Washington Wall Street Watch n°2024-34
Réflexions hebdomadaires sur les principaux évènements financiers, institutionnels ou règlementaires, aux Etats-Unis.
Sommaire
Conjoncture
- Les prix de l’immobilier marquent le pas
- Le BEA revoit à la hausse la trajectoire du PIB sur 2019-2023
Politiques Macroéconomiques
- Le Congrès adopte le budget provisoire
Services financiers
- L’audition de la SEC à la Chambre des Représentants met l’accent sur la régulation des crypto-actifs
- Le groupe de travail inter-agences publie un rapport sur les mesures mises en place pour la résilience du marché des Treasuries
- La CFTC promeut la standardisation des procédures d’autorisation préalables à la cotation des contrats dérivés de crédits carbone volontaires (CCV)
Situation des marchés
Brèves
Conjoncture
Les prix de l’immobilier marquent le pas
Selon le rapport publié le 24 septembre par l’Agence fédérale de financement du logement (Federal Housing Finance Agency – FHFA), les prix de l’immobilier ont augmenté de +0,1 % en juillet (après avoir marqué le pas en juin, à +0,0 %). Sur douze mois glissants, les prix ont progressé de +4,5 %. Selon Anju Vajja, directeur adjoint de la division de la recherche et des statistiques de la FHFA, bien que les prix aient marqué le pas au cours des trois derniers mois, la baisse des taux d’intérêt devrait soutenir le marché.
L’indice Case-Shiller publié par S&P Global, qui porte sur les prix immobiliers des 20 plus grandes villes américaines, a augmenté en juillet de +0,3 % (après +0,4 % en juin). En glissement annuel, l’indice progresse de +5,9 % (après +6,5 %). Bien qu’ils ralentissement, les prix immobiliers ont atteint leur plus haut niveau historique.
Le BEA revoit à la hausse la trajectoire du PIB sur 2019-2023
Selon la 3ème estimation (définitive) du Bureau of Economic Analysis (BEA), la croissance du PIB des États-Unis au 2ème trimestre est restée inchangée par rapport à la 2ème estimation, à savoir +0,7 % en évolution trimestrielle (+3,0 % en rythme annualisé).
À l’occasion de cette publication, le BEA a également publié un rapport sur la révision annuelle des comptes nationaux. Le rapport indique une croissance plus dynamique du PIB au cours de la période 2019-2023 : en glissement annuel, la croissance s’est établie à +2,6 % (+0,1 point par rapport à l’estimation précédente) en 2019, +6,1 % (+0,3 point) en 2021, +2,5 % (+0,6 point) en 2022 et +2,9 % (+0,4 point) en 2023. En particulier, les révisions en 2022 et 2023 résultent principalement d’une consommation et d’investissements plus dynamiques. Enfin, la croissance du produit national brut (PNB) a été revue à la hausse.
Politiques Macroéconomiques
Le Congrès adopte le budget provisoire
Le Congrès a adopté (341-82 pour la Chambre des représentants et 78-18 pour le Sénat) le 25 septembre une version bipartisane de budget provisoire qui expire le 20 décembre.
Le budget provisoire permet de maintenir le fonctionnement des administrations fédérales pour une période intérimaire après la fin de l’exercice budgétaire ordinaire (30 septembre). Pour mémoire, une proposition de budget provisoire formulée par le Speaker Mike Johnson (R-Louisiane), prévoyant notamment une date d’expiration fixée au 28 mars 2025 et un contrôle préalable de la citoyenneté américaine lors des élections, a été rejetée (202-220) le 18 septembre faute de consensus interne au parti républicain.
Services Financiers
L’audition de la SEC à la Chambre des Représentants met l’accent sur la régulation des crypto-actifs
Le 24 septembre, le comité des services financiers de la Chambre de Représentants a auditionné Gary Gensler, Président de la Securities and Exchange Commission (SEC), l’autorité des marchés financiers, accompagné des quatre commissaires Hester Peirce (R), Caroline Crenshaw (D), Mark Uyeda (R) et Jamy Lizárraga (D).
Les principales discussions ont porté sur la régulation des crypto-actifs. Pour mémoire, à ce jour, la SEC leur applique le même cadre juridique que celui applicable aux titres financiers traditionnels (securities), tandis que les républicains sont en faveur d’une supervision partagée entre la SEC et la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), régulateur des marchés de dérivés, considérée comme plus souple.
Tom Emmer (R-Minnesota), a reproché à la SEC de conserver une définition imprécise du statut des crypto-actifs. La commissaire H. Peirce (R) a regretté elle-aussi que la SEC ne dissocie pas clairement les crypto-actifs des titres financiers traditionnels. G. Gensler a quant à lui défendu la position de la SEC, qui se réfère à un arrêt de la Cour Suprême de 1946 (SEC vs. Howey) définissant les securities.
Par ailleurs, Maxine Waters (D-Californie) a annoncé qu’elle souhaitait engager un travail bipartisan avant la fin de l’année au sujet de l’encadrement des stablecoins, critiquant l’approche du texte présenté par le camp républicain en juillet 2023, qui exclut trop explicitement les payment stablecoins du champ des securities. Patrick McHenry (R-Caroline du Nord), Président de la commission des services financiers, a accueilli favorablement l’idée de poursuivre des discussions bipartisanes sur le sujet, rappelant néanmoins l’importance de clarifier les définitions de l’industrie.
Wiley Nickel (D-Caroline du Nord) et Mike Flood (R-Nebrasca) ont également interrogé G. Gensler sur la légitimité d’une règle visant à rehausser les exigences comptables de détention des crypo-actifs. Mi-mai, le Congrès avait adopté une résolution destinée à censurer le texte, finalement empêchée par le véto de Joe Biden. G. Gensler a affirmé que la règle resterait en vigueur, et a rappelé son importance pour accompagner les sociétés de crypto-actifs à évaluer leurs risques.
La SEC a également présenté les autres chantiers de son programme de travail, notamment la réforme du marché actions, le rehaussement des exigences de transparence en matière climatique et de cybersécurité. Au sujet de l’encadrement de la rémunération des dirigeants de certaines institutions financières, G. Gensler a indiqué que la SEC attendait l’approbation de la Fed pour proposer une règle sur le modèle de celle présentée par d’autres régulateurs bancaires (OCC, FDIC, FHFA) en mai 2024. Cette règle retient l’attention des membres du Congrès depuis la crise des banques régionales de 2023.
Le groupe de travail inter-agences publie un rapport sur les mesures mises en place pour la résilience du marché des Treasuries
Le 20 septembre, le groupe de travail inter-agences (Inter-Agency Working Group – IAWG), composé du Treasury, de la Fed, de la Fed de New York, de la Securities and Exchange Commission (l’autorité des marchés financiers – SEC) et de la Commodity Futures Trading Commission (l’autorité des marchés de dérivés – CFTC), a publié un rapport qui présente les mesures prises par les agences membres afin de renforcer la résilience du marché des obligations souveraines américaines (Treasuries).
L’IAWG souligne notamment i) plusieurs règles adoptées par la SEC visant à faciliter la procédure de compensation (clearing) des Treasuries, ii) le lancement d’un programme de rachat (buyback program) par le Treasury afin d’améliorer la liquidité du marché et la gestion de sa trésorerie, iii) de nouvelles règles adoptées par la SEC imposant aux investisseurs pour compte propre de s’enregistrer en tant que dealer lorsqu’ils interviennent sur le marché des Treasuries, iv) la diffusion publique de données relatives aux transactions individuelles des Treasuries à coupon nominal en cours d'émission par l’organisation d’autorégulation des marchés financiers (la FINRA, supervisée par la SEC), et v) la finalisation d’une règle par le bureau de recherche financière (Office of Financial Research – OFR) du Treasury qui prévoit des exigences de déclaration pour les accords de rachat (repurchase agreement - repo) dont le mécanisme de compensation n’est pas centralisé.
La publication du rapport s’inscrit dans la poursuite des travaux présentés par l’IAWG en novembre 2023 sur le même sujet.
La CFTC promeut la standardisation des procédures d’autorisation préalables à la cotation des contrats dérivés de crédits carbone volontaires (CCV)
Le 20 septembre, la Commodity Futures Trading Commission (CFTC), l’autorité des marchés de dérivés, a publié un ensemble de recommandations (guidance) non-contraignantes en matière de procédures d’autorisation préalables à la cotation de contrats dérivés de crédits carbone volontaires (CCV). Cette mesure a pour objectif d’améliorer la transparence, la liquidité et le mécanisme de fixation des prix de ces instruments. Rostin Benham, Président de la CFTC, souligne à cette occasion que la CFTC est le premier régulateur financier à s’engager par la voie règlementaire pour favoriser ces instruments qui participent aux efforts de décarbonation.
Pour mémoire, les marchés volontaires du carbone traitent de l'émission, l'achat et la vente de crédits carbone sur une base volontaire des acteurs (en dehors des machés carbone réglementés). Lors des colloques organisés par la CFTC sur le sujet en 2022 et en 2023, les parties prenantes du marché des CCV (développeurs de projets, émetteurs de CCV, auditeurs, registres, bourses etc.) ont souligné certains risques qui pèsent sur l’intégrité et l’efficience du marché des CCV, concernant notamment la qualité des projets sous-jacents aux CCV et le risque de greenwashing des entreprises qui les achètent.
Afin d’atténuer ces risques, les lignes directrices de la CFTC recommandent aux bourses enregistrées auprès de la CFTC (Designated Contract Markets – DCMs) de tenir compte, au cours du processus d’émission des contrats dérivés de CCV, d’exigences concernant i) les standards de qualité des contrats (transparence des caractéristiques,), ii) les modalités de négociation et de livraison des contrats (cadre de gouvernance, mécanisme de suivi du transfert de propriété des CCV sous-jacents, mesures de prévention de double comptage), et iii) les dispositifs d’inspection (supervision des auditeurs qui certifient les projets sous-jacents).
Ces recommandations participeront par ailleurs à s’assurer de la conformité obligatoire des contrats dérivés de CCV aux règles de la CFTC en matière de cotation (Commodity Exchange Act – CEA).
Situation des marchés
Au cours de la semaine écoulée (de vendredi à jeudi), l’indice S&P 500 est en en hausse de +0,6 %, à 5 745 points, tandis que le NASDAQ 100 a marqué une plus forte croissance avec +1,51 %, à 20 115 points.
Les rendements des obligations souveraines américaines (Treasuries) à 2 ans et à 10 ans sont restés stables, -0,0 point et +0,1 point pour atteindre 3,6 % et 3,8 %.
Au cours de la semaine, la progression des indices s’expliquerait notamment par une confiance accrue dans l’atterrissage en douceur de l’économie américaine dans un contexte de baisse des taux directeurs.
Brèves
- Le 24 septembre, le ministère de la justice (DoJ) a annoncé poursuivre Visa, le premier réseau de paiements à l’échelle mondiale et des États-Unis, au motif qu’il recourrait à des pratiques anti-concurrentielles sur le marché des cartes de débit. Visa est suspecté d’avoir i) imposé aux commerçants, par voie contractuelle, des restrictions illégales de routage des transactions (network exlusivity), les empêchant d’utiliser d’autres solutions à moindre coût, et ii) versé des centaines de millions de dollars à certains concurrents (PayPal, Apple, Block) pour tenir certains nouveaux produits à l’écart du marché. Le jour suivant l’annonce du DoJ, le titre Visa baissait de -5,4 %.
- Le 24 septembre, l’Office of the Comproller of the Currency (OCC), le régulateur des national banks, a publié les résultats des revenus de trading des entités supervisées pour le T2 2024. Sur la période, l’OCC présente un revenu de trading cumulé de 15,5 Md USD, soit + 1,4 % (+ 218 M USD) par rapport au T1 2024 et de + 16 % (+ 2,2 Md USD) par rapport au T2 2023.
- Conference Board, un think-tank spécialisé dans les sondages, a publié le 24 septembre un indice de confiance des ménages surprenant à la baisse. Il s’est établi à 98,7 (-6,9 points par rapport au niveau du mois précédent), soit la plus forte baisse enregistrée depuis août 2021 et bien en-deçà du niveau attendu (104).
- Selon une enquête de la Mortgage Bankers Association (MBA), publiée le 25 septembre, l’indice de refinancement, qui mesure l’activité de refinancement des prêts hypothécaires, a progressé de +20 % sur une semaine et de +175 % sur un an. Les demandes de prêts atteignent leur plus haut niveau depuis juillet 2022, notamment sous l’effet de la baisse des taux d’intérêt. Le taux des prêts hypothécaires à 30 ans est en baisse continue depuis mai 2024, passant de plus de 7 % à moins de 6 % fin septembre.