Lettre économique d'AEOI - Le commerce bilatéral France -AEOI
Si les échanges entre la France et la région AEOI demeurent limités, ils restent structurellement excédentaires en faveur de la France
La région Afrique de l’Est et Océan Indien (AEOI) reste un partenaire commercial modeste de la France. Madagascar et Maurice se distinguent comme les principaux débouché de la région pour les produits français, grâce à des liens historiques et la présence significative d'entreprises françaises qui y sont installées. Le Kenya et les Seychelles occupent également une place importante dans les exportations français vers la région, ainsi que l’Éthiopie, caractérisée par son vaste marché intérieur, qui représente notre 3ème client de l’AEOI. Si la composition des ventes françaises vers ces pays est variable, et peut-être marquée par les grands contrats (aéronautiques notamment), les achats français provenant de la région AEOI sont largement dominés par les produits agricoles et agroalimentaires. L'écart de valeur ajoutée entre exportations et importations permet à la France de maintenir un excédent commercial structurel avec l'AEOI, bien que celui-ci tende à se réduire.
Les exportations françaises vers l’AEOI ont légèrement augmenté en 2023
Selon les données des Douanes françaises, les exportations vers l’AEOI ont atteint 1,8 Md EUR en 2023 (+2,2 % par rapport à 2022), marquant ainsi une progression pour la deuxième année consécutive. Elles sont cependant restées en deçà des niveaux prépandémiques (2,2 Mds EUR en 2019). La région AEOI reste, par ailleurs, un client modeste pour la France, absorbant 0,3 % des exportations françaises et 16,6 % des exportations françaises vers l’Afrique subsharienne en 2023. Les principaux partenaires commerciaux de la France dans cette région sont Maurice (25,2 % des exportations vers l’AEOI), Madagascar (23,0 %) et l’Ethiopie (19,3 %).
Entre 2022 et 2023, les exportations françaises vers certains pays de l’AEOI ont, néanmoins, fortement augmenté. C’est notamment le cas des flux vers la Somalie (+123,8 %), le Burundi (+41,2 %), Djibouti (+17,3 %), le Rwanda (+15,8 %) et les Comores (+11,3 %). L’Éthiopie (+8,5 %) et Maurice (+5,3 %) ont également progressé, de façon plus modérée. Un tassement des ventes françaises a été observé pour les Seychelles (- 6,1 %), le Kenya (-3,2 %), Madagascar (-1,9 %), et, plus fortement, vers la Tanzanie (-9,7 %), le Soudan du Sud (-14,9 %), l’Ouganda (-28,1 %) et le Soudan (-29,5 %).
Nos principaux postes d’exportations vers l’AEOI reflètent la structure de nos exportations globales :
- Les équipements mécaniques, matériel électrique, électronique et informatique représentent 21,3 % de nos ventes en 2023 vers la région (contre une moyenne de 19,2 % depuis 2015), principalement à destination de Maurice (29,7 %), de Madagascar (25,7 %) et de l’Ethiopie (9,0 %) ;
- Les produits des industries agroalimentaires (IAA) comptent pour 18,8 % de nos exportations (14,1 % en moyenne depuis 2015), avec Maurice (27,4 %) et Madagascar (16,5 %) comme principaux marchés.
- Les matériels de transport, qui constituent 17,1 % de nos exportations vers l’AEOI en 2023 (contre 26,0 % en moyenne depuis 2015), sont principalement exportés vers l’Éthiopie (75,8 % en 2023) et Maurice (5,8 %).
Les importations françaises de la région sont en baisse, pour la première fois depuis 3 ans
En 2023, les importations françaises en provenance de l’AEOI se sont établies à 1,4 Md EUR, soit une baisse de 3,4 % par rapport à 2022, une diminution toutefois moins prononcée que celle enregistrée par les achats français depuis l'Afrique subsharienne (-15,3 %) et à l'échelle mondiale (-7,1 %). L’AEOI demeure un fournisseur marginal pour la France : en 2023, la région a fourni 10,6 % des importations françaises en provenance de l’Afrique subsaharienne (contre 13,5% en moyenne entre 2015 et 2022). À l'échelle mondiale, la région AEOI ne représente que 0,2 % des importations françaises, une part qui est reste stable depuis 2018. En 2023, nos principaux fournisseurs en AEOI étaient Madagascar (41,8 % de nos importations depuis l’AEOI), Maurice (19,4 %), les Seychelles (10,5 %) et le Kenya (10,1 %).
Compte tenu des caractéristiques productives des pays de l’AEOI, la structure des achats français de la région est relativement éloignée de la structure globale de nos importations (qui repose plutôt sur des produits à plus forte valeur ajoutée). Les principaux produits importés par la France depuis l’AEOI sont :
- Des produits agricoles, sylvicoles, de la pêche et de l’aquaculture, qui représentent 30,4 % de nos importations de la région en 2023 (32,6 % en moyenne depuis 2015), principalement en provenance de Madagascar (35,1 %), du Kenya (19,1 %) et du Soudan (16,3 %) ;
- Les produits des industries agroalimentaires (IAA) avec 31,4 % (28,5 % en moyenne depuis 2015), essentiellement en provenance de Madagascar (38,1 %), des Seychelles (32,2 %), et, dans une moindre mesure, de Maurice (13,7 %) ;
- Le textile, l’habillement, cuir et chaussures, avec 20,5 % de nos importations (22,2 % en moyenne depuis 2015), avec une provenance quasi exclusive de Madagascar (71,3 %) et de Maurice (18,1 %).
En résulte une hausse de notre excédent avec l’AEOI, pour la première fois depuis 2019
Historiquement, la France présente un déficit commercial avec seulement deux pays de la région : Madagascar, avec un déficit annuel moyen de -173,0 MEUR sur la décennie 2013-2023, et les Seychelles, avec un déficit annuel moyen de -59,2 MEUR sur la même période. Depuis 2022, la France enregistre également un déficit avec le Soudan, qui s’est creusé de 37,6 % pour atteindre -34,1 MEUR en 2023.
En 2023, l'excédent commercial français avec la région AEOI a atteint 378,1 MEUR, soit une amélioration de 89,1 MEUR par rapport à 2022 (+30,8 %), mais une dégradation de 123,1 MEUR (-24,6 %) par rapport à 2021. Cette amélioration est particulièrement notable avec la Somalie, où l'excédent est passé de 0,3 MEUR à 18,9 MEUR. Par ailleurs, le déficit commercial avec Madagascar s'est nettement réduit, passant de -267,8 MEUR en 2022 à - 182,4 MEUR en 2023 (-31,8 %).
L’Accord de Partenariat Economique UE-Kenya devrait stimuler le commerce extérieur français
Non éligible au régime Tous sauf les armes (TSA), et alors que son accès préférentiel au marché européen au titre du Système de préférences généralisées (SPG) faisait l’objet d’une suspension partielle depuis le 1er janvier 2023, le Kenya et l’UE ont conclu en juin 2023 la négociation d’un APE bilatéral nouvelle génération
Cet accord, entré en vigueur le 1er juillet 2024, est conçu de manière asymétrique pour tenir compte du différentiel de développement entre les deux parties prenantes. Alors que les exportations kényanes vers l’UE (à l'exception des armes) seront intégralement exemptées de droits de douane dès ratification de l’accord, les produits européens à destination du Kenya subiront un traitement différencié et progressif. Dans le détail, l’accord prévoit la libéralisation du marché kényan pour les produits européens, en valeur, à hauteur de 64,4 % à T0 (ratification de l’accord), 79,7 % à T0+15 et à 82,6 % à T0+25. A terme, seul 17,4 % du marché kenyan sera toujours sujet à droits de douane pour les produits européens. Un traitement asymétrique que le Kenya a décidé de mettre à profit pour protéger ses industries existantes/naissantes (agriculture, pêche, tabac, textile, produits animaux). Outre les considérations relatives au commerce, l’APE inclut également diverses dispositions annexes relatives aux conditions de travail, à l'égalité des sexes, à l'environnement et à la lutte contre le changement climatique.
Concernant la France, la signature de cet accord commercial bénéficiera en premier lieu aux exportations de produits des industries chimiques (24,4 % des exportations françaises à destination du Kenya en 2023 ; baisse moyenne des droits de douane kényans de 10,6 % à T0+6, de 71,2 % à T0+14 et de 78,0 % à T0+25) et d’appareils mécaniques et électriques (17,3 % des exportations ; baisse moyenne des droits de douane kényans de 10,0 % à T0+6, de 70,8 % à T0+14 et de 95,2 % à T0+25). A l’inverse, certaines catégories de produits resteront assujetties à des droits de douane relativement élevés. C’est notamment le cas des aliments préparés, boissons, spiritueux et tabac (13,3 % des exportations ; baisse moyenne des droits de douane kényans de 15,8 % à T0+6, de 16,7 % à T0+14 et de 16,8 % à T0+25).