COLOMBIE
COLOMBIE - Situation économique et financière (juillet 2024)
Structure de l’économie réelle et croissance économique
La Colombie est une république, frontalière du Venezuela, du Brésil, du Pérou, de l’Equateur et de Panama. Le Président et premier président de gauche du pays, Gustavo Petro, a été élu au suffrage universel direct et occupe la fonction depuis août 2022, jusqu’à août 2026. Avec 51,9 M d’habitants répartis sur les 1,139 M km2 – soit plus de deux fois la taille de la France – c’est le 2ème pays le plus peuplé d’Amérique du Sud, derrière le Brésil.
En 2023, la croissance économique a fortement ralenti, s'établissant à 0,6 % contre 7,5 % en 2022. Ce ralentissement est principalement imputable à une chute marquée de l’investissement (-25 % sur l'année) et à une décélération de la consommation (+1,1 %), qui sont toutefois concomitantes à un fort durcissement de la politique monétaire colombienne. Structurellement, la Colombie se positionne comme la 3e économie d'Amérique du Sud en termes de PIB, estimé à 363,6 Md USD en 2023 (derrière le Brésil et l’Argentine), mais se classe seulement au 7e rang régional en termes de PIB par habitant, estimé à 6 972 USD par habitant pour la même année. D'après les prévisions du FMI, la croissance devrait légèrement se relever en 2024 (+1,1 %) avant de connaître un regain plus important en 2025 (+2,5 %).
En 2023, les principaux moteurs de l'économie colombienne sont le commerce de gros et de détail (19,2 % de la valeur ajoutée brute - VAB), les services publics (17,2 % de la VAB), l'industrie manufacturière (12,9 % de la VAB), et l'agriculture (6,6 % de la VAB). Bien que les secteurs minier et pétrolier ne contribuent pas de manière significative à la valeur ajoutée, il reste crucial, représentant plus d'un tiers des exportations du pays.
Malgré une économie parmi les plus dynamiques des économies émergentes (5 % en moyenne depuis 2020, vs. 4,1 % en moyenne pondérée en Amérique du Sud), la Colombie reste le pays le plus inégalitaire du continent au sens de l’indice de Gini (coefficient à 54,8) et le 3e plus inégalitaire dans le monde, après l’Afrique du Sud (60,3) et la Namibie (59,1). Toutefois, la Colombie est classée dans les pays à haut développement humain avec un IDH de 0,758 en 2021 (classé 91ème sur 192) – avec un IDH similaire à celui du Brésil. Le pays a dépassé cette année la moyenne des pays d’Amérique latine et des Caraïbes (0,749) et se place toujours au-dessus de la moyenne mondiale (0,724).
Equilibres externes
En 2023, les exportations colombiennes ont enregistré une contraction de -12,5 % par rapport à l'année précédente, à 49,7 Md USD. Le secteur de l'industrie extractive a maintenu sa position prédominante, représentant 52,5 % du total des exportations. Les produits manufacturés ont constitué le 2e poste d'exportations avec une part de 21 %, suivis de près par les produits agricoles, qui ont représenté 20 % des ventes à l'étranger. Parallèlement, les importations colombiennes ont subi une baisse significative de -33,6 %, passant à 59,4 Md USD en 2023. Cette forte baisse de l’inflation est à lier à la chute de la demande sur l’année. Le secteur industriel a dominé les importations, comptant pour 92 % du total, avec une prépondérance du secteur chimique, représentant 14 % des importations industrielles. Dans ce cadre, le déficit commercial de la Colombie s'est réduit en 2023, atteignant 9,7 Md USD vs. 14,3 Md USD en 2022 (-4,6 Md USD sur l’année).
Les Etats-Unis et la Chine sont les principaux partenaires commerciaux de la Colombie en 2023 puisqu’ils représentent à eux deux près de 42 % du commerce extérieur du pays (resp. 26,8 % et 14,8 %). Les Etats-Unis sont à la fois le 1er fournisseur (16 Md USD en 2023 – soit 27 % des importations) et le 1er client (13,6 Md USD – soit 26,7 % des exportations) du pays. La Chine se place en tant que 2ème fournisseur (13,6 Md USD) et le Brésil en 3ème (4,0 Md USD). Le Panama voisin quant à lui s’établit en 2ème client du pays andin (4,7 Md USD exportés). En 2023, la France est, en valeur, le 6ème fournisseur de la Colombie (3,4 % des importations, à 2 Mds USD) et le 33ème client (0,05 % des exportations, à 235 M USD), ce qui fait de notre pays le 12ème partenaire commercial de la Colombie (2 % des échanges).
Le déficit courant de la Colombie est en large part financé par d’importantes entrées d’IDE, à 17,2 Md USD en 2023 (près de 5 % du PIB). Ces entrées sont en augmentation de +1,5 % sur l’année, et en augmentation de +23 % par rapport au niveau prépandémique (14,0 Md USD en 2019). Le secteur des mines et des carrières, en tant que première destination de ces investissements, capte près de 20 % des IDE (3,3 Md USD) tandis que le secteur financier et commercial, 2e destination, en reçoit 18 % (3,1 Md USD). Les IDE vers le secteur pétrolier, historiquement prépondérants, poursuivent leur déclin (constituant la 4ème destination en 2023, représentant 15,5 % du total vs. 36 % en 2012).
Les réserves internationales nettes de la Colombie s’élèvent à 59,4 Md USD[1] à la fin mars 2024 et atteignent 121 % de la métrique ARA. Leur niveau est jugé adéquat par le FMI. Le FMI prévoit une augmentation de ces réserves dans les années à venir et estime qu’elles atteindront 60,4 Md USD fin 2026. La Colombie dispose d’une ligne de crédit modulable auprès du FMI de près de 8,1 Md USD.
Politique budgétaire / équilibres financiers internes
La dette publique a baissé en 2023 et s’élève à 52,5 % du PIB (218 Md USD) après avoir atteint 63,6 % en 2022 et 64 % en 2021. Toutefois, le ratio devrait réaugmenter cette année et atteindre 54,4 % en 2024 et 55,5 % en 2026 selon les estimations du FMI. Le niveau de la dette a fortement augmenté durant la pandémie (+ 48,1 %[2] vs. 2019), associé à un niveau de dépense durablement accru, explique la perte du statut Investment grade (cf. infra). La dette publique est majoritairement externe (à hauteur de 29,3 % du PIB soit 113 Md USD). La dette externe totale s’établit à 50,8 % du PIB, fin mars 2024, dont près de 20 pts émanant du secteur privé (21,5 % de la dette externe).
Le 27 juin 2024, l’agence de notation Moody’s a dégradé les perspectives de la Colombie de « stables » à « négatives », du fait des difficultés du pays à respecter la règle budgétaire, sa faible croissance (0,6 % en 2023) et la baisse de l’investissement (-8,3 % en 2023). Par ailleurs, la perte du statut Investment grade en 2021 a entrainé une augmentation significative du coût de la dette : ainsi, le FMI prévoit que la Colombie consacrera 24 % de ses recettes au service de la dette. Par ailleurs, les recettes fiscales baissent significativement en 2024, en partie du fait d’une conjoncture globalement dégradée et d’une retouche constitutionnelle concernant la déductibilité des royalties à l’IS pour les entreprises minières et pétrolières. Par conséquent, une dégradation de la note souveraine est à craindre.
L’inflation a largement reculé tout au long de 2023, mais stagne autour de 7,1 % au T2 2024. L’inflation a fortement diminué depuis un pic à 13,7 % en avril 2023, et la politique monétaire colombienne, particulièrement restrictive, a permis une baisse ininterrompue jusqu’à avril 2024. Ainsi, la Banque centrale a progressivement diminué son taux directeur depuis décembre 2023, qui s’établit depuis à 11,25 % en juillet (-3 pts% en 7 mois). Cependant, le FMI souligne une persistance de l'inflation en Colombie, attribuée en partie à l'indexation des salaires et à certains prix. Ces facteurs peuvent expliquer à la récente hausse de l’inflation en juin qui laisse planer des doutes quant à l'atteinte de l'objectif d'inflation d'ici la fin de 2024, tel que prévu dans les prévisions antérieures.
Le cours du Peso colombien (COP) est flottant et a connu une forte appréciation face au Dollar états‑unien, après une dépréciation en 2023 : le COP s’est ainsi apprécié de 20,5 % en 2023, après une dépréciation de 19 % en 2022. A la fermeture le 10 juillet dernier, le taux de change s’établissait à 3 980 USD/COP, et 4 308 EUR/COP. Cette appréciation est largement attribuée à l'évolution politique marquée – en 2022 – part des prises de parole du Gouvernement mal accueillies par le marché, puis par une perte de manouvre politique et des clarifications en 2023 rassurant ainsi les marchés financiers. Pour mémoire, le COP s’est fortement déprécié depuis plusieurs années : entre aujourd’hui et le taux de change moyen de 2016, la dépréciation atteint 30 %.
Perspectives et principaux risques
Les ambitieuses politiques publiques prévues par le Gouvernement Pétro constituent à la fois une opportunité conséquente vers une Colombie plus sociale et inclusive (réformes fiscales, de la santé, des retraites, du travail), mais pourraient peser sur la soutenabilité du pays. Afin de respecter la règle budgétaire, le gouvernement colombien a annoncé le 20 juin 2024, une coupe budgétaire de 14,6 Md USD pour l’année en cours impactant lourdement les projets d’investissement. Cette mesure est jugée insuffisante par le comité autonome de la règle budgétaire (CARF), qui estime nécessaire une coupe budgétaire d'au moins 51 Md USD pour répondre aux obligations de la dette et à la baisse de la collecte des impôts.