La situation économique et financière de l'Autriche
L’Autriche connaitrait une croissance quasi-nulle cette année, affectée par l’atonie de l’économie allemande et par la crise de la construction mais qui rebondirait à +1,6 % l’an prochain. L’inflation reste nettement supérieure à celle de la zone euro, alimentée notamment par des hausses de salaire substantielles accordées début 2024. Le marché du travail reste bien orienté, avec un taux de chômage estimé à 5,3 % cette année. Le déficit public atteindrait 3,1 % cette année puis 2,9 % en 2025.
Une croissance atone en 2024 mais qui rebondirait en 2025
Fortement dépendante de l’économie allemande, son principal partenaire commercial, l’économie autrichienne ne progresserait cette année que de 0,3 % pour rebondir à 1,6 % en 2025. Au 1er trimestre 2024, le PIB a crû très modérément de +0,2 % par rapport au trimestre précédent ; en glissement annuel, il a affiché une sensible contraction de 1,1 %, en raison de la morosité de l’activité industrielle et du secteur de la construction. Ce dernier représente plus de 300 000 emplois directs et il est en crise en Autriche comme dans d’autres Etats membres en raison de la hausse des coûts des matériaux de construction ainsi que du renchérissement et du durcissement des conditions de financement, qui ont entrainé l’arrêt de nombreux chantiers. En raison de l’utilisation croissante du bois comme matériau durable, l’industrie du bois est également touchée par la crise du BTP. En réponse, le gouvernement, en coopération avec les Länder, a mis en place en février pour une durée de 3 ans un programme de soutien à la construction de 1 Mrd EUR.
Un retour à une croissance plus dynamique est attendu au cours du second semestre 2024.
Une inflation persistante
Largement supérieure à la moyenne de l’Union Européenne, l’inflation reste en Autriche élevée, l’IPCH (indice des prix à la consommation harmonisé) affichant fin mai une hausse de 3,3 % en glissement annuel.
En données annuelles, l’IPCH en 2023 a atteint 7,7 % (FR = 5,7 % ; DE = 6,0 % ; UE = 6,4 %). Les principaux moteurs de cette inflation ont été les prix de l’énergie, le gouvernement n’ayant pas voulu plafonner le prix du gaz, et dans les services, notamment l’hôtellerie et la restauration, confrontées au rattrapage des salaires à l’occasion des négociations des accords de branche. L’indexation automatique sur l’inflation de nombreux contrats, comme les loyers ou les primes d’assurance automobile, mais également des prestations sociales[1] contribue également à entretenir celle-ci. Selon les prévisions de la Commission, l’inflation atteindrait cette année 3,6 % puis 2,8 % en 2025.
Un marché du travail résilient
Malgré la croissance atone, le taux de chômage en 2024 atteindrait 5,3 % et baisserait légèrement en 2025. Alors que la crise du secteur de la construction a provoqué une très légère hausse du nombre de demandeurs d’emploi et que le secteur de l’industrie voit aussi le nombre de ses employés reculer, les créations d’emplois dans les services ont pour l’instant plus que compensé les pertes d’emplois dans les autre secteurs.
Le taux d’emploi fin 2023 était de 77,3 % qui progresserait en 2024 grâce à une augmentation du nombre de seniors et de femmes en situation d’emploi. Autant la Commission européenne que le FMI et l’OCDE recommandent à l’Autriche de mieux profiter du potentiel du travail des femmes, en développant notamment les structures d’accueil de la petite enfance. Pour ce faire, le gouvernement a mis en place un financement pluriannuel de 4,5 Mrd EUR au profit des collectivités territoriales.
Le marché du travail autrichien se distingue également par un chômage des jeunes relativement faible : fin 2023, le taux de chômage des 15-24 ans atteignait 10,4 % en Autriche (UE = 14,5 % ; DE = 5,9 % ; FR= 17,2 %). Une des clés de la lutte contre le chômage des jeunes est, comme en Allemagne et en Suisse, la place importante qu’occupe l’apprentissage, notamment dans l’artisanat, l’industrie et le tourisme. 39,1 % des jeunes de 15 ans s’orientaient en 2023 vers une formation qualifiante en apprentissage (formation duale). Fin 2023, quelque 108 000 jeunes étaient en contrat d’apprentissage.
Toutefois, le manque de main d’œuvre qualifiée en Autriche serait parmi les plus importants au sein de l’Union Européenne, tout comme le nombre d’emplois vacants, ces deux facteurs représentant un frein au développement. Au-delà des évolutions de la démographie autrichienne qui joue un rôle non négligeable, les mutations du secteur industriel et les besoins en nouvelles compétences liées à la transition verte et à la transformation numérique affectent également le marché du travail.
Avec des hausses salariales importantes en raison d’une inflation régulièrement plus élevée en Autriche qu’au sein de la zone euro, le coût du travail en Autriche progresse plus rapidement que chez ses voisins, affectant ainsi la compétitivité de son économie : dans le classement 2024 de l’institut de recherche économique lausannois IMD relatif à la compétitivité mondiale, l’Autriche ne parvient toujours pas à enrayer le repli entamé depuis 2020 (16ème rang) et perd 2 places pour occuper le 26ème rang (FR = 31ème rang ; DE = 24ème rang) parmi les 67 pays sous revue. Selon l’IMD, le coût du travail en Autriche a progressé de 8,5 % contre 4,6 % au sein de la zone euro.
Des finances publiques sous contrôle
Selon la Commission, le déficit public serait de 3,1 % en 2024 puis de 2,9 % en 2025. L’endettement public est prévu à 77,7 % du PIB cette année. A ce stade, les partis politiques ne s’engagent pas dans une surenchère de promesses dispendieuses à l’orée des élections législatives du 29 septembre prochain.
L’Etat autrichien s’est doté en 2012 d’une règle d’or sous la forme d’un frein à la dette inspiré du modèle allemand, limitant le déficit structurel de l’Etat fédéral et des collectivités territoriales. Suspendu pendant la crise conformément à la clause dérogatoire générale au niveau européen, ce frein est de nouveau actif depuis le 1er janvier 2024. Les finances publiques de l’Autriche restent toutefois confrontées à de nombreux défis comme le financement du système de retraite par répartition et d’un système de santé efficace pendant la crise mais onéreux car surdimensionné et un fédéralisme au fonctionnement complexe et parfois redondant.
Tableau : Les principaux indicateurs macroéconomiques de l' Autriche
Source : Commission européenne, rapport Pays 2024