Publications des Services économiques

Avec un PIB dépassant 170 Md USD en 2020 et un PIB par habitant de l’ordre de 9 000 USD, le Kazakhstan concentre près de 50 % du PIB de l’Asie centrale. L’économie kazakhstanaise repose essentiellement sur l’extraction d’hydrocarbures : environ 60 % des exportations en valeur en 2020. Après un recul limité en 2020, l’économie du Kazakhstan retrouve en 2021 son rythme de croissance d’avant crise. Le Kazakhstan connait toutefois une forte poussée inflationniste ses comptes extérieurs restent légèrement déséquilibrés.

1/ Retour de la croissance... Alors qu’entre 2017 et 2019 le Kazakhstan a vu son PIB croitre à un rythme légèrement supérieur à 4% par an, la crise pandémique a fait connaitre au pays en 2020 sa première année de récession depuis 1997. Le soutien de l’Etat à l’économie et la remontée des cours des hydrocarbures ont toutefois permis de limiter le recul du PIB kazakhstanais en 2020 à -2,6%. Le gouvernement kazakhstanais vise entre 3,7% et 4% de croissance en 2021, ce qui est en ligne avec les prévisions du FMI (3,7%) et légèrement supérieur à celles des bailleurs de fonds internationaux : 3,6 % selon la BERD, 3,5% selon la Banque mondiale. La croissance de l’activité atteint 3,5% en janvier-octobre 2021 en g.a.

2/ ... et de l’inflation. Après une période de ralentissement en 2018 et 2019, l’inflation est repartie à la hausse à partir de 2020. L’inflation, notamment par les prix des biens alimentaires (+10,9% en novembre en g.a.), s’est élevée à 8,7% en novembre en g.a., bien au-delà du corridor cible de la Banque nationale du Kazakhstan (4-6%). Elle constitue actuellement l’un des principaux facteurs d’inquiétude, alors que les anticipations d’inflation à 12 mois se sont élevées à 10,3% en octobre 2021 en g.a. La Banque nationale réagit en remontant progressivement son taux directeur – inchangé depuis juillet 2020 – avec trois hausses de 25 pdb en juillet, septembre et octobre 2021. La Banque nationale pourrait décider de nouvelles augmentations de son taux directeur au cours des prochains mois. D’autre part, les mesures de lutte contre l’inflation proposées par le Président Tokaïev en septembre 2021 (création d’un organisme de contrôle des prix alimentaires et d’un réseau de centres de commerce de gros) ne devraient pas avoir de conséquences significatives sur l’inflation. Le Président a en outre annoncé des hausses de salaires à partir du 1er janvier 2022, ce qui devrait renforcer la tendance inflationniste.

3/ Annonces de réformes. Dans son discours de septembre, le Président Tokaïev a par ailleurs annoncé différentes réformes dans le domaine des finances publiques, notamment la mise en œuvre d’une règle budgétaire. Le déficit public, qui avait atteint -7,1% du PIB en 2020, devrait se réduire à -2,6% du PIB en 2021 selon les prévisions du FMI. Le déficit non pétrolier resterait toutefois élevé, à -8,7% du PIB en 2021, contre -10,5% du PIB en 2020. Le Kazakhstan affiche en outre des objectifs ambitieux en matière de décarbonation de son économie, les autorités visant la neutralité carbone d’ici 2060. A cet égard, des initiatives devraient être prises cours des prochaines années dans un contexte où le secteur énergétique kazakhstanais repose encore fortement sur le charbon. Ces politiques pourraient peser lourdement sur les finances publiques. Le coût total de cette décarbonation de l’économie serait de l’ordre de 640 Md USD d’ici 2060.

4/ Comptes extérieurs. En matière de comptes extérieurs, porté par une augmentation de l’excédent de la balances des biens et services (+130% sur janvier-septembre 2021 en g.a.), le déficit du compte courant devrait légèrement se réduire malgré la hausse des revenus d’investissement sortants (+53% sur janvier-septembre 2021 en g.a.), au profit des créanciers du Kazakhstan sous trois formes : les intérêts, les profits réinvestis et les dividendes. Le déficit du compte courant s’est ainsi élevé à -3 Md USD (2,1% du PIB prévisionnel) sur la période janvier-septembre 2021 selon les données préliminaires de la Banque nationale contre -5,1 Md USD sur janvier-septembre 2020. Le déficit du compte courant pourrait atteindre -0,9% du PIB en 2021 contre -3,8% du PIB en 2020 selon les prévisions du FMI. Le quasi équilibre du compte courant au cours du troisième trimestre 2021 semble indiquer que le Kazakhstan aurait besoin d’un cours du baril dépassant 75 USD pour voir son compte courant s’équilibrer (dans le contexte actuel de limitation de la production de pétrole). La dette externe kazakhstanaise reste par ailleurs l’une des plus élevées de la zone à 166,8 Md USD au 1er juillet 2021, soit environ 86% du PIB.  Cette dette est à près de 53% liée à des investissements dans le secteur extractif (à 93% destinés aux hydrocarbures).

Figure. Compte courant et cours du Brent

Graphique

4/ Système bancaire. Le secteur bancaire kazakhstanais est sous dimensionné et remplit peu son rôle de financement de l’économie. Le portefeuille total de crédits bancaires représentait seulement 24,1% du PIB, contre 54% en Russie, 44% en Ouzbékistan ou encore 25% au Kirghizstan. Ce chiffre est toutefois en progression dans la mesure où le portefeuille de crédit ne représentait que 22% du PIB un an plus tôt. En effet, les crédits à l’économie réelle étaient en hausse de 19,1 % en novembre 2021 en g.a. Après une longue période d’assainissement très coûteuse pour les finances publiques entre 2015 et 2019, le système bancaire kazakhstanais semble enfin sortir de sa convalescence. Le niveau des prêts non performants affiché par la Banque nationale du Kazakhstan est désormais relativement faible : 4,1% au 1er novembre 2021. Cet indicateur est cependant à considérer avec beaucoup de précaution dans la mesure où, notamment en raison d’incitations fiscales, de nombreuses banques kazakhstanaises ont sorti les créances douteuses de leurs bilans pour les transférer à des structures dédiées. A titre d’exemple, Halyk Bank – première banque du pays en matière actifs – détenait 209 Md KZT de créances douteuses dans des structures de défaisance au 1er janvier 2021, soit 4,3% de son portefeuille de crédit. Ces créances douteuses n’apparaissent pas dans les données de la Banque nationale, selon lesquelles le taux de créance douteuses de Halyk Bank n’atteignait que 3,8% à la même période. En tenant compte des créances douteuses détenues dans des structures de défaisance, le taux de créances douteuses à l’échelle du système bancaire kazakhstanais est probablement compris entre 10 et 15%.