Un système multilatéral fondé sur des règles est essentiel pour assurer la prévisibilité et la stabilité des échanges.

Pour résoudre les tensions commerciales, réformer l’Organisation mondiale du commerce

L'encadrement du commerce mondial par un système de règles multilatérales, avec depuis 1994 l'OMC en son centre, a été une avancée majeure de l'après-guerre pour organiser l'accès aux marchés internationaux sur la base d'une concurrence commerciale loyale. Les autorités françaises soutiennent activement les initatives actuelles de réforme de l'organisation, pour mettre à jour ses règles et mieux réguler la mondialisation.

Les initiatives de l'UE en la matière, soutenues par la France, découlent d'un mandat du Conseil européen des 28-29 juin 2018 ayant donné lieu à un concept paper de la Commission européenne publié en septembre de la même année. Elles s'organisent des priorités suivantes :

  • Moderniser les règles de l'OMC pour traiter les nouveaux enjeux du commerce mondial. Alors que l'essentiel du corpus de règles de l'OMC date des années 1990, il est essentiel de relancer des négociations en particulier pour lutter contre les distorsions de concurrence mondiale liées aux subventions industrielles, aux transferts forcés de technologie résultant d'un traitement inadéquat de la propriété intellectuelle, et pour encadrer le développement du commerce numérique. La prise en compte des enjeux de soutenabilité est également essentielle.
  • Repenser les flexibilités offertes aux pays en développement dans les règles en cours de négociation, en proposant des aménagements différenciés en fonction de la phase particulière de développement dans laquelle se trouvent les pays, et en encourageant les économies les plus avancées parmi eux à appliquer pleinement les règles communes ;
  • Réformer le fonctionnement du système de règlement des différends de l'OMC pour faciliter le réglement des litiges et prévenir les risques d'escalade des tensions, tout en préservant les principes du système agréé dans les accords de Marrakech : système comportant un niveau d'appel et dont les décisions sont obligatoires pour les parties.

Alors que l'Organe d'appel du mécanisme de réglement des différends ne dispose plus depuis décembre 2019 d'un quorum suffisant de membres pour continuer à opérer, les autorités françaises soutiennent également l'adoption par l'UE de « mesures de contingence » sur la base des possibilités offertes par les accords de l'OMC et, de manière plus générale, le droit international. Ces mesures consistent à :

Les autorités françaises portent également la question de la réforme de l'OMC en soutien des positions européennes dans les forums internationaux tels que le G7 (sommet de Biarritz) et le G20 (sommets de Buenos Aires en 2018 et d'Osaka en 2019). Par ailleurs, elles épauleront les efforts de la Commission européenne dans les préparations internationales de la 12è conférence ministérielle de l'OMC, initialement prévue du 8 au 11 juin prochains à Noursoultan et désormais.

La priorité pour la France et l'UE est de faire adopter par l'ensemble de ses membres un programme ambitieux pour la réforme de l'OMC.

L'OMC en bref

Instituée par les accords de Marrakech du 15 avril 1994, l'Organisation mondiale du commerce est une création multilatérale relativement récente. Elle s'appuie cependant sur des principes plus anciens : pour empêcher le retour des guerres commerciales qui avaient marqué la fin du 19ème siècle jusqu'aux années 1930, les alliés avaient envisagé, dès la fin de la Seconde guerre mondiale, la création d'une Organisation Internationale du Commerce pour compléter l'ensemble formé par le Fonds monétaire international et la Banque mondiale, et ainsi assurer la stabilité des échanges mondiaux et le retour à la prospérité économique.

En 1947, sans attendre la mise en place de cette organisation (dont la charte fondatrice, signée à La Havane, ne fut finalement jamais ratifiée), 23 pays définirent un ensemble de règles temporaires regroupées sous le titre d'Accord général sur les droits de douane et le commerce, ou GATT (General Agreement on Tariffs and Trade), accompagné de concessions tarifaires. Jamais remis en cause et doté d'un secrétariat installé à Genève, le GATT devint de facto permanent -- de nouveaux accords (sur les subventions et les normes de produits par exemple) et de nouveaux signataires venant s'y ajouter dans les décennies suivantes.

Parmi les obligations majeures qu'il renferme et qui sont aujourd'hui devenues des éléments fondamentaux du cadre commercial multilatéral figurent :

  • les droits de douane consolidés, c'est-à-dire qu'un relèvement des droits de douane au-delà des plafonds agréés n'est pas autorisé sans offrir de compensation aux pays tiers affectés ;
  • la clause de la nation la plus favorisée, c'est-à-dire que tout avantage commercial accordé à un signataire du GATT doit être automatiquement étendu à tous les autres afin de prévenir les discriminations commerciales, qui avaient conduit à beaucoup de tensions dans les décennies d'avant-guerre ;
  • le traitement national, c'est-à-dire la prohibition des discriminations entre les produits nationaux et les produits importés ;
  • la limitation des barrières non tarifaires, afin que les concessions tarifaires ne soient pas annulées de manière détournée par des restrictions règlementaires ;
  • la réciprocité, c'est-à-dire l'échange entre les pays participants de concessions tarifaires sur l'ensemble des biens couverts (plutôt que s'offrir symétriquement les mêmes concessions produit par produit). Cette réciprocité globale, qui permet à chaque pays de mieux défendre certains de ses intérêts-clé, prévaut dans toutes les négociations commerciales.

Dans les années 1980, la prise de conscience de la nécessité de doter la gouvernance du commerce international d'un cadre institutionnel renforcé, et d'étendre le champ des règles et des engagements de libéralisation, donna lieu à un tournant majeur : la négociation du cycle d'Uruguay, lancée en 1986 et conclue en 1994 par les accords de Marrakech. En plus de la création de l'OMC, la conclusion du cycle vit la signature d'une dizaine de nouveaux accords à portée thématique ou sectorielle : les services (AGCS), la propriété intellectuelle (ADPIC), les instruments de défense commerciale, les mesures SPS, etc. Une autre grande réussite du cycle a été la création d'un mécanisme de règlement des différends, dont les décisions sont contraignantes pour les parties, une fois qu'elles ont été adoptées par les membres (sauf consensus contre) et doté d'un niveau d'appel.

Comptant aujourd'hui 164 membres, l'OMC remplit trois grandes fonctions :

  • la négociation de nouvelles règles commerciales pour encadrer les flux commerciaux ou l'ouverture des marchés, adoptées au consensus de l'ensemble des membres, ou en format plurilatéral par seulement une partie d'entre eux,
  • l'examen périodique des politiques commerciales des membres, la transparence sur leurs politiques liées au commerce grâce à des obligations de notifications, et le suivi de la bonne mise en oeuvre des accords existants dans les différents comités et autres enceintes de dialogue de l'OMC
  • le règlement des différends commerciaux entre les pays membres.

Un nouveau grand cycle de négociations lancé à Doha en 1994, centré notamment sur les aspects de développement dans le commerce ("programme de Doha pour le développement"), devait poursuivre le développement du cadre des règles commerciales multilatérales. Les négociations se sont cependant arrêtées en 2008 du fait de différences irréconciliables entre les membres de l'OMC.

Depuis, seulement quelques négociations multilatérales ont pu être finalisées, notamment l'accord sur la facilitation des échanges en 2013. 

Des groupes de membres ont également ouvert des négociations en format plurilatéral : c'est le cas par exemple de l'accord sur les marchés publics, révisé en 2011, ou de l'initiative en cours sur un cadre pour le e-commerce.

 

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