Commerce extérieur du Pakistan (exercice budgétaire 2023-2024)
Une progression du commerce extérieur pakistanais, tiré des par des exportations en hausse, alors que les importations restent sous contrôle.
Sur l’exercice budgétaire 2023-2024 (courant du 1er juillet 2023 au 30 juin 2024), le commerce extérieur du Pakistan a progressé de 4,3% pour s’établir à 84 Mds USD, témoignant d’une stabilisation de la situation économique et financière du pays, après avoir enregistré une forte baisse de 22,6% en 2022/2023, suite à l’introduction par les autorités de mesures administratives de contingentement des importations pour faire face à une crise de la balance des paiements.
Conséquence d’une progression des exportations et du maintien de mesures de contrôle des importations, le solde commercial a été réduit à 22 Mds USD, soit 5,9 % du PIB. En glissement annuel, le solde commercial enregistre une baisse de 11%, une tendance initiée dès l’exercice 2022/23, au cours duquel il avait été fortement réduit de 36,4% sous l’effet du contingentement des importations et d’un ralentissement des exportations, après plusieurs années de hausse (+35,7% en 2022, +36,3% en 2023) qui ont contribué à l’aggravation du déficit du solde courant.
En 2023/2024, le niveau des importations est demeuré stable (+0,69% à 53 Mds USD, après une baisse de 26,3% en 2023), représentant 14,2% du PIB. Cette stabilisation s’explique, d’une part, par le maintien des mesures de contrôle et de contingentement des importations, mais aussi par un ralentissement de l’activité se traduisant par une plus faible demande domestique, auquel s’ajoute un contexte plus favorable sur le marché des matières premières. Les importations ont fortement ralenti au cours du premier semestre de l’exercice budgétaire (-16%), avant de repartir à la hausse au second semestre sur fond de reprise de l’activité économique. Les exportations en revanche enregistrent une progression de 11% à 31 Mds USD (8,3% du PIB), après avoir diminué de 14,2% en 2023, tirées principalement par les exportations non-textiles, produits agricoles et alimentaires (+49,6% en g.a.).
Une faible diversification sectorielle toujours caractérisée par des exportations à faible valeur ajoutée
Le commerce extérieur pakistanais reste faiblement diversifié et biaisé en termes de valeur ajoutée, les importations étant dominées par des biens à forte valeur ajoutée et les exportations par les produits à faible valeur ajoutée (le coton, le riz et les produits du cuir représentent près de 70% des exportations).
Les exportations sont toujours largement dominées par les produits textiles (16,3 Mds USD), mais leur part relative dans le total des exportations diminue par rapport à l’an passé (52,7% en 2024 contre 59,7% en 2023). En 2024, les exportations textiles reculent légèrement (-2%, à 16,3 Mds USD), en raison de la baisse de la demande mondiale post période Covid, d’une réduction des prix entraînant une perte en valeur qui a neutralisé une hausse des volumes exportés, mais aussi d’une perte de compétitivité de l’industrie textile pakistanaise face à la concurrence du Bangladesh ou du Vietnam, liée à la suppression de subventions à l’énergie dans le cadre du programme FMI. L’industrie textile pakistanaise souffre aussi d’un manque de diversification, avec une spécialisation disproportionnée sur le linge et textile de maison, par rapport aux vêtements : ce poste est constitué majoritairement de produits à faible valeur ajoutée ou de matière première brute (fil et tissu de coton, serviettes de bain, linge de maison). Par son poids, l’industrie textile continue d’influencer la performance de l’ensemble de l’appareil exportateur. La dépréciation de la roupie au début de l’exercice budgétaire 2024 s’est traduite par un léger rebond des exportations de textile, mais l’effet est relatif car l’industrie textile recourt fortement aux importations (coton de bonne qualité – 1,3 Mds USD en 2024 ; intrants chimiques, produits pétroliers pour la production d’énergie).
Le second poste d’exportation est constitué de produits agricoles et alimentaires (7 Mds USD, 23% du total des exportations), principalement de riz (11,9% du total des exportations et 52% des produits agricoles exportés), de viande (7,3%), de fruits et légumes, dont graines oléagineuses (15,5%) et de produits de la mer (6%). Ce poste enregistre une hausse de 50% en 2024, tiré par une production en hausse, une meilleure compétitivité et une plus forte demande globale. Le riz enregistre une hausse des exportations en volume et en valeur (+75%) en 2024 atteignant son plus haut historique – 3,7 Mds USD, qui s’explique, d’une part, par une production record (+34,8% en g.a.) et, d’autre part, une croissance de la demande mondiale en raison de l’interdiction par l’Inde des exportations de riz blanc non basmati. Le gouvernement a soutenu activement les exportations pakistanaises de riz (augmentation du nombre d’entreprises autorisées à exporter vers la Chine et la Russie, mise en place d’un prix minimum à l’export, test et certification de qualité). Les exportations de viande ont progressé de 34% grâce à l’ouverture de nouveaux marchés (Ouzbékistan, Jordanie, Egypte) et l’attribution de nouvelles licences d’exportations vers les EAU, l’Arabie saoudite. En revanche, les produits de la mer sont en net recul, -12,4% à 423 M USD, le marché souffrant de l’interdiction américaine mise en place en 2017 en raison de non-conformité avec le programme de protection des tortues marines (Turtle Excluder Devices, TEDs), et d’une plus faible demande des pays de l’ASEAN. On note aussi une progression des exportations de graines de sésame (+122% à 390 M USD) qui bénéficient de l’ouverture aux marchés chinois et au CCEAG.
Les produits manufacturés constituent le troisième poste d’exportation (10,65% du total des ventes, 3,3 Mds USD) ; ils regroupent les « produits des industries chimiques et pharmaceutiques », les articles en cuir, les articles de sport (ballons de football, gants en cuir) et le matériel médical et instruments chirurgicaux.
S’agissant des importations, le poste « produits pétroliers » continue de constituer le premier poste d’achats (28,6% des importations à 15,1 Mds USD, soit 4% du PIB et 49% des exportations), en nette diminution en 2024 (-19,7%) en raison de la baisse du cours des matières première, alors que les volumes d’importation, notamment de pétrole brut, ont progressé sur la même période sur fond de reprise de l’activité économique. Les produits chimiques représentent le second poste d’importation (16,9%), en progression de 8,35% par rapport à 2023 pour s’établir à 8,9 Mds USD. Le troisième poste est constitué par les machines et équipements (7,4 Mds – 14% des importations), en progression de 67% par rapport à l’année précédente en raison (i) de la levée des restrictions sur les importations de téléphones portables et (ii) par l’acquisition de panneaux solaires. Les métaux, véhicules, produits alimentaires et textiles représentent respectivement 8,8%, 3%, 13,4% et 7,3% des importations. On notera une baisse des importations de coton (-47% en g.a.) en raison de la reprise de la production domestique, ainsi qu’une baisse des importations alimentaires (-10,75% en g.a.) en raison de la chute des importations d’huile de palme.
Une réduction du déficit commercial, en dépit des relations économiques déséquilibrées entretenues avec ses principaux partenaires commerciaux
Le Pakistan enregistre des déficits structurels vis-à-vis de la Chine (-10,8 Mds USD), des Emirats arabes unis (-4,3 Mds USD), de l’Arabie saoudite (-3,8 Mds USD), du Qatar (-3,2 Mds USD) et de Singapour (-2,19 Mds USD). La balance commerciale est en revanche excédentaire vis-à-vis des Etats-Unis (3,57 Mds USD) et de l’Union européenne (4,1 Mds USD), en progression respectivement de -4% et +0,6%.
La Chine reste le premier partenaire commercial du Pakistan– rang qu’elle occupe depuis 2015/2016 suite au lancement du CPEC (corridor économique sino-pakistanais) – avec 16,2 Mds USD d’échanges, en nette progression de 39% par rapport à 2023 – les échanges avec la Chine représentent près de 20% des échanges commerciaux du Pakistan (ils représentaient 15,7% des échanges extérieurs du Pakistan en 2019).
La Chine conserve sa place de premier fournisseur acquise en 2015/2016 avec une part de marché de 25% (elle était de 19,4% en 2018/19), devant les Emirats arabes unis (11,9%), l’Arabie saoudite (8,5%), le Qatar (6,3%), et Singapour (4,6%). L’Allemagne reste le premier fournisseur de l’Union européenne avec une part de marché de 2% (930 M USD). En termes de blocs commerciaux, les pays du CCEAG, la Chine et l’Asie du Sud-Est (principalement Singapour, l’Indonésie et la Malaisie) restent les premiers fournisseurs du Pakistan avec des parts de marché respectivement de 32%, 25% et 17%. L’Union européenne affiche une part de marché de 7%, devant les Etats-Unis (4%).
Il convient de noter : (i) la baisse en valeur des importations en provenance des pays du Golfe et de Singapour, principaux fournisseurs de matière première énergétique, le Pakistan bénéficiant ici de la baisse du cours des matières premières énergétiques ; (ii) la progression de la Russie au cours des dernières années qui devient le 9ème fournisseur du Pakistan et son premier fournisseur de blé et de céréales dans le cadre d’accords d’Etat à Etat, auquel viennent s’ajouter des livraisons de pétrole brut – les importations en provenance de Russie ont ainsi progressé de 38%, à 1 Md USD. (iii) Les importations en provenance de l’Union européenne ont diminué de 8,3%, à 3,8 Mds USD, signe du maintien des mesures de contingentement des importations sur les biens d’équipement à plus forte valeur ajoutée. La France est désormais le 32ème fournisseur du Pakistan avec 0,51% de parts de marché (en comparaison, notre part de marché était de 0,8%, 23ème rang fournisseur en 2019), en raison d’une chute de nos ventes de 32% à 268 M USD ; la France reste le 5ème fournisseur européen, derrière l’Allemagne, les Pays-Bas, l’Italie et la Belgique.
S’agissant des exportations pakistanaises, l’Union européenne, les Etats-Unis et le Royaume-Uni demeurent les principaux clients du Pakistan, à hauteur respectivement de 26,3%, 18% et 6,5%. Malgré l’extension du régime SPG+ de l’UE (système des préférences généralisées plus) qui octroie aux pays bénéficiaires un accès en franchise et sans contingent pour presque toutes leurs exportations et qui a été octroyé au Pakistan le 1er janvier 2014, les exportations vers les pays de l’UE sont en baisse de 3% par rapport à 2023. Cette baisse serait due à une diminution de la demande de produits pakistanais en Europe ; on observe une tendance similaire pour les ventes pakistanaises vers les Etats-Unis, en baisse de 8% en g.a. A l’inverse, les exportations du Pakistan vers la Chine marquent une nette progression, +34% à 2,7 Mds USD. La Chine capte désormais 9% des ventes du Pakistan et est le second client, devant le Royaume-Uni et les Emirats arabes unis. Selon les données de la Banque centrale du Pakistan, la France voit ses importations en provenance du Pakistan reculer de 11%, pour s’établir à 508 M USD[1]. Avec une part des exportations de 1,64%, la France est le 15ème client du Pakistan (6ème au sein de l’UE, derrière l’Allemagne, l’Espagne, les Pays-Bas, l’Italie et la Belgique).