La place financière de Singapour : évolutions et enjeux
Selon le dernier Global Financial Center Index 2022, Singapour est classée 6ème place financière mondiale et 3ème en Asie, derrière Hong Kong et Shanghai, mais devant Tokyo. Depuis l’indépendance en 1965, le gouvernement singapourien a fait du développement du secteur financier un axe stratégique de sa politique : en 2021, celui-ci pèse près de 16% du PIB, illustrant le poids qu’il occupe dans l’économie. La cité-État est unanimement reconnue pour son excellence et son savoir-faire dans le domaine bancaire, l’assurance et la gestion d’actifs. Son marché des changes est le 3ème mondial derrière Londres et New-York en chiffre d’affaires mais l’étroitesse de son marché domestique ne lui permet pas d’avoir une capitalisation boursière à la hauteur des autres grandes places financières. Dans la compétition avec Hong-Kong, la cité-Etat peut néanmoins faire valoir sa stabilité politique et économique pour attirer davantage de capitaux ainsi que son cadre réglementaire favorable pour la gestion d’actifs. Le principal enjeu pour l’Autorité monétaire de Singapour est de s’adapter aux transformations à venir du paysage de la finance mondiale (Fintech, finance durable) et de parvenir à favoriser l’innovation tout en l’encadrant.
I. Le succès de la place financière de Singapour est l’aboutissement d’une politique proactive des autorités depuis l’indépendance de la cité-État en 1965
Les premiers signes d’une financiarisation de l’économie de Singapour remontent à l’époque coloniale. Comptoir commercial stratégique pour l’Empire britannique, l’offre de services financiers tels que le change, l’assurance ou le financement maritime se révélèrent rapidement nécessaires pour l’activité de son port. C’est néanmoins à partir de l’indépendance, en 1965, que Singapour développe véritablement son secteur financier. L’administration Lee Kuan Yew a tout mis en œuvre dans cette transformation, d’abord via l’autorisation de la finance offshore (autorisation des activités bancaires en devises, séparées des activités en dollars singapouriens), la mise en place d’un régime fiscal compétitif, l’ouverture aux banques étrangères (d’abord pour les activités offshore) puis la libéralisation progressive des flux de capitaux. La position géographique et le fuseau horaire de Singapour ont permis l’essor, dès les années 70, d’un marché des changes comblant les heures d’inactivité des marchés américain et européens – l’Asian Dollar Market (ADM), équivalent asiatique du marché Eurodollar- qui a permis à Singapour de devenir le 3ème marché des changes mondial. À partir des années 90, Singapour s’est imposée comme emplacement privilégié des sièges des entreprises étrangères opérant en Asie du Sud-Est. Singapour a su tirer parti de ses excédents courants structurels et du développement de l’Asie du Sud-Est pour se positionner en centre régional pour la gestion d’actifs et, dans une moindre mesure, de l’assurance. La cité-Etat s’est également placée comme intermédiaire dans l’internationalisation des entreprises chinoises dès les années 2000, et, plus récemment, dans l’internationalisation du renminbi, devenant le 3ème centre pour le renminbi offshore après Hong Kong et Londres. Aujourd’hui, l’attractivité de Singapour ne repose pas uniquement sur sa fiscalité avantageuse (mise à mal par le projet d’impôt minimum mondial) mais aussi sur sa bonne situation géographique, la qualité de ses infrastructures et de son climat des affaires.
II. Singapour se distingue tout particulièrement dans la gestion d’actifs et le marché des changes
1. Le secteur bancaire est l’un des plus solides au monde avec des actifs égaux à six fois le PIB en 2021
En 2021, les actifs détenus par le secteur bancaire s’élevaient à 2 428 Mds USD (cf. Annexe 1), soit près de six fois le PIB de la même année (~397 Mds USD). Ces actifs sont répartis à travers 127 banques, dont 4 locales et 123 étrangères selon l’Autorité monétaire de Singapour (MAS) – cf. Annexe 2. On compte parmi les plus grandes banques étrangères HSBC, Standard Chartered, ABN-AMRO, Maybank, BNP Paribas et Citibank. Trois banques dominent le marché local : DBS, OCBC et UOB, une position renforcée par la consolidation du secteur opérée en 2004, avec le passage de six banques locales à trois. Ces banques font en outre partie des 50 plus grandes banques de l’Asie-Pacifique en termes d’actifs, selon S&P Global (cf. Annexe 3) et sont en situation de quasi-monopole sur l’activité de détail. Le secteur bancaire singapourien est jugé comme l’un des plus solides au monde et s’est montré résilient face à la crise sanitaire. Le rapport sur la stabilité financière de la MAS daté de décembre 2021 révèle ainsi que le secteur a enregistré une croissance soutenue du crédit la même année. La qualité de ses actifs est restée bonne, comme en témoigne le ratio de créances douteuses (NPL) extrêmement bas, autour de 2,2% au 3ème trimestre. Enfin, les bénéfices nets des trois banques locales ont affiché une forte progression, en lien avec la hausse des recettes hors intérêts.
2. Le secteur de l’assurance affiche une croissance soutenue mais tirée essentiellement par la région
Place majeure de l’industrie assurancielle dans la région, Singapour compte en 2020 plus de 400 Mds USD d’actifs (+17% sur un an). Selon le Financial Institutions Directory de la MAS, on dénombre un peu moins de 200 assureurs à Singapour dont une majorité d’acteurs internationaux. Cela étant, 10 assureurs concentrent 95% des parts de marché, témoignant de la concentration du secteur. La filière de l’assurance-vie apparait comme la plus dynamique étant donné les caractéristiques de la région : augmentation de la classe moyenne, vieillissement de la population et forte exposition aux aléas climatiques notamment. La présence de réassureurs permet de fournir une large palette de services assurantiels, tant pour le marché domestique que pour la région. Comme les banques et les gestionnaires de fonds, les sociétés d’assurance se sont montrées résilientes en 2020 et 2021 malgré un contexte global incertain. Les taux d’adéquation des fonds propres sont restés supérieurs aux exigences réglementaires, tandis que les primes résultant des affaires nouvelles ont progressé de près de 40% sur les trois trimestres 2021 selon la MAS.
3. Le secteur de la gestion d’actifs est bien établi
Le secteur de la gestion d’actifs est en progression constante. En 2020, Singapour compte 962 gestionnaires de fonds, gérant 3 374 Mds USD d’actifs (+15,7% vs 2019, cf. Annexe 4) – incluant la gestion de fortune – soit près de huit fois le PIB. À titre de comparaison, en 1999, le secteur gérait 20 fois moins d’actifs (~160 Mds USD). Fin 2020, les actifs traditionnels représentaient près de 80% du total des actifs gérés, avec une croissance de 15% sur un an, tandis que les actifs alternatifs (du type : capital investissement, hedge fund, immobilier, capital-risque, venture capital ou private-equity) en représentaient 20% et augmentaient de 31%. La cité-Etat talonne Hong Kong dans la région, qui reste davantage tournée vers la Chine (près de 1 900 gérants de fonds, gérant 4 476 Mds USD d’actifs). 80% des fonds investis à Singapour proviennent d’investisseurs internationaux. Sur la gestion de fortune, Singapour se classe 2ème derrière la Suisse d’après le Wealth Management Ranking 2021 de Deloitte, lui valant la réputation d’être la « Suisse de l’Asie ». Les conditions politiques à Hong Kong et l’influence croissante de la Chine rendent Singapour plus attractif pour les individus fortunés. Le nombre de family offices a été multiplié par 2 entre 2019 et 2020 selon la MAS. Ils sont au nombre de 400 en 2021 et ont augmenté de plus de 200 sur la seule année 2020.
4. Le poids des marchés boursiers singapouriens ne fait pas la comparaison avec Hong Kong et Shanghai
Sur le marché des capitaux, la crise s’intensifie pour Singapour (SGX) face à la fuite croissante des compagnies vers des bourses plus actives. La bourse hong-kongaise (HKEX) se place en 2021 à la 6ème place mondiale en capitalisation boursière, avec plus de 5 430 Mds USD de capitalisation et 2 360 entreprises cotées, alors que Singapour ne parvient pas à se hisser dans le top 10 mondial (bien que 1ère dans l’ASEAN) avec 660 Mds USD de capitalisation boursière (soit huit fois moins) et 700 entreprises cotées (Annexes 5 et 6). L’attractivité de HKEX, en particulier pour les entreprises souhaitant se développer sur le marché chinois, entraîne le déplacement des entreprises vers cette bourse, plus liquide et permettant de meilleures valorisations. Certaines sociétés singapouriennes préfèrent même Hong Kong et New York à Singapour (à l’instar de Grab entré sur le Nasdaq en 2021). Le développement des marchés de l’ASEAN affaiblit aussi l’avantage comparatif de Singapour et entraîne le rapatriement de certaines sociétés. Alors que 2021 fut une année record pour les introductions en bourse, elles n’ont atteint que 2 Mds USD à Singapour, contre 12,2 Mds à Hong-Kong. La taille du marché obligataire de Singapour est également modeste (449 Mds USD) à l’échelle de la région (cf. Annexe 7).
5. Le marché des changes se classe 3ème au niveau mondial, derrière Londres et New-York
En forte croissance depuis les années 90, le marché des changes de Singapour est considéré comme le 3ème mondial derrière Londres et New York, devant Hong-Kong et Tokyo. La cité-Etat est la référence en Asie en matière de changes et offre un marché développé et liquide pour les opérations en devises du G3 (dollar, euro, yen) et d’Asie émergente. Selon la Banque des Règlements Internationaux (BRI), le volume quotidien moyen échangé à Singapour s’élevait à 640 Mds USD en 2019 (cf. Annexe 8) et la part de la place singapourienne dans le marché mondial à 7,7%. Malgré une croissance des échanges de 22% à Singapour entre 2016 et 2019 d’après la dernière enquête triennale de la BRI en 2019, le marché hongkongais a bondi de 45% sur la même période. La progression de Singapour a été portée notamment par une activité accrue sur les devises asiatiques (yuan, yen et won en particulier), les swaps de change représentant près de la moitié des volumes traités. La cité-Etat bénéficie également des activités liées au renminbi et pourrait profiter de son exposition au commerce et au marché des changes chinois.
III. À la tête du développement de la place financière se trouve l’Autorité monétaire de Singapour (MAS), à la fois banque centrale et organe de régulation et de promotion de la place
L'Autorité monétaire de Singapour (MAS), créée en 1971, est non seulement responsable de la supervision et du développement du secteur financier de Singapour mais assure également le rôle de banque centrale, formulant et mettant en œuvre la politique monétaire. Elle met ses pouvoirs en œuvre pour développer le cadre juridique, la réglementation et la surveillance du secteur financier. À cette fin, elle exerce les tâches de réglementation, d'autorisation, de contrôle, de surveillance, d'exécution et de résolution, en adoptant une approche centrée sur le risque, et une surveillance accrue des institutions financières jugées d'importance systémique. Si la MAS collabore avec la place boursière SGX pour rédiger les lois statutaires qui réglementent les marchés financiers et supervise la fonction de réglementation de SGX, c’est SGX qui est en première ligne pour réglementer les participants de marché et s'assurer de leur conformité. En s’alignant sur les normes internationales et les meilleures pratiques mondiales telles que les règles de fonds propres des accords de Bâle et les recommandations du Groupe d'action financière (GAFI) sur la lutte contre le blanchiment d'argent, la réglementation et la surveillance rigoureuse de la MAS ont gagné la confiance des investisseurs internationaux. Il en est résulté une stabilité financière, même au milieu des crises comme lors de la crise bancaire asiatique de 1997-1998 et de la crise financière mondiale de 2007-2008. De plus, la MAS a une longue tradition de consultation active avec l'industrie sur les nouvelles règles et initiatives proposées. Une telle approche a contribué à la construction d'un système financier réactif et progressif. L’institution a néanmoins été confrontée au déclenchement de plusieurs scandales en 2015 – éclatement de l’affaire du fonds d’investissement public malaisien 1MDB et accusations de comportement de marché illicite et de manipulation du groupe hongkongais de négoce de matières premières coté à la bourse de Singapour, Noble Group – qui ont affecté la réputation de la place financière de Singapour. Cette situation a poussé l’institution à se doter d’un cadre plus strict pour s’assurer du respect de la réglementation financière, avec notamment un renforcement de la supervision – via la création d’un département dédié à la lutte contre le blanchiment d’argent – de même que de ses capacités en matière d’investigation, de dissuasion et de sanction. Illustrant la volonté de renforcer ses capacités de supervision, en s’appuyant notamment sur les nouvelles technologies, le 31 mars 2022, la MAS et le Centre d'innovation de Singapour de la BRI (BIS Innovation Hub) ont mis au point un nouvel outil d’analyse pour identifier plus rapidement les risques pesant sur le système bancaire et financier (« Projet Ellipse »).
IV. Malgré ses forces, la place financière de Singapour souffre de la comparaison avec Hong-Kong
1. Au sein des classements mondiaux, la compétition avec Hong-Kong
Malgré ses réalisations notables, le secteur financier de Singapour est confronté à un environnement extérieur de plus en plus complexe et concurrentiel avec le développement économique asiatique, désormais centré autour de la Chine. Singapour cherche à dépasser Hong Kong qui se trouve dans une situation de crise renforcée avec l’adoption de la nouvelle loi sur la sécurité nationale et surtout sa politique « Zero Covid » qui a perduré entre 2020 et 2022, limitant les déplacements d’affaires. Selon le classement 2021 Global Financial Centre Index (GFCI), Singapour est ainsi la 3ème place financière en Asie, derrière Hong Kong et Shanghai. Les facteurs de compétitivité pris en compte dans le classement sont le climat des affaires, la réputation, le capital humain, le développement des marchés financiers et la qualité des infrastructures. Par activité, Hong-Kong et Singapour ont chacune des aires de spécialisation (cf Annexe 9). Hong-Kong devance par exemple la cité-Etat pour tout ce qui relève de la banque, l’assurance, les services financiers et le trading, mais se situe derrière pour la gestion d’actifs, la gouvernance, la qualité de ses services et les Fintech. Si la situation à Hong-Kong apparaît plus compliquée en 2022 en raison de contraintes sanitaires persistantes, les multinationales demeurent discrètes quant à leurs intentions de quitter Hong-Kong, que ce soit pour des raisons politiques ou une volonté de proximité au marché chinois. Elles procèdent en revanche bien souvent à une réorganisation de leurs équipes.
2. Face à Hong-Kong, les enjeux sont de renforcer la proximité avec l’ASEAN et le marché chinois
Avec une population de plus de 667 M de personnes et un PIB combiné d’environ 3 300 Mds USD en 2021 (FMI), la Communauté économique de l'ASEAN (AEC), est un potentiel tremplin pour Singapour dans sa politique d’attractivité. Des défis subsistent néanmoins pour harmoniser les normes de réglementation et de gouvernance des marchés financiers au sein de l’Association. Le cadre des systèmes de placement collectif de l'ASEAN (Collective Investment Scheme) établi en 2014 par l’ACMF fait néanmoins partie des quelques progrès réalisés. Celui-ci permet aux gestionnaires de fonds établis à Singapour, en Malaisie et en Thaïlande d'offrir des fonds constitués dans leur juridiction d'origine directement aux investisseurs de détail d’un autre pays du groupement. Dans le domaine bancaire, Singapour peut également tirer parti de la sous-bancarisation de plus de la moitié de la population en ASEAN. En complément de cette proximité avec l’Asie du Sud-Est, la place financière singapourienne devra parvenir à maintenir son lien privilégié avec les marchés chinois, par exemple en approfondissant les divers programmes existants tels que RQFII, QDII2 ou QDII2 qui facilitent actuellement les investissements de portefeuille entre la Chine continentale et Singapour, ainsi qu’en introduisant ou en développant des contrats à terme RMB/USD, des obligations « Lion City » et/ou des financements transfrontaliers en RMB avec Shanghai, Tianjin et Chongqing.
V. L’avenir de la place financière repose sur son adoption rapide des tendances mondiales
1. Dans la finance verte, des progrès restent à faire pour bien positionner Singapour à l’échelle mondiale
Seulement à la 16ème place mondiale du Green Financial Centres Index en 2022, les autorités singapouriennes se montrent aujourd’hui volontaires pour renforcer la compétitivité de Singapour dans ce domaine. Ainsi, la MAS est, depuis le One Planet Summit de décembre 2017, l’un des membres fondateurs du Réseau des banques centrales et superviseurs pour le verdissement du système financier (NGFS), dont le secrétariat est assuré par la Banque de France. Le directeur général de la MAS, Ravi Menon, a été nommé président du NGFS en janvier 2022 pour un mandat de deux ans. En 2020, Singapour a également lancé le projet « Greenprint », afin de promouvoir un écosystème financier plus durable à travers trois piliers : (i) la mobilisation des capitaux, (ii) le contrôle des engagements et (iii) la mesure d’impact grâce à la technologie. Dans ce cadre, le lancement de quatre plateformes d’ici fin 2022 a été annoncé, autour du traitement, de l’agrégation et de l’accès aux données ESG ainsi que de la mise en relation des Green Fintech avec les institutions financières de la région. Singapour est aussi membre du Sustainable Insurance Forum, un réseau international de 25 superviseurs et régulateurs des assurances cherchant à renforcer les pratiques de durabilité dans l’industrie de l’assurance. Sur les marchés financiers, le régulateur SGX RegCo, a annoncé le 15 décembre 2021 l’introduction d’une obligation de reporting climatique pour les sociétés cotées, conformément aux recommandations de la TCFD (Task Force on Climate-related Financial Disclosures). Depuis le début de l’année, les sociétés cotées à la bourse de Singapour (SGX) sont désormais tenues d’intégrer à leur rapport extra-financier un rapport climatique ou justifier de son absence, le cas échéant. Dans la région, les coopérations s’accélèrent pour faciliter les critères d’évaluation de performance environnementale, sociale et de gouvernance des entreprises cotées, notamment à travers la plate-forme « ASEAN Exchange » qui réunit plusieurs bourses de l’ASEAN.
2. Singapour est l'une des places financières les plus innovantes, en particulier en matière de développement des Fintechs
Comme à l’échelle mondiale, la scène Fintech a connu un boom ces dernières années à Singapour, qui compte fin 2020 plus de 1 000 Fintech - contre moins de 100 en 2015 - employant plus de 10 000 personnes. En 2021, les Fintech ont levé près de 3 Mds USD selon Dealstreetasia, soit plus de 50% du montant levé dans l’ASEAN. Le secteur est un axe stratégique de la politique de Singapour et en particulier de l’Autorité Monétaire de Singapour (MAS), qui est mobilisée pour favoriser l’émergence d’un « Smart Financial Center ». La cité-Etat souhaite également se positionner sur le marché des cryptoactifs, tendance majeure du secteur Fintech, mais adopte une position contraignante à l’égard de ces pratiques. Pour opérer à Singapour, toute entité qui traite ou facilite l’échange de cryptomonnaies doit en effet obtenir une licence spécifique de la MAS. Ainsi, en mars 2022, 103 entreprises sur les 176 ayant déposé un dossier ont vu leur demande rejetée ou l’ont retirée - à l’instar de Binance, plus grande plateforme d’échange de cryptomonnaies au monde. En outre, la MAS régule la publicité pour les cryptoactifs depuis janvier 2022, cherchant à sensibiliser les Singapouriens sur la nécessité de prudence lorsqu’ils traitent avec les cryptoactifs. D’autres enjeux entourent le développement de la Fintech à Singapour, au premier rang desquels l’accès au financement ou le déficit de main d’œuvre suffisamment qualifiée, dont les autorités et les écoles singapouriennes semblent avoir pris acte. Du côté institutionnel, les projets de monnaie numérique de banque centrale (CBDC) sont à un stade avancé à Singapour, la MAS ayant lancé plusieurs programmes pour leur développement (« Ubin » en 2016, « Dunbar » en 2021, en collaboration avec la BRI). Début 2021, la Banque de France et la MAS ont d’ailleurs conduit avec succès une expérimentation de paiements transfrontaliers utilisant des CBDC.