Depuis le début de l’année, les chocs extérieurs (hausse du prix de l’énergie, durcissement de la politique monétaire aux États-Unis) et intérieurs (refinancement de la dette en monnaie locale et devises, entre autres) se succèdent et s’entremêlent, ce qui pèse lourdement sur la performance de l’économie argentine et la confiance du marché. Pour tenter de le rassurer, les autorités monétaires ont annoncé le 21 juillet des mesures visant à générer des entrées et à limiter les sorties de devises.

Depuis le début de l’année, les chocs extérieurs (hausse du prix de l’énergie, durcissement de la politique monétaire aux États-Unis) et intérieurs (refinancement de la dette en monnaie locale et devises, démission surprise de Martín Guzmán) se succèdent et s’entremêlent, pesant lourdement sur la performance de l’économie argentine et la confiance du marché. Si l’activité économique résiste en mai (+7,4% sur un an), sa progression en rythme mensuel, corrigée des variations saisonnières, demeure faible (+0,3% après +0,5% en avril et -0,4% en mars). Qui plus est, les entreprises et les ménages pâtissent de l’accélération de l’inflation (+64% pour les prix aux consommateurs et +57% pour les prix de gros en juin) et de l’impressionnant décrochage du peso. En effet depuis début juillet, la devise argentine a perdu 41% de sa valeur sur le marché parallèle dit « blue » en dépit des interventions massives de la Banque centrale (657 MUSD depuis le début du mois). De la même manière, l’accélération du rythme de dépréciation du peso sur le change officiel (autour de 5% en rythme mensuel) n’a pas réussi à réduire les écarts des taux, désormais à 160% avec le blue le 22 juillet. Dès lors, le marché craint que les effets de second tour sur les prix causés par la chute de la valeur du peso et les revalorisations salaires conduisent à un renforcement de la spirale inflationniste. A cet égard, les prévisions d’inflation pour la fin de l’année sont désormais comprises entre 75 et 90%. La forte volatilité s’explique aussi par les incertitudes sur l’orientation de la politique économique et cambiaire, face aux craintes d’un durcissement des conditions d’accès au marché de change suite aux difficultés à reconstituer les réserves internationales [1] (40,1 Mds USD à la mi-juillet ; -3,0 Mds USD depuis fin mars). Et pour cause, le compte extérieur est sous pression en raison de l’alourdissement de la facture énergétique (6,6 Mds USD au 1er semestre 2022, versus 2,3 Mds USD sur la même période en 2021). Conséquence, l’excédent commercial s’est réduit à 3,1 Mds USD, versus 6,7 Mds USD un an plus tôt.

Pour tenter de rassurer les marchés, les autorités monétaires ont annoncé dans la soirée du 21 juillet, des mesures de deux ordres. D’une part, celles visant à générer des entrées de devises à travers l’accès au marché de change pour importer les intrants des produits destinés à l’exportation et la possibilité pour les non-résidents de changer leurs devises au taux de change financier dit MEP (314 pesos/USD) dans la limite de 5.000 USD. D’autre part, celles visant à limiter les sorties de devises et réduire le cours du taux boursier dit CCL (326 pesos/USD) en imposant un délai de trois mois entre les opérations sur les titres Cedears [2] et la demande d’accès au marché de change et en plafonnant la détention de ces titres à 100.000 USD. Cette limitation obligera certains détenteurs de ces titres à déboucler leurs positions. Les autorités argentines se veulent également rassurantes sur les finances publiques en annonçant un déficit primaire à 1% du PIB à la fin juin, en ligne avec l’objectif du programme du FMI pour le 1er semestre. L’accalmie pourrait toutefois être de courte durée. En effet, le marché reste préoccupé par les pressions sur les réserves de changes (facture énergétique, dépenses à l’étranger des résidents estimées à 600 MUSD par mois) et la perspective de nouvelles mesures pour contraindre les exportateurs de soja à écouler leurs stocks. Signe de cette nervosité, le risque-pays mesuré par JP Morgan a bondi à 2.913 points (+569 points depuis début juillet), au plus haut depuis la mi-mai 2020.



[1] Les réserves nettes sont estimées à 2,5 Mds USD, soit un niveau bien inférieur à l’objectif d’accumulation de 6,4 Mds USD à la fin septembre établi dans le programme avec le FMI. 

[2] Les certificats des entreprises étrangères libellés en pesos peuvent être convertis à travers des opérations boursières dites CCL.