Le secteur du tourisme connait une croissance soutenue depuis plus d'une décénnie aux Pays-Bas. Ce succès est en partie dû à la croissance de la consommation de biens et services touristiques par les néerlandais eux-mêmes, mais aussi et surtout par une croissance sans précédent des flux touristiques en provenance de l'étranger. Si ce dynamisme constitue une aubaine économique, il exige également l'élaboration de plus en plus pressante d'une véritable stratégie nationale en matière de tourisme.

Le secteur du tourisme constitue un pilier de l'économiée néerlandaise.

Le secteur du tourisme figure désormais parmi les moteurs de l'économie néerlandaise, au même titre que la construction ou les services informatiques. La consommation touristique intérieure représentait en 2018 près de 90 milliards d'euros de recettes en 2018 aux Pays-Bas[1]. La croissance du secteur s’établie à 6,4% sur un an (4,1% après ajustement à la fluctuation des prix). La valeur ajoutée générée par ce secteur progresse également (+5% sur un an), pour s'établir à 30,4 milliards d'euros, soit 4,4% du PIB en 2018. Les secteurs d'activités caractéristiques du tourisme représentaient près 791 000 emplois en 2018, soit environ 1 actif sur 13 dans le pays.

Les biens et services touristiques consommés par les Néerlandais génèrent 60% de ces recettes du secteur du tourisme, soit 50 milliards d'euros. La croissance du tourisme « domestique » s'établit à près de 5,5%. Par ailleurs, en sus de la consommation de biens et de services touristiques aux Pays-Bas (bars, restaurants, hôtels, musées, parcs d'attraction, casinos,...), les revenus générés par les entreprises néerlandaises sur des prestations touristiques à l'étranger sont également pris en compte (compagnies aériennes, tour-opérateurs, agences de voyages, ...). Dès lors, le dynamisme affiché par le secteur touristique en Europe en général contribue également aux performances du secteur aux Pays-Bas.

Les touristes étrangers participent grandement à cette croissance. Alors qu’un peu plus de 11 millions de touristes étrangers avaient visité les Pays-Bas en 2011, ce chiffre s’est établi à 19 millions en 2018. Il devrait atteindre entre 29 et 42 millions de visiteurs étrangers en 2030 selon les scénarii. Le nombre total de touristes pourrait ainsi atteindre 60 millions de visiteurs domestiques et internationaux en 2030, selon le Bureau Néerlandais pour le Tourisme et les Congrès (Nederlands Bureau voor Toerisme & Congressen, NBTC). Rien qu'à Amsterdam, qui compte moins de 900 000 habitants intramuros (866 000 en 2017), le nombre de touristes (locaux et étrangers) a atteint un record de 19 millions en 2018. Ce chiffre pourrait atteindre 25 millions en 2025, selon les estimations de la municipalité[2].

Les touristes étrangers ont généré plus de 32 milliards d'euros d'activité économique en 2018.  Leur contribution aux recettes du secteur affiche une croissance de 8,2%. Les touristes transfrontaliers (Belges et Allemands) représentent, sans surprise, les deux principaux groupes de visiteurs. La croissance des flux de touristes en provenance de pays européens non limitrophes et de pays non européens (Chine, Amérique du nord notamment) se poursuit également.

Toutefois, le développement des activités touristiques inquiète, et pousse désormais les autorités à réagir.

Les Pays-Bas sont confrontés à un dilemme nouveau, entre croissance des flux touristiques et compétitivité des infrastructures stratégiques du pays. Ainsi, l’aéroport de Schiphol reste confronté à un problème de saturation. Son trafic (3ème rang européen), connaît une croissance soutenue et continue, à tel point que la plate-forme est devenue victime de son succès. Elle a en effet déjà atteint le plafond de mouvements (500 000). Le projet de nouvel aéroport de désengorgement, à Lelystad, à environ 50 km au Nord-Est d'Amsterdam, cumule les retards et ne verra pas le jour, en tout état de cause, avant 2020. Malgré la validation par la Commission européenne, ce mois-ci, du volet concurrence du projet d’aéroport, avec des propositions néerlandaises de réassignation des lignes à bas coût, transportant les touristes et représentant 46% du trafic à Schiphol, sur ce nouvel aéroport, c’est à présent la pollution à l’azote qui risque de retarder la mise en service du nouvel aéroport, voire de menacer l’augmentation du plafond de mouvements aériens à Schiphol (de 500 000 à 540 000 vols)[3].

Des municipalités se sont dotées de stratégies visant à encadrer le développement des activités touristiques, tout en veillant à préserver la qualité de vie des résidents. Il s'agit, en premier lieu, d'Amsterdam, mais aussi des villes comme Haarlem ou Utrecht, dans les villes frontalières à l’instar de Maastricht, ainsi que des villages et attractions prisés tel que Giethoorn, Keukenhof ou encore Zaanse Schans. Si les mesures envisagées, voire adoptées, sont diverses, elles visent avant tout à contrôler les activités générées par les plateformes en ligne dans le domaine de l'hébergement (type Airbnb), et des services aux touristes (services de visites guidées, location de vélos et segways, ...). La ville d'Amsterdam, qui connait une situation de pénurie de logements, souhaite en particulier mieux réguler le développement des logements meublés touristiques : ces logements représenteraient entre 10 et 15% du parc de logements dans certains quartiers du centre-ville. La réflexion va également plus loin, s’agissant par exemple de l’instauration de limites sur le nombre de commerces dédiés aux touristes, ou encore s’agissant de l’implantation en centre-ville des activités fréquentées en majorité par les visiteurs, qui peuvent poser des questions d'ordre public.

Au niveau national, le NBTC, organisme public-privé est en charge de la promotion des Pays-Bas cofinancé par le gouvernement (8,5M€ en 2018) et les professionnels du tourisme, s’efforce à désengorger les centres urbains et attractions touristiques en état de surcapacité. La stratégie établie au niveau nationale, "HollandCity", vise à présenter les Pays-Bas comme une seule et même métropole, assimilant les villes et provinces du pays à des quartiers thématiques (architecture pour Rotterdam, design pour Eindhoven, ou encore région des lacs pour la Frise).

Mona Keijzer, secrétaire d'Etat à l'économie et au climat (CDA), a annoncé une réforme prochaine du schéma de financement du NBTC pour soutenir davantage le développement du tourisme aux Pays-Bas. Les Pays-Bas entendent également promouvoir le tourisme "durable". Le 3 septembre 2019, le prince Harry d'Angleterre a annoncé, lors d'une visite à Amsterdam, le lancement d'une coalition internationale, en partenariat avec des acteurs du secteur tel que le néerlandais Booking.com, l'écossais Skyscanner, l'Américain TripAdvisor ou encore le Chinois Ctrip.


 

[3] Le 29 mai 2019, le Conseil d’Etat a annulé le plan national relatif à la gestion des dépôts d’azote (dit « PAS »), s’appliquant dans le cadre de projet d’infrastructures en zones protégées Natura 2000. Cette décision a d’importantes conséquences en termes d’aménagement et de planification du territoire. Ont ainsi été suspendus 18 000 projets d’infrastructures, agricoles, industriels et résidentiels à travers le pays, dont 126 projets d’intérêt national.