Les acteurs français sont historiquement présents dans le domaine économique à Madagascar, comme en témoigne la position prépondérante de la France parmi les partenaires commerciaux, les grands investisseurs, et les contributeurs à l’aide au développement de la Grande Ile. Nos entreprises se positionnent également de manière très active sur les projets économiques en cours à Madagascar, notamment dans des secteurs à forts enjeux pour le pays comme l’énergie.

Le SE de Tananarive a décidé de lancer, en partenariat avec la CCIFM et le comité local des CCEF, une grande enquête en ligne intitulée « Cartographie de la présence économique française à Madagascar ». Il ressort de cette étude une liste consolidée de 268 entreprises répondantes (sur 700 entreprises françaises pré-identifiées), opérant dans des secteurs variés et affichant 2,41 Mds d’euros de chiffre d’affaires, ainsi qu’un effectif de près de 53 200 emplois à fin 2017.

 

Une présence économique forte et multiforme de la France à Madagascar

 La France bénéficie d’une position commerciale solide à Madagascar. Les échanges commerciaux entre les deux pays ont progressé de 70% sur les dix dernières années pour tangenter le milliard d’euros (974 MEUR) en 2017. Selon les douanes françaises, les exportations de produits malgaches vers la France ont représenté 620 MEUR en 2017 (+31% par rapport à 2016) tandis que les importations malgaches de produits français ont atteint 354 MEUR (+10%) la même année, générant ainsi un déficit commercial au détriment de la France de 266 MEUR en 2017.

Malgré ces forts liens commerciaux, selon les chiffres du FMI la France voit sa part de marché diminuer en devenant en 2017 le 3ème fournisseur de la Grande Ile (6,4% de ses importations)  derrière la Chine (18,6%) et l’Inde (9,3%), mais devant les Emirats Arabes Unis (5,5%). Elle demeure cependant le 1er client historique de Madagascar en étant destinataire de 24,9% de ses exportations en 2017, suivie de près par les Etats-Unis (16,5%), du fait de la réintégration de Madagascar dans l’AGOA en 2015. 

Toujours selon le FMI, la France est redevenue en 2017 le 1er partenaire commercial de Madagascar (volume d’échanges de 989 MUSD), devant la Chine (864 MUSD).

Selon la Banque Centrale de Madagascar, avec un stock d’IDE estimé à 712 MEUR en 2014 (dernière année disponible), la France se situe en 4ème position parmi les investisseurs étrangers ce qui la place devant le Japon (440 MEUR) et les Etats-Unis (138 MEUR), mais toujours derrière les grands investisseurs miniers (Royaume-Uni, Canada) et l’Ile Maurice (816 MEUR). Les investissements français se concentrent essentiellement dans le secteur financier, le commerce, les services et les activités extractives .

Sur le plan de l’aide au développement, Madagascar a reçu 44 MEUR de transferts en provenance de la France en 2016. Ce montant place notre pays en deuxième position des contributeurs à l’APD à destination de la Grande Ile, à égalité avec l’Allemagne, mais loin derrière les Etats-Unis (100 MEUR). Près de la moitié de l’APD française (18,4 MEUR) a été mise directement en œuvre par l’AFD, dont la montée en puissance s’est faite ressentir depuis le retour à l’ordre constitutionnel en 2013 avec près de 30 MEUR de prêts et 15 MEUR de dons accordés par an.

En perspective, on note une mobilisation importante de nos entreprises dans les projets en cours et à venir à Madagascar

Les entreprises françaises font preuve d’un fort dynamisme dans le secteur de l’énergie :

  • GreenYellow vient d’achever la construction de la plus grande centrale solaire de l’Océan Indien avec 20 MW de puissance installée à Ambatolampy (26 MEUR d’investissements sur fonds propres). Un contrat d’achat d’électricité d’une durée de 25 ans lie la société à la Jirama afin de couvrir les besoins du réseau interconnecté d’Antsirabe et de renforcer celui d’Antananarivo;
  • Eiffage, réuni en consortium avec Eranove, Themis et la société malgache HIER, a signé un accord cadre avec le Ministère de l’Energie et des hydrocarbures, portant sur la construction du barrage hydroélectrique de Sahofika d’une capacité envisagée de 300MW;
  • A Volobe (est du pays), Colas prévoit de construire un barrage hydroéléctrique de 120 MW. Sur ce projet, l’entreprise est réunie en consortium avec Jovena (Groupe Axian), SN Power et Africa 50 (les discussions se poursuivent avec ces deux derniers partenaires). Jovena vient notamment de livrer deux centrales thermiques au fioul lourd, Noor 1 et Noor 2 à Ambohimanambola, pour une puissance installée de 76MW;
  • A Farahantsana (Mahitsy) la société Sogea-Satom s’est vue attribuer par l’entreprise TozziGreen la construction d’un barrage hydroélectrique de 28MW moyennant un investissement de 35 M€ dont les travaux ont débuté. La filiale de Vinci est également porteuse d’un projet de barrage hydroélectrique de 140 MW à Antetezambato, dont l’investissement est estimé à 320 MUSD;
  • Deux entreprises françaises viennent d’être pré-qualifiées pour le programme Scaling Solar de la Banque Mondiale à Madagascar : Green Yellow  et Voltalia. Le programme prévoit la construction de centrales solaires supplémentaires pouvant accroître l’offre énergétique malgache de 30 à 40 MW.

Des succès ont également été obtenus dans le secteur du transport et du fret aérien :

  • D’un côté, Ravinala Airports (consortium réunissant le groupe ADP, Meridiam, Colas, Bouygues) a décroché le contrat de concession sur 28 ans des aéroports internationaux d’Ivato et de Fascène (Nosy-Be). Les travaux de modernisation prévus dans le cadre du projet coûteront au total 111 MEUR et la livraison est prévue en cette fin d’année 2018 pour Fascène et au premier trimestre 2020 pour Ivato;
  • D’autre part, Air Austral a noué un accord de partenariat stratégique  avec la compagnie aérienne Air Madagascar afin de procéder a son redressement financier et au développement de son réseau domestique et régional.

La France maintient une position de référence dans le secteur du BTP :

  • Cela se manifeste notamment par la construction de trois rocades par Sogea-Satom (Vinci)  : Tsarasaotra-Ivato (rocade Est) ; Andohatapenaka-Anosiala-Ivato (rocade Nord-Est) ; Ambohimanambola-Marais Masay (Pénétrante urbaine Nord). Les entreprises françaises ont également pu se positionner en amont de ces projets, en obtenant des contrats d’étude de faisabilité (Egis-Inframad ; BRL Ingénierie). De même, un contrat annexe de suivi des travaux a été décroché par Setec International.

On observe par ailleurs une percée prometteuse des entreprises françaises dans les domaines des technologies et du numérique:

  • Le contrat de construction du câble sous-marin à très haut débit METISS a été attribué aux sociétés Alcatel Submarine Networks (ASN) et Elettra TLC, filiale d’Orange. Cette infrastructure numérique de 3000 km disposant d’une vitesse de connexion de 24 000 gigabits/seconde devrait être opérationnelle d’ici 2019;
  • Ametis, filiale malgache de la société Surys (ex-Hologram Industries) est l’actuelle gestionnaire du traitement électronique de la délivrance des visas touristiques dans la Grande Ile, via son système eVisa;
  • Air Madagascar a choisi le logiciel Alexis de Maureva, filiale mauricienne du groupe réunionnais Cirrus Informatique, pour rationaliser ses activités opérationnelles dont la gestion de ses équipages et la planification de ses vols.

 

Cartographie de la présence économique française à Madagascar

 Etat des lieux des informations disponibles

La qualité des données sur le tissu économique malgache est altérée par les faiblesses institutionnelles alimentant entre autres, une rétention des informations par les entreprises qui craignent leur usage à des fins déloyales ou fiscales. En outre, les indicateurs de performance économique comme le chiffre d’affaires ou les emplois créés sont absents des bases de données disponibles notamment au niveau de l’INSEE.

Du côté des institutions malgaches, l’Institut National de la Statistique (INSTAT) procède chaque année à un recensement des créations d’entreprises étrangères dont françaises à Madagascar. Néanmoins, ces données sont à considérer avec prudence étant donné le nombre important « d’entreprises fantômes » .

On peut également citer l’enquête sur les IDE menée conjointement par la Banque Centrale de Madagascar et l’INSTAT. Si cette source offre de meilleurs indicateurs chiffrés de la présence française, elle exclut cependant, étant donné les objectifs de l’étude, les sociétés ne recevant pas d’IDE en provenance de France mais dont les actionnaires sont français : ce qui peut être le cas de grands groupes locaux ainsi que de plusieurs entreprises locales n’entretenant pas forcément un lien capitalistique ou financier avec des entités basées en France.

Aussi, afin de pallier ces déficiences, le SE de l’ambassade de France, en partenariat avec la Chambre de Commerce et d’Industrie France-Madagascar (CCIFM) et le Comité Madagascar des CCEF, a décidé de lancer de mai à juillet 2018 un projet de cartographie de la présence économique française à Madagascar en 2017.

Résultats chiffrés de l’étude : une forte présence des entreprises françaises à Madagascar

Sur les 700 entreprises françaises préidentifiées par le SE, 268 d’entre elles (soit 38%) ont renseigné le questionnaire de recensement qui leur avait été adressé.  Il en est ressorti en ce qui concerne les indicateurs de performance économique, un chiffre d’affaires cumulé des entreprises ayant renvoyé le questionnaire de 2,41 Mds d’euros  (23,6% du PIB ) et un nombre d’emplois de 53 177. Il ressort également de cette cartographie une concentration géographique de nos intérêts dans la capitale et les zones urbaines limitrophes puisque seules 19% des entreprises recensées se situent en région.

La présence économique française à Madagascar prend différentes formes qu’il importe de saisir :

  • Les entreprises du CAC 40 implantées à travers leurs filiales ou participations sont au nombre de 9 et pèsent selon nos données 397,1 MEUR de chiffre d’affaires: Air Liquide, Colas (Bouygues), Orange, Lafarge-Holcim, BFV-Société Générale, Total, Sogea-Satom (Vinci), Canal + (Vivendi), Schneider Electric (bureau de représentation). Le groupe Accor est quant à lui présent à Madagascar via les enseignes IBIS et NOVOTEL (hôtel en cours de construction dans la capitale)  à travers un contrat de franchise détenu par l’entreprise CIMELTA (Groupe Rajabali);
  • Les filiales et succursales hors CAC 40 regroupent 56 entreprises et réalisent quant à elles 642,1 MEUR de chiffre d’affaires dont 56 MEUR concernent des filiales de maisons-mères réunionnaises. Ces implantations ont pour la plupart profité de la vague de privatisations et de libéralisation de l’économie malgache à partir des années 90;
  • Enfin, l’essentiel de la présence économique française se manifeste au sein des entreprises locales à capitaux français (1,47 Mds d’euros) dont les grands groupes locaux (1 Mds d’euros). Ces derniers sont majoritairement contrôlés par des dirigeants d’origine indienne présents dans la Grande Ile depuis plusieurs générations et qui sont par ailleurs des ressortissants français. Identifiés comme de puissants conglomérats familiaux, ils ont pour la plupart fortement diversifié leurs activités au fil des ans. Si les investissements dans l’immobilier apparaissent comme une constante, certains d’entres eux se sont dernièrement démarqués par un engagement dans l’internationalisation de leurs activités (Axian, Sipromad, Socota, et dans une moindre mesure la SMTP et Basan).

 Les intérêts économiques français couvrent des domaines très diversifiés . On observe cependant une forte concentration dans les secteurs suivants :

  • Avec 710,4 MEUR de chiffre d’affaires, le secteur de la fourniture d’énergie et de produits pétroliers occupe la première place, riche d’entreprises à capitaux français actives dans ce domaine: Jovena et EDM (Groupe Axian), Galana et Vitogaz (Groupe Rubis), Schneider Electric, First Energy (Groupe SMTP), Total;
  • Le secteur de l’industrie de transformation occupe la 2ème place avec 408,1 MEUR de chiffre d’affaires . On remarque une forte domination de la branche agro-industrielle avec des fleurons comme JB (Groupe Basan), Socolait, Agrivet (Groupe SMTP), Food&Beverage. D’autres branches industrielles sont également représentées : Holcim-Lafarge (ciment) ; Makiplast, Sacoplast, Technopet et la SMTP (industrie du plastique) ;  Air Liquide (gaz industriel) ; Nivo S.A, SICD-Groupe Sipromad (produits ménagers);
  • A la troisième position, le secteur des communications et télécoms (296,0 MEUR) regroupe essentiellement les opérateurs téléphoniques : Telma (Groupe Axian), Orange ; la revente de contenus audiovisuels (Canal +) ; les installations d’infrastructures de télécoms (Camusat) ;  le conseil en communication (Novo-Comm, France Pub) ; ainsi que la presse économique (Eco Austral);
  • Le commerce forme le quatrième secteur d’activités des entreprises françaises avec 287 MEUR de chiffre d’affaires. On y retrouve les principaux  acteurs de la grande distribution comme la Société Malgache de Magasins (Groupe Casino) et Leader Price ; les concessionnaires automobiles : Madauto, Sicam (Groupe CFAO), Ocean Trade&Co ; les distributeurs grossistes : Soredim (Groupe Taloumis), Netter, Sanifer ; les revendeurs de matériels spécialisées : MC3, Regitech (informatique), HG (médical);
  • Profitant de potentialités importantes du secteur primaire ainsi que d’un secteur industriel à prédominance agro-alimentaire, les entreprises françaises se signalent aussi par une présence conséquente dans les activités agricoles et halieutiques (196 MEUR). Outre les exportateurs de cultures de rente (AFH Export , Girofle et Denrées de Madagascar), on constate également la présence d’entreprises dynamiques appartenant à des grands conglomérats : Agrival et Bovima  (Groupe SMTP), Trimeta Agro Food (Groupe Trimeta), Lecofruit (Groupe Basan), Socota Agro Industries et OSO-Farming  (Groupe Socota). D’autre part, le Groupe Refrigepêche ainsi que la Somapêche  sont bien connus de la branche halieutique malgache;
  • Enfin, la présence dans le secteur des services financiers (171,8 MEUR) est assez diversifiée. Les banques occupent l’essentiel du paysage avec la BNI, BFV-SG (Société Générale), BMOI et Banque des Mascareignes (Groupe BPCE), Microcred (devenu Baobab Bank en 2018). Viennent ensuite les activités d’assurance : Saham Assurances (ex-groupe Colina) , Allianz, Active Assurances. Les services de financement des investissements prennent une importance croissante avec des entreprises comme Solidis Garantie, Miarakap, ou encore Investisseurs & Partenaires. Enfin, des entreprises comme le cabinet  Lexel occupent la branche du conseil juridique et fiscal.

D’autres secteurs accueillent des sociétés françaises solidement implantées localement:

  • C’est le cas du transport et de la logistique (78,8 MEUR) : CMA-CGM, AGS Frasers (Groupe Mobilitas), Air France, Bolloré Africa Logistics, Ariva Logistics. Mais également du BTP et matériels de BTP (83,6 MEUR) : Eiffage, Colas, Cimelta (Groupe Rajabali), Sogea-Satom, OTI, Madecasse.

Enfin, on observe ces dix dernières années une percée de nos entreprises dans deux secteurs en pleine croissance à Madagascar.

  • D’une part, l’industrie textile, en plus d’être le premier vivier d’emplois (13 000 employés), réalise 116 MEUR de chiffre d’affaires. Cette branche est fortement constituée d’entreprises bénéficiant du régime des zones franches , avec des sociétés comme Akanjo dont les clients opèrent dans le secteur du prêt-à-porter de luxe et haut de gamme, et Epsilon, qui fournit entres autres les tenues des agents de la Gendarmerie Nationale et de la SNCF. Avec d’autres exemples comme Ultramaille, Wild, Cottonline (Groupe Socota) et Antana Production, nos entreprises prennent activement part au rôle moteur que joue le secteur de la confection dans nos échanges bilatéraux qui, avec 169 MEUR, représente le second poste d’importations françaises en provenance de Madagascar;
  • D’autre part, un savoir-faire français se dégage également dans le domaine du BPO (19,7 MEUR). En témoigne le dynamisme d’entreprises comme Vivetic, Numen, EasyTech, Ariane Etudes, Ibonia. Ces sociétés, qui interviennent dans des activités diverses (call center, externalisation comptable, recueil d’informations, internet en back-office…) constituent un relais auprès de grands groupes internationaux qui y sous-traitent certaines activités de back office à des prix compétitifs. Ce domaine est par ailleurs le premier pourvoyeur d’emplois dans le secteur tertiaire avec 3946 employés, supplantant légèrement les services financiers (3369) et la communication (2002).