Lumière Turquoise est la publication bimestrielle du SER d'Ankara

L’activité économique connait en Turquie un redressement soutenu (p. 2 & 10), porté par le rebond de la production et de la consommation interne. Mais les politiques de relance mises en oeuvre ont aggravé les fragilités traditionnelles de l’économie turque (p. 3). Le creusement du déficit de la balance des paiements et l’accélération de l’inflation des prix à la production ont ainsi poussé l’Exécutif à diminuer les stimuli des politiques publiques et à resserrer progressivement les conditions de la politique monétaire (pour la première fois depuis le 18 décembre 2019, le taux d’intérêt réel est redevenu positif). Cependant, les vives tensions géopolitiques avec l’Union européenne (qui se sont notamment traduites par le report du comité conjoint sur l’Union douanière à après le Conseil européen de décembre, lequel donnera le « la » sur la relation bilatérale pour les prochains mois), l’approche des élections aux États-Unis qui ravive le spectre des sanctions (p. 7) ainsi que le reconfinement de l’Europe, principal partenaire commercial de la Turquie, alimentent les pressions à la baisse sur la devise turque.
 
L’appel au boycott des marques françaises, bien que largement reprise par les médias locaux, n’a qu’un impact très limité à ce stade. Si ses effets potentiels dépendront de la durée de la campagne, plusieurs facteurs jouent leur rôle d’amortisseur : (1) le positionnement de l’offre française en Turquie, très orientée sur du BtoB, (2) les modes de présence française en Turquie qui s’appuient sur des partenariats solides, (3) la très faible élasticité de la demande pour de nombreuses marques françaises ou (4) la faible appropriation de cette campagne par les ménages, dont la principale préoccupation reste la baisse de leur pouvoir d’achat. Par ailleurs, la grande majorité du monde des affaires turc appelle à la modération en soulignant qu’une telle initiative va à l’encontre des intérêts économiques et commerciaux des deux pays et en mettant en avant l’importance de la contribution des entreprises françaises à l’économie turque (emploi, export, recherche et développement, etc.).
 
L’épisode de tensions entre la France et la Turquie ainsi que la crise sanitaire ont, ce qui au premier regard pourrait paraître paradoxal, contribué à l’intensification du dialogue entre les communautés d’affaires françaises et turques dont les regards sont tournés vers « l’après-crise ». Elles n’ont pas eu, non plus, d’impact négatif sur la coopération institutionnelle qui se poursuit (de manière virtuelle).
 
En Géorgie (p.9), l’ampleur de la contestation au lendemain des élections législatives est encore difficile à mesurer (un second tour aura lieu le 21 novembre). Pour autant, la situation ne suscite que peu d'inquiétudes dans les milieux économiques qui n’attendent pas de changement radical de politique économique ni d'orientation diplomatique, quel que soit le résultat définitif.
 
Enfin, le conflit dans le Haut-Karabakh, qui mobilise toute l’attention du gouvernement azerbaidjanais, pourrait dégrader encore davantage une conjoncture déjà très marquée par la pandémie de Covid, notamment en accentuant la baisse de la consommation et des investissements.