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Zoom de la semaine : La démographie russe a connu sa pire année depuis 15 ans

La démographie russe a connu en 2020 sa pire année depuis 15 ans avec une diminution de la population de plus de 582 000 personnes, soit une baisse de 0,3%. La Russie comptait ainsi officiellement près de 146,2 millions d’habitants au 1er janvier 2021, alors qu’en septembre 2020, le gouvernement prévoyait encore un maintien la population à 146,7 millions en 2020 puis une baisse à 146,5 millions en 2021.

Après les années 1990, la démographie russe avait connu une période d’embellie à partir de la fin des années 2000, période au cours de laquelle la population a connu neuf années de croissance. Le solde naturel est même devenu légèrement positif entre 2013 et 2015.

La Russie est toutefois entrée dans une nouvelle phase de déclin démographique à partir de 2018. Cette baisse s’est accélérée en 2020 pour trois raisons :

  • La Russie a enregistré une hausse de près de 18% de la mortalité en glissement annuel (g.a.), soit 323 802 décès supplémentaires en 2020 par rapport à 2019. Cette brusque remontée de la mortalité vient contrarier 18 années de tendance baissière de la mortalité en Russie. Une large partie de cette surmortalité apparait liée à l’épidémie de Covid-19. Alors que l’Agence Rosstat décompte 163 325 décès liés directement ou indirectement à la Covid 19 en 2020, ces derniers pourraient être plus nombreux dans la mesure où ce chiffre permet d’expliquer seulement la moitié de la hausse de la mortalité.
  • Par ailleurs, la tendance à la baisse de la natalité observée depuis 2016 se poursuit avec une diminution du nombre de naissances de 3,3% en 2020 en g.a., soit 48 767 naissances en moins.
  • Enfin, alors que le solde naturel négatif était partiellement compensé par un solde migratoire nettement positif depuis 2017 (+285 792 en 2019), la crise économique et les restrictions de déplacement ont fortement limité l’afflux de migrants en Russie en 2020. Ainsi, en 2020, le solde migratoire restait positif mais s’établissait à 106 496 (baisse de près de 63% en g.a).

 Figure 1. Evolution de la population russe entre 2014 et 2020

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Au cours des deux premiers mois de l’année 2021, la mortalité en valeur absolue a diminué par rapport aux derniers mois de 2020 mais reste en forte en augmentation en g.a.. Le nombre de décès était ainsi en hausse de près de 34% en janvier 2021 en g.a. et de 20,6% en février 2021 en g.a. Ces chiffres ne laissent pour le moment pas présager pour 2021 une baisse importante de la surmortalité, notamment liée à la covid-19. A titre de comparaison, la Russie affiche une augmentation de la mortalité mensuelle en g.a. plus forte qu’en France depuis mai 2020. Entre février 2020 et février 2021 en Russie les décès ont augmenté de 23,7% en g.a. et environ 420 000 décès supplémentaires ont été enregistrés sur la période, soit presque 6 fois plus qu’en France sur la même période (environ 72 000).

 Figure 2. Evolution de la mortalité mensuelle en France (orange) et en Russie (bleu) – ga en %

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Le retournement démographique actuel, plus brutal qu’anticipé en raison de l’épidémie, vient clore un cycle d’amélioration relative de la démographie russe. Cette dégradation, qui pourrait être durable si la natalité se maintient à un bas niveau, devrait pousser le gouvernement à revoir à la baisse ses objectifs en matière de croissance. Les espoirs de stimulation de l’économie par les générations arrivant après le trou d’air des années 1990 semblent illusoires dans un contexte de baisse de la population et de non renouvellement des générations. Ainsi, selon l’agence de notation ACRA, les conséquences démographiques de la pandémie pourrait faire perdre de 0,2% à 0,9% de PIB à la Russie en 2021.

 Figure 3. Naissances (bleu) et décès (orange) en Russie pour 1 000 habitants

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Au sein de ce tableau démographique de la Russie, on soulignera cependant un développement positif : la poursuite de la baisse de la mortalité infantile observée depuis 1993. La mortalité infantile aurait ainsi atteint un nouveau minimum historique en Russie en 2020 à 4,5 pour mille selon le Ministre de la Santé et l’Agence Rosstat, après 4,9 pour mille en 2019.

Cette dernière aurait donc été divisée par quatre en 28 ans. La Russie se rapproche ainsi des pays les plus avancés en la matière et dépasse même les Etats-Unis ou la mortalité infantile atteignait environ 5,6 pour mille en 2019. En France la mortalité infantile s’est établie à environ 3,6 pour mille en 2020. 

Figure 4. Mortalité infantile pour 1000 habitants en Russie (bleu) et en France (orange)

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