Actualités économiques Nigéria - Ghana semaine du 7 avril 2025
Impact limité des droits de douanes américains mais exposition à la conjoncture internationale ; Objectifs de recettes compromis par la chute du prix du baril ; La CBN injecte 198 M USD dans le marché des changes ; Excédent de balance courante ; Le prix de l'essence devrait baisser ; BUA investit dans une raffinerie d’huile de palme ; Lancement du programme HOPE-EDU. Négociations avec les Etats-Unis ; L’inflation annuelle en baisse ; Le COCOBOD maintient le prix d’achat du cacao.
LE CHIFFRE À RETENIR
434 M USD
C’est la taille que pourrait représenter le marché de l’IA au Nigéria d’ici 2026
Nigéria
Le Nigéria devrait être peu affecté par les droits de douanes américains mais reste exposé à la conjoncture internationale
Le 4 avril, les États-Unis ont annoncé introduire des droits de douanes de 14% sur leurs importations en provenance du Nigéria, avant d’annoncer un allègement le 9 avril, fixant le taux à 10%. Le gouvernement nigérian n’a déployé aucune mesure de rétorsions et appelé à la discussion entre les deux parties via les outils de l’OMC.
Cette introduction de droits de douanes est justifiée par l’excédent commercial bilatéral enregistré par le Nigéria (1 400 Md NGN en 2024) et aux barrières aux échanges imposées par le Nigéria, selon l’administration Trump.
Les États-Unis sont, d’après le Bureau national des statistiques (NBS), le 5ème marché d’exportations du Nigéria en biens en 2024, représentant 5 500 Md NGN (près de 3,5 Md USD), soit 7% des exportations nigérianes de biens.
Seul 280 M USD d’exportations nigérianes sont désormais soumises aux nouveaux droits de douanes. De par la nature de sa relation commerciale avec les États-Unis, le Nigéria n’est que peu affecté par l’entrée en vigueur de droits de douanes sur ces exportations. Les produits pétroliers et miniers n’étant pas concernés par cette mesure, alors qu’ils représentaient près de 92% des exportations nigérianes à destination des États-Unis en 2024.
Néanmoins, l’économie nigériane reste exposée aux chocs que peuvent représenter ces annonces et les tensions sur le commerce international. La baisse du cours du pétrole pourrait en effet menacer la stabilité du cours du naira et les finances publiques, le pays étant dépendant des entrées de devises provenant des exportations pétrolières (88% des exportations nigérianes en 2024).
Les objectifs de recettes publiques compromis par une moindre production pétrolière et la chute du prix du baril
Le budget 2025, reposant sur un prix du baril de 75 USD et une production de 2,06 millions de barils par jour (mbpj), est mis à mal par une moindre production (environ 1,5 mbpj) et le prix du Brent à moins de 65 USD, le niveau le plus bas en quatre ans. Cette situation est exacerbée par l'augmentation de la production des pays de l'OPEP et les tensions commerciales mondiales.
Les problèmes structurels tels que le vieillissement des infrastructures, le vandalisme des pipelines et le vol de pétrole dans le delta du Niger aggravent la situation. Le ministre des Finances, Wale Edun, a ainsi rappelé la nécessité pour le Nigéria de diversifier les sources de recettes fiscales de l’État et de réduire sa dépendance aux recettes pétrolières. La situation actuelle met en évidence l’importance de réformes économiques et d'investissements dans d'autres secteurs pour assurer la stabilité financière du pays et renforcer sa résilience face aux fluctuations du marché pétrolier mondial.
La CBN injecte 198 M USD dans le marché des changes à la suite des annonces de droits de douanes américains
Dans le sillage de l’entrée en vigueur de droits de douanes imposés par l’administration Trump, la Banque centrale du Nigéria (CBN) a démontré son engagement à soutenir la liquidité du naira, en injectant 198 M USD dans le marché des changes.
Le contexte international a tiré à la baisse le cours du baril passant 74 USD à 64 USD entre le 4 et le 9 avril. Dans le même temps, le naira s’est déprécié de 2,8% par rapport au dollar. La CBN a ainsi démontré son engagement à assurer la liquidité du marché des changes nigérian.
Évolution du taux de change USD/NGN et du prix du baril
Source : Banque centrale du Nigéria
Clef de lecture : Lors de l’entrée en vigueur des droits de douanes américains, le naira s’est déprécié par rapport au dollar, et le cours du baril a fortement baissé.
La CBN a enregistré un excédent de balance courante de 17 Md USD en 2024
La CBN a publié son rapport sur la balance des paiements pour l’année 2024. Celui-ci fait état d’un excédent de balance courante de 17 Md USD, en nette amélioration par rapport aux années précédentes (6 Md USD en 2023, 3 Md USD en 2022).
Ce résultat s’explique par un important excédent commercial en biens sur l’année (13 Md USD contre 8 Md USD en 2023), lié aux améliorations en matière de production et d’exportations pétrolières et à des progrès en matière d’exportations non-pétrolières. Le Nigéria a en parallèle réduit son volume d’importations, en conséquence de la dépréciation du naira mais également de la mise en service de la raffinerie Dangote, qui a permis de limiter les importations de carburant.
En outre, la balance des services a conservé un niveau stable par rapport à 2023, avec un déficit de 13 Md USD. Les revenus secondaires nets, issus des transferts de la diaspora nigériane, ont atteint 24 Md USD, après 22 Md USD. Les transferts représentent une source de devises essentielle pour le pays, permettant notamment de soutenir le cours du naira.
Le compte financier affiche un excédent de 12 Md USD, après un déficit de 18 Md USD en 2023. Cet écart s’explique par l’importante reconstitution des réserves de changes brutes de la CBN, passées de 32,9 Md USD à 40,2 Md USD mais également par l’augmentation importante d’actifs en devises détenus par les résidents nigérians.
Le prix de l'essence devrait baisser avec le renouvellement de l’accord « naira contre brut »
Cet accord lancé en octobre 2024 permet aux raffineries, et notamment à la raffinerie Dangote, d'acheter du pétrole brut en NGN, réduisant ainsi la demande de devises étrangères et soutenant la monnaie nationale. La NNPC a fourni plus de 84 millions de barils de brut à la raffinerie Dangote dans le cadre de cet accord. Néanmoins, l’accord n’a pas pu être mis en place depuis plus d’un mois à cause des difficultés d’approvisionnement en brut local de la NNPC. Le ministre des Finances, Wale Edun, a précisé que l'accord est en cours de renégociation pour s'adapter aux réalités du marché. Les discussions actuelles doivent donc ajuster les volumes, les prix et la durée des contrats afin de garantir une mise en œuvre efficace.
Le gouvernement espère que cette politique contribuera à réduire la pression sur les réserves de change, à baisser sensiblement les prix des carburants et à stabiliser l'économie. Cet accord doit réduire la demande mensuelle de devises de 660 M USD à environ 50 M USD, soit plus de 7 Md USD par an. Cette annonce du ministère des Finances intervient alors que le Nigéria cherche à renforcer sa résilience économique face aux fluctuations du marché mondial du pétrole. Le ministère des Finances a réaffirmé son engagement à soutenir l'industrie locale du raffinage et l'importance de la collaboration entre les secteurs public et privé pour atteindre ces objectifs.
BUA investit dans une nouvelle raffinerie d’huile de palme au Nigéria
Le conglomérat nigérian BUA, actif dans les secteurs agroalimentaire, minier et des infrastructures, renforce ses activités dans la transformation de l’huile de palme, ressource stratégique dont le Nigéria est le principal producteur africain.
BUA a signé un accord avec Alfa Laval PVT Limited, filiale du groupe suédois Alfa Laval, pour la construction d’une raffinerie d’huile de palme d’une capacité de 1 000 T par jour, intégrant une unité de fractionnement. Ce projet vise à produire des dérivés utilisés dans les industries alimentaires et cosmétiques.
Selon l’USDA (département états-unien de l’agriculture), la production nationale d’huile de palme devrait croître de 6,6% en un an pour atteindre 1,6 M T en 2024/25. BUA Foods exploite déjà deux huileries à Kano et Lagos, avec une capacité annuelle de 250 000 T, produisant notamment oléine, stéarine et acides gras distillés. Cette nouvelle raffinerie devrait renforcer la contribution du segment des huiles aux revenus du groupe, dont le chiffre d’affaires a atteint 1 527 Md NGN en 2024.
Lancement du programme HOPE-EDU pour transformer l’éducation de base
Le gouvernement fédéral du Nigéria a lancé une réforme majeure de son système éducatif à travers le programme HOPE for Quality Basic Education for All (HOPE-EDU). Dotée d’un financement de 552 M USD, cette initiative est soutenue par la Banque mondiale et le Partenariat mondial pour l’éducation. HOPE-EDU vise à améliorer l’accès et la qualité de l’enseignement de base pour plus de 29 millions d’enfants. Les priorités du programme sont l’apprentissage des sciences, l’éducation des filles, le renforcement de l’enseignement et de la formation techniques et professionnels, la scolarisation des enfants non-inscrits et le recours au numérique pour améliorer l’enseignement.
Le Nigéria, qui affiche un faible indice de capital humain (0,36), fait face à des défis majeurs : 17,1 millions d’enfants non scolarisés et 37 millions d’élèves incapables de lire un texte simple. Le budget 2025 alloue 2,3 Md USD à l’éducation, complété par un prêt de 1,1 Md USD de la Banque mondiale, dont 500 M USD dédiés à la qualité éducative.
Ghana
Le ministre ghanéen des Affaires étrangères engage des négociations avec l’Ambassadrice des Etats-Unis au Ghana suite à l’instauration des nouveaux tarifs douaniers américains
Dans un communiqué publié à l’issue de leur rencontre, le ministère ghanéen des Affaires étrangères indique que les exportations ghanéennes pétrolières, gazières et énergétiques sont exemptées des nouveaux droits de douane de 10 % instaurés par l’administration Trump. En revanche, des secteurs clés comme l’habillement, le cacao transformé, les bijoux en or, le beurre de karité, ainsi que certains produits agricoles (horticoles, ignames, fruits, légumes, noix de cajou), qui bénéficiaient jusqu’ici de l’Accord sur la Croissance et les Opportunités en Afrique (AGOA) couvrant plus de 6 700 produits au Ghana, sont menacés. Le gouvernement ghanéen souhaite négocier l’exemption des secteurs du cacao et de l’habillement.
Les économistes anticipent une baisse significative des recettes d'exportation ghanéennes, une augmentation des coûts pour les exportateurs et des pertes d’emplois dans les PME, avec plusieurs milliers d’emplois exposés, ainsi qu’un impact indirect sur l’inflation et le taux de change du cedi à long terme. Toutefois, selon le communiqué du ministère ghanéen des Affaires étrangères, les deux parties ont convenu de travailler ensemble par des « voies diplomatiques » pour atténuer ces défis. À l’instar des autres pays – à l’exception de la Chine – le Ghana entre désormais dans une période d’allègement de 90 jours - droits de douanes de 10% - au cours de laquelle des négociations devront être menées.
L’inflation annuelle en baisse pour le troisième mois, s’établissant à 22,4% en mars 2025
L’inflation alimentaire, l’un des principaux moteurs de la hausse des prix ces derniers mois, a diminué, passant de 28,1% à 26,5%, tandis que l’inflation non-alimentaire a légèrement baissé, passant de 18,8% à 18,7%. Bien que l’inflation des produits locaux ait baissé à 24%, après 25,1% le mois précédent, les prix des biens importés ont accéléré, atteignant 18,7%, contre 18,5% en février. En termes de disparités régionales, la région de l'Upper West a enregistré l’inflation la plus élevée, à 36,2%, tandis que la région de la Volta a affiché l’inflation la plus faible, à 18,9%. Pour rappel, le gouvernement ghanéen vise une inflation à 11,9% en fin d’année 2025.
Le Bureau National du Cacao (COCOBOD) maintient le prix d’achat du cacao pour la saison agricole 2025/26
Actuellement, le prix à la production du cacao au Ghana est de 3 100 GHS par sac de 64 kg, soit 49 600 GHS la tonne, représentant une augmentation marginale de 0,03% par rapport au prix précédent annoncé en septembre pour la campagne agricole 2024/25.
Cette décision, prise à la suite d’une évaluation complète des impacts opérationnels et financiers sur l’industrie, vise à assurer la stabilité des prix et la durabilité à long terme de la chaîne de valeur du cacao au Ghana. Le COCOBOD a toutefois précisé qu’une réévaluation des prix de production, des redevances et des marges pour les parties prenantes pourrait avoir lieu au cours de la saison à venir.
Cette mesure intervient alors que le Ghana et la Côte d’Ivoire, qui produisent ensemble plus de 60% du cacao mondial, cherchent à harmoniser leurs prix dans le cadre de leur initiative conjointe pour mieux protéger les revenus des producteurs.