Indicateurs et conjoncture

Honduras : L’économie du pays en récession sous l’effet combiné du COVID-19 et des ouragans

 

Le Honduras a souffert d’un double choc en 2020. D’un côté la pandémie du COVID-19 a fortement touché le pays en déclenchant une récession économique en raison des mesures de restrictions de l’activité. De l’autre, en l’espace de deux semaines, les ouragans Eta et Iota ont provoqué des dégâts et des inondations inédits depuis l’ouragan Mitch en 1998.

Les mesures strictes de confinement ont permis d’enrayer la propagation du COVID-19 malgré la pression sur l’économie.

Face au développement de la pandémie, le Honduras a rapidement mis en place des mesures de confinement très strictes, avec notamment la fermeture des frontières et l’instauration d’un couvre-feu national absolu du 16 mars au 8 juin.

Les mesures sanitaires prises pour faire face au virus affectent l’économie locale : le Honduras devrait connaître une récession comprise entre -6,6% (selon le FMI) et -9% (Banque centrale) en 2020 (contre +2,8% attendu pré-COVID). L’économie hondurienne devrait particulièrement être affectée par les retombées importantes sur son commerce extérieur (notamment avec les Etats-Unis, leur principal partenaire commercial, qui absorbent 55,6% des exportations honduriennes[1]), le coût économique des ouragans (cf. infra), et la diminution des arrivées de touristes (secteur qui représente 14,6% du PIB et emploie 542 000 personnes). Malgré la crise économique et sanitaire, la Banque centrale prévoit pour 2020 une augmentation de 8% des transferts de fonds de migrants (une décélération par rapport à l’augmentation de 13,1% en 2019) et ce contrairement aux premières prévisions. Le FMI prévoyait une reprise rapide en 2021 avec un taux de croissance du PIB à 4,9% mais au vu des  conséquences des ouragans, les prévisions devraient être revues à la baisse au cours des prochains mois.

Les chiffres du PIB au T2 2020 montrent l’ampleur de la contraction économique. Selon la Banque centrale, le PIB a enregistré une baisse de 19,1% en g.a au T2 (contre une baisse de 9,6% g.a pour le Guatemala, de 19,3% g.a pour El Salvador et de 8,6% g.a pour le Costa Rica)[2]. Fortement dépendant de la demande des Etats-Unis pour ses exportations, le Honduras a enregistré une contraction importante du secteur secondaire (qui a contribué pour 19% du PIB en 2019) de -30,8% g.a, due notamment à la baisse d’activité des « maquiladoras » du textile. L’agriculture a fait preuve de résilience face à la pandémie avec une baisse de 2,7% g.a au T2, pour un secteur qui représente 14% du PIB.  

Une reprise lente qui risque d’affaiblir un pays particulièrement vulnérable.

Selon le Conseil hondurien de l'entreprise privée (COHEP), 500 000 emplois ont été détruits ou suspendus en raison de la quarantaine et en avril près de 250 000 familles étaient en situation d’insécurité alimentaire. Ainsi, le taux de chômage du secteur formel devrait augmenter à 13% d’ici fin 2020 (contre 5,7% en début d’année) et l’informalité représenterait près de 70% des emplois.

En l’espace de deux semaines, les ouragans Eta et Iota (de catégorie 4 et 5 à leur arrivée sur le territoire hondurien) ont frappé le Honduras et une grande partie de l'Amérique centrale. A fin novembre 2020, près de 3,7 millions de personnes ont été touchées dans le pays, presque 400 000 personnes ont été déplacées et de nombreuses infrastructures (hôpitaux, routes, lignes électriques, etc.) ont été dévastées.

Selon les premiers chiffres à fin novembre 2020, Eta et Iota ont provoqué la mort d’une centaine de Honduriens et les premières estimations évaluent les dégâts à 5 Mds USD. Les dégâts économiques sont comparables à ceux de l’ouragan Mitch en 1998, qui avait fait plus de 5 000 morts et couté près de 4 Mds USD à l’économie hondurienne.

Le Honduras est confronté à d’importants besoins de financements qui pourraient alourdir l’endettement du secteur public

La dette publique hondurienne représenterait 46% du PIB en 2020 et 50,4% en 2021 selon les dernières prévisions du FMI (contre 40,3% du PIB en 2019). Le Honduras est tout de même le deuxième pays le moins endetté de la région après le Guatemala (33,9% du PIB prévu pour 2021). Il existe cependant un niveau élevé d’exposition au risque de change pour la dette hondurienne due à la haute proportion de celle-ci à être libellée en devises étrangères (62%, pour l’essentiel en USD). Malgré cette vulnérabilité, les réserves internationales de la Banque centrale représentaient 19,4% du PIB en 2019 (5,1 mois d’importations), soit un niveau suffisant pour garantir la stabilité du taux de change. De ce fait, le lempira s’est légèrement apprécié depuis le début de la crise du COVID-19, au contraire des autres pays en développement. En outre, près de 60% de la dette extérieure a été contractée auprès d’organisations multilatérales.

Les agences de notation les plus importantes ont maintenu leurs notes souveraines du risque pays au cours du premier semestre 2020, anticipant  une reprise économique rapide et un engagement du gouvernement en faveur de la modération fiscale (notamment avec la Loi de Responsabilité Fiscale qui limite le déficit budgétaire à 1% du PIB). Le gouvernement avait prévu initialement pour 2020 d’encaisser 4,5 Mds USD mais suite à la pandémie, le ministère des Finances prévoit des recettes comprises entre 2,9 et 3,2 Mds USD.  

Comme de nombreux pays de la région, le Honduras a par ailleurs eu recours à la dette notamment auprès de bailleurs internationaux pour faire face aux besoins de financements. La dette contractée au cours des neuf premiers mois de l’année 2020 s’élevait à 1,2 Md USD (376,2 M USD auprès du FMI, 350 M USD auprès de la BCIE, 244 M USD auprès de la Banque Mondiale et 225,8 M USD auprès de la BID). Ce recours à la dette devrait ainsi permettre au gouvernement de disposer de marges de manœuvre supplémentaires pour répondre à la crise actuelle.

Le coût économique lié à l’ouragan Eta a été estimé à 1 % du PIB  par le président de la Banque centrale. Celle-ci a donc réduit son taux d’intérêt directeur de 75 points de base, à 3%, son niveau le plus bas depuis 2005. Le taux directeur s’élevait à 5,5% en février 2020 avant la pandémie, puis a été abaissé au fur et à mesure afin de stimuler le crédit et l’économie hondurienne.


[1] En 2018

[2] Données du Conseil Monétaire Centre-américain (SECMCA)

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