APD : Une intervention des bailleurs limitée

Avec une APD totale nette de 84,2 MUSD en 2018, la présence des bailleurs en Érythrée reste limitée. Même si certains signaux semblaient témoigner d’un changement d’état d’esprit en 2018 (paix avec l’Ethiopie, participations aux assemblées de la BAD, de l’ONU, et accueil d’une mission du FMI), les multiples incidents diplomatiques couplés à un climat politique défavorable, découragent l’implication de la communauté internationale.

Bien que les besoins du pays soient nombreux, l’engagement des bailleurs reste limité. L’Érythrée est 182ème sur 189 pour l’IDH en 2019. Avec 61 % de la population entre 15 et 64 ans au chômage, la pauvreté reste prégnante : le taux de pauvreté s’établissait en 2015 à 69 % et plus de la moitié des enfants de moins de cinq ans souffre de malnutrition. Selon les données du CAD, qui ne couvrent donc pas la Chine, malgré une légère hausse en 2018 (+ 6 %) avec 84,2 MUSD, le montant total d’APD reçue par l’Érythrée reste inférieur à celui des pays voisins : 4,9 Mds USD pour l’Éthiopie, 2,5 Mds USD pour le Kenya et 179 M USD pour Djibouti.

 

En 2018, la majorité de l’aide provenait de bailleurs multilatéraux (69 %), aux premiers rangs desquels le Fonds mondial pour la santé (17 MUSD) et les Nations unies (15 MUSD). Les financements bilatéraux sont faibles : seuls les Émirats Arabes Unis ont octroyé un montant d’aide significatif en 2018 (10 MUSD). L’APD bilatérale française en 2018 totalisait 0,5 MUSD (0,47 MUSD en 2017), faisant de la France le 10ème bailleur bilatéral de l’Érythrée.

 

Des relations avec les bailleurs caractérisés par des « incidents diplomatiques » et une faible capacité d’absorption. Après un «  incident diplomatique », la Banque mondiale a, depuis 2009, dû cesser ses engagements en Érythrée, les efforts récents ayant été suspendus par le gouvernement en janvier 2020[1]. De même, la BAfD, avait suspendu ses actions en 2006 avant de les reprendre timidement à compter de 2009. La dotation (en dons) octroyée par l’UE en Érythrée dans le cadre du 11ème FED (2016-2020) s’élève à 180 M EUR. Elle n’a cependant fait l’objet d’aucun décaissement jusqu’en mars 2019, lors de la mise en place de l’Emergency Trust Fund for Africa[2].

 

Néanmoins l’Érythrée a enregistré des progrès socioéconomiques dans les dernières décennies. Selon le rapport annuel de la PNUD publié en octobre 2020 : le pays a remonté dans le classement IDH, passant du 239ème rang (0,424) en 2005 au 182ème rang (0,434) en 2018 ; la durée moyenne de scolarisation serait passée de 3,8 ans en 2010 à 5 ans en 2018 ; l’espérance de vie s’est accrue de 16,4 années entre 1990 et 2018 ; le revenu national brut par habitant a progressé (+ 91 %) passant à 1 708 USD/habitant en 2011.

 

Si la normalisation des relations avec l’Éthiopie en 2018 avait constitué un espoir d’ouverture internationale, la plupart des bailleurs se voient limités dans leurs actions. Ils évoquent l’impossibilité de contractualiser leurs engagements en raison du refus du gouvernement érythréen de répondre aux conditionnalités imposées par ces derniers. En effet, le pays refuse de mettre en œuvre les réformes proposées en matière de droits civils, politiques, sociaux et culturels et continue de pratiquer des détentions arbitraires, du travail forcé au sein du « service national » et limite les libertés fondamentales (expression, association, religion).

 

Profil de l’APD de l’Érythrée (source OCDE)

Classification (BM, 2020) : PMA

Programme FMI en cours : non

APD en part de RNB (BM, 2018) : n.c.  

APD par habitant : n.c. 

Niveau d’endettement selon le FMI: n.a.

 

 

APD reçue dans le cadre de la Covid19

L’Érythrée a refusé l’envoi d’équipements médicaux et kits de dépistage proposée par la Fondation Jack Ma. Néanmoins, depuis l’annonce du premier cas le 21 mars, l’UNICEF a fourni une aide en nature. Ainsi, plus de 12 000 bouteilles de désinfectants et 86 000 barres de savon pour les mains ont été produits localement et distribuées. Par ailleurs, 270 messages d’intérêt public ont été diffusés à la télévision et radio nationales ainsi que trois numéros verts mis en place. Enfin, l’UE a accordé une aide d’urgence sanitaire de 6,6 MEUR, dans le cadre de l’initiative Team Europe. Les décaissements tardent cependant en raison des lenteurs des autorités locales.

Focus sur un projet clé

L’Union européenne a octroyé trois subventions d’un montant total de 95 MEUR à l’Érythrée, au titre du Fonds fiduciaire d’urgence pour l’Afrique. Il s’agit de : i) 30 MEUR pour la création d’emplois agricoles durables et le renforcement de la sécurité alimentaire, ii) 60 MEUR pour la deuxième phase du projet de réhabilitation des routes entre l’Érythrée et l’Éthiopie et iii) 5 MEUR pour le renforcement des dispositifs statistiques et macroéconomiques nationaux, actuellement déficients.

          

Principaux bailleurs entre 2014 et 2018

 

 


APD cumulées  MUSD

Part dans

l’APD totale

Fonds mondial

77,66

24 %

Nations Unies

97,71

19 %

Emirats Arabes-Unis

64,36

16 %

 

 

                

 

 



[1] Le programme de la Banque en Érythrée consiste actuellement en un nombre limité d’expertises techniques et en aucune opération. L’apurement des arriérés auprès de la Banque (115 M USD) constituant une des conditions nécessaires à son réengagement local, elle est désormais à la recherche de solutions auprès d’autres bailleurs pour financer cet apurement et se réengager.

[2] Les fonds ont ainsi été réalloués comme suit : infrastructures (routes et énergie) (80 M EUR dont 20 MEUR déjà déboursé), la création d’emploi dans l’agriculture (30 MEUR), le développement de statistiques macroéconomiques (5 MEUR), les réformes économiques (5 MEUR), l’engagement de la diaspora dans le développement national (5 MEUR), l’amélioration du système judiciaire (5 MEUR), le soutien pour la mise en œuvre des recommandations UPR (Universal Periodic Review – 5 MEUR) et le soutien du secteur de la santé (6,6 MEUR).

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