La loi congolaise relative aux contrats de partenariat public-privé

Les contrats de partenariat public-privé (PPP) sont un mode alternatif de financement des infrastructures, pouvant de plus aider à maîtriser l’endettement public. Après la création en juillet 2021 d’un ministère en charge de la Coopération internationale et de la Promotion du PPP, la nouvelle loi relative aux contrats de PPP a été adoptée par le Parlement le 30 décembre 2022.

1. Cette nouvelle loi confère aux contrats de PPP un régime juridique propre mais non exclusif

La loi n°88-2022 du 30 décembre 2022 prévoit le cadre juridique et institutionnel des contrats de partenariat public-privé (PPP). Toutefois Elle ne s’applique pas aux contrats PPP « qui par leur nature sont régis par des lois spécifiques »[1] (art. 2). Les soixante-cinq (65) articles de cette loi sont regroupés en huit titres qui définissent i) les dispositions générales des contrats de PPP, ii) les règles de passation et les critères d’attribution de ces contrats, iii) les clauses et les mentions obligatoires, iv) les modalités d’exécution (droits et obligations des parties, résiliation, contrôle et audit), v) les régimes financier, fiscal et douanier, vi) le régime foncier et des biens, vii) le règlement des différends ainsi que viii) les dispositions transitoires et diverses.

La loi définit le contrat de PPP comme un « contrat administratif par lequel l’État, une collectivité locale, un établissement public ou une société à participation publique majoritaire, confie à une personne morale de droit privé ou un groupement de personnes morales de droit privé, pour une période déterminée, tout ou partie de la conception, de la construction, du financement, de la transformation, de l’exploitation, de la gestion, de la maintenance, de la réhabilitation, de l’entretien d’un actif de la personne publique, d’un équipement, d’une infrastructure ou d’un service public ». 

Parmi les grandes lignes exposées dans cette loi, ressortent :

  • Les formes des contrats de PPP : les contrats de PPP se répartissent en contrats de PPP à « paiement par les usagers » et en contrats de PPP à « paiement public ». 
  • Les quatre types de procédures de passation des contrats de PPP qui sont prévues, selon l’objet, la nature et le contexte du contrat : l’appel d’offres, le dialogue compétitif, l’offre spontanée et l’entente directe. Le contrat de PPP fait l’objet d’une publicité préalable, d’un règlement d’appel à la concurrence, d’une étude de faisabilité et il doit répondre à un besoin préalablement défini par la personne publique. Le recours à l’entente directe peut être autorisé en raison notamment de la particularité du projet.
  • Les interdictions de soumissionner : et notamment les partenaires de droit privé nationaux ou internationaux n’étant pas constituées au Congo et ne fonctionnant pas selon la réglementation congolaise.

Les critères d’attribution, parmi lesquels figurent en premier lieu le coût global de l’offre et les objectifs de performance définis en fonction de l’objet du contrat, en particulier en matière de développement durable et de mise en œuvre des clauses sociales et de qualité du service. Il peut être pris en compte la part d’exécution du contrat que le candidat s’engage à confier à des entreprises de droit congolais, détenues majoritairement par des nationaux congolais, ainsi que des critères environnementaux, sociaux et de gouvernance. Par ailleurs, le titulaire du contrat doit obligatoirement se constituer sous la forme d’une société de projet de droit congolais dédié au contrat de PPP. Il en est de même en cas d’attribution du contrat à un groupement d’entreprises. 

2. Les aspects financiers et opérationnels sont essentiellement renvoyés au contrat

  • Diverses clauses (modalités de financement, transfert des actifs, modalités de rémunération du partenaire privé, portage des risques entre les parties, régimes financier, fiscal et douanier régime foncier et des biens, etc.) et mentions obligatoires doivent être mentionnées dans les contrats. Le régime fiscal et douanier d’un contrat de PPP est spécifique et peut s’aligner sur un droit dérogatoire déjà en vigueur. Le ministre chargé des finances peut également consentir, exceptionnellement, des avantages supplémentaires. Les causes de résiliation doivent être prévues au contrat, notamment en cas de remise en cause de son équilibre financier par la personne publique. Dans  ce cas le partenaire privé peut demander des indemnités après la résiliation.
  • Le règlement des différends liés à la passation, à l’interprétation ou à l’exécution des contrats de PPP se fait à l’amiable. En cas d’échec, ils sont réglés par voie d’arbitrage ou par voie juridictionnelle selon les modalités fixées dans le contrat.

 3. Cinq organes de gouvernance pour les contrats de PPP

L’exécution des contrats de PPP est encadrée par cinq organes de gouvernance que sont :

  1. le comité national du PPP, placé sous l’autorité du Premier ministre, chargé d’élaborer un portefeuille multisectoriel annuel de projets pouvant faire l’objet de PPP ;
  2. le comité technique, organe technique du gouvernement, chargé de valider et de mettre en œuvre les projets de PPP (les contrats de PPP sont approuvés par le ministre en charge du PPP, le PM et le Président de la République, après avis du comité national du PPP. La prorogation des contrats obéit aux mêmes procédures) ;
  3. le secrétariat permanent des PPP, placé sous l’autorité du ministre en charge des PPP, chargé notamment de publier et mettre à jour le portefeuille de projets de PPP, les évaluer et effectuer leur suivi ;
  4. la commission de passation des contrats de PPP chargée de mettre en œuvre la procédure de passation appropriée, en fonction du projet ;
  5. la commission de contrôle des PPP, chargée d’assurer le contrôle de l’exécution du contrat.  

Outre ces organes de gouvernance, d’autres acteurs sont habilités à contrôler les contrats de PPP, à savoir la Cour des comptes et de discipline budgétaire, la Haute autorité de lutte contre la corruption, un auditeur indépendant, ainsi que tout autre organe compétent prévu par les lois et règlements.

 

Commentaires

La Commission de la CEMAC s’est engagée dans l’élaboration d’une stratégie des PPP et d’un cadre régional juridique et institutionnel sur les PPP. Le Congo a été associé aux travaux relatifs à cette loi communautaire. Plusieurs pays de la région ont toutefois déjà leur loi sur les PPP comme le Gabon ou le Cameroun et le Congo a également pris les devants pour combler le vide juridique en la matière, cette initiative n’étant nullement contraire à la réflexion communautaire. La loi n°88-2022 du 30 décembre 2022 relative aux contrats de PPP est la toute première loi adoptée par le Congo dans ce domaine, bien que plusieurs contrats d’ordre public-privé soient en cours d’exécution depuis plusieurs années.



[1] Ainsi une convention internationale est ratifiée par la loi n° 5-2021 du 21 janvier 2021 relative au pont route-rail sur le fleuve Congo. Elle prévoit aussi un PPP.

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