Une équipe du Fonds monétaire International s’est rendue au Mozambique du 29 novembre au 13 décembre derniers dans le cadre des consultations Article IV. Derrière ce terme peut-être un peu abstrait, il faut y voir une référence à l'article IV des statuts du Fonds Monétaire International qui stipule que le Fonds « exerce une ferme surveillance sur les politiques de change des États membres et adopte des principes spécifiques pour guider les États membres en ce qui concerne ces politiques ». Le même article précise que « chaque État membre fournit au Fonds les informations nécessaires à cette surveillance et, à la demande du Fonds, a des consultations avec ce dernier sur ces politiques ». En pratique, cette surveillance comprend une mission normalement annuelle durant laquelle de nombreuses questions économiques sont abordées (situation macroéconomique, finances publiques, réformes structurelles, situation du secteur bancaire et financier, etc…). Ces missions sont généralement très attendues car elles donnent lieu à la publication d’un rapport qui établit un bilan complet de la situation du pays. Concernant le Mozambique, cette mission ne visait donc pas à évoquer la reprise d’un futur programme ou les conséquences de l’audit de Kroll sur les dettes cachées (même si ces sujets étaient en toile de fonds) mais bel et bien à dresser un tableau exhaustif de la situation économique.

A l’issue de deux semaines passées au Mozambique, les services du Fonds ont donc livré des conclusions et des recommandations préliminaires : le Fonds a d’abord noté un ralentissement de l’activité économique plus accentué que prévu avec une croissance devrait s’établir à 3% en 2017 au lieu de 4,7% attendu l’été dernier. Le déficit courant (qui fait principalement la somme des échanges internationaux de biens et services) s’est résorbé mais pour de mauvaises raisons : cette évolution reflète en effet une demande interne atone et une baisse des investissements étrangers dans les grands projets gourmands en importations. Elle s’est toutefois accompagnée d’une nette appréciation des réserves de change et d’une stabilisation du taux de change MZN/USD depuis plus de 6 mois. Le taux d’inflation a spectaculairement chuté passant de 27% en g.a fin 2016 à 7% en novembre 2017. Ces accomplissements sont en grande partie liés à une politique monétaire agressive reposant sur une ample utilisation des taux d’intérêts.

C’est surtout en matière fiscale que le Fonds exprime de fortes inquiétudes : le déficit budgétaire s’est en effet creusé (8% du PIB en 2017) en raison de l’accumulation d’arriérés au secteur privé et si des mesures d’austérité ont été adoptées, elles restent insuffisantes pour établir un équilibre des finances publiques. Les recommandations du Fonds aux autorités mozambicaines sont multiples et dans les grands lignes, on peut retenir les points suivants : i )focaliser les énergies sur la réduction du déficit budgétaire en contrôlant mieux la masse salariale et en supprimant les exemptions fiscales ; une profonde réforme des sociétés publiques voire leur privatisation est aussi conseillée ; ii) du fait des résultats obtenus sur le plan monétaire (baisse de l’inflation notamment), le Fonds estime qu’il est temps d’assouplir la politique monétaire pour redonner un peu d’oxygène au secteur privé ; iii) l’amélioration de l’environnement des affaires est également citée comme une priorité afin de favoriser l’activité économique ; iv) à plus long terme, le Fonds recommande au Mozambique de renforcer ses institutions économiques et fiscales pour se préparer à l’arrivée massive des revenus gaziers à l’horizon du milieu des années 2020.

Le FMI publiera un rapport de sa mission en début d’année 2018 auquel sera annexée une analyse de soutenabilité de la dette publique (« debt sustainability analysis »). Ce document, très attendu, devrait permettre au Gouvernement d’entamer des négociations de restructuration de sa dette avec ses créanciers privés (nb : détenteurs des dettes MAM, ProIndicus et Mozam 2023 correspondant à la dette Ematum restructurée en 2016). Une avancée sur ce dossier sera cruciale pour permettre au Mozambique de ramener ses ratios d’endettement à un niveau soutenable. Concernant la reprise d’un programme, les choses restent toujours suspendues à la fourniture de davantage d’informations sur la manière dont les fonds levés dans le cadre de ces emprunts ont été dépensés. A ce sujet, on peut donc dire que l’année 2018 s’ouvre sur une certaine incertitude et que la balle est désormais dans le camp des autorités mozambicaines.