Quels temps forts ont marqué l’année 2019 pour la DG Trésor ? Quel impact, en ce début 2020, de l’épidémie de Covid-19 sur l’économie et sur l’activité de la direction ? Quels enjeux pour l’économie française et pour l’Europe, autres que la crise sanitaire et économique en cours, continuent de subsister ? Retrouvez l'entretien croisé de la directrice générale du Trésor et du directeur général adjoint, publié dans le rapport d'activité du Trésor paru le 3 juin 2020.

ORB BD RA 2019

 

Quels sont les temps forts qui ont marqué l’année 2019 pour la DG Trésor ?

Odile Renaud-Basso : La poursuite de la transformation de l'économie française a été au coeur de notre activité en 2019.

2019 marque un tournant sur l'implication de la direction en matière de transition écologique et énergétique qui est devenu un axe stratégique majeur tant dans nos politiques de soutien à l'exportation que dans les sujets d'allocation de l'épargne ou d'investissements publics.

La poursuite de l’agenda de réformes explique les très bons résultats de la France en matière d’attractivité en 2019, qui ont confirmé ceux de 2018. Notre pays a aujourd’hui la capacité d’attirer des investissements internationaux, avec une place de premier plan. Au sein de la direction, nous nous sommes organisés pour renforcer notre action sur ce sujet en créant un bureau dédié. La France a un message équilibré d’ouverture tout en défendant ses intérêts stratégiques. Par exemple, dans la loi PACTE, le dispositif d’autorisation des investissements étrangers en France a été simplifie et complété en élargissant le champ des secteurs concernés.

 

Bertrand Dumont : 2019 a également été une année de poursuite des tensions commerciales entre les Etats-Unis et la Chine, tensions qui sont allées en s’aggravant pour déboucher sur la fin du fonctionnement de l’Organe de Règlement des Différends de l’Organisation Mondiale du Commerce. Nous sommes face à une crise profonde du système multilatéral. Le Trésor a été très actif sur ce sujet, promouvant une position d’équilibre : d’un côté reconnaître les dysfonctionnements pointés par nos partenaires américains, de l’autre être force de proposition pour refonder les mécanismes de l’OMC et défendre une ouverture équilibrée des marchés.

 

Odile Renaud-BassoORB : Au plan international, un des temps fort de cette année 2019 a été la présidence française du G7. La lutte contre les inégalités était le fil directeur de cette présidence, avec des champs variés comme la concurrence à l’ère du numérique, la réforme de la fiscalité internationale pour lutter contre le dumping fiscal et mieux capter l'économie numérique. Sur ce sujet, qui est une priorité de l’OCDE, des avancées importantes ont été réalisées. Ces enjeux sont globaux et structurants pour l’avenir de tous. Et il y a eu un sujet imprévu qui a pris beaucoup plus de place qu’anticipé : le projet Libra et la régulation des monnaies numériques. Le G7 a su formuler une réponse coordonnée et efficace sur les conditions, notamment juridiques, nécessaires à leur développement. C’est un sujet qui soulève nombre de questions, tant économiques que politiques.

 

BD : Au plan européen, nous avons continué à travailler au renforcement de la zone euro et défendu un nouvel agenda de réformes. La France a notamment contribué à une des initiatives phares de la nouvelle Commission : le Green Deal. Mais nous avons aussi vécu l’Europe qui se défait avec le Brexit en 2019. La négociation du traité consacrant le départ du Royaume-Uni a été un moment difficile mais bien mené, avec une implication très forte des services du Trésor. Nous entrons cette année dans une nouvelle phase, qui sera elle aussi difficile, exigeant une implication toute aussi forte : celle de la négociation de la relation future entre l’Union européenne et le Royaume-Uni.

 

ORB : Enfin, nous avons engagé une transformation de notre administration avec le plan Trésor 2020 qui vise notamment à rendre notre organisation plus souple et efficace, via par exemple, le développement du mode projet. La crise du Covid-19 a un peu suspendu les travaux, mais le cadre et les priorités d’action sont bien identifiées.

 

En ce début d’année 2020, quel est impact de l’épidémie de Covid-19 sur l’économie ? Et sur l’activité de la direction générale du Trésor ?

ORB : Cette crise a un impact majeur sur notre mode de fonctionnement.Depuis plusieurs semaines, seules une vingtaine de personnes sont présentes en centrale sur 700 agents. Nous avons su nous adapter ! Tout ce qui a été fait dans Trésor 2020, en termes de travail à distance et de digitalisation, nous a aidés pour surmonter les obstacles techniques liés à cette situation inédite. Nous avons pu assurer de bonnes conditions de travail aux agents malgré le confinement. Pour notre réseau international, la situation dans certains pays implique une grande vigilance. Le Secrétariat général a donc fait un suivi précis des conditions de travail et de sécurité sanitaire des agents dans les différents pays.

 

BD : Cette crise démontre notre capacité à nous réinventer et à être agile dans des circonstances difficiles. La réflexion et la capacité d’analyse sont au rendez-vous, y compris sur des sujets largement inédits. Le nombre de contributions n’a pas faibli.Le réseau a été mobilisé également sur des missions très opérationnelles : le rapatriement de nos concitoyens l'a ainsi beaucoup mobilisé, tout comme l’approvisionnement en produits médicaux et sanitaires.

 

ORB : Le Trésor s’est totalement mobilisé pour répondre à la crise du Covid-19. Nous avons été moteurs dans la conception et la mise en oeuvre des mesures de soutien à l’économie, comme le prêt garanti par l’État ou en faveur de nos exportateurs. Nous avons aussi été en première ligne pour mesurer l’impact de la crise sur notre économie et adapter notre réponse, notamment en élaborant dans l’urgence les simulations de prévision de croissance et de déficit des deux projets de loi de finances rectificatives. Les impacts de cette crise sont majeurs. Tous nos schémas classiques doivent être adaptés pour pouvoir faire face à ce choc et soutenir au mieux l’économie. Cela nous a demandé de la réactivité, de la capacité d’innovation et une force de travail conséquente, tout en réussissant à maintenir un collectif.

 

BD : Au plan européen, nous avons proposé la mise en place d’un fonds de relance financé par de la dette commune et qui viendrait compléter les mesures de 500 milliards d’euros déjà actées par l’Union européenne. Sur le plan international, nous avons été mobilisés pour soutenir nos entreprises exportatrices en lien avec Business France et Bpifrance. Dans ce contexte, notre réseau a joué un rôle clé pour comprendre ce qui se passe ailleurs, comparer les stratégies sanitaire et économique, identifier les risques à venir. Grâce à une forte mobilisation de la France, un moratoire historique sur les dettes des pays les plus pauvres a été proposé et accepté par le G20.

 

Quels enjeux pour l’économie française et pour l’Europe autres que la crise du Covid-19 continuent de subsister pour 2020 ?

ORB : Je ne pense pas que la question se pose en ces termes, et qu’il faille opposer les enjeux liés au Covid-19 et les autres. Nous ne sortirons de la crise du Covid-19 qu’en continuant à travailler sur les sujets de fond pour l’économie française. Cette crise montre à quel point nos sociétés sont fragiles face à des phénomènes imprévus. Il est donc indispensable d’augmenter la résilience de notre économie et d’anticiper les risques. Cette crise doit nous amener à accélérer plutôt que ralentir sur des sujets décisifs pour l’avenir de notre économie. Je pense à la transition écologique et énergétique, au renforcement de la construction européenne et de la coopération internationale.

 

BD : LBertrand Dumonte même raisonnement s’applique en matière de compétitivité. Il faudra la reconstruire. Nous allons devoir tirer les leçons de la crise, notamment en termes de dépendance et de résilience des chaînes de valeur.

Je vois deux actions à mener. Premièrement, il faudra s’appuyer sur ce que nous avons appris sur ce type de chocs, par exemple sur le rôle du numérique, pour réinventer notre industrie et faire redémarrer le mieux possible l’ensemble de l’économie, afin de limiter au maximum les effets du choc subi, notamment sur l’emploi et les compétences. Deuxièmement, il nous faudra être offensifs et organiser la reconquête de marchés dont les acteurs français ont dû se retirer du fait de la crise. Les pays qui prendront ces décisions avec le plus de discernement s’en tireront le mieux.

 

ORB : Enfin, je voudrais profiter de cette entretien pour féliciter et remercier tous les agents qui ont su se mobiliser en un temps record et parfaitement s’adapter pour apporter la réponse attendue de nous à la crise qui démarrait. Je sais que les conditions ont parfois été extrêmes, notamment en termes de délais mais tous, nous avons répondu présents. La qualité des propositions, l’efficacité de leur mise en place montrent la cohésion et la force de nos équipes. Nous pouvons en être fiers.

 

BD : La capacité des équipes à intégrer des problématiques qui jusque-là étaient inconnues est impressionnante ! Pondérer la réponse économique en fonction d’un choc sanitaire, ce n’est pas notre métier, tout était encore inconnu. Chaque jour, je crois que nous démontrons notre capacité à mener à bien cette mission.

 

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