Washington Wall Street Watch n°2025-16
Réflexions hebdomadaires sur les principaux évènements financiers, institutionnels ou règlementaires, aux Etats-Unis.
Sommaire
Conjoncture
- Les perspectives économiques fléchissent selon les indices PMI
- Dans le beige book, l’incertitude commence à peser sur l’activité économique
Services financiers
- La FDIC allège les obligations relatives aux plans de résolution
Situation des marchés
Brèves
Conjoncture
Les perspectives économiques fléchissent selon les indices PMI
L’indice US PMI Composite Output, publié par S&P Global le 23 avril a chuté de ‑2,3 points en avril, à 51,2 après avoir fortement augmenté en mars (+1,9 points). Bien qu’il demeure en zone d’expansion (supérieur à 50), le niveau est nettement inférieur aux attentes (52,8). Pour mémoire, une valeur supérieure (respectivement inférieure) à 50 indique une augmentation (resp. diminution) globale par rapport au mois précédent.
En particulier, dans les services, l’indice de l’activité a baissé de -3 points à 51,4 (contre 52,6 attendus), pénalisé par la baisse des nouvelles commandes et les exportations de services (tourisme et prestations transfrontalières). Les entreprises interrogées expliquent cette baisse par l’incertitude économique et la politique commerciale de l’administration.
L’indice PMI Manufacturing est quant à lui en légère hausse de +0,5 point à 50,7, illustrant une augmentation marginale mais supérieure aux attentes (49,1) de la production manufacturière, après une contraction en mars. Cette hausse est tirée par les commandes de demande intérieure, bien qu’en partie compensée par une forte baisse des commandes à l’export.
Le sentiment des entreprises concernant leur activité a chuté pour le troisième mois consécutif, atteignant son niveau le plus bas depuis juillet 2022. L’optimisme de certaines entreprises dans l’industrie, espérant bénéficier des mesures protectionnistes, a été dégradé par la hausse des coûts, des contraintes d’approvisionnements et les faibles perspectives d’exportation et de croissance économique pour 2025.
En outre, selon l’enquête, l’emploi a faiblement progressé en avril. Les créations nettes d’emplois augmentent dans les services mais diminuent dans l’industrie. Les entreprises interrogées déclarent reporter leurs décisions d’embauche en raison des anticipations de ralentissement de la demande, à l’export notamment, et de hausse des coûts.
Par ailleurs, les prix des biens et services ont connu leur plus forte augmentation de ces 13 derniers mois, en particulier pour les produits manufacturés. Cette augmentation s’explique par les droits de douane principalement, mais également par une hausse du coût de la main d’œuvre.
Dans le beige book, l’incertitude commence à peser sur l’activité économique
Le Beige Book publié le 23 avril, rendant compte de l’évolution économique dans les douze districts régionaux de la Fed, décrit une activité globale qui est restée pour l’essentiel inchangée depuis le dernier rapport, malgré une incertitude accrue liée aux droits de douane. La consommation a diminué à l’exception de celle de véhicules et de certains biens non-durables, les ménages anticipant une hausse des prix liée aux droits de douane. Dans ce contexte, les entreprises soulignent leurs inquiétudes concernant les perspectives de leur activité dans les prochains mois.
Dans les services, le secteur du transport a vu son activité s’améliorer, tandis que la demande de services non financiers a baissé. Par ailleurs, le tourisme étranger a reculé dans plusieurs districts, pesant sur les secteurs de l’hôtellerie et des loisirs.
L’industrie a quant à elle globalement reculé, deux tiers des districts ayant noté une activité inchangée ou en baisse.
Le marché immobilier présente des signes contrastés : dans le résidentiel, les ventes de maisons individuelles ont augmenté, mais l’offre reste limitée dans de nombreux districts. En revanche, l’activité s’est améliorée dans l’immobilier commercial.
Le marché du travail est resté globalement stable mais l’emploi a légèrement progressé : cinq districts ont rapporté une hausse et trois un léger déclin, notamment dans le secteur public et le secteur bénéficiant des aides et subventions publiques. Les entreprises déclarent reporter le recrutement et se disent prêtes à réduire leurs effectifs si la visibilité économique ne s’améliore pas. L’offre de travail s’est renforcée, mais certaines régions connaissent des tensions liées à la diminution du nombre de travailleurs immigrés. Les salaires ont continué de croître à un rythme modéré, mais plus lentement que lors du précédent rapport.
Les pressions inflationnistes demeurent présentes : les prix ont connu une nette augmentation, de manière modérée dans six districts et plus marquée dans six autres. Les entreprises anticipent des hausses de coûts en raison des droits de douane. Les anticipations d’inflation ont progressé, témoignant des pressions sur les intrants et des inquiétudes liées à l’incertitude de la politique commerciale.
Services Financiers
La FDIC allège les obligations relatives aux plans de résolution
La Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC), l’autorité de résolution et de garantie des dépôts des banques (Insured Depository Institutions – IDI), a publié le 18 avril une version révisée de son interprétation des règles relatives aux plans de résolution.
Pour mémoire, un plan de résolution présente la stratégie et les mesures prévues en cas de défaillance d’un établissement bancaire, dans le but d’assurer une résolution ordonnée. Les plans de résolution sont obligatoires pour tous les IDIs, principalement des banques, dont les actifs sont supérieurs à 100 Md USD, tandis que les établissements disposant de 50 à 100 Md USD d’actifs doivent transmettre des informations minimales à la FDIC, en application d’une réglementation de la FDIC du 9 juillet 2024.
La FDIC réduit le spectre des obligations en (i) supprimant le besoin d’inclure un scénario de faillite et en (ii) n’obligeant plus les banques à présenter la cession de la banque à un établissement-relai. Par ailleurs, certaines règles deviennent principielles, à l’instar de l’évaluation des actifs, qui n’a plus besoin de prendre en compte des scenarios économiques extrêmes. Enfin, certaines notions sont précisées, comme la définition des personnalités clés de l’établissement, ou la catégorisation des activités pouvant être cédées en cas de faillite.
Le Président par interim de la FDIC, Travis Hill, indique que cette volonté de simplification de la procédure doit permettre à l’agence d’agir plus rapidement et à moindre coût, et tire les leçons des faillites bancaires du printemps 2023, qui avaient révélé le coût excessif de la création d’établissements-relai.
Situation des marchés
Au cours de la semaine écoulée (de vendredi à jeudi), les indices boursiers ont nettement rebondi : +3,4 % pour le S&P 500, à 5 485, et +4,7 % pour le Nasdaq, à 17 166.
Les rendements des obligations souveraines américaines (Treasuries) sont restés stables au cours de la semaine écoulée, les taux à 2 ans et à 10 ans se maintenant à 3,8 % et 4,3 % respectivement.
Les valeurs des actions et des obligations ont d’abord nettement baissé lundi 21 avril à la suite des critiques de D. Trump à l’égard de la politique monétaire menée par le président de la Fed, Jerome Powell. Les marchés actions ont nettement rebondi pour clôturer jeudi en hausse sur une semaine.
D’une part, les inquiétudes liées aux tensions commerciales se sont apaisées. Le secrétaire au Treasury, Scott Bessent a indiqué qu’il s’attendait à une « désescalade », jugeant le maintien des droits de douane actuels « non-soutenable ». Le Vice-Président JD Vance s’est quant à lui exprimé sur les progrès réalisés avec l’Inde. Par ailleurs, la réponse du Président D. Trump aux journalistes selon laquelle il n’a pas l’intention de limoger J. Powell semble avoir rassuré les investisseurs quant à la préservation de l’indépendance de la Fed. La situation des marchés financiers s’est nettement améliorée avec une baisse des taux des obligations souveraines et un rebond des actions
Brèves
- Le 18 avril, la Fed et l’Office of the Comptroller of the Currency (OCC), le régulateur des national banks, ont autorisé Capital One, neuvième plus grande banque des États-Unis, à poursuivre son opération de rachat de la société de crédit et de paiement Discover (pour environ 35 Md USD), qui vise à créer un géant mondial des paiements. Pour rendre leur décision, les régulateurs ont mis en balance les dynamiques concurrentielles complexes de la transaction : d’une part, la hausse de la concentration du secteur bancaire avec la création du plus grand émetteur de cartes de crédit des États-Unis, et d’autre part, l’intensification de la concurrence sur le segment des réseaux de paiement face au quasi-duopole Visa-Mastercard. L’opération devrait se clôturer le 18 mai.
- Le 21 avril, Paul Atkins, 34ème Président de la Securities and Exchange Commission (SEC), l’autorité des marchés financiers, a officiellement pris ses fonctions au sein de l’agence. Pendant la cérémonie d’investiture, P. Atkins a exprimé la ligne directrice de son mandat, consistant à « mettre fin aux dérives de la SEC », et à « revenir aux missions fondamentales de l’agence confiées par le Congrès : protéger les investisseurs, favoriser l’efficience des marchés et l’accès au capital des entreprises ». Le 9 avril, le Sénat avait confirmé (52-44) sa nomination.
- Le 21 avril, la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), l’autorité des marchés de dérivés, a lancé deux consultations publiques (Request for Comment – RFC). L’une vise à identifier les usages potentiels, les opportunités et les risques liés au fonctionnement continu (24/7 basis) i) des places de marché (Designated Contract Markets – DCMs) et des plateformes d’exécution de contrats de swaps (Swap Execution Facility – SEFs) enregistrées auprès de l’agence. L’autre vise à identifier les caractéristiques des contrats à terme perpétuels (perpetual derivatives), notamment utilisés sur les marchés dérivés de crypto-actifs. La fin de la période de consultation des deux RFC est fixée au 21 mai.
- Le 18 avril, une juge fédérale de Washington, Amy Berman Jackson, a de nouveau bloqué temporairement le mouvement de licenciement massif visant le Consumer Financial Protection Bureau (CFPB), l’agence chargée de la protection financière des consommateurs. La juge A. Jackson estime que la réduction de personnel envisagée, portant les effectifs de l’agence de 1 700 à 200 personnes, ne permettrait plus à celle-ci d’accomplir les missions définies par ses statuts légaux, ce que conteste la direction de l’agence. Le 3 avril, la cour d’appel fédérale avait réduit la portée d’un précédent gel des licenciements ordonné par la juge, estimant que la réduction des effectifs pourrait reprendre à condition que chaque licenciement fasse l’objet d’une évaluation individualisée.
- La FDIC envisagerait de supprimer 1 250 postes, d’après un courriel interne reçu par ses salariés. Cet objectif inclut la vague de départs volontaires menée en février 2025, et s’inscrit dans le plan général de réduction des effectifs (Workforce Optimization Initiative) mené par le Department of Government Efficiency (DOGE). La FDIC devrait privilégier des procédures de départs volontaires et de retraite anticipée, associées à des incitations financières, mais n’exclut pas des licenciements. L’accès au plan de départ volontaire devrait être limité aux employés participant à des missions jugées essentielles, telles que la résolution bancaire ou l’examen de la gestion des risques.