Indicateurs et conjoncture


AAA

L’Egypte se caractérise par sa démographie, plus de 103 M d’habitants en 2021, ainsi que par sa position géographique stratégique, au carrefour de trois continents et de deux mers reliées par le canal de Suez. Elle jouit de son rayonnement culturel dans le monde arabe ainsi que d’un patrimoine historique exceptionnel.

La superficie de son territoire est de 1 M km² découpés administrativement en 27 gouvernorats, dont Le Caire, Giza et Alexandrie qui regroupent près du quart de la population et concentrent la majeure partie de l’activité économique. Plus de 95% de la population est concentrée sur 7% du territoire. L'agglomération du Caire, la capitale, compte près de 23 M d’habitants.

Le PIB de l’Egypte, le deuxième d’Afrique, était d’environ 403 Mds USD sur l’exercice budgétaire 2020/21. Il résulte d’une économie diversifiée, structurée autour des secteurs de l’immobilier et de la construction (17%), manufacturier (15%), commerce de gros et de détail (14%), agricole, forestier & pêche (12%) et extractif (10%). Le secteur public occupe une place prépondérante dans l’économie, représentant 31% de l’activité et 74% des investissements (tout secteur public confondu). Par ailleurs, l’inclusion du secteur informel, qui représenterait entre 30 et 60% de l’emploi total, augmenterait le PIB d’au moins 40%.

AAA

L’Egypte bénéficie traditionnellement des revenus de trois rentes :

  • Les transferts de la diaspora (de 18,4 Mds USD en 2013/14 à 31,4 Mds USD 2020/21),
  • Le tourisme (les revenus sont tombés à 3,8 Mds USD en 2015/16 puis ont significativement augmenté pour retrouver en 2018/19 un niveau pré-révolution avec 12,6 Mds USD, avant d’être ramené à 4,8 Mds USD en 2020/21 en raison de la crise sanitaire),
  • Les redevances d’utilisation du Canal de Suez (5,5 Mds USD en moyenne depuis 2014/15 ; plus de 7 Mds USD en 2020/21).

AAA

A la suite de la modernisation de son économie au milieu des années 2000, l’Egypte a connu des taux de croissance record (7% entre 2005 et 2008). Toutefois, la crise financière de 2008 et l’instabilité politique depuis la chute du Président Moubarak en 2011 ont durablement affaibli l’économie.

L’élection à la présidence de la République d’Abdel-Fatah Al-Sissi en juin 2014 (puis sa réélection en 2018) a marqué le retour de la stabilité politique alors que le processus de transition s’est achevé par l’élection du Parlement en janvier 2016. Le 2 avril 2018, le président Sissi a été réélu pour un mandat de quatre ans. L’approbation par référendum, en avril dernier, de la révision de la Constitution égyptienne, prolonge le mandat actuel du président jusqu’en 2024, et l’autorise à briguer un troisième mandat lors des élections présidentielles de 2024.

La croissance économique est l’une des plus dynamiques de la région ANMO. Elle est néanmoins insuffisante pour compenser le poids des dépenses publiques qui se sont multipliées par 2 en 5 ans. Celles-ci se décomposent principalement en remboursement des intérêts de la dette (35% du total), en salaires et traitements des fonctionnaires (20%), et en subvention et dépenses sociales (19% du total). En 2020/21, 14% du budget a été consacré aux dépenses d’investissement. La croissance est également insuffisante pour absorber de façon inclusive les quelques 800 000 jeunes qui rejoignent chaque année le marché du travail et réduire de façon durable la pauvreté (29,7% des égyptiens vivraient sous le seuil de pauvreté en 2019/20 – fixé à environ 1,7 USD par jour par les autorités - contre 16,7% vingt ans plus tôt).

AAAAAA

En termes d’ouverture économique, l’Egypte souffre d’un déficit commercial structurel (42,1 Mds USD en 2020/21, 10% du PIB) en raison de la faiblesse de son appareil exportateur et d’une part conséquente d’importations incompressible (l’Egypte étant par exemple le 1er importateur de blé au monde, sa production manufacturière et industrielle dépend à 40% d’intrants importés). D’un point de vue conjoncturel, les exportations égyptiennes n’ont pas profité de la dépréciation massive de la devise nationale de 2016, car l’effet-prix a surtout impacté négativement les achats de biens intermédiaires importés. Et en tout état de cause, l’avantage change a été largement compensé par l’inflation qui en est résulté et le surenchérissement du coût des intrants.

Sur le plan des infrastructures, le gouvernement a lancé une série de méga projets dont les plus emblématiques sont le doublement du canal de Suez, le développement de la région économique attenante et la construction d’une nouvelle capitale administrative. Parmi les autres grands projets dits « nationaux » en cours de développement ou finalisés, on pourra citer : 36 complexes urbains touristiques, 13 villes nouvelles, de nouveaux centres industriels dans 22 villes, une centrale nucléaire, la bonification de terres désertiques ou encore 8000 km de nouvelles routes et les premières lignes à grande vitesse. 

La situation économique et financière de l’Egypte a été marquée ces dernières années par le programme d’ajustement macroéconomique déployé par les autorités sous l’égide du FMI, en échange d’une facilité de crédit de 12 Mds USD sur trois ans, et dont la dernière tranche a été déboursée fin 2019. Les effets du programme sur l’économie égyptienne peuvent être résumés ci-après :

  • Consolidation budgétaire : En quasi situation de défaut de paiement à l’été 2016, l’Egypte a procédé à un assainissement conséquent de ses finances publiques via des mesures de consolidation budgétaire comme la loi sur la réforme du service public, la mise en place de la TVA et le démantèlement progressif des subventions énergétiques avec une hausse par vague des tarifs régulés (électricité, eau, gaz, carburants et autres tarifs publics). Le déficit public a été ramené de 12,5% du PIB en 2015/16 à 7,7% du PIB en 2020/21 et un excédent primaire de 1,3% a été enregistré. La dette publique, détenue en majorité par les banques domestiques, qui avait constamment augmenté depuis 2008 (67% du PIB) pour atteindre 103,3% du PIB en juin 2017, diminue en valeur relative à 89,6% du PIB en juin 2020.
  • Redressement des comptes extérieurs : condition pour signer l’accord avec le FMI, la Banque centrale a procédé le 3 novembre 2016 à la libéralisation totale du marché des changes. Celle-ci, qui a vu la livre se déprécier fortement avant de se stabiliser aux alentours de 17-18 LE/USD (contre 8,8 LE /USD), a permis de drainer le marché noir et de résoudre le problème de disponibilité en devises du système bancaire. Cette libéralisation a entrainé une hausse de l’inflation sans précédent culminant à 33% en juillet 2017 qui a néanmoins entamé sa décrue dès 2018 pour atteindre 3,1% en octobre 2019, soit son taux le plus bas depuis décembre 2005. La libéralisation du taux de change et la bonne performance des rentes traditionnelles a permis de ramener le déficit courant à 2,4% du PIB en 2017/18 et 3,1% du PIB en 2019/20. Les réserves en devises de la Banque Centrale ont également été reconstituées à plus de 45 Mds USD fin 2019 contre moins de 16 Mds USD en juillet 2016.
  • Retour de l’Egypte sur les marchés financiers internationaux : l’ajustement conjoncturel engagé par l’Egypte a permis de restaurer sa crédibilité sur les marchés financiers (22 Mds USD et 4 Mds EUR ont été levés sur les marchés internationaux depuis janvier 2017 pour couvrir une partie de ses besoins de financement) et aux investisseurs étrangers de portefeuille de revenir en Egypte (plus de 16 Mds USD de flux nets entre 2017/18 et 2018/19).
  • Mesures d’ajustement structurel : plusieurs mesures ont été initiées afin de corriger les rigidités de l'économie égyptienne (nouvelle loi sur l'investissement, loi sur les licences industrielles) et d’améliorer l’environnement légal des affaires. L’objectif annoncé est d’améliorer la compétitivité externe de l’Egypte et de soutenir les exportations, le tourisme et les IDE.

L’Egypte a pu donc faire face à la crise sanitaire dans un cadre macroéconomique relativement assaini par le précédent programme du FMI. Les autorités ont notamment annoncé dès mars 2020 un paquet de mesures contra-cycliques - budgétaires (2% du PIB) et monétaires (-300 pdb des taux directeurs) - tout en sollicitant un nouveau soutien financier du FMI (RFI de 2,8 Mds USD en mai et SBA de 5,2 Mds USD en juin) pour faire face aux tensions de financement externe (sorties de capitaux, arrêt brutal des recettes touristiques). Au terme de l’année fiscale 2019/20 et 2020/21, l’Egypte a été l’un des rares pays a enregistré un taux de croissance de son PIB respectivement de 3,6% et 3,3%.

L’Egypte a pu donc faire face à la crise sanitaire dans un cadre macroéconomique relativement assaini par le précédent programme du FMI. Les autorités ont notamment annoncé dès mars 2020 un paquet de mesures contra-cycliques - budgétaires (2% du PIB) et monétaires (-300 pdb des taux directeurs) - tout en sollicitant un nouveau soutien financier du FMI (RFI de 2,8 Mds USD en mai et SBA de 5,2 Mds USD en juin) pour faire face aux tensions de financement externe (sorties de capitaux, arrêt brutal des recettes touristiques). Au terme de l’année fiscale 2019/20 et 2020/21, l’Egypte a été l’un des rares pays a enregistré un taux de croissance de son PIB respectivement de 3,6% et 3,3%.

Alors que l’Egypte était dans une phase de reprise économique, la guerre entre la Russie et l'Ukraine a renforcé les risques et les inquiétudes sur l’équilibre économique du pays, parmi lesquels : la soutenabilité de sa dette publique et du service de ses intérêts sur les finances de l’Etat en particulier (10% du PIB et un tiers du budget en moyenne ces cinq dernières années) ; son appareil exportateur peu développé et ses importations incompressibles importantes (blé, intrants, etc.), sa forte dépendance aux recettes rentières volatiles (tourisme, canal de Suez, capitaux spéculatifs) et la poursuite de la dégradation de la situation socio-économique d’une majeure partie de sa population (salaires réels au plus bas depuis 30 ans, taux de pauvreté multiplié par deux en 20 ans, hausse des emplois précaires et informels, …) que le manque chronique d’investissement public dans les secteurs sociaux ne parvient pas à enrayer. Les conséquences du conflit sont ainsi nombreuses et affectent principalement :

  • Le tourisme : l’enlisement du conflit risque d’être lourd de conséquence pour ce secteur qui venait tout juste de se rétablir avec la levée des restrictions de voyage, la réouverture progressive des frontières et la reprise, en août dernier, des vols charter en provenance de Russie. Les touristes d’origine russe et ukrainienne représenteraient 35 à 40% des touristes qui visitent l’Egypte chaque année. En 2021, l'Ukraine était le premier pays d’origine des touristes en Egypte (1,3 million) contre environ 700 000 Russes.  
  • L’inflation : L’Egypte a atteint un niveau record d’inflation depuis plus de trois ans pour le mois de mai 2022 (13,5% en glissement annuel). L’Ukraine et la Russie représentent en moyenne 50% des achats de la General Authority for Supply of Commodities (GASC) dont le blé est destiné pour moitié à la filière publique du pain subventionné que consomment chaque jour près de 70 millions d’Egyptiens. Bien que l'Egypte dispose d’autres sources d’approvisionnement, la hausse du coût du blé est marquée. La hausse du prix des engrais devrait également s’accélérer, alimentant ainsi les pressions inflationnistes sur les produits alimentaires. Alors que les importations de produits pétroliers et d’essence représentent 13% des importations totales du pays, le baril de pétrole a atteint son niveau le plus élevé depuis plus de 7 ans jusqu’à atteindre 125 USD.
  • Les finances publiques : La guerre a des conséquences importantes sur les finances publiques égyptiennes à plusieurs égards. L’augmentation du prix du blé (de plus de 140 USD la tonne) affectera les finances publiques, le budget 2021/22 prévu par le ministère des Finances est notamment construit sur l'hypothèse d’un prix du blé à 255 USD la tonne quand il est actuellement de plus de 390 USD la tonne (+53%). De plus, malgré la mise en place du mécanisme d’indexation des prix des carburants, l’évolution à la hausse du baril de Brent fait également peser un risque important sur la bonne exécution budgétaire de l’Etat. Si la flambée des prix mondiaux du pétrole et du blé est alarmante, les hausses de 50 à 60% des prix du gaz naturel pourraient être une source de revenus supplémentaire pour l'Egypte et permettrait de couvrir les coûts des importations en pétrole et en blé selon les autorités (les exportations de gaz sont toutefois principalement réalisées via des traders).
  • Les comptes extérieurs : La pression sur la position extérieure de l’Egypte, déjà fragile, s’est accentuée avec la guerre en Ukraine. La baisse des achats étrangers de titres de la dette publique égyptienne s'est aggravée à la suite de l'invasion russe en Ukraine, les investisseurs cherchant à se tenir à l'écart des marchés émergents jugés instables. Selon les autorités environ 20 Mds USD ont quitté l'Egypte après l'invasion de l’Ukraine par la Russie. La mobilisation des réserves de change officielles a été soutenu (passé de 40,99 Mds USD en février à 33,4 Mds USD en juin 2022) poussant les autorités à engager des discussions avec le FMI pour un nouveau programme dès la fin mars. Le déficit de la balance courante déjà aggravé par la reprise de l’activité économique – et donc des importations – sera encore renforcé par la baisse des recettes du tourisme et la hausse des prix du blé et du pétrole. Les tensions sur les liquidités en devises ont par ailleurs amené la Banque centrale à augmenter son taux directeur de 300 pdb au total depuis fin mars afin d’endiguer la hausse de l’inflation et la sortie marquée des investissements de portefeuille fin février-début mars (le taux d’intérêt réel est ainsi repassé en territoire positif). La livre égyptienne s’est également dépréciée de 13% par rapport au dollar américain entre le premier et le deuxième trimestre 2022 (1 USD = 18,53 EGP au, à comparer à 1 USD = 16,09 EGP).

Ainsi le 27 mai 2022 Moody’s revu à la baisse ses perspectives sur l’Egypte de B « stable » à B « négative » tandis que le reste des agences de notation ont maintenu leur note souveraine à B « stable » pour S&P ; B+ « stable » pour Fitch et B+/B « stable » pour Capital Intelligence.

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