Extrait de l'Editorial :

Jusqu’ici l’on pensait en France que l’Albatros n’inspirait que Baudelaire. Mais nos chercheurs* ont équipé le « prince des nuées » de balises et ainsi pu apporter une première estimation du nombre de bateaux de pêche qui éteignent leurs systèmes d’identification électronique, lorsqu’ils naviguent dans l'océan Austral. Résultat ? L’affaire est loin d’être anecdotique : un tiers des navires arpentant ces eaux, sur plusieurs millions de kilomètres carrés, se rendraient ainsi anonymes. Pratiqueraient-ils une pêche illégale ? Fort soupçon…

Dans le cadre des objectifs planétaires du développement durable, les chefs d’Etats et de gouvernements ont justement demandé à l’OMC de contribuer à éliminer de tels comportements : si des bateaux violent la loi, au risque de l’épuisement des stocks, il faut leur retirer les subventions qu’ils reçoivent. Il y a plus : même si ces navires ont un comportement légal, il faut arrêter de subventionner le développement de surcapacités ou d’activités de surpêche, pour respecter les seuils de renouvellement de la ressource.

L’OMC joue sa crédibilité et peut-être son avenir sur sa capacité à traiter ces questions. L’échéance d’un accord, d’abord fixée à fin 2019, a déjà été dépassée. La prochaine, sa douzième conférence ministérielle en juin 2020, ne laisse aucune échappatoire : il faut réussir.

 Cet enjeu vital est pourtant loin d’être encore atteint dans les discussions à Genève. Les négociations demeurent retranchées derrière des positions convenues. Celle de ceux qui accusent l’Europe de vouloir « verdir » à bon compte à l’OMC sa politique de pêche, pourtant massivement régulée et pilotée au moyen des meilleurs systèmes de surveillance des stocks. Celle de ceux qui réclament des flexibilités pour les pays en développement, au nom du droit de la pêche artisanale, mais où certains pourraient vouloir nicher des possibilités de subventionnement incontrôlé pour développer des flottes de bateaux usines…