Réflexions hebdomadaires sur les principaux évènements financiers, institutionnels ou règlementaires, aux Etats-Unis.

Sommaire

Conjoncture

  • L’inflation PCE marque le pas

Politiques macroéconomiques

  • Le Congrès adopte un budget provisoire expirant le 14 mars, évitant ainsi le shutdown de l’État fédéral
  • Le plafond de dette est réactivé à compter du 1er janvier 2025
  • Les responsables de la Fed se montrent prudents pour 2025 face à une incertitude élevée

Services financiers

  • Le vice-président de la Fed chargé de la supervision et le président de la CFTC annoncent leur démission
  • Les plus grandes banques américaines quittent la Net-Zero Banking Alliance

Situation des marchés

Brèves

 

Conjoncture

 

L’inflation PCE marque le pas

Selon les estimations du Bureau of Economic Analysis (BEA), en novembre, l’indice des prix des dépenses de consommation personnelle (Personal Consumption Expenditure – PCE) et sa composante sous-jacente (hors énergie et alimentation) ont augmenté tous deux de +0,1 %. Sur douze mois glissants, l’inflation et sa composante sous-jacente se sont établies à +2,4 % et +2,8 % respectivement (après +2,3 % et +2,8 %), légèrement en-deçà des attentes des marchés (2,5 % et 2,9 % respectivement).

Sur un mois, les prix de l’énergie et de l’alimentation ont progressé tous deux de +0,2 % (après ‑0,1 % et 0,0 % respectivement). Sur douze mois glissants les prix de l’énergie ont baissé de ‑4,0 % (après ‑6,0 %) alors que ceux de l’alimentation ont augmenté de +1,4 % (après +1,0 %).

Les prix des services ont ralenti, à +0,2 % (après +0,4 %) et les prix des biens se sont stabilisés (0,0 % après -0,1 %). En glissement annuel, l’inflation des services s’établit à +3,8 % (après +3,9 %) et celle des biens à ‑0,4 % (après -1,0 %).

 

Politiques macroéconomiques

 

Le Congrès adopte un budget provisoire expirant le 14 mars, évitant ainsi le shutdown de l’État fédéral

Le Congrès a adopté (366-34 à la Chambre des représentants le 20 décembre et 85-11 au Sénat le 21 décembre) un budget provisoire maintenant le fonctionnement des administrations fédérales jusqu’au 14 mars 2025. Le président Biden l’a signé dès sa réception, permettant ainsi à l’État fédéral d’éviter la fermeture forcée de ses services (shutdown).

Le budget prévoit notamment 110 Md USD de dépenses liées aux catastrophes naturelles et d’aides aux agriculteurs ainsi que l’extension de la Farm Bill pour un an. En revanche, contrairement à l’accord bipartisan initial publié le 16 décembre, la loi ne comporte pas de dispositions relatives aux restrictions d’investissements vers la Chine.

Par ailleurs, le Représentant Mike Johnson (R-Louisiane) a été réélu speaker (président de l’assemblée) de la Chambre des représentants du 119e Congrès. Le speaker est notamment chargé de définir l’agenda de l’assemblée. En fonction depuis le 26 octobre 2023, sa réélection, bien que soutenue par le président élu Donald Trump, s’est effectuée dans un climat tendu, marqué par une étroite majorité républicaine à la Chambre (219-215) et des dissensions internes au sein du parti. Le maintien de Mike Johnson au poste de Speaker a été rendu possible grâce au changement de vote inattendu de Ralph Norman (R-Caroline du Sud) et Keith Self (R-Texas).

 

Le plafond de dette est réactivé à compter du 1er janvier 2025

La secrétaire au Trésor, Janet Yellen, a indiqué, dans sa lettre au Congrès datée du 27 décembre 2024, que le plafond de dette serait réactivé à compter du 1er janvier 2025. Le plafond correspond au montant maximum que le Congrès autorise l’État fédéral à emprunter. Il avait été suspendu à la suite de l’adoption bipartisane du Fiscal Responsibility Act en juin 2024.

Selon les estimations du Treasury, le plafond deviendrait mordant à une date comprise entre le 14 et le 23 janvier et il sera alors nécessaire pour le Treasury de mettre en place des mesures d’urgence de gestion de la trésorerie (extraordinary measures). Faute d’ajustement du plafond ou des émissions de dette, les États-Unis courent le risque d’un défaut de paiement.

 

Les responsables de la Fed se montrent prudents pour 2025 face à une incertitude élevée

Selon le procès-verbal (minutes) de la réunion du comité de politique monétaire de la Fed (FOMC) des 17 et 18 décembre, publié le 8 janvier, les responsables de la Fed ont salué les progrès réalisés dans la lutte contre l’inflation et la robustesse de l’économie américaine mais ont également affiché une prudence face aux perspectives économiques incertaines.

Selon les responsables, l’économie américaine reste globalement bien orientée. L’inflation a bien reculé par rapport à son pic en 2022 et le processus de désinflation semble bien amorcé. En particulier, les entreprises seraient plus réticentes à augmenter les prix face aux consommateurs qui y sont devenus plus sensibles. Ils s’attendent néanmoins à une désinflation plus lente en 2025 que prévu initialement, en lien notamment avec les pressions inflationnistes qui pourraient résulter des changements de politiques commerciale et migratoire, et du dynamisme de l’activité et des marchés financiers. Le marché du travail s’est détendu, notamment au regard de certains indicateurs comme les taux d’emplois vacants et de démission. Toutefois, les responsables estiment que le risque d’une dégradation brutale serait faible.

Au regard de l’évolution des indicateurs économiques, les responsables ont globalement jugé que la poursuite de la baisse des taux directeurs était appropriée. Toutefois, certains ont indiqué préférer maintenir les taux inchangés face au risque de résurgence de l’inflation. À ce titre, ils se sont accordés sur la nécessité de rester vigilants sur l’évolution et d’opter pour une approche prudente et graduelle dans l’ajustement de la politique monétaire.

 

Services Financiers

 

Le vice-président de la Fed chargé de la supervision et le président de la CFTC annoncent leur démission

Le début d’année est marqué par plusieurs démissions parmi les régulateurs financiers, ce qui laisse le champ libre au Président et au Sénat pour nommer des responsables alignés avec le programme républicain.

Dans un communiqué de presse publié le 6 janvier, le conseil des gouverneurs de la Fed a annoncé la démission de Michael Barr de ses fonctions de vice-président en charge de la supervision à compter du 28 février 2025, ou plus tôt si un successeur était désigné d’ici-là par le Président des États-Unis et confirmé par le Sénat. M. Barr restera néanmoins gouverneur de la Fed. Cette démission intervient alors que le camp républicain questionnait depuis plusieurs semaines la capacité du Président à changer le vice-président avant l’issue de son mandat. Si M. Barr considérait qu’un tel remplacement du responsable de la supervision bancaire n’était pas possible juridiquement, son indépendance étant protégé par le Dodd Franck Act qui a créé la fonction, il a justifié sa décision par le souhait de ne pas ouvrir un contentieux juridique long et préjudiciable à l’action de la Fed. J. Powell, de son côté, a déjà indiqué qu’il ne quitterait pas ses fonctions de président de la Fed avant l’issue de son mandat.

M. Barr devrait être remplacé dans ses fonctions de vice-président chargé de la supervision par l’un des deux gouverneurs de la Fed nommé durant le premier mandat de président Donald Trump, Christopher Waller ou Michelle Bowman. Ces deux derniers avaient voté contre la proposition de transposition des accords de Bâle III publiée en juillet 2023.

Le départ de M. Barr achève de clarifier les évolutions à attendre à la tête des régulateurs bancaires chargés de finaliser la transposition des accords de Bâle III.

Ainsi, Michael Hsu, Comptroller par intérim de l’Office of the Comptroller of the Currency (OCC), le régulateur des state banks, a indiqué le 6 janvier qu’il resterait en poste jusqu’à son changement probable par le nouveau secrétaire au Trésor (Scott Bessent doit être confirmé par le Sénat). Par ailleurs, Martin Gruenberg, président de la Federal Deposit Insurance Company (FDIC), l’autorité de résolution et de  garantie des dépôts des banques, a indiqué qu’il démissionnerait le 19 janvier. Enfin, Rohit Chopra, président du Consumer Financial Protection Bureau (CFPB), l’agence de protection des consommateurs en matière de services financiers, a indiqué qu’il n’avait pas l’intention de démissionner mais a rappelé qu’une jurisprudence de la Cour suprême de 2020 (Seila Law vs CFPB) donnait le droit au Président des États-Unis de le remplacer à n’importe quel moment.

Rostin Behnam, président de la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), l’autorité des marchés de dérivés, a également annoncé le 7 janvier sa démission à compter de l’investiture du Président le 20 janvier. Si le Président Trump a déjà désigné Paul Atkins pour succéder à Gary Gensler, dont la démission de la présidence de la Securities and Exchange Commission (SEC), l’autorité de régulation des marchés, prendra effet le 20 janvier, il n’a pas fait connaître qui il entendait nommer à la tête de la CFTC, l’agence qui a les faveurs des républicains pour assurer la régulation du secteur des cryptoactifs.

 

Les plus grandes banques américaines quittent la Net-Zero Banking Alliance

Citigroup, Bank of America, Goldman Sachs, Wells Fargo, Morgan Stanley et JP Morgan ont annoncé leur sortie de la Net-Zero Banking Alliance (NZBA). La NZBA est un groupe de banques qui s’engagent à mettre en œuvre une stratégie compatible avec l’objectif de neutralité des émissions de gaz à effet de serre d’ici 2050.

Cette sortie de l’alliance répond à la pression croissante exercée depuis plusieurs années par le parti républicain contre la finance verte, exacerbée par l’élection du Président D. Trump. En décembre, le comité des affaires judiciaires de la Chambre des Représentants, présidé par le Républicain Jim Jordan (R-Ohio), avaient accusé les différentes alliances de constituer des « cartels climatiques ». Si les banques concernées ne remettent pas en cause leurs engagements climatiques, elles mettent en avant leur intention de continuer à financer les énergies fossiles, notamment alors que le Président élu entend relancer les activités extractives. L’Attorney General du Texas, Ken Paxton, a réagi à la décision des banques en levant la revue qu’il avait ouverte à leur égard en octobre 2023 pour déterminer si elles pouvaient toujours participer aux émissions de dettes locales.

Cette pression s’exerce aussi dans le secteur de la gestion d’actifs, et a donné lieu à plusieurs actions de rétorsion de la part des États républicains (désinvestissements de certains fonds) ou des poursuites judiciaires (comme celles engagées récemment par 11 États républicains contre BlackRock, State Street et Vanguard au motif d’une prétendue entente pour limiter l’approvisionnement en charbon). Vanguard avait déjà quitté la Net Zero Asset Managers Initiative (NZAMI) en décembre 2022 et State Street la Climate Action 100+ en février 2024.

 

Situation des marchés

 

Depuis le début d’année, les indices boursiers progressent légèrement : +0,3 % pour le S&P 500 à 5 918 et +0,4 % pour le Nasdaq à 42 635.

Le rendement des obligations souveraines américaines (Treasuries) à 2 ans se sont stabilisés à 4,3 % tandis que celui à 10 ans a progressé de +0,1 point, à 4,7 %. Les marchés financiers sont marqués par des mouvements de sens opposé : d’un côté, la nouvelle administration promet des baisses d’impôts et une politique de dérégulation, et les valeurs technologiques font toujours l’objet d’un enthousiasme porté par l’intelligence artificielle ce qui favorise l’appétit pour le risque. De l’autre, ce mouvement est contrebalancé par un niveau d’incertitude élevé résultant des promesses de politique commerciale protectionniste et migratoire restrictive, qui pourraient exacerber les pressions inflationnistes et ralentir la baisse des taux d’intérêt.

 

Brèves