Politique monétaire :

 

Baisse de l’inflation mais maintien des pressions inflationnistes sous-jacentes.

L’indice des prix à la consommation (IPC) pour le mois de novembre s’établit à 4,9% en g.a. atteignant son plus bas niveau depuis six ans. L’IPC moyen au cours des cinq premiers mois (juillet-novembre) de l’exercice est à 7,9 %. Dans ce contexte, le ministère des Finances revoit ses prévisions d’inflation pour l’année budgétaire de 12 % -prévues au moment du vote de la loi de finances en juin 2024- à une fourchette située entre 5,8 % et 6,8 %. La banque centrale (Central Bank of Pakistan-SBP) s’attend quant à elle à une inflation située autour de 5 %. L’inflation sous-jacentes calculée après exclusion des produits énergétiques et alimentaires affiche une tendance en demi-teinte, s’accélérant à 8,9 % dans les villes mais ralentissant pour atteindre 10,9 % dans les zones rurales.

Baisse des taux d’intérêts réels.

La baisse de l'inflation a entraîné la baisse des taux d'intérêt réels à 10,1 % (le taux directeur s’établissant à 15%), ce qui pourrait donner à la SBP la marge de manœuvre suffisante pour introduire une nouvelle réduction du taux directeur lors de la prochaine réunion du Comité de politique monétaire du 16 décembre 2024.

Vente avant échéance des bons du Trésor sur le marché secondaire depuis novembre.

Les ventes anticipées de bons du Trésor (T-Bills), qui sont libellés en monnaie locale, ont atteint 46 MUSD lors de la première semaine de novembre (pour des achats à hauteur de 10,5 M USD). Deuxième semaine de novembre, les ventes anticipées de T-Bills s’établissaient à 48 MUSD (dont 41 MUSD par des fonds britanniques et 5 MUSD par des fonds émiratis) pour des achats à hauteur de 9,5 M USD. Entre le 15 et le 22 novembre 2024, les ventes anticipées de T-Bills s’établissaient à 38 M USD pour 10 MUSD d’achats par les banques pakistanaises. On notera que c’est la première fois que la SBP communique sur la prédominance des acteurs étrangers par rapport au banques pakistanaises sur ce marché. Au niveau conjoncturel, le désinvestissement net du marché obligataire reflète la baisse des rendements des bons du Trésor, le rendement à trois mois ayant chuté à 12,9974 % lors de l’émission de bons du Trésor du 27 novembre, son niveau plancher depuis avril 2022. Sur le fond, il semble que les acteurs financiers mettent en doute la capacité du Pakistan à améliorer la situation en termes de liquidités financières (les IDE entrants ne pourront pas compenser l’abondement des réserves de change par les IFIs actuellement très dynamique) et à ce que la roupie pakistanaise reste à son niveau actuel (278 PKR en moyenne pour 1 USD depuis un an).

Débat autour de l’effet économique d’une dévaluation sur la roupie pakistanaise (PKR).

La presse évoque cette semaine une discussion autour de la surévaluation de la PKR à partir d’une « note d’alerte économique » rédigée par M. Ashfaq Tola (actuellement à la tête d’un cabinet d’experts comptables), l’un des secrétaires d’Etat aux finances de 2022 à février 2023 et ancien président de la « commission des réformes et de la mobilisation des recettes ». M. Ashfaq Tola considère que la PKR n’est pas basée sur le marché et qu’elle est surévaluée d’au moins ¼ de sa valeur (le taux de marché devrait donc être à 211,5 PKR plutôt que 278 PKR). M. Dar, vice Premier ministre et ancien ministre des finances considère que le taux de change effectif réel de la PKR (valeur de la PKR corrigée d’un différentiel d’inflation avec les monnaies des autres pays) devrait s’établir entre 235 et 240 PKR pour 1 USD.  Pour M. Ashfaq Tola, la SBP a acheté 6 Mds USD sur le marché international et 722 M USD sur le marché domestique au cours de l’année budgétaire 2024. Selon l’ancien secrétaire d’Etat, si la PKR avait été négociée à son taux de change effectif réel, au lieu d’être à 8,7% en moyenne sur les quatre premiers mois de l’année 2025, l’inflation de cette période se serait établie à 4,67%, le taux directeur de la SBP aurait été à 2% (et non à 15%) et le remboursement annuel de la dette intérieure aurait pu entraîner des économies de 6,4 Mds PKR.

Mise en conformité par rapport aux attentes du FMI et de l’UE.

Critères de performance du FMI avec lesquels le gouvernement doit se mettre en conformité

Il ressort d’une présentation par des haut-fonctionnaires du ministère des Finances à la Commission des finances de l’Assemblée nationale que le Pakistan doit améliorer les critères quantitatifs de performance du programme du Fonds monétaire international (FMI) d’ici la première revue du programme de l’EFF : (i) le plafond des recettes fiscales nettes perçues par le FBR (agence autonome de perception des impôts) ; (ii) l’adhésion effective des provinces au « national fiscal pact » (seul le Pendjab s’est doté d’une loi permettant de percevoir un impôt sur le revenu agricole) ; (iii) le plafond des dépenses budgétaires des administrations publiques en matière de santé et d’éducation n’est pas atteint (du fait du lien existant dans la loi de finance de l’année 2025 entre les revenus provinciaux et les dépenses dans ces domaines) ; (iv) amélioration des délais de paiements auprès des banques locales des titres de créance domestiques en monnaie locale ; l’extinction progressive d’une double programmation budgétaire (la loi de finances est votée en parallèle avec un programme de développement du secteur public) ; (v) question de la maturité de la dette (le Pakistan doit rembourser 100 Mds USD entre l’année budgétaire 2025 et 2029).

Critères pour le maintien du GSP+ : annonce d’adhésion à la convention de l'OIT relative au travail forcé.

Le cabinet du Premier ministre a approuvé la ratification du Protocole à la Convention sur le travail forcé de 1930. Le cabinet indique que le ministère des Pakistanais de l’étranger et du développement des ressources humaines (PPRH) sera responsable de la préparation de cette loi ainsi que de la loi sur l’autonomie du financement de la sécurité sociale (le FMI insiste pour que le gouvernement commence cette réforme). Ce ministère devient l’interlocuteur direct des organisations internationales sur ce sujet. La presse indique qu’un progrès rapide est nécessaire dans le cadre des dialogues commerciaux avec l’UE (maintien du GSP+) et avec le Royaume-Uni (mise en place d’un GSP).

Chronique :

Une société chinoise victime d’importations illégales.

La société chinoise Century Steels Mills a envoyé un courrier au Premier ministre pour se plaindre des privilèges de franchise de droits d’importations concernant des produits métalliques dont bénéficient les ex-territoires tribaux (« FATA ») - qui font officiellement partie de la province du Khyber Pakhtunkhwa depuis 2018 – mais continuent à bénéficier de privilèges fiscaux liés à leur ancienne qualité de territoire spécial. Century Steels Mills dont l’usine est située à l’extérieur des FATA indique que du fait que les produits métalliques importés par les FATA sont distribués vers le reste du Pakistan (en contravention avec le principe de la franchise de taxe liée aux seuls consommateurs locaux) elle a perdu pour une valeur de 7,5 M USD en produits métalliques. De ce fait, elle voudrait obtenir un dédommagement de la part de la zone économique spéciale (ZES) de Rashakai (une ZES dont le capital est détenu en partie par la province du Khyber Pakhtunkhwa). Le groupe de travail qui s’est constitué pour régler cet irritant sino-pakistanais indique qu’il sera difficile à la société métallurgique chinoise d’obtenir gain de cause du fait de la réticence d’une autre société chinoise -la China Road & Bridge Corporation- qui est le premier actionnaire de la ZES.