Veille sur le numérique et les start-ups - Royaume-Uni & Irlande - Juillet 2019

TIC / Numérique

1/ Irlande :

Phil Hogan écarté du commissariat européen à la concurrence pour éviter les conflits d’intérêt entre l’Irlande et les géants du numérique – Reconduit comme candidat irlandais pour le poste de commissaire européen par le Premier ministre Leo Varadkar, M. Phil Hogan, actuel commissaire à l’agriculture et au développement rural, ne cherchera vraisemblablement pas à obtenir le portefeuille de la concurrence, actuellement détenu par la danoise Margrethe Vestager. Cette décision a pour objectif d’éviter d’envenimer les relations de l’Irlande avec les firmes multinationales implantées sur son territoire. Ces dernières ont en effet largement tiré parti du cadre fiscal irlandais pour implanter sur l’île leurs sièges européens. En 2016, Mme Vestager a estimé qu’Apple avait bénéficié de la part de l’Irlande d’une aide d’Etat de 13 Mds € sur la période 2003-2013, montant qu’elle a condamné le groupe américain à rembourser. Apple et le gouvernement irlandais ont fait appel de la décision. M. Hogan viserait donc plutôt les postes de Commissaire à l’énergie, aux transports ou au commerce.

Eir propose au gouvernement irlandais de réaliser les objectifs du National Broadband Plan pour 1Md€ – Au cours d’une audition parlementaire, Mme Carolan Lennon, PDG d’Eir, opérateur historique de téléphonie irlandais racheté en 2017 par Xavier Niel, a affirmé pouvoir fournir le haut-débit aux 540 000 foyers compris dans la zone d’intervention du National Broadband Plan (NBP) pour seulement 1 Md€. Pour mémoire, le ministère des communications a confié en mai dernier, pour 5 Mds€ (dont 2,97 Mds€ engagés par l’Etat), le déploiement de la fibre dans le pays au consortium National Broadband Ireland (NBI), dernier participant à l’appel d’offres depuis le retrait d’Eir fin 2017. Ayant déjà permis  à 340 000 foyers d’accéder au haut débit, dont 300 000 initialement compris dans la zone d’intervention du NBP, Eir jouit d’une expérience technique dans le déploiement de la fibre et possède les infrastructures auxquelles NBI devra accéder tout au long de la construction de son propre réseau, pour un coût estimé à 900 M€. Mme Lennon a également déploré la lourdeur des contraintes imposées par l’Etat irlandais dans son appel d’offres, qui ont pour conséquences un alourdissement des coûts du projet. La proposition d’Eir, dénoncée par les autres opérateurs comme une tentative « d’interférence tactique », devrait être rejetée par le gouvernement, notamment parce qu’elle ne respecterait les règles relatives aux marchés publics et impliquerait de lancer un nouvel appel d’offres, retardant le déploiement du NBP de près de trois ans selon le ministère des communications. Contrairement à ses deux anciens concurrents pour l’appel d’offres, Eir et SIRO (joint-venture entre Vodafone et ESB, équivalent irlandais d’EDF), NBI n’a pas souhaité se présenter devant le parlement irlandais.

2/ Royaume-Uni :

British Airways (BA) reçoit une amende record de 183 M£ suite au piratage de données personnelles de passagers – En application du RGPD, l’ICO (Information Commissioner’s Office) a imposé à l’entreprise britannique de transport aérien une amende de 183 M£, soit 1,5% de son chiffre d’affaires. Cette amende record pour violation du RGPD fait suite au piratage de données (identifiants, coordonnées bancaires, adresses et références de réservations) de plus de 500 000 passagers en 2018 par une organisation malveillante. L’ICO a critiqué la défaillance des systèmes de cyber sécurité de BA mais a reconnu leur bonne coopération au long de l’enquête et l’amélioration de leurs systèmes depuis lors. Cette amende marque une césure nette avec l’approche de l’ICO, qui consistait jusqu’alors à accompagner les entreprises plutôt qu’à les sanctionner. Un peu plus d’un an après la mise en place du RGPD, l’ICO veut envoyer un signal clair aux entreprises, en se montrant intransigeante face aux cas de mauvaise gestion des données personnelles.

L’ICO publie un rapport accablant sur l’utilisation des données personnelles dans l’adtech – L’équivalent de la CNIL au RU s’est penché sur les problématiques liées à la collecte et à l’utilisation des données personnelles par les nombreux acteurs de l’industrie de l’adtech. Dans un rapport publié la semaine dernière, l’ICO met en garde contre le non-respect du RGPD par la grande majorité du secteur. Elle critique notamment l’absence de consentement explicite pour collecter certaines catégories de données et une mauvaise information sur leur utilisation. L’ICO appelle les entreprises de l’adtech à collaborer afin d’améliorer les conditions de traitement des données personnelles et souhaite renouveler son rapport dans six mois pour évaluer les changements réalisés d’ici-là.

La Chambre des Communes n’apporte aucune preuve technique justifiant l’exclusion totale de Huaweï des réseaux 5G – Le comité scientifique et technologique de la Chambre des Communes a envoyé les conclusions de son enquête réalisée auprès des opérateurs télécoms au Ministre en charge du numérique, Jeremy Wright. Il admet n’avoir trouvé aucun élément technique qui puisse justifier une exclusion totale de Huaweï du marché des équipements 5G au RU mais, recommande cependant son exclusion du « cœur des réseaux ». Il encourage également la création de structures comparables au Huaweï Cyber Security Evaluation Centre pour les autres fournisseurs d’équipements et de services comme Nokia et Ericsson.

Start-ups

1/ Irlande :

1,34 Md€ investis via les Seed & Venture Capital Schemes en Irlande depuis 1994 – Le DBEI (Department of Business, Entreprise and Innovation) a publié fin juin 2019 un rapport sur le capital d’amorçage et le capital-risque en Irlande, pour célébrer le 25^e anniversaire du Seed and Venture Capital Scheme. Une cinquième mouture de ce plan quinquennal d’investissements dans les fonds de capital-risque, administré par Entreprise Ireland (agence publique en charge de l’aide aux entreprises irlandaises) et doté d’un budget de 175 M€, a été lancée en 2019. Les quatre premiers plans ont permis l’investissement de 1,34 Md€ dans les fonds de capital-risque et de capital d’amorçage depuis 1994, dont 72 M€ dans les entreprises irlandaises en 2018. Cette même année, Entreprise Ireland a soutenu financièrement 82 start-ups à haut potentiel. Le rapport fait également état d’une diversification sectorielle et géographique des investissements depuis 2013 bien qu’ils restent concentrés à plus de 30 % sur Dublin et dans un petit nombre de secteurs (logiciel, télécommunications, électroniques, sciences de la vie).

La Silicon Valley Bank s’engage à prêter 300 M$ aux entreprises irlandaises spécialisées dans la tech et les sciences de la vie – La banque californienne a renouvelé son engagement financier auprès des entreprises irlandaises en mettant à leur disposition 300 M$ (266 M€) sous forme de prêts et de crédits. M. Paschal Donohoe, ministre des finances irlandais, a salué cette initiative comme étant « un exemple concret de la stratégie de l’Ireland Strategic Investment Fund, voué à encourager l’investissement privé dans les start-ups innovantes irlandaises ». Présente sur le marché irlandais depuis 2012, la Silicon Valley Bank a déjà fourni 226 M€ à 29 entreprises irlandaises.  

2/ Royaume-Uni :

L’autorité de la concurrence britannique freine l’intégration de Deliveroo à Amazon - Amazon a investi en mai 2019 575 M$ dans la startup foodtech britannique Deliveroo, ce qui ne constitue toutefois pas un investissement majoritaire. Le 24 juin, la Competition & Markets Authority (CMA) a interdit aux deux entreprises toute démarche d’intégration de leurs services, le temps qu’elle décide si l’opération mérite le lancement d’une enquête de fusion officielle ou non. D’ici là, les deux entreprises ne sont pas autorisées à partager leurs données et efforts commerciaux, ni à transférer des employés d’une entité à l’autre. Cette annonce est une première dans l’industrie dans la mesure où elle fait suite à une prise de participation minoritaire dans une entreprise qui n’est pas directement concurrente, Amazon ayant abandonné son service Amazon Restaurants au RU l’année dernière. Si elle est concluante, elle ouvre la porte à de nouvelles pratiques en matière de concurrence, en phase avec les recommandations du rapport Furman et du rapport européen Crémer-Montjoye-Schweitzer qui plaident pour un contrôle plus poussé des rapprochements d’entreprises du numérique.