Actualités du transport aérien 15 au 29 mai 2020

Le 18 mai, le Premier Ministre Modi a annoncé que le confinement serait prolongé jusqu’à la fin du mois, et la DGCA a donc, en conséquence, annoncé la poursuite de la suspension des vols commerciaux .

Toutefois les choses ont changé avec l’annonce du 20 mai par le ministre Puri d’une reprise des vols domestiques en Inde à compter du 25 mars, pour un tiers de la capacité habituelle du planning d’été jusqu’au 25 août 2020.

On a assisté ensuite à une véritable cacophonie entre les annonces du gouvernement fédéral et celles des gouvernements fédérés. Certains étaient résolument contre l’idée de reprendre les vols en pleine épidémie mais ont finalement accepté de relancer très peu de vols (le Maharashtra par exemple, Etat qui compte à lui seul 40% des cas, ou encore le Tamil Nadu). Le West Bengale, dévasté par le cyclone Imphan, a sollicité un début des activités le 28 mai, l’Andra Pradesh a décidé de ne pas commencer avant le 26 mai. Rien de vraiment surprenant toutefois quand on sait que cette reprise des vols domestiques survient alors que le pays a fait justement état lundi de sa plus importante hausse quotidienne de cas de Covid-19 diagnostiqués, avec 6 977 nouveaux malades recensés en 24 heures.

Certains pensent que la santé financière précaire et de plus en plus dégradée des compagnies aériennes est certainement la raison qui a poussé le gouvernement fédéral à décider soudainement de la reprise des vols domestiques, avant même de s’être mis d’accord avec les gouvernements des Etats fédérés.

Au 25 mai, 90 000 billets ont été vendus pour la période du 25 au 31 mai. Le 25 soir, le ministre Puri a indiqué que 39 231 voyageurs avaient pris un vol, pour un nombre total de vols opérés de 532 contre 1 095 initialement annoncé. Ceci représente 17% du nombre de vols opérés par jour en période normale d’activité. Le taux de remplissage moyen a été de 50%, et certains vols ont acheminé moins de 10 passagers. Le ministre Puri a fait un démenti de ses propos de la veille le 26 pour annoncer finalement 832 vols, sans préciser s’il avait inclus les vols d’évacuation de la « Vande Bharat Mission ». Air India a annoncé qu’elle opérera 8 428 vols par semaine d’ici au 25 août 2020. Go Air ne proposera des vols qu’à compter du 1er juin…

Le chaos observé cette semaine peut être imputé à plusieurs facteurs combinés. Tout d’abord, les compagnies n'ont eu qu'un préavis de 5 jours pour relancer les opérations, à l’arrêt depuis deux mois. Par ailleurs, de nombreux vols ont été annulés à la dernière minute, ce qui a suscité la colère de passagers. Malgré l'opposition du gouvernement central, plusieurs États ont décrété une quarantaine obligatoire de 14 jours pour les voyageurs qui arrivaient dans leur région.

Certains Etats fédérés imposent 7 jours de quarantaine dans un centre étatique, suivis de 7 jours de quarantaine à la maison. D’autres Etats proposent 14 jours à la maison pour les cas peu symptomatiques, ou 14 jours dans un centre si les symptômes sont plus graves (sans tuotefois que ne soit expliqué quels sont les indices de gravité). Le Kerala, le Telangana, l’Assam, le Punjab, Chhattisgar, le Karnataka, l’Andra Pradesh, l’Uttarakhand et les territoires de l’union Jammu et Kashmir, imposent une quarantaine. Goa vient de décider un test obligatoire à l’arrivée de tous les passagers qui ne pourront pas produire un certificat négatif au Covid-19. Le ministre Puri a rappelé aux Etats fédérés  qu’il leur demandait d’appliquer les SOP fédéraux plutôt que les SOP des Etats fédérés.

Il n’a pas non plus été clairement précisé si une auto déclaration pouvait éventuellement se substituer à l’application de traçage numérique Aarogya Setu quand celle-ci n’a pas été téléchargée par le passager afin d'être autorisé à pénétrer dans l’enceinte aéroportuaire, puis à bord de l’avion. Certains voyageurs n’ont pas pu imprimer leur carte d’embarquement ou leur étiquette bagage…

A ce jour, plus de 15 voyageurs ont été testés positifs à l‘arrivée : 12 cas sur 4 vols IndiGo, 2 cas sur un vol Spice Jet, 1 cas sur un vol Air India et 1 cas sur un vol Air Asia India. Tous les passagers de ces vols et les équipages sont en quarantaine. A noter que 25 agents du CISF sont actuellement sous traitement pour le Covid-19 et que 20 nouveaux cas ont été recensés pour la seule journée du 25 mai. Les pilotes commerciaux sont inquiets et demandent des clarifications au gouvernement sur l’obligation de quarantaine, ne sachant pas s’ils seront confinés à destination du vol qu’ils ont opéré ou à leur retour chez eux.

Par ailleurs, le ministère de l’aviation civile impose un encadrement du prix des billets des compagnies privées pendant les 3 prochains mois, avec un système de 7 tarifs différents. IATA et CAPA insistent sur le fait que cet encadrement des prix ne va pas aider les compagnies aériennes à sortir du marasme dans lequel les deux mois d’arrêt total des vols les ont plongées. Le gouvernement indien n’a apporté aucune aide spécifique au secteur du transport aérien mais présenté 3 mesures pré existantes comme étant des mesures d’accompagnement pendant la crise du Covid-19 : FUA, taux de TVA réduit pour le MRO et désinvestissement de certains aéroports publics.

Un pilote d’Air India a saisi la cour de justice de Bombay, estimant que la compagnie n’avait pas appliqué les consignes de la DGCA sur la distanciation sociale à bord des avions (circulaire du 23 mars) lors des vols d’évacuation.  Depuis la saisine, toutefois, la DGCA a émis une nouvelle circulaire en date du 25 mai, qui annule et remplace l’ancienne, et précisant aussi qu’il n’est désormais plus nécessaire de laisser le siège du milieu vacant à bord des avions. Le cas sera entendu le 2 juin. La Cour de justice a toutefois observé que le « gouvernement devrait être plus préoccupé de la santé de ses concitoyens que de celle des compagnies aériennes ».

Les syndicats d’Air India ont envoyé un courrier au ministre Puri demandant 50 000 crore roupies au gouvernement pour permettre à la compagnie nationale de rester à flots.

Le liquidateur de Jet Airways, en attente d’un éventuel repreneur (c’est la 4ème fois que la date limite pour faire une offre est reportée) a proposé au ministère de l’aviation civile de mettre à sa disposition deux de ses Boeing 777-300 pour participer à la mission Vande Bharat (vols d’évacuation organisé par le gouvernement indien pour ramener les ressortissants indiens bloqués à l’étranger depuis l’interdiction des vols internationaux).

Dans une interview accordée à Live Mint par Arvind Singh, le Chairman de Airports Authority of India, interrogé sur le devenir du transport aérien post crise du Covid-19, a indiqué que l’objectif du gouvernement d’un milliard de voyages par an ne serait pas atteint aussi rapidement qu’initialement imaginé au moment où l’Inde s’apprêtait à devenir le 3eme marché domestique mondial.

Toutefois, il insiste sur le fait que la reprise des vols domestiques se faisant de façon graduelle, sans que l’on sache encore à quel moment les vols internationaux seraient de nouveau autorisés, permettrait justement aux aéroports congestionnés d’avoir plus de temps pour augmenter leur capacité en agrandissant leurs terminaux (par exemple Delhi, Hyderabad, Patna, Badgogra). Il a indiqué qu’AAI continuerait à proposer des aéroports à la gestion en PPP (les 6 prochains ayant été annoncés au début de l’année : Varanasi, Raipur, Bhubaneshwar, Indore, Amritsar et Trichy).

Interrogé sur le nombre maximal d’aéroports pour lesquels un candidat pourrait postuler, il a indiqué que leur nombre ne serait vraisemblablement pas capé, le gouvernement préférant reconduire les appels d’offre à l’identique, mais que la décision finale n’avait pas encore été prise. Selon lui, le plan UDAN va continuer sans changement, y compris pour les aéroports aquatiques.

Les aéroports rouvrent pour les opérations domestiques, mais ne sont pas autorisés à proposer de services aux passagers, en dehors de la vente à emporter de snacks et eau, puisque les compagnies ne servent pas de repas à bord. Cela obère donc 60 % de leurs revenus habituels (revenus non aéronautiques) et pourrait appeler un nouveau modèle économique. Seul un terminal fonctionne à l’aéroport de Delhi et Mumbai, qui se trouvent être en zone hotspot. En outre, à la baisse des revenus non aéronautiques s’ajoute la baisse des revenus aéronautiques engendrée par un niveau de trafic moindre. Il a reconnu qu’AAI n’avait pas accepté la clause de force majeure dans les accords de concession, mais que le paiement de la part qui revenait à AAI était différé jusqu’en juin.

Enfin, il a affirmé qu’AAI pourrait contribuer à faire de l’Inde un hub MRO en assurant la « facilitation dans les aéroports et la disponibilité des terrains ».

Zurich Airport International AG a reçu l’autorisation du ministère de l’Intérieur pour débuter le développement du tout nouvel aéroport de Jewar (coût estimé 29 560 crore roupies, avec une concession pour 40 ans). Il avait été annoncé que les travaux devaient commencer en janvier 2020. Ce projet pharaonique prévoit 6 pistes et un début d’opérations en mars 2023, pour une capacité annuelle de 60 lakh passagers.

L’aviation générale s’attend à une demande à la hausse dans les trois prochains mois car les opérateurs privés estiment pouvoir offrir plus de services et de sécurité sanitaire que les vols commerciaux. Les 25 et 26 mai, les compagnies non régulières ont opéré 22 vols, ce qui n’est pas très différent des 25 vols journaliers pré Crise du Covid-19 en Inde. Selon le type d’appareils, l’heure de vol est entre 1 et 4 lakh. Un marchand de spiritueux a payé un vol charter sur un A320 pour 4 membres de sa famille pour un prix estimé à 20 lakh.

Le gouvernement du Rajasthan indique explorer la possibilité de mettre en place du MRO dans son Etat, et a décidé de mettre en place une nouveau plan pour l’aviation civile, incluant des écoles de formation.

IndiGo et AirAsia India commencent à rembourser les passagers dont le vol n’a pas été assuré en raison du confinement au lieu de leur remettre des avoirs, comme cela était le cas jusqu’à présent.

Les personnels du CISF estiment que l’autorisation d’avoir 375 ml de gel hydro alcoolique par personne représente une menace pour la sureté aéroportuaire puisque c’est un liquide inflammable.