TUNISIE
Veille sectorielle
Agriculture
Considéré comme l’un des piliers de l’économie tunisienne, le secteur de l’agriculture et de la pêche représentait, en 2020, 10,2 % du PIB et 18 % des emplois, surtout dans les zones défavorisées. Fortement impactée par les différentes crises économiques qui ont secoué le pays -la dernière en date étant celle liée à la pandémie mondiale-, l’agriculture tunisienne a su faire preuve d‘une grande résilience grâce à l’implication des investisseurs privés dans les activités exportatrices. Le secteur souffre néanmoins d’un recul des investissements publics, d’un faible accès aux crédits, d’un manque de structuration des filières et d’une prise en compte insuffisante des enjeux climatiques.
La Tunisie occupe le second rang mondial (derrière l’Espagne) des pays producteurs d’huile d’olive. Lors de la campagne 2019/2020, 400 000 tonnes ont en effet été produites. 365 000 d’entre elles ont été destinées à l’export, vers 54 pays, pour une valeur totale de l’ordre de 2,23 Mds TND. Avec plus de 5 M de palmiers de plus de 200 variétés, la Tunisie se distingue également par ses très bons résultats en matière de production de dattes. Premier pays exportateur en termes de valeur, grâce à la variété deglet nour, la Tunisie a exporté 35 135 tonnes de dattes entre le 1er octobre 2020 et le 7 janvier 2021, ce qui a généré des revenus équivalant à 241 M TND. La Tunisie dispose actuellement de 14 indications géographiques (IG) enregistrées, dont, à titre d’exemple, l’huile d’olive de Teboursouk, les vins Grand Cru de Mornag ou Coteaux de Tebourba, les figues de Djebba, les grenades de Gabès. Sans oublier les pommes de Sbiba ou les dattes deglet nour.
La Tunisie a fortement développé ses compétences dans l’agriculture biologique. Elle est aujourd’hui le 1er pays exportateur africain de produits biologiques et le seul pays du continent à avoir une réglementation en la matière, reconnue par l’Union Européenne. Cette production concerne essentiellement l’huile d’olive, les dattes, les légumes, et les plantes aromatiques et médicinales.
Les entreprises françaises demeurent bien positionnées sous des formes très diverses : à travers des investissements directs étrangers comme le rachat de Rayen Food par le géant de la fermentation Lesaffre, ou la participation de Danone et de Bongrain dans des filiales du Groupe Délice, leader dans l’industrie du lait et dérivés, via des partenariats comme celui lancé en février 2017 entre le Groupe Avril et ses filiales Cristal Tunisie, Lesieur et Sanders, ou, enfin, à travers des sociétés totalement exportatrices, comme c’est le cas de Nextprotein qui offre une une alternative pour l’alimentation de la filière aquacole ou de Selt Marine qui cultive et transforme les algues marines.
Phosphate
Le secteur des phosphates contribuait à hauteur de 1,7% du PIB, de 3,3% des exportations totales (2020) et reste largement dominé par deux entreprises publiques qui forment une holding de près de 12 100 employés (6 300 à la CPG et 5 800 au GCT) détenant le monopole de l’exploitation, de la transformation et de la commercialisation du phosphate : le Groupe Chimique Tunisien (GCT), créé en 1992, et la Compagnie des Phosphates de Gafsa (CPG), créée en 1897.
Ce secteur, historiquement l’un des plus importants de l’économie tunisienne, connaît un déclin depuis 2011, notamment en raison de nombreux troubles sociaux ; la paralysie des sites d’extraction se traduisant par des interruptions dans l’approvisionnement des sites de transformation. Si en 2010, le secteur des phosphates participait à hauteur de 3,3 % du PIB (soit 9 % des exportations tunisiennes), cette contribution au PIB est tombée au cours de l’année 2020 à 1,7 % (soit 3,3 % des exportations totales). Dans le même temps, la Tunisie est passée du 5ème au 12ème rang mondial en matière d’extraction de phosphate. Par ailleurs, alors qu’en 2010, la Tunisie produisait 8 millions de tonnes (Mt), sa production est tombée à 3,8 Mt au cours de l’année 2021. Cependant, cette inflexion tend à se résorber puisque la production de phosphate a connu une croissance de 202 % entre le premier trimestre de l’année 2021 et le premier trimestre de l’année 2022 ; passant de 369 000 tonnes à 1,18 Mt.
Le Groupe français Roullier, spécialisé dans la production des phosphates alimentaires, à partir d’intrants fournis par le GCT, et de leur commercialisation, est notamment présent en Tunisie via sa filiale Timab (Gabès).
Energie
Bien que voisine de deux géants pétrolier (Libye, à l’Est) et gazier (Algérie, à l’Ouest), la Tunisie ne bénéficie pas de ressources en hydrocarbures abondantes. En 2020, le secteur des extractions de pétrole et de gaz naturel représentait 2,5% du PIB et la production nationale d’hydrocarbures couvrait 43% à la consommation énergétique nationale. Alors que la Tunisie dispose de nombreux atouts pour le développement des énergies renouvelables, les projets dans ce secteur peinent à se concrétiser.
En 2020, la balance commerciale énergétique a enregistré un déficit de 4,6 Mds TND (soit 1,4 Md EUR), soit 36 % du déficit commercial global de la Tunisie. Cet indicateur est cependant en nette amélioration par rapport à l’année précédente puisqu’en 2019 le déficit énergétique tunisien a atteint un niveau record de 7,8 Mds TND (soit 2,4 Mds EUR et 40% du déficit commercial global). Cette dépendance énergétique provient essentiellement de l’épuisement de certains puits, de la diminution du nombre de permis de prospection, d’exploration et d’exploitation ainsi que de la baisse graduelle des capacités de production (de 81 000 barils par jour en 2009 à 33 000 barils en 2020). En 2010, la Tunisie produisait 7 millions de tonnes équivalent pétrole (Mtep), assurant un taux d’indépendance énergétique de 93 %, tandis qu’au cours de l’année 2020 la production d’hydrocarbures s’est élevée à 3,5 Mtep, réduisant ainsi son taux d’indépendance énergétique à 43 % ; la différence étant principalement couverte par les importations de gaz algérien. L’Entreprise Tunisienne d’Activités Pétrolières (ETAP) a pour mission l’exploration, la production et la commercialisation d’hydrocarbures bruts. A la fin de l’année 2020, l’ETAP gérait en joint-venture avec des sociétés étrangères, dont la franco-britannique Perenco, 24 concessions ; contre 52 en 2010.
Consciente de l’enjeu que représente sa sécurité énergétique, la Tunisie a mis en place un plan de développement ambitieux – intitulé « stratégie nationale de maîtrise de l’énergie à l’horizon 2030 » – centrée sur le solaire et l’éolien qui consiste, notamment, à porter la part des EnR à 22 % en 2022 et 30 % en 2030 dans le bouquet énergétique, soit une capacité totale de 3 800 MW. Par ailleurs, un cadre juridique favorisant l’investissement, privé comme public, a été instauré en 2015 par la loi n°2015-12 relative à la production d’électricité à partir des EnR. Différents régimes (autorisation, concession et autoproduction) ont été mis en place afin d’organiser des projets de différentes envergures, impliquant une plus grande variété d’acteur et permettant ainsi d’accroitre l’efficacité du déploiement des énergies renouvelables sur l’ensemble du territoire national. De nombreuses entreprises françaises ont remporté des appels d’offres de production d’électricité à partir d’EnR (Engie, Qair, EcoDelta, SmartEnergies…). Par ailleurs, les Autorités françaises contribuent au développement des EnR en Tunisie, notamment via les outils de financement du Trésor (centrale solaire flottante sur le lac de Tunis financée via un FASEP) et de l’Agence Française de Développement (programme SUNREF).
Santé
Au cours de l’année 2020 le budget du Ministère de la Santé s’est élevé à 3,4 Mds TND (1 Mds EUR), soit 3 % du PIB et 7,3 % du budget de l’état, en progression de 17 % par rapport à l’année précédente. D’après le ministère de la Santé, le secteur public de la santé représente près de 46 000 professionnels, tandis que le secteur privé de la santé concentre quant à lui 17 000 salariés et enregistrait un chiffre d’affaires de 870 M TND (267 M EUR), en 2019, selon le Tunisia Health Alliance (groupement d’entreprises du secteur privé de la santé).
L’industrie pharmaceutique tunisienne employait, en 2019, près de 9 000 personnes et comportait 57 unités de production de médicaments (dont 35 unités de médicaments à usage humain), un quart d’entre elle étant dédiées à l’export. La production locale de produits pharmaceutiques couvrait 53 % des besoins du marché local en 2018. Par ailleurs, le secteur pharmaceutique tunisien s’oriente progressivement à l’export et les dispositifs médicaux sont considérés comme l’un des avantages comparatifs du pays.
De nombreuses entreprises françaises sont présentes dans le secteur, telles que Sanofi, Pierre Fabre, ou encore Servier dans le pharmaceutique et ER2i, Sofrecom, GE Healthcare dans l’ingénierie médicale. La France participe financièrement au développement du secteur de l’e-santé (AFD), à la construction du nouvel hôpital régional multidisciplinaire de Gafsa (au titre du mécanisme de conversion de dettes) et à la modernisation de l’offre de soins du gouvernorat de Sidi Bouzid (AFD).
Numérique
Les Technologies de l’Information et de la Communication est aujourd’hui considéré comme l’un des atouts en devenir de l’économie tunisienne. Le secteur contribuait, en 2019, à hauteur de 4,3 % du PIB et à environ 3 % des exportations totales du pays, soit 1 Md TND (environ 306 M EUR). Il bénéficiait jusqu’en 2020 d’un taux de croissance de l’ordre de 8 % par an. Le segment des télécommunications représente 66 % du secteur tunisien des TIC et le segment du matériel 24 % (revente de serveurs, PC, tablettes et écrans). Composé de 2 120 entreprises privées, le secteur du numérique emploie par ailleurs près de 100 000 personnes. Cependant, le taux de chômage en sortie de formation reste néanmoins particulièrement élevé (environ 35 % pour les diplômés du numérique, soit près du double de la moyenne nationale), principalement du fait d’une inadéquation entre l’offre et la demande d’emplois.
Consciente de la faiblesse de son positionnement, la Tunisie ambitionne aujourd’hui de se placer en hub technologique régional. Les autorités tunisiennes ont ainsi élaboré plusieurs stratégies nationales (la stratégie « Tunisie Digitale 2018 » (2014-2018) et le plan national « Tunisie Numérique 2020 » avec une enveloppe globale de 5,5 Mds TND (2,5 Mds EUR) sur la période 2014-2020 (dont 1/3 public, 2/3 privé), visant à faire de la Tunisie une référence numérique internationale et à promouvoir les TIC comme levier important pour le développement socio-économique. La stratégie nationale de transformation numérique (2021-2025), dont la déclinaison opérationnelle est toujours en cours de définition, s’articulera autour de six axes principaux : (i) inclusion numérique et financière, (ii) promotion des investissements locaux et étrangers, (iii) digitalisation de l’administration, (iv) soutien à l’émergence de technologies de rupture, (v) formation et (vi) cyber sécurité et protection des données
Les entreprises françaises contribuent au dynamisme du secteur numérique tunisien notamment dans le segment des télécommunications (Orange Tunisie et sa filiale Sofrecom), des composants électroniques (Sagemcom), de la relation client à distance (Vocalcom et Teleperformance), des logiciels dédiés au secteur financier (Sopra Steria, Codix, Neoxam), des logiciels de gestion (Expensya, Prodware, Advyteam) et de la e-santé (Cegedim). La coopération française dans le secteur se traduit par de nombreux financements et une expertise technique mis au service de projets structurants : soutien à la création du fonds de fonds ANAVA (BpiFrance), création de l’incubateur et accélérateur de startups « The DOT » (Expertise France et AFD), aide à la formation et à la reconversion des métiers du numérique à travers les centres ELIFE (AFD), appui à la numérisation du secteur de la santé etc.
Transports
Le secteur des transports en Tunisie, a contribué d’après l’Institut National des Statistiques pour près de 5 % du PIB en 2020.
Les infrastructures portuaires sont essentielles pour l’économie tunisienne - les 8 ports commerciaux concentrent près de 98 % des échanges extérieurs de la Tunisie - et nécessitent une profonde restructuration. Le port Radès constitue la principale plateforme d’exportation et d’importation du pays, concentrant près de 23 % du trafic enregistré dans l’ensemble des ports de commerce tunisiens, Cependant, les dysfonctionnements des services portuaires à Radès sont considérés comme un goulot d’étranglement pour l’ensemble du pays. Les entreprises françaises sont présentes dans le domaine du transport maritime, à l’instar de CMA-CGM ou encore Bolloré.
La Tunisie compte 9 aéroports internationaux et le secteur de l’aviation civile, clef de voûte de la promotion du tourisme, représente environ 2 % du PIB et concentre près de 35 000 emplois. L’aéroport de Tunis-Carthage, qui concentre 74,2 % du trafic, est très proche de la saturation avec un taux d’utilisation de 98 % et une croissance moyenne annuelle de l’ordre de 5 % depuis 2011 (hors période de pandémie). Si la gestion aéroportuaire demeure le monopole de l’Office de l’Aviation Civile et des Aéroports, l’entreprise française TAV dispose de la concession des aéroports d’Enfidha et de Monastir. Par ailleurs, Air France et sa filiale Transavia assurent de nombreuses liaisons aériennes entre la France et la Tunisie.
Le secteur du transport ferroviaire en Tunisie constitue un axe stratégique pour le développement du pays : développement touristique, désenclavement des populations isolées, réduction des émissions de gaz à effet de serre, renforcement de l’inter-connectivité des villes. La SNCFT est la compagnie ferroviaire nationale créée en 1969 pour gérer, exploiter et maintenir le réseau ferroviaire tunisien relevant du ministère du Transport. La SNCFT est une entité ferroviaire intégrée transportant des passagers et des marchandises qui exploite un réseau de 2 268 km, dont 267 stations. Les entreprises françaises sont présentes en Tunisie dans le transport ferroviaire et notamment grâce au dynamisme des financements Trésor et AFD. Les entreprises françaises évoluant dans ce sectyeur en Tunisie sont nombreuses : nous pouvons notamment citer les grands groupes Alstom et Colas ou les bureaux d’études Egis et Systra.