693 Md USD fin 2021), PIF 620 Md USD (contre 480 Md USD fin 2021), QIA 450 Md USD (contre 366 Md USD fin 2021), Mubadala 284 Md USD (contre 243 Md USD fin 2021) et ADQ 157 Md USD (contre 110 Md USD fin 2021).

Les indices des directeurs d’achat (PMI) du mois de décembre pour les trois principales économies du CCG (Arabie saoudite, EAU, Qatar) ont été publiés et reflètent des dynamiques différentes. Le PMI des EAU (par S&P) continue de baisser à 54,2 en décembre (contre 54,4 en novembre et 56,6 en octobre). Ce dernier reste donc toutefois supérieur au seuil de 50 et reflète la confiance des directeurs d’achat dans l’expansion de l’activité manufacturière. Même dynamique pour l’indice de l’Arabie saoudite qui, selon Riyad Bank, baisse à 56,9 (un niveau toutefois toujours très positif) contre 58,5 en novembre. Le PMI du Qatar (données d'enquête du Qatar Financial Centre), augmente quant à lui à 49,6 en décembre et se rapproche donc du seuil de 50. Selon les directeurs d’achat, les perspectives demeurent donc globalement positives dans le Golfe.

Arabie saoudite

Le Programme saoudien pour le développement et la reconstruction du Yémen (SPDRY) a signé un accord de 7,3 M USD avec le gouvernement yéménite et la Banque islamique de développement (BIsD) afin de soutenir le développement durable du Yémen. Un montant peu important mais qui témoigne de la volonté croissante saoudienne de développer la coopération économique bilatérale.

Saudi Aramco a réduit le prix de ses bruts qui seront exportés en Asie en février, étant donné le ralentissement de la demande observé par l’entreprise saoudienne. Selon Bloomberg, le produit phare Arab Light a ainsi été abaissé de 1,45 USD par baril par rapport au prix de ce mois-ci. Pour mémoire, environ 60 % des exportations saoudiennes de pétrole partent vers l’Asie (Chine, Japon, Corée du Sud, Inde).

Le promoteur immobilier saoudien ROSHN - détenu par le fonds souverain PIF - a signé des accords de facilités de crédit d'une valeur de 6 Md SAR (1,6 Md USD) avec trois des principales banques du Royaume (Saudi British Bank, Bank Albilad, and Al Rajhi).

Bahreïn

Aluminium Bahrain (Alba) a établi un nouveau record historique de production de 1 600 111 tonnes métriques (MT) en 2022, soit une augmentation de 38 889 MT par rapport aux 1 561 222 MT de 2021 (+2,5 % en glissement annuel). Alba est l'une des plus grandes fonderies d'aluminium au monde, une industrie très importante dans le Royaume (environ 12 % du PIB avant le covid-19).

Négociations autour du futur budget 2023-26. Muhammad Al-Ahmad, le président de la commission des finances de la Chambre des représentants, a récemment révélé que les députés exigeront un prix baril de pétrole de 70 USD dans le prochain budget, au lieu de la vision conservatrice du gouvernement sur le prix actuel du baril de pétrole qui n'est que de 60 dollars. Selon le président de la commission, les députés ont également exigé l'inclusion d'une priorité dans le programme du gouvernement visant à élever le niveau de vie du citoyen (comprenant notamment la poursuite de l'augmentation des retraites, la délivrance d'une carte de rationnement pour les produits de base à un prix subventionné et fixe ...).

GFH acquiert une part majoritaire dans la société américaine Big Sky Asset Management, un gestionnaire d'actifs immobiliers spécialisé sur le secteur de la santé. Cette opération renforce la présence de GFH (16,4 Md USD d’actifs et d’actifs sous gestion) aux États-Unis, puisque la société d'investissement bahreïnie avait déjà acquis, en mai 2022, la société américaine SQ Asset Management.

Emirats arabes unis

Le souverain de Dubaï Sheikh Mohammed bin Rashid Al Maktoum, également vice-président et Premier ministre des EAU, a présenté le programme “D33”, le programme économique de Dubaï d'un montant de 8 700 Md USD s'étendant sur la prochaine décennie. Ce montant pharaonique ne doit toutefois pas être vu comme l’investissement prévu par l’Emirat d’ici 2033, mais comme la somme de plusieurs objectifs économiques chiffrés. Ce programme prévoit ainsi de doubler le commerce et les investissements étrangers (IDE entrants) d'ici 2033 pour renforcer sa position en tant que centre financier à l'échelle mondiale. La mise en place de ce programme intervient alors que Dubaï fait face à une concurrence régionale accrue (notamment de Riyad) afin d’attirer capitaux et entreprises.

Le géant émirien des énergies renouvelables Masdar s'est entendu avec le ministère yéménite de l'Electricité et de l'Energie pour construire une centrale solaire d'une capacité de 120MW à Aden. Il s'agit du premier projet de cette ampleur en matière d'énergie propre au Yémen. Depuis le début de la guerre civile, l'énergie solaire est devenue la principale source d'énergie pour les ménages yéménites.

Le géant pétrolier ADNOC a annoncé l'allocation d'un budget de 15 Md USD pour des projets de décarbonation de ses opérations d'ici 2030. Troisième pays producteur au sein de l'OPEP, les EAU misent aujourd'hui sur les projets d'énergie propre, de capture et de stockage du carbone, ainsi que d'efficacité énergétique pour redorer leur blason, notamment en vue de la COP28 qui se tiendra en fin d'année à Dubaï.

Le fonds souverain aboudhabien ADQ poursuit ses achats à l’international et a récemment acheté les parts de plusieurs fonds et actionnaires pour un montant estimé à 230M USD pour acquérir l'hôtel Reykjavik Edition à Austurhöfn, en Islande. Les pourparlers auraient débuté il y a six mois. L'hôtel continuera à être exploité par Marriott International.

Le fonds souverain Mubadala (284 Md USD en gestion) et Alpha Dhabi Holging (filiale de IHC, la première capitalisation d’ADX) ont annoncé former une coentreprise afin d’investir jusqu’à 9 Md AED (2,5 Md USD) sur cinq ans dans des opportunités de crédit. Mubadala détiendra 80 % des parts de la coentreprise et Alpha Dhabi les 20 % restants. En outre, les deux investisseurs vont s’associer avec le gestionnaire d’actifs Apollo. Selon l’agence officielle émirienne WAM, le crédit privé en tant que classe d’actifs gagne actuellement du terrain dans la région étant donné les solides rendements générés sous fonds de pressions inflationnistes.

L'entreprise allemande Uniper et le leader émirien des énergies propres Masdar s'entendent pour développer une usine d'hydrogène vert aux EAU. Alimentée par un complexe solaire d'une capacité de 1,3GW, l'usine devrait entrer en service en 2026. Pour rappel, les EAU accueilleront la prochaine COP 28 fin 2023 et multiplient donc les annonces en matière d'environnement. Le pays a également instauré des objectifs environnementaux ambitieux dont la neutralité carbone en 2050. Quant à Masdar, l’entreprise souhaite avoir une capacité d'énergie renouvelable d’au moins 100 GW de capacité d'ici à 2030 (contre environ 20 GW actuellement).

Afin de conserver son attractivité face aux concurrents de la région dans le secteur des affaires et du tourisme, l'émirat de Dubaï a assoupli sa législation concernant l'alcool, en supprimant la taxe qui s'élevait à 30% et en rendant gratuite la licence permettant d'acheter de l'alcool dans l'émirat.

Koweït

KIPCO (Kuwait Projects Company) a annoncé avoir finalisé son émission obligataire senior non garantie de 165 M KWD (538 M USD) sur six ans. Il s'agit de la plus importante émission obligataire libellée en KD à ce jour, reflétant la confiance des investisseurs dans la solidité du crédit sous-jacent de KIPCO. Les obligations, arrivant à échéance en décembre 2028, étaient disponibles en tranches à taux fixe et variable, la tranche flottante attirant 67 % de l'allocation. L'obligation à taux fixe verse aux investisseurs un coupon de 6,75 % par an, tandis que le taux variable verse aux investisseurs un taux de coupon de 3 % par an au-dessus du taux d'actualisation déclaré par la Banque centrale. Kamco Invest et Gulf Bank sont les Joint Lead Managers de l’opération.

L’éducation sera le premier poste de dépense dans le budget pour l’année en cours 2022-23 (avec une allocation totale d’environ 2,9 Md KWD (9,5 Md USD contre 8,8 Md USD en 2021-22). Les dépenses de santé viennent en deuxième position, avec une dotation de 2,7 Md KWD de dinars. Les dépenses de logement arrivent en troisième position, avec des dotations totales de 2,5 Md KWD, tandis que les sommes totales allouées aux dépenses de défense dans le budget général s'élèvent à 2,3 Md KWD.

Le satellite KuwaitSat-1 a été lancé mardi à bord d'une fusée SpaceX, portant avec elle les espoirs et les rêves de la jeunesse koweïtienne d'une exploration spatiale plus poussée, a déclaré dimanche le directeur opérationnel du projet national pour le premier satellite koweïtien, le Dr Ahmad Al-Kandari.

Oman 

Le sultan d'Oman a ratifié le budget 2023 avec un déficit de 1,3 Md OMR (3,4 Md USD), soit 3 % du PIB. Le budget 2023 prévoit des recettes de 10,05 Md OMR, soit 5 % de moins qu'en 2022, et des dépenses de 11,35 Md OMR, soit 6,4 % de moins que l'année précédente. Enfin, le budget 2023 est basé sur un prix de 55 USD le baril.

Oman prévoit de créer prochainement une société gazière intégrée pour gérer tous les actifs de gaz naturel. Selon l'agence de presse omanaise, cette initiative améliorera les agrégats économiques du pays en excluant du budget général de l'État les coûts d'achat et de transport du gaz.

Qatar

QatarEnergy et la société japonaise Qatar Petroleum Development Company (QPD) ont signé un nouvel accord qui prolonge de 5 ans le partenariat de développement et de production des champs pétroliers Al-Karkara et A-Structures, situés dans les eaux territoriales de l'État du Qatar. En vertu de ce nouvel accord qui débute le 23 décembre 2022, et qui réitère un précédent accord signé en décembre 1997, QPD continuera d'agir en tant qu'opérateur des champs pétroliers.

À la suite de l'accord conclu entre Baladna et plusieurs entreprises malaisiennes en vue d'établir conjointement une ferme laitière intégrée de pointe en Malaisie, le roi de Malaisie Al-Sultan Abdullah Ri'ayatuddin Al-Mustafa Billah Shah a rendu visite à Baladna Farms. Baladna est le leader du marché des produits laitiers et des boissons au Qatar. Le groupe exporte des produits fabriqués dans toute la région, notamment au Yémen, en Afghanistan, en Irak et à Oman.

D’après un sondage BBC Sport clôturé ce 25 décembre, la Coupe du Monde du Qatar a été élue à 78% meilleure coupe du monde du 21ème siècle. Les autres éditions de la Coupe du monde ont obtenu entre 3 % (2010 en Afrique du Sud) et 6 % (2002 au Japon et en Corée du Sud). Le nombre de votants n’a pas été divulgué.

Le Comité olympique du Qatar (QOC) a annoncé le calendrier des événements sportifs pour 2023, qui comprend 14 grands événements internationaux. Le pays accueillera entre autres la coupe du monde FIBA 3×3, le championnat du monde de judo et la Coupe du Monde de gymnastique artistique.