Réflexions hebdomadaires sur les principaux évènements financiers, institutionnels ou règlementaires, aux Etats-Unis.

Sommaire

Politiques macroéconomiques

  • Donald Trump devient le 47ème président des États-Unis
  • Le Treasury met en place des mesures d’urgence pour faire face à l’atteinte du plafond de dette

Services financiers

  • Les banques américaines ont publié d’excellents résultats pour le 4ème trimestre et l’année 2024
  • Le Président D. Trump signe des décrets en faveur de l’industrie des crypto-actifs et des nouvelles technologies financières
  • La Maison Blanche désigne les dirigeants par intérim des régulateurs financiers en attendant la confirmation de leurs Présidents par un vote du Sénat

Situation des marchés

 

Politiques macroéconomiques

 

Donald Trump devient le 47ème président des États-Unis

Le 20 janvier, Donald Trump devient le 47ème président des États-Unis, marquant ainsi le début de la nouvelle administration. Lors de son discours d’investiture au Capitole, le nouveau Président promet « un âge d’or de l’Amérique » par la mise en œuvre d’une politique d’« America First ».

À l’arrivée dans le bureau ovale, après avoir signé un décret (Executive Order – EO) visant à annuler les décrets de son prédécesseur Joe Biden, D. Trump a signé une série de décrets touchant divers domaines : en matière d’immigration, D. Trump déclare une urgence nationale à la frontière sud des États-Unis avec l’envoi des troupes pour renforcer le contrôle et limiter l’immigration, suspend le programme d’admission des réfugiés aux États-Unis et met en place d’autres dispositions comme le maintien des demandeurs d’asile au Mexique. Toutefois, certaines de ces dispositions font et feront l’objet d’un examen juridique. Dans la fonction publique, la nouvelle administration suspend la publication de nouvelles réglementations et soumet les projets en cours à une revue générale, gèle le recrutement d’emplois civils au sein de l’administration et met fin au télétravail, exigeant le retour en présentiel des fonctionnaires. En matière économique, le Président affirme la nullité de la réforme de la fiscalité internationale adoptée dans le cadre de l’accord de l’OCDE sans le vote d’une loi au Congrès, et la Maison-Blanche enjoint l’ensemble des administrations et agences fédérales à trouver des plans d’économie et des mesures pour réduire le coût de la vie. Le président a par ailleurs signé un décret clarifiant le statut et les missions du Department of Governement Efficiency (DOGE) dirigé par Elon Musk, après le départ de Vivek Ramaswamy. Le DOGE, renommé en US DOGE Service (USDS) sera rattaché à la Maison-Blanche, remplacera l’US Digital Service créé en 2014 sous l’administration Obama et aura pour objectifs de renforcer la numérisation et l’efficience de l’administration fédérale.

 

Le Treasury met en place des mesures d’urgence pour faire face à l’atteinte du plafond de dette

L’ancienne secrétaire au Trésor, Janet Yellen, a indiqué, dans sa lettre au Congrès datée du 17 janvier 2025, que le plafond de la dette serait atteint à compter du 21 janvier, et que dans l’attente de son relèvement ou sa suspension par le Congrès, le Treasury mettrait en place des mesures d’urgence de gestion de la trésorerie de l’État fédéral (extraordinary measures). J. Yellen a mis en garde contre le risque d’un défaut de paiement en l’absence de relèvement ou de suspension du plafond mais n’a toutefois pas précisé la durée pendant laquelle ces mesures permettraient à l’État fédéral d’honorer ses obligations.

Les mesures d’urgence annoncées consistent à une suspension d’alimentation des fonds de retraite et de santé des employés fédéraux tels que le Civil Service Retirement and Disability Fund (CSRDF) et le Postal Service Retiree Health Benefits Fund (PSRHBF), ce qui permet de dégager de la trésorerie temporairement. Une fois le plafond relevé ou suspendu, ces fonds seront crédités.

Pour rappel, le plafond correspond au montant maximum que le Congrès autorise l’État fédéral à emprunter et il a été suspendu à la suite de l’adoption bipartisane du Fiscal Responsibility Act en juin 2024 et réactivé à compter du 2 janvier 2025.

 

Services Financiers

 

Les banques américaines ont publié d’excellents résultats pour le 4ème trimestre et l’année 2024

Les six plus grandes banques américaines (JP Morgan - JPM, Bank of America - BoA, Citigroup - Citi, Wells Fargo - WF, Goldman Sachs - GS, Morgan Stanley - MS) ont publié mercredi et jeudi leurs résultats pour le 4ème trimestre 2024 et pour l’exercice 2024.

Au 4ème trimestre 2024, les banques affichent d’excellents résultats portés par la victoire de Donald Trump à l’élection américaine, qui a gonflé la confiance et l’activité des marchés financiers. Leur produit net bancaire (PNB) cumulé est en hausse de +13 % sur un an. La hausse des revenus provient essentiellement des activités de banque de financement et d’investissement (BFI). La hausse des activités de trading sur un an dépasse celle enregistrée au 3ème trimestre 2024, tandis que les performances exceptionnelles de la banque d’investissement (BoA +44 % ; MS +25 % ; JPM +46 % ; GS +24 %) reflètent (i) la reprise des introductions en Bourse, rendues attractives pour les entreprises grâce à l’augmentation des valorisations, et (ii) la demande d’accompagnement d’émetteurs obligataires attirés par la récente baisse des taux. En revanche, la marge nette d’intérêts (MNI) est en retrait sur un an pour trois des quatre banques « universelles », en partie en raison de la bonne tenue des marchés qui détourne certaines entreprises du financement bancaire classique. Conforté par un coût du risque et des charges d’exploitation en baisse, le résultat net des grandes banques a plus que doublé sur un an. Le résultat net agrégé des six banques augmente de +107 % sur un an.

Dans son ensemble, l’année 2024 est positive pour les six plus grandes banques américaines, mais dans une moindre mesure que son quatrième trimestre. Quasiment toutes les banques publient des PNB en hausse sur l’année, leur PNB cumulé progressant de +8 % par rapport à 2023. Contrairement à 2023 où ils avaient pâti de la baisse des flux de fusion-acquisition et de trading, les établissements spécialisés dans les activités de banque d’investissement et de marché voient leur PNB augmenter le plus rapidement (+16 % pour GS, +14 % pour MS). Les résultats nets cumulés connaissent une hausse plus rapide encore que le PNB (+19 %), grâce à des charges d’exploitation contenues ou réduites, et malgré un coût du risque qui continue d’augmenter chez la plupart des banques. Enfin le secteur bancaire a connu sa meilleure performance boursière sur l’année depuis plus de 10 ans (+33 % pour l’indice KBW Nasdaq bank Index), et surperforme largement le marché (l’indice S&P 500 réalise une hausse de 24 %).

Les banquiers ont confiance dans les perspectives de croissance de l’année 2025. Lors de la présentation des résultats, les CEO des banquese se sont félicités de l’agenda favorable à la croissance du nouveau Président, qui justifie l’optimisme des entreprises et les encourage à investir. L’économie américaine est jugée robuste et résiliente, le taux de chômage demeurant faible et la consommation soutenue, malgré deux risques identifiés : la persistance de l’inflation, et des risques géopolitiques inquiétants. Les banques s’attendent à une croissance modérée de la marge nette d’intérêt, et surtout à ce que le sursaut de fin d’année des fusions-acquisitions prenne de l’ampleur au cours de l’année à venir. 

 

Le Président D. Trump signe des décrets en faveur de l’industrie des crypto-actifs

Le 23 janvier, D. Trump a publié un décret présidentiel visant à promouvoir l’industrie des crypto-actifs et des nouvelles technologies financières aux Etats-Unis. Pendant sa campagne, D. Trump avait insisté sur son engagement de faire des Etats-Unis « la capitale mondiale » des crypto-actifs.

Le décret crée notamment, sous l’égide du National Economic Council (NEC), le comité économique rattaché au Président, un groupe de travail dédié à l’élaboration d’un cadre règlementaire en matière de crypto-actifs (Working Group on Digital Asset Markets – WG). Présidé par David Sacks (Chair), le conseiller spécial en matière d’intelligence artificielle (IA) et de crypto-actifs à la Maison Blanche, le WG compte 11 membres issus de différentes agences de l’Etat, parmi lesquels le Secrétaire du Trésor, le Chairman de la Securities and Exchange Commission (SEC), l’autorité des marchés financiers et le Chairman de la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), l’autorité des marchés de dérivés. Le décret charge les agences membre du WG : i) dans un délai de 30 jours, d’identifier toute matière juridique (règle, recommandation, décret) « affectant » le secteur des crypto-actifs ; ii) dans un délai de 60 jours, de formuler des recommandations au Chair du WG pour amender ou supprimer la documentation concernée. Le WG devra ensuite remettre au Président, dans un délai de 180 jours, un rapport présentant des propositions relatives à l’encadrement des crypto-actifs, y compris des stable coins (e.g. régime de supervision, modalités d’émission, règles de protection des consommateurs, gestion des risques). Dans ses travaux, le WG devra évaluer la pertinence de créer une réserve nationale de crypto-actifs (national digital asset stockpile), qui pourrait s’appuyer sur des crypto-actifs saisis à l’issue de procédures de sanction.

Le décret interdit également les agences d’entreprendre des projets visant à la création d’une monnaie digitale de banque centrale (Central Bank Digital Currency – CBDC). Les travaux en cours en la matière devront être immédiatement suspendus. En effet, selon D. Trump, les CBDC menaceraient la stabilité financière, et entraîneraient des risques pour la confidentialité des données des usagers.

Par ailleurs, le 21 janvier, la SEC a annoncé la création d’une Task Force dédiée à l’élaboration d’un cadre règlementaire en matière de crypto-actifs. Dirigée par la Commissaire républicaine Hester Pierce, cette Task Force vise à collaborer avec la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), l’autorité des marchés de dérivés, et l’industrie pour apporter plus de « clarté » aux acteurs, en particulier sur les modalités d’enregistrement auprès des régulateurs. La SEC indique que cette démarche permettra de sortir de la logique de sanction adoptée jusqu’alors contre les plateformes de crypto-actifs sur le fondement des règles applicables aux titres financiers (securities), jugée inintelligible.

 

La Maison-Blanche désigne les dirigeants par intérim des régulateurs financiers, en attendant la confirmation de leurs Présidents par un vote du Sénat

Suite à l’investiture du Président D. Trump le 20 janvier, la Maison Blanche a désigné la plupart des dirigeants par intérim (acting Chair) des agences de régulation financière, dans l’attente de la confirmation par le Sénat des Présidents (Chairman) titulaires nommés (ou en attente d’être nommés) par D. Trump. La procédure de confirmation du Sénat pourra prendre plusieurs mois.

Sont notamment nommés en qualité d’acting Chair : i) au département du Trésor, David Lebryk, actuel Secrétaire aux affaires fiscales du département, en attendant le vote de confirmation de Scott Bessent qui devrait avoir lieu très prochainement après la décision de la Commission des finances du Sénat d’avancer la date du vote ; ii) à la Securities and Exchange Commission (SEC), l’autorité des marchés financiers, le Commissaire républicain Mark Uyeda, en attendant la confirmation de Paul Atkins ; ii) à la Federal Deposit Insurance Corporation (FDIC), l’autorité de résolution et de garantie des dépôts des banques, le Vice-Président actuel Travis Hill, en attendant la nomination d’un Chairman par D. Trump.

À ce jour, la Maison-Blanche n’a pas changé le président du Consumer Financial Protection Bureau (CFPB), l’agence de protection des consommateurs en matière financière, qui reste Rohit Chopra. Michael Hsu, président par intérim de l’Office of the Comptroller of the Currency (OCC), conserve lui aussi pour l’instant ses fonctions.

 

Situation des marchés

 

Sur la semaine écoulée (de vendredi à jeudi), les indices boursiers progressent légèrement : +3,0 % pour le S&P 500 à 6 112, atteignant ainsi son plus haut niveau historique, et +3,7 % pour le Nasdaq à 20 054.

Le rendement des obligations souveraines américaines (Treasuries) à 2 ans s’est stabilisé à 4,3 % tandis que celui à 10 ans a reculé de ‑0,1 point, à 4,6 %.

La progression des marchés actions s’expliquerait principalement par (i) un communiqué « rassurant » du Président D. Trump à la suite d’un échange téléphonique avec son homologue chinois, Xi Jinping, (ii) l’absence d’annonce sur une hausse des droits de douane à la suite de son investiture, et (iii) des annonces de soutiens à l’industrie américaine et aux secteurs stratégiques comme celui de l’intelligence artificielle (IA).

 

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