Actualités du transport aérien du 15 au 30 avril 2020

Actualités du transport aérien 15-30 avril 2020

 

Le lock down imposé par le gouvernement Modi, qui se terminait théoriquement le 14 avril, a été prolongé de 3 semaines en date du 15.

La suspension des vols commerciaux, domestiques et internationaux, a donc été prolongée d’autant, alors que le gouvernement, qui avait par ailleurs annoncé un plan de relance pour le transport aérien d’1,6 milliards de $, n’a toujours pas défini de mesures concrètes, au grand dam de l’ensemble de la profession, qui, par l’intermédiaire de ses syndicats et chambres de commerce, rappelle que le secteur représente en Inde 3% du PIB et que 2 932 900 emplois sont menacés.

IATA considère que les compagnies qui sont membres de son association, dont IndiGo, Air India, Spice Jet et Vistara, vont subir 314 milliards de $ de pertes, et que le trafic aérien 2020 sera moindre de moitié par rapport à 2019, avec un chiffre d’affaires correspondant à 55% du chiffre d’affaires de 2019. La région APAC (Asie Pacifique) sera le plus durement touchée.

Sans préjuger d’une nouvelle extension du lock down que le gouvernement Modi pourrait annoncer le 3 mai, au vu de l’envolée du nombre de cas de Covid-19 alors même que chacun sait que les chiffres officiels indiens sont vraisemblablement bien en-deçà de la réalité, puisque très peu de personnes sont testées, les analystes imaginent que les transports domestiques pourraient au mieux reprendre en Juin, mais qu’il faudra sûrement attendre Septembre pour la remise en place des opérations aériennes internationales.

Qui plus est, si la crise a frappé de plein fouet d’un seul coup le transport aérien, il faut s’attendre à un redémarrage lent des opérations. En effet, un certain nombre de facteurs sont autant de freins :

  • Tout d’abord, la récession économique va faire chuter la demande, avec simultanément une possible hausse du prix des billets pour compenser la hausse des coûts liée à la mise en place de mesures sanitaires supplémentaires (parmi les pistes évoquées, et/ou déjà retenues par certaines compagnies comme par exemple Emirates : check up médical systématique à l’embarquement avec prise de température et test sanguin de dépistage du Covid-19, obligation de passeport médical, gel de places dans les cabines pour respecter la distanciation sociale et dans les bus entre l’aérogare et les aéronefs, renchérissant de 50% le coût du voyage…)

  • Il faudra restaurer la confiance des passagers qui craignent un risque sanitaire, une étude laissant apparaître que 60% des personnes interrogées n’envisagent pas de prendre l’avion tant que la pandémie n’est pas entièrement maîtrisée 

  • Les mesures de protection sanitaire et la levée des restrictions de voyages doivent être coordonnées : à l’heure actuelle, l’OACI n’a toujours pas publié de recommandations sur les mesures à mettre en place pour limiter le risque de contamination. La DGCA toutefois, en date du 23 mars 2020 (soit 2 jours avant l’interdiction des vols commerciaux) a publié une circulaire incitant vivement les compagnies qui opèrent en Inde à geler la place du milieu dans les cabines et à instaurer des mesures de distanciation sociale dans les aéroports.

    Par ailleurs, réintroduire des vols internationaux suppose préalablement que les pays concernés aient levé conjointement leurs restrictions de voyage.

Pour essayer de limiter la casse, en l’absence d’un plan de relance et d’aides du gouvernement indien, les entreprises du transport aérien mettent en place des stratégies pour limiter la fonte de leurs faibles liquidités.

Vistara, par exemple, qui avait mis en place 3 jours de carence pour ses 1 200 employés les mieux payés pendant la première quinzaine d’avril, a renouvelé l’opération pour la seconde, essayant ainsi de préserver les emplois.

Go Air également impose des congés sans solde à ses salariés les mieux payés, le top management étant payé 50% de son salaire seulement.

Spice Jet a mis en place des congés sans solde d’un mois tournant pour ses employés assurant la maintenance des aéronefs et son PdG Ajay Singh a baissé son salaire de 30%.

Air Asia India a réduit tous les salaires de 20%.

8 syndicats de catégories de personnels travaillant pour Air India ont écrit conjointement au Ministre de l’Aviation civile pour indiquer formellement leur désaccord sur une coupe salariale de 10%.

Spice Jet et IndiGo sont en pour parler avec les loueurs d’avions pour demander à reporter de 6 mois le paiement des loyers.

A noter qu’IndiGo est la seule compagnie à avoir réglé un salaire complet à tous ses employés pour le mois d’avril, finalement.

Les compagnies optent souvent pour la remise d’un voucher plutôt que de rembourser les billets pour les vols n’ayant pas pu être opérés en raison du lock down, gardant ainsi un peu de trésorerie, car, en l’absence de recettes, il n’en reste pas moins nécessaire de régler les coûts fixes qui épuisent les liquidités des compagnies aériennes indiennes.

En date du 19 avril, la DGCA a d’ailleurs publié une circulaire demandant aux compagnies aériennes de rembourser les billets achetés pendant la période du confinement, et de ne pas mettre à la vente de nouveaux billets tant que la décision d’autorisation de reprise des vols ne leur a pas été signifiée, ce qui n’a nullement empêché certaines d’entre elles de proposer à la vente des billets sur leur site web pour des dates postérieures à la fin théorique de la période de confinement du 3 mai.

En 2016, la DGCA a autorisé les compagnies à assurer elles-mêmes les services d’assistance en escale, ce que la plupart ont décidé de faire, intégrant dans leur masse salariale ces postes pour des services qu’elle sous traitait préalablement. En période de crise, ces salaires supplémentaires sont à régler…

Certes, la chute du prix du baril de pétrole aurait normalement été une bonne nouvelles pour les compagnies aériennes. Seulement, elles n’opèrent quasiment pas de vols, à l’exception des vols de rapatriement ou de transport de fret, et ne peuvent donc pas en tirer un réel avantage. D’ailleurs, les 250 stations de stockage du kérosène sont remplies jusqu’à la lie, et se pose le problème du stockage de la production des raffineries indiennes…

Quand on sait que la presque totalité de la flotte des compagnies aériennes indiennes est clouée au sol, et que le prix du parking peut aller jusqu’à 1 000 $ la journée par aéronef, on imagine bien le coût supplémentaire engendré. Par ailleurs, les places de parking étant moins nombreuses que le nombre d’aéronefs qui opéraient en Inde avant le lock down, certains aéroports, comme celui de Delhi, ont immobilisé une des pistes pour y parquer des avions.

Ces avions, qui habituellement volent environ 15 heures par jour, sont immobilisés, ce qui induit l’obligation de les mouvoir régulièrement pour éviter l’usure des roues qui supportent le poids de l’appareil, et oblige à assurer des opérations d’entretien pour éviter la corrosion et le grippage de certains systèmes. On estime qu’il faut entre 250 et 400 heures de travail pour réaliser une opération d’entretien « A check », obligatoire tous les 90 jours ou après 750 heures de vol pour que l’avion puisse voir son certificat de navigabilité renouvelé par la DGCA…En Inde, plus de 600 avions sont cloués au sol…

En période normale d’activité, le cargo (le transport de fret aérien) fait souvent figure de parent pauvre comparé au transport aérien de passagers. Mais en cette période de crise, c’est la seule activité qui tempère un tant soit peu les pertes du secteur. 

La déclinaison ‘cargo’ de la politique de connectivité régionale, baptisée Lifeline Udan, enregistre pour le mois d’avril 403 vols de transport de fret, représentant 74868 tonnes de marchandises transportées par Air India et sa filiale Alliance Air, l’IAF (Indian Air Force), Pawan Hans (l’hélicoptériste indien), mais aussi Spice Jet, IndiGo et Vistara qui ont modifié les cabines de certaines de leurs avions pour pouvoir faire du transport de marchandises sur les sièges passagers. Certains transports de fret internationaux ont également été opérés.

L’aéroport de Delhi a aménagé un espace de 3 800 m2 pour le chargement, stockage et déchargement de matériel médical.

Les aéroports indiens gérés en PPP ont essayé de faire jouer la clause de force majeure pour geler le paiement du pourcentage du chiffre d’affaires prévu dans le contrat de concession à Airports Authority of India (45,99% pour DIAL et 38,7% pour MIAL par exemple), mais AAI n’a pas accepté et a proposé simplement un report des sommes dues à une date ultérieure.

Les concessionnaires aéroportuaires pourraient saisir AERA (Airports Economic Regulation Agecny) pour demander une hausse des redevances.

Les « metro airports » se préparent à une reprise des activités en mettant en place certaines mesures de distanciation sociale. A noter que l’Inde a constitué un Comité technique comprenant des représentants de l’Administration, des compagnies aériennes, des concessionnaires aéroportuaires, des médecins et des membres du gouvernement pour rédiger de nouvelles SOP (Standard Operating Procedures) mais qu’aucun rapport n’a été remis pour l’instant.

Les vols d’évacuation ont continué pendant la deuxième quinzaine du mois d’avril, moyennant l’obtention d’une clearance de la DGCA.

L’OACI a d’ailleurs envoyé un courrier aux Etats en date du 15 définissant les différentes catégories de vols pouvant être considérés comme des vols d’évacuation : vols affrétés par les Etats, vols humanitaires et vols d’évacuation commerciaux opérés par des compagnies aériennes, espérant ainsi fluidifier les demandes de clearance auprès des autorités d’aviation civile nationales…

Les autorités indiennes ont fait savoir qu’elles exigeraient par ailleurs des justificatifs pour autoriser des vols d’évacuation médicale. (Il faudra prouver que les soins ne peuvent pas être apportés localement).

GAL, la filiale aéroportuaire de GMR, a reçu des autorités de l’Andra Pradesh la lettre de notification d’octroi de la concession de l’aéroport greenfield de Bhogapuram pour une période initiale de 40 ans, avec possibilité de 20 ans supplémentaires.

Le certificat que la DGCA avait accordé au système GAGAN développé par AAI et ISRO le 21 avril 2015, expirait théoriquement après 60 mois et devra donc faire l’objet d’un renouvellement. Rappelons que les aéronefs ont jusqu’au 30 juin 2020 pour être équipés de façon à recevoir les signaux GAGAN.

L’un des moteurs de l’avion d’Air India Express qui rentrait de Sharjah où il était allé livrer 40 tonnes de produits frais a été endommagé à l’atterrissage à Thiruvananthapuram, dans le Kerala, en raison de kites que faisaient voler des enfants.

Simultanément au remaniement ministériel de l’Etat fédéral indien, Rajiv Bansal, le PdG d’Air India et Arvind Singh, le Chairman d’AAI, ont été promus au rang de « Special Secretary ».

L’usine DRAL (Dassault Reliance Aeropsace Ltd), qui assemble des aérostructures pour le Falcon 2000 et produit des composants pour le Rafale sur la SEZ (zone économique spécial) Mihan à Nagpur, a repris 25% de ses activités de production le 20 avril.

Le gouvernement a reporté de 2 mois la date limite pour faire une offre pour Air India.

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