Point mensuel sur la situation économique et financière de l'Irlande.

Macroéconomie

Estimations de croissance réelle annuelle du PIB – (Mise à jour) La crise économique résultant de la pandémie de coronavirus se traduit par l’entrée en récession de l’économie irlandaise. Selon les sources et les analyses, cette récession pourrait être comprise entre -13,8% et -1,7% en 2020. Un rebond de l’activité économique est attendu l’année prochaine avec des prévisions de croissance allant de +3,8% à +6,6%. L’OCDE n’écarte toutefois pas la possibilité d’une récession équivalente à -0,2% en 2021.

Tableau récapitulatif des prévisions de croissance
Source : SE de Dublin

Tableau récap' des prévisions de croissance

 

Comptes nationaux trimestriels – CSO

Selon le dernier rapport trimestriel du Central Statistics Office (CSO), l’équivalent irlandais de l’INSEE, l’estimation de la récession au 2ème trimestre 2020 ressort à -6,1% en glissement trimestriel et corrigé des variations saisonnières (g.t./csv) après -2,1% au 1er trimestre 2020. L’impact de la crise sanitaire sur l’économie irlandaise est en partie compensé par la croissance de la valeur ajoutée de l’industrie hors construction (+1,5% g.t.) et la résilience des exportations (+37,8 Mds€), elles-mêmes dues à la présence des firmes multinationales dans les secteurs pharmaceutique et informatique en Irlande. L’économie domestique subit de plein fouet la crise sanitaire avec une baisse de la demande intérieure (-46,9% g.t.) et de ses principales composantes, à savoir la consommation (-19,6% g.t.), en raison de la fermeture des commerces, bars et restaurants pendant la période de confinement, et l’investissement (-67,4% g.t.) ; laissant pour seul stimulus la consommation des administrations publiques. Au total, la contraction de l’économie irlandaise au 2ème trimestre est moins forte que celle de la moyenne de la zone euro (-12%). Elle reste toutefois la plus importante récession trimestrielle jamais enregistrée par l’Irlande, y compris lors de la crise financière où elle s’établissait à -4,7% au 4ème trimestre 2008. Enfin, le GNI* (mesure alternative du PIB corrigée de l'activité des firmes multinationales) se contracte quant à lui de -7,4% (g.t./csv) ; rappelant la dualité croissante de l’économie irlandaise.

Activité économique – Dans l’ensemble, l’activité a progressé au mois d’août mais reste timide au vu des circonstances actuelles.

Note méthodologique

Les indices PMI (Purchasing Manager’s Index) pour l’Irlande sont calculés chaque mois par la société IHS Markit, sur la base de questionnaires envoyés auprès d’un panel représentatif d’environ 250 entreprises pour l’industrie et 400 entreprises pour les services.

L’indice PMI pour l’industrie (Manufacturing PMI) est une moyenne pondérée des soldes des nouvelles commandes (30%), de la production passée (25%), de l’emploi (20%), des délais de livraison des fournisseurs (15%) et des stocks d’achats (10%).

L’indice PMI pour les services (Services Business Activity Index) correspond au seul solde de l’activité commerciale passée.

Au total, l’indice PMI permet de mesurer l’évolution de l’activité d’un secteur à la lumière de l’activité observée le mois précédent. Les valeurs inférieures à 50 indiquent une contraction du secteur d’un mois à l’autre tandis que les valeurs supérieures à 50 indiquent son expansion. La valeur de 50 traduit, quant à elle, une stabilité sur un mois.

L’indice PMI du secteur manufacturier en Irlande continue de progresser mais la reprise a perdu de l’élan. L’indice reste, en effet, au-dessus de la barre symbolique des 50 mais s’établit à 52,3 en août contre 57,3 le mois précédent, soit une baisse de 5 points. Il s’établit à un niveau proche de celui de la zone euro (51,7). Selon les entreprises sondées pour la construction de l’indicateur, le ralentissement de la reprise du secteur par rapport au fort rebond observé en juillet s’explique par une baisse de la confiance due aux fortes incertitudes qui pèsent à la fois sur la demande et les conditions générales d’activité alors que le gouvernement irlandais durcit les restrictions localement en fonction de l’augmentation des nouveaux cas confirmés de Covid-19. Les entreprises continuent ainsi de déstocker massivement, certaines opérant à un niveau inférieur à celui de leur pleine capacité.

Figure 1 : Indices PMI de l’institut Markit 
Source : SE de Dublin

PMI

Le PMI des services enregistre, quant à lui, une nouvelle hausse au mois d’août 2020, la quatrième consécutive depuis avril où il avait atteint son niveau le plus bas depuis la création de l'indice. Il s’établit comme pour le secteur manufacturier au-dessus de la barre symbolique des 50 pour le deuxième mois consécutif, à 52,4 par rapport à 51,9 le mois précédent, signalant ainsi la poursuite de la reprise. Toutefois, la croissance d’activité du secteur reste timide en comparaison de son niveau pré-Covid où l’indice s’établissait à 59,9 au mois de février. L’enquête pour la constitution de l’indice indique cependant que deux des quatre sous-secteurs sondés dans les activités de services restent en contraction (les secteurs du tourisme, des transports et des activités de loisir ainsi que celui des services financiers) ; laissant entrevoir un potentiel de croissance à venir.

Dans la construction, en revanche, le PMI a sensiblement chuté pour s’établir à 44 au mois d’août contre 53,2 le mois précédent. Cette contraction d’activité, la première depuis le fort rebond du secteur observé en juin, accompagne le ralentissement généralisé de la reprise de l’économie irlandaise.

Chômage – Le taux de chômage en Irlande enregistre une hausse marginale (+0,1 pp) au mois d’août 2020 par rapport au mois précédent, et s’établit à 5,2% (csv). Le nombre de chômeurs (cvs) s’établissait à 121 200 en août, soit 2 600 de plus qu’en juillet et 1 400 de plus qu’en août 2019. Ce chiffre, calculé en application des normes européennes et internationales, ne reflète pas les nombreux bénéficiaires des allocations versées au titre des dispositifs spéciaux liés à la pandémie (voir chiffres du « Live Register » ci-dessous), ces personnes ne remplissant pas les critères arrêtés par l’Organisation internationale du travail. Le CSO a cependant évalué quel serait le taux de chômage si l’on intégrait l’ensemble des bénéficiaires des allocations Covid au sein des chômeurs : il serait alors au maximum de 15,4% pour le mois d’août 2020, contre 16,7% au mois de juillet 2020. Le taux de chômage des jeunes (mesure standard) augmente à 17,5% en août, après 17% le mois précédent. La mesure alternative tenant compte des bénéficiaires des indemnités Covid dépeint une situation plus inquiétante, affichant un taux maximum de chômage des jeunes de 37,8% en août 2020.

Figure 2 : Évolution du chômage en Irlande
En milliers de chômeurs et en pourcentage de la population active
Source : SE de Dublin

Figure 2 : Évolution du chômage en Irlande

Le nombre des inscriptions au « Live Register », équivalent irlandais de Pôle Emploi, a enregistré une baisse entre août et juillet 2020 (-12 900, cvs.), de même que les demandes supplémentaires liées à la pandémie enregistrent une diminution : -49 622 pour le dispositif de chômage spécifique (« Pandemic Unemployment Payment » ou PUP) et - 88 544 pour le dispositif d’indemnisation du chômage partiel (« Temporary Wage Subsidy Scheme » ou TWSS). En prenant en compte les inscriptions liées au coronavirus, le nombre de bénéficiaires d’allocations chômage via l’un des trois programmes gouvernementaux s’établit à 783 485 individus, en baisse de -139 211 comparé au chiffre du mois précédent.

L’impact de la crise sanitaire sur le marché du travail irlandais est significatif en comparaison européenne. Selon les chiffres publiés par Eurostat, le nombre de personnes ayant travaillé a décliné de -2,9% en moyenne dans la zone euro au 2ème trimestre 2020 (g.t.) contre -6,1% en Irlande qui est le deuxième État membre le plus touché après l’Espagne (-7,5%). À cet égard, le think-tank irlandais « Economic & Social Research Institute » (ESRI) a publié une stratégie de court terme pour aider les services publics de l’emploi à identifier rapidement les demandeurs d’allocations chômage qui présenteraient le risque le plus élevé de tomber dans un chômage de longue durée.

Immobilier – Selon les variations exprimées en glissement mensuel (g.m.), les prix de l’immobilier à l’échelle nationale ont enregistré une hausse au mois de juillet 2020 (+0,3%) par rapport au mois précédent. En dehors de Dublin, les prix à l’achat ont augmenté de +0,6% (g.m.) en juillet, poursuivant une tendance à la hausse observée progressivement depuis avril dernier. À l’inverse, les prix de l’immobilier à l’achat diminuent marginalement pour le quatrième mois consécutif dans la capitale irlandaise, à hauteur de -0,1% (g.m.) au mois de juillet.

Figure 3 : Évolution mensuelle des prix de l'immobilier en glissement annuel en Irlande
En pourcentage
Source : SE de Dublin

Figure 3 : Évolution mensuelle des prix de l'immobilier en glissement annuel en Irlande

Les variations exprimées en glissement annuel indiquent que les prix de l’immobilier à l’échelle nationale sont en baisse au mois de juillet 2020 (-0,5%), après s’être stabilisés en juin. Bien que cette diminution soit marginale, il s’agit d’une première depuis le mois de mai 2013 ; date à partir de laquelle les prix ont constamment augmenté. La croissance des prix à l’achat sur l’ensemble du territoire hors Dublin se maintient en juillet (+0,2% en glissement annuel, g.a.) alors que la capitale enregistre à nouveau une baisse de ses prix pour le troisième mois consécutif (- 1,3%, g .a.). Dans l’ensemble, l’indice des prix de l’immobilier a connu une baisse de 17,7% (g.a.) par rapport à son plus haut niveau atteint en 2007.

D’après les derniers chiffres publiés par le CSO, les ventes de logements ont légèrement augmenté en juillet 2020 après avoir chuté en avril et mai derniers, en raison notamment des mesures de confinement. Ainsi, 2 561 ventes de logements à des ménages ont été signalées auprès de l’autorité fiscale irlandaise (« Revenue ») en juillet, soit une hausse de +12,9% par rapport au mois précédent mais une baisse de 40,7% par rapport à juillet 2019.

Par ailleurs, 18 000 logements devraient être construits en 2020 d’après la Fédération irlandaise des Banques et des Paiements (« Banking & Payments Federation Ireland » ou BPFI). Cela représente une baisse de – 3 000 (ou -14%) par rapport aux 21 000 logements construits en 2019. Mais le CSO indique que le secteur de la construction se montre in fine plus résilient face au choc de la crise sanitaire qu’anticipé. Si le nombre de logements achevés avait chuté de -73% (g.a.) en avril 2020, ce chiffre remontait à -6% (g.a.) dès le mois de juin.

Du reste, 6 077 sans-abris ont été comptabilisés la semaine du 20 au 26 juillet 2020.

Inflation – Les prix à la consommation ont en moyenne chuté de -1% en août 2020 par rapport à août 2019 et de - 0.1% par rapport à juillet 2020, sous l’effet de la baisse des prix des communications (-8,4% g.a.), des transports (- 4,4% g.a.), des vêtements et des chaussures (-3.2% g.a.). Cette déflation – la plus importante depuis dix ans – fait écho au contexte actuel : la crise sanitaire et les mesures de restrictions mises en place contraignent la demande et tirent le cours des produits énergétiques vers le bas. L’indice des prix à la consommation harmonisé suit la même tendance en août 2020 (-1,1% g.a.).

Confiance des consommateurs  La confiance des consommateurs irlandais, mesurée par l’indice « Consumer Sentiment Index » créé et mis à jour par la banque KBC et l’ESRI, diminue de façon marginale au mois d’août 2020 après avoir rebondi ces trois derniers mois. L’indice s’établit à 58,9 en août contre 62,6 le mois précédent, soit une baisse de près de 4 points. Il reste cependant nettement en dessous du niveau atteint en février, mois pour lequel il s'établissait à 85,2. Si la confiance des consommateurs irlandais montre des signes de redressement par rapport au mois d’avril où l’indice avait chuté à son niveau le plus bas depuis octobre 2008, les données pour le mois d’août reflètent les nouvelles inquiétudes liées à l’évolution du virus en Irlande ainsi que les craintes économiques que ce dernier suscite.

Figure 4 : Évolution mensuelle de la confiance des consommateurs
Source : KBC & ESRI

Figure 4 : Évolution mensuelle de la confiance des consommateurs

Compte courant – Les exportations irlandaises sont stables au mois de juillet 2020, s'établissant à 12,9 Mds€ (+78 M€ ou +0,6% g.m.). Les importations s’élèvent quant à elles à 8,1 Mds€ et progressent de +22% (g.m.) ou +1,5 Mds€, sous l’effet principal de la croissance des importations de produits chimiques organiques. Au total, l’Irlande affiche un excédent commercial de 4,8 Mds€, en baisse de -22% (g.m.) ou -1,4 Mds€.

Finances publiques

Exchequer – Côté recettes, les derniers chiffres du Trésor irlandais confirment les tendances observées ces derniers mois. Reflétant la baisse de la consommation au cours du printemps, les recettes cumulées pour la TVA et les droits d'accise du 1er janvier au 31 août sont en baisse de respectivement -21% et -15% par rapport à cette même période l’année dernière. Les recettes de l'impôt sur le revenu sont, quant à elles, plutôt stables avec une baisse de seulement -1,4% (g.a.). Leur résilience dans le contexte actuel s’explique par la forte progressivité de cet impôt en Irlande, à laquelle s’ajoute une forte performance en janvier et février derniers. À contrario, les recettes de l’impôt sur les sociétés, tirées par les multinationales (GAFAM, secteur pharmaceutique et entreprises de la Tech) augmentent de +31,4% (g.a.) et confirment une dynamique à la hausse déjà observée en 2018. Dans l’ensemble, les recettes fiscales totales cumulées du 1er janvier au 31 août sont en baisse par rapport à cette même période l’année dernière, à hauteur de -2,3% (g.a.) ou -802 M€, et s'établissent à 34,2 Mds€. Au total, ces chiffres confirment la dualité croissante de l’économie irlandaise ; les finances publiques du pays reposant de plus en plus sur l’impôt sur les sociétés.

Les dépenses du gouvernement central à cette période de l’année dépassent les plafonds inscrits dans le Budget 2020 en raison des mesures prises pour faire face à la pandémie, essentiellement en matière de santé et de protection sociale. Les dépenses courantes se sont établies à 43,2 Mds€ pour la période allant du 1er janvier au 31 août 2020, soit +21% au-dessus des limites budgétaires et en augmentation de +28% par rapport à la fin août 2019.

Selon l’évolution de la crise sanitaire, le déficit public irlandais pourrait atteindre 25 à 30 Mds€ en 2020, soit 8 à 10% du PIB. Jusqu’à présent, 24,5 Mds€ – soit 14% du GNI* – ont été dépensés pour contenir le choc économique. Les prévisions de la Banque Centrale d’Irlande (BCI) indiquent que la dette publique pourrait atteindre 120 à 130% du GNI* en 2020.

July Jobs Stimulus – Pendant l’été, le gouvernement a annoncé un ensemble de nouvelles mesures budgétaires en réponse à la crise sanitaire. Le « July Jobs Stimulus » prévoit ainsi 7 Mds€ d’aides supplémentaires:

  • 4 Mds€ de dépenses directes permettant de couvrir, entre autres, la mise en place du dispositif d’indemnisation du chômage partiel « Employment Wage Subsidy Scheme » (EWSS) en remplacement du TWSS et l’extension du dispositif de chômage spécifique PUP ;
  • 1 Md€ de mesures fiscales comprenant essentiellement une baisse du taux normal de la TVA de 23% à 21% pendant six mois ;
  • 2 Mds€ de garanties de crédit (« Covid-19 Credit Guarantee Scheme »).

Budget 2021 – Les ministres irlandais des finances (Paschal Donohoe) et de la dépense publique et de la réforme (Michael McGrath) ont récemment annoncé les grandes lignes du budget annuel qui sera présenté plus en détail le 13 octobre prochain. Le gouvernement prévoit de mettre en place un plan de relance domestique, autorisant 15 à 19 Mds€ de dépenses financées par emprunt l’année prochaine.

Rendements souverains – À la suite de l’annonce du « July Jobs Stimulus », la « National Treasury Management Agency » ou NTMA, l’équivalent irlandais de l'Agence France Trésor, a indiqué qu’elle ciblait la fourchette haute de son intervalle de financement, à savoir 24 Mds€. Depuis le début de l’année, elle a levé 20 Mds€ via l’émission d’obligations souveraines ayant une maturité moyenne de plus de 11 ans et à un taux moyen de 0,27%. L'Irlande reste en bonne position pour se financer via l'emprunt grâce notamment à l’action de la Banque Centrale Européenne (BCE). Le rendement souverain à 10 ans demeure en territoire négatif depuis plus de deux mois consécutifs et à - 0,16% au 25 septembre 2020.

Chiffre du mois
500

+500, c’est le solde migratoire net d’Irlandais·e·s enregistré au cours de la période annuelle de recensement (avril-19 – avril-20), selon les derniers chiffres publiés par le CSO. Pour mémoire, ce solde était négatif depuis dix ans avec un pic à -29 600 en avril 2012 ; traduisant l’impact démographique de la crise financière et bancaire qui a ébranlé l’Irlande entre 2008 et 2011 (Voir Figure 5). Si le nombre de nationaux rentrant au pays était légèrement plus élevé que ceux qui le quittaient (+100) en 2018, il était à nouveau déficitaire en 2019 (- 2 100). Au total, +500 est donc le plus grand retour de ressortissants irlandais observé depuis dix ans mais il est encore trop tôt pour dire si cette tendance va se poursuivre à plus long terme.

Figure 5 : Solde migratoire net d’Irlandais
Source : SE de Dublin

Figure 5 : Solde migratoire net d’Irlandais

Secteur financier et assurances

Ménages – Le montant des dépôts des ménages irlandais auprès d'établissements bancaires continue d’augmenter sensiblement du fait de la crise sanitaire. Au total, l’encours des dépôts des ménages s’établit à 120 Mds€ en août 2020 par rapport à 112 Mds€ en février dernier. Il affiche son taux de croissance annuel le plus important depuis 2007, soit +10,9% en juillet 2020 par rapport à juillet 2019. Selon les derniers chiffres publiés par la BCI, l'épargne des ménages irlandais continue d’augmenter substantiellement d’un mois à l’autre, à +2 Mds€ en juillet 2020 (g.m.) après le record à +4 Mds€ (g.m.) enregistré en avril dernier. Les mesures gouvernementales de soutien aux revenus pendant la mise à l’arrêt de l’économie et la suspension temporaire des mensualités de prêts appellent à relativiser cette augmentation rapide de l’épargne irlandaise. En parallèle, la BCI souligne également la faiblesse relative des dépenses des ménages, dont le niveau se situait à la mi-juin encore bien en deçà de celui pré-Covid. Les données relatives aux paiements quotidiens par carte (y compris les retraits) montrent que le total des dépenses est inférieur de -3% en août 2020 par rapport à août 2019. Il demeure toutefois considérablement plus élevé qu’à la mi-avril 2020 (+63%). La valeur des paiements sans contact (dont le plafond a été augmenté de 30 à 50 euros pendant la crise) a crû de +26% au 2ème trimestre 2020 (g.a.), pour s’établir à 1,9 Mds€.

Figure 6 : Variations mensuelles de l’encours des dépôts des ménages
Source : SE de Dublin

Figure 6 : Variations mensuelles de l’encours des dépôts des ménages

À l’inverse, l'encours de crédits aux ménages continue de se contracter pour le cinquième mois consécutif, à hauteur de -2,5% (g.a.) en juillet 2020 après -3% (g.a.) le mois précédent. Il a légèrement progressé au mois de juillet par rapport au mois de juin (+0,8% g.m.).

Enfin, un rapport publié récemment par la BCI souligne l’amélioration de la position financière des ménages avant la crise sanitaire, permettant à ces derniers d’être plus résilients face au choc actuel que lors la crise financière. Entre 2013 et 2018, la richesse nette médiane des ménages a augmenté de +74% ou +76 000 euros pour s’établir à 179 200 euros. Cette croissance résulte principalement de l’augmentation des prix immobiliers et du remboursement de la dette hypothécaire des ménages.

Figure 7 : Variations mensuelles de l’encours de crédits aux ménages
Source : SE de Dublin

Figure 7 : Variations mensuelles de l’encours de crédits aux ménages

Prêts hypothécaires – Selon les données publiées par la BPFI, le montant total des prêts hypothécaires accordés a connu une baisse marginale de -2,3% (g.a.) en août 2020 après une chute substantielle de -30,2% (g.a.) en juillet 2020. Ce montant continue toutefois d’augmenter d’un mois à l’autre, à hauteur de +16,7% en août et +51,2% en juillet ; et ce du fait de la réouverture progressive de l’économie. L’encours total des prêts hypothécaires accordés en août s’établit à 946 M€, dont 556 M€ – soit 59% de l’encours total – pour des primo-accédant.

Entreprises – L’encours de crédits aux sociétés non financières diminue à nouveau en juillet 2020 (-2,1% g.m.), poursuivant sa tendance à la baisse à l’exception d’avril qui avait connu une forte croissance (+4,2% g.m.) en raison de la crise sanitaire. L’encours de leurs dépôts poursuit une hausse substantielle (+16,6% g.m.). La BCI indique que l’encours de crédits aux PMEs s’est établi à 20 Mds€ à la fin du 2ème trimestre 2020, soit l’encours le plus faible jamais observé depuis la création de la série en 2003.

Moratoire – Le nombre considérable de demandes d’accès au moratoire de six mois sur le paiement des intérêts dans le cadre de prêts contractés auprès des institutions bancaires irlandaises témoigne de l’ampleur du choc causé par la pandémie en Irlande. Selon la BCI, le moratoire a significativement allégé les besoins de trésorerie des ménages et des entreprises. 227 233 suspensions de paiement ont été accordées à la fin du mois de juin pour un montant en prêts de 27 Mds€. Les entreprises représentent 40% de cette valeur et les ménages 60%.

Banques – L’impact de la pandémie en termes de créances impayées renforce la pression sur le secteur bancaire irlandais qui souffre de la faiblesse de la demande de crédits et des taux d’intérêt. Selon l’Irish Times, Bank of Ireland (BoI) et Allied Irish Banks (AIB) ont indiqué leur intention de supprimer respectivement 1 500 et 1 400 effectifs ces prochaines années. La filiale de Netwest Group, Ulster Bank, a quant à elle annoncé la suppression de 266 postes, soit 9,5% du total de son personnel. Mais la société mère britannique procède actuellement à un examen stratégique plus large de sa filiale irlandaise dont le sort est pour l’heure incertain. En outre, la BCI a annoncé, dans un communiqué de presse publié le 24 septembre 2020, avoir sanctionné KBC Bank Ireland d’une amende de 18 M€ suite au scandale des « tracker mortgages » pour lequel elle avait déjà blâmé Permanent TSB en 2019.

Discours du gouverneur de la Banque Centrale d’Irlande – Invité à l’occasion d’un séminaire en ligne organisé par l’ « Institute of International and European Affairs » (IIEA), Gabriel Makhlouf a indiqué que le contexte de crise sanitaire actuelle mettait en évidence la nécessité d’achever l’Union bancaire et l’intégration européenne des marchés financiers, des capitaux et du crédit. Selon lui, la politique monétaire doit poursuivre son adaptation à la mondialisation et aux changements induits par le numérique, pour ce dernier notamment en matière de paiements et de productivité sur le marché du travail.

Union bancaire – Pascal Donohoe, le Ministre des Finances irlandais, a présidé son premier Eurogroupe organisé le 11 septembre 2020 par la présidence allemande du Conseil, à Berlin. Il a appelé ses partenaires européens à saisir l’opportunité de la crise pour renforcer l’Union bancaire et libérer ainsi du capital en faveur des économies frappées par la pandémie.

Entreprises

Impact de la crise sanitaire – Selon la dernière enquête du CSO portant sur l’impact de la pandémie de Covid-19 sur les entreprises en Irlande, 63% des entreprises interrogées avaient retrouvé à la fin du mois d’août une activité proche de leur niveau d’avant-crise. 33% d’entre elles ne fonctionnaient encore que partiellement, tandis que 4% restaient portes closes. Près de la moitié des entreprises interrogées ont enregistré un chiffre d’affaires inférieur à la normale pour la période allant du 27 juillet au 23 août 2020. Aussi, 46% des entreprises sondées ont bénéficié de l’aide gouvernementale. La proportion des PMEs à en dépendre (49%) est plus importante que celle des grandes entreprises (33%). Ce sondage est fondé sur une série de questions transmise à 3 000 entreprises et dont les réponses ont été collectées entre le 27 juillet et le 3 août 2020. Il s'agit du 6ème sondage de ce type réalisé par le CSO.

Impact cumulé du Brexit et de la pandémie – Un rapport rendu par le Ministère des Finances en partenariat avec l’ESRI indique qu’un no-deal élargirait le nombre de secteurs impactés par le Brexit et pourrait amplifier le choc sur l’économie dans son ensemble, notamment en termes d’accumulation des incertitudes. Le chevauchement resterait toutefois limité entre les secteurs exposés à un « Brexit dur » (l’agriculture, l’alimentation, l’industrie manufacturière traditionnelle et les services financiers) et ceux les plus touchés par la crise sanitaire (le commerce de gros et de détail, l’hébergement et la restauration ainsi que la construction et l’industrie). L’étude ayant porté sur la seule exposition au risque combiné du Brexit et de la pandémie de Covid-19 des secteurs d’activité, il est précisé que les résultats obtenus ne sauraient être interprétés par les entreprises au niveau individuel. L’impact sur celles-ci pourrait, en effet, différer du secteur dans lequel elles évoluent. 

Evolution des indicateurs macroéconomiques

Tableau mensuel

Tableau mensuel

Tableau annuel

Tableau annuel