Le programme d’échange de dettes contre actions (DES) semble pour le moment principalement assainir les bilans des entreprises d’Etat et des grandes banques
Dans le contexte d’une croissance inquiétante de l’endettement global de l’économie chinoise, les autorités chinoises ont fait de la lutte contre l’endettement des entreprises, en particulier publiques, la « priorité des priorités ». Parmi les principaux outils mis en place à cette fin figure un programme de dettes contre actions (ou Debt to equity swap, DES), réminiscence d’un programme de la fin des années 90 mis en œuvre avec un certain succès dans un contexte en partie similaire.
Après des débuts difficiles, le programme semble être appelé à se déployer pleinement en 2018, avec un total d’environ 1 600 Mds RMB de créances annoncées fin 2017 comme devant être échangées au titre du DES (250 Mds USD, 2% du PIB, 1% des crédits bancaires).
Les informations relativement restreintes sur les détails de ces opérations, et alors que moins de 15% des échanges prévus auraient été menées à leur terme (à fin 2017), rend difficile l’appréciation en l’état de l’effet à long terme du programme sur l’économie chinoise.
Dans un 1er scénario, à l’image du précédent programme, le DES faciliterait la restructuration des SOE peu efficaces. Ces dernières devraient se réformer pour bénéficier du DES et seraient incitées à le faire par de nouveaux actionnaires intéressés prioritairement par les bénéfices futurs.
Dans un 2ème scénario, le DES servirait en revanche uniquement à un assainissement du bilan des SOE sans aboutir à de véritables restructurations des entreprises concernées. Le risque serait alors simplement transféré aux banques, à l’Etat ou aux ménages, selon les modalités financières choisies, mais le problème ne serait que déplacé et repoussé dans le temps.
A ce stade, les échanges impliquent principalement des entreprises d’Etat (ou State owned entreprises, SOE), propriétés d’autorités publiques locales, dans des secteurs traditionnels, souvent sujettes à des problèmes de surcapacités et de rentabilité. Peu d’informations concernant des restructurations des sociétés concernées ont été communiquées. Par ailleurs, les négociations entre les banques et les entreprises semblent être difficiles et déboucher sur des montages financiers complexes qui pourraient aboutir à un transfert des risques des entreprises et des banques vers l’Etat et les ménages.
Le DES précédent s’inscrivait dans un ensemble de réformes conduites sous la direction de ZHU Rongji à la fin du siècle dernier pour traiter les problèmes de dette et d’inefficacité des entreprises publiques qui s’appuyait également sur une redistribution des risques aux ménages. Les mesures allaient néanmoins de pair avec des réformes structurelles profondes, reflétées par la mise au chômage de 30 M de travailleurs et la fermeture de 60 000 SOE. Ces réformes intervenaient par ailleurs dans un contexte particulièrement favorable du fait des marges de rattrapage technologique et de la démographie dynamique de l’époque.
Aujourd’hui, l’orientation politique, les réformes structurelles et les marges de manœuvre paraissent sujettes à un plus grand degré d’incertitude. En outre, le DES tel qu’il est conçu aujourd’hui n’apparait pas en phase avec les recommandations formulées spécialement par le FMI : mise en place de critères d’éligibilité stricts et transparents, exposition limitée des banques aux nouvelles participations, rachat des créances à ces mêmes banques à leur juste valeur (i.e. reconnaissance des pertes des banques), distribution transparente des risques.